Article 1er A (Nouveau)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 2

Article 1er

Le chapitre Ier du titre III du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Les quatre derniers alinéas de l’article L. 1131-1 sont supprimés ;

2° Après l’article L. 1131-1, sont insérés deux articles L. 1131-1-2 et L. 1131-1-3 ainsi rédigés :

« Art. L. 1131-1-2. – Préalablement à la réalisation d’un examen des caractéristiques génétiques d’une personne, le médecin prescripteur informe celle-ci des risques qu’un silence ferait courir aux membres de sa famille potentiellement concernés si une anomalie génétique grave, dont les conséquences sont susceptibles de mesures de prévention, y compris de conseil génétique, ou de soins, était diagnostiquée. Il prévoit avec elle, dans un document écrit qui peut, le cas échéant, être complété après le diagnostic, les modalités de l’information destinée aux membres de la famille potentiellement concernés, afin d’en préparer l’éventuelle transmission. Si la personne a exprimé par écrit sa volonté d’être tenue dans l’ignorance du diagnostic, elle peut l’autoriser à procéder à l’information des intéressés dans les conditions prévues au troisième alinéa.

« En cas de diagnostic d’une anomalie génétique grave, sauf si la personne a exprimé par écrit sa volonté d’être tenue dans l’ignorance du diagnostic, l’information médicale communiquée est résumée dans un document rédigé de manière loyale, claire et appropriée, signé et remis par le médecin. La personne atteste de cette remise. Lors de l’annonce de ce diagnostic, le médecin propose à la personne de prendre contact avec une association de malades agréée en application de l’article L. 1114-1 capable d’apporter des renseignements complémentaires sur l’anomalie génétique diagnostiquée.

« Si la personne ne souhaite pas informer elle-même les membres de sa famille potentiellement concernés, elle peut demander par un document écrit au médecin prescripteur, qui atteste de cette demande, de procéder à cette information. Elle lui communique à cette fin les coordonnées des intéressés dont elle dispose. Le médecin porte alors à leur connaissance l’existence d’une information médicale à caractère familial susceptible de les concerner et les invite à se rendre à une consultation de génétique, sans dévoiler ni le nom de la personne ayant fait l’objet de l’examen, ni l’anomalie génétique, ni les risques qui lui sont associés.

« Le médecin consulté par la personne apparentée est informé par le médecin prescripteur de l’anomalie génétique en cause.

« Art. L. 1131-1-3. – Par dérogation au deuxième alinéa de l’article L. 1111-2 et à l’article L. 1111-7, seul le médecin prescripteur de l’examen des caractéristiques génétiques est habilité à communiquer les résultats de cet examen à la personne concernée ou, le cas échéant, aux personnes mentionnées au second alinéa de l’article L. 1131-1. »

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, sur l'article.

M. Bernard Cazeau. L’information de la parentèle en cas de maladie génétique est une question extrêmement délicate. Cela tient au fait que, en génétique, contrairement aux autres spécialités médicales, l’information délivrée au patient peut concerner d’autres personnes que lui.

À cet égard, la loi de 2004 avait prévu une procédure discutable : l’obligation d’information pesait sur la personne malade ; si elle ne pouvait s’en charger, l’Agence de la biomédecine devait le faire à sa place. À l’époque, j’avais exprimé mes réserves quant à la formulation proposée.

Les faits semblent m’avoir donné raison. En effet, le décret relatif aux modalités d’application de la procédure d’information à caractère familial n’ayant pas vu le jour, nous sommes de nouveau saisis de cette question. Or, malheureusement, force est de constater que la rédaction de l’article 1er n’est pas très satisfaisante au regard des problématiques médicales.

Prenons trois exemples.

Premièrement, l’information de la parentèle apparaît nécessaire lorsque l’anomalie génétique est grave ou lorsque des mesures de prévention peuvent être appliquées. A priori, nous sommes tous d’accord. Néanmoins, qu’entendons-nous par « anomalie génétique grave » ?

Deuxièmement, la notion de « parentèle » me paraît problématique. Il n’y pas de définition scientifique du terme. Doit-on informer un cousin germain des risques de trisomie 21 d’un enfant à naître ? Médicalement, pourquoi pas. Humainement, cela paraît discutable. Enfin, que se passe-t-il en cas de non-présence ou de rupture familiale ?

Troisièmement, cet article prévoit que les médecins doivent proposer aux parents de prendre contact avec une association de malades en cas d’anomalie grave afin qu’ils soient informés des conséquences de la pathologie. Cela pose tout un tas de problèmes, notamment en ce qui concerne le secret médical ; nous avons déjà eu un débat sur ce point et d’autres que moi interviendront sur le sujet.

Madame la secrétaire d'État, toutes ces questions me conduisent à vous demander de plus amples explications. À défaut, les tribunaux, demain, devront répondre à ces interrogations, ce qui ne paraît souhaitable pour personne. Notre position sera donc fonction des éclairages que vous vous voudrez bien nous apporter.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.

M. Guy Fischer. L’article 1er de ce projet de loi concerne une question à la fois essentielle et délicate, celle de la nécessité d’informer ou non une tierce personne, généralement le conjoint et les enfants, de l’existence d’une maladie génétique. Autrement dit, il s’agit de s’interroger sur une forme de confrontation, pour ne pas dire de contradiction, entre, d’une part, le respect du secret médical et le respect de l’autonomie de la décision de la personne malade et, d’autre part, le droit des proches à être informés d’une éventuelle maladie génétique pouvant, de fait, les concerner.

Comme le souligne le Comité consultatif national d’éthique, le CCNE, dans l’avis n° 76, « Il peut donc exister une tension forte entre le strict respect du secret éventuellement souhaité par la personne chez laquelle on a découvert une mutation génétique et l’intérêt éventuel, parfois majeur, des autres personnes à connaître cette information pour en tirer bénéfice ». Cet avis faisait suite à l’interrogation formulée par le ministre de la santé de l’époque, M. Jean-François Mattei, sur l’opportunité d’inscrire dans la loi l’obligation d’informer son entourage familial en cas de découverte de l’existence d’une maladie génétique grave ou de prédispositions pouvant faire l’objet pour les autres membres de la famille d’une prévention efficace.

Il va de soi que cette question, à la fois philosophique et très concrète, se pose avec moins d’importance dès lors que la personne atteinte de cette anomalie lève le secret ou que l’anomalie ne peut faire l’objet d’aucun traitement préventif ou curatif.

Ce point a déjà donné lieu à des débats importants, bien au-delà de la question des maladies génétiques. Je pense, notamment, au problème de la contamination par le VIH. Si, naturellement, nul ne souhaite que des femmes et des hommes se trouvent contaminés par ignorance ou ne puissent être traités de manière préventive ou curative en matière génétique, nous ne sommes pas favorables à ce que soit rompu le secret médical, et ce pour une bonne raison : nous considérons que ce dernier est au cœur de la relation spécifique qui lie le patient à son médecin.

Aussi, partageons-nous les conclusions du Comité consultatif national d’éthique, qui affirme dans son avis : « Au terme de cette analyse, en considérant les situations réelles dans lesquelles se pose le problème d’une nécessaire transmission d’une information génétique à la famille d’un sujet, le CCNE considère que la mise en œuvre de procédures adaptées, dans le cadre d’un strict respect du secret médical, est la mieux à même d’aboutir au résultat désiré, c’est-à-dire la protection de la famille dans le strict respect de l’intimité des personnes ».

La rédaction de l’article 1er issue des travaux de la commission s’inscrit pleinement dans cette perspective, et nous y souscrivons. Nous considérons que la volonté exprimée au travers de cet article d’inciter les patients à informer leurs proches tout en conservant le secret professionnel reste la meilleure solution. C’est pourquoi nous le voterons tout comme nous voterons l’amendement n° 10 de notre collègue Jean-Pierre Godefroy.

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par M. Cazeau, Mme Le Texier, MM. Godefroy et Michel, Mmes Cerisier-ben Guiga, Alquier, Printz et Schillinger, MM. Kerdraon et Le Menn, Mmes Demontès et Jarraud-Vergnolle, MM. Desessard et Mirassou, Mmes Blandin, Blondin, Bourzai et Lepage, MM. C. Gautier, Collombat, Guérini, Madec, Marc, Massion, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

...- Après le troisième alinéa de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le droit à l'intimité génétique est reconnu. »

La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.

M. Jean-Jacques Mirassou. Cet amendement a trait à l’intimité génétique et à son respect. Il est donc essentiel à nos yeux.

Dès 1999, Franck Sérusclat, dans un rapport parlementaire intitulé « Génomique et informatique : l’impact sur les thérapies et sur l’industrie pharmaceutique », mettait en avant le fait que le droit à l’intimité génétique allait devenir l’une des plus importantes problématiques et revendications de notre siècle.

Le professeur de droit Brigitte Feuillet-Le Mintier estimait, quant à elle, que la question de l’intimité génétique renvoyait à l’impérieuse nécessité de trouver un système où la science, moteur de développement, et l’économie, système incontournable de notre société, puissent se développer, mais dans le respect de la personne humaine.

Nous savons tous que les découvertes réalisées dans le domaine génétique permettent désormais non seulement d’identifier un individu, de le rattacher à une lignée généalogique, mais aussi d’établir des liens entre la présence d’un gène et la prédisposition à développer telle ou telle pathologie.

Si ces découvertes peuvent constituer un atout important dans l’amélioration de la condition humaine, elles peuvent aussi, à elles seules, être sources de préjudices extrêmement graves.

Considérons les empreintes et les tests génétiques, par exemple. Dans le premier cas, une parenté officielle peut être remise en cause par les empreintes génétiques, qui vont établir assurément la parenté biologique. Certes, l’article 16-11 du code civil n’autorise ces pratiques que dans un cadre juridique précis et limité aux « mesures d’enquête ou d’instruction diligentées lors d’une procédure judiciaire » ou « à des fins médicales ou de recherche scientifique ». Néanmoins, des pays tel que l’Espagne, la Belgique ou le Brésil autorisent les examens d’empreintes génétiques en dehors de tout procès.

Quant aux tests génétiques, ils présentent des intérêts remarquables. Ils ont rendu possible la prévention de certaines maladies ou l’anticipation de traitements avant que celles-ci ne se déclarent. Cependant, des dangers existent.

Cet accès à la connaissance de doit pas être obligatoire. En effet, penser que, dans tous les cas, l’information issue de ces tests n’impactera pas la vie privée de l’individu n’est pas raisonnable. Ainsi, un citoyen qui disposera d’informations sur sa santé –  je pense, notamment, à une pathologie décelée ou à la découverte d’une prédisposition à développer une maladie alors qu’aucun traitement n’existe –, pourra-t-il continuer de mener sa vie sereinement ? Personne ne peut l’affirmer.

Or, si nous considérons que la vie privée regroupe tout ce qui touche à l’intimité d’un individu et que l’article 9 du code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée », il apparaît indispensable d’affirmer dans la loi que tout citoyen dispose du droit de savoir, mais aussi du droit de ne pas savoir. Tout citoyen doit disposer du droit d’ignorer sciemment ce qui relève non pas tant du secret médical que du respect de l’intimité privée et de son corollaire, l’intimité génétique.

Dans un monde où la transparence semble être l’un des leitmotive de rigueur, le droit de ne pas savoir doit trouver sa place. Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à inscrire dans l’article du code de la santé publique relatif au droit de toute personne d’être informée sur son état de santé ou d’être tenue dans l’ignorance d’un diagnostic un nouveau droit, celui à l’intimité génétique.

En l’absence de définition, la portée juridique de cette notion paraît très incertaine. Que recouvre concrètement ce droit à l’intimité génétique ? S’agit-il du droit de ne pas savoir ? S’agit-il du droit de ne pas informer ses proches ? Cette dernière interprétation irait à l’encontre de l’article 1er, lequel répond, selon moi, aux préoccupations du groupe socialiste : le droit à l’ignorance y est clairement affirmé et le secret médical s’impose en toutes circonstances.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Cet amendement a essentiellement une portée déclarative.

Monsieur le sénateur, votre préoccupation est déjà satisfaite par les dispositions relatives à la protection de la vie privée, plus spécifiquement par le secret médical.

En ce qui concerne le droit d’être informé, la personne peut toujours y renoncer.

Quant au droit de ne pas savoir, spécifiquement, dans le champ des tests génétiques, il est bien pris en compte par la procédure relative aux conditions d’information de la parentèle.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 85, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° Avant l’article L. 1131-1, il est inséré un article L. 1131 ainsi rédigé :

« Art. L. 1131. – La commercialisation de tests ayant pour finalité de pratiquer des examens génétiques est interdite dès lors qu’elle n’a pas de finalité scientifique ou thérapeutique.

« Un décret précise les sanctions financières applicables aux personnes physiques ou morales qui contreviendraient à cette disposition. »

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Nous venons de le voir, chacun a le droit de savoir ou de ne pas savoir. Chacun a le droit de savoir d’où il vient, chacun a le droit d’obtenir des informations sur ses origines, ses caractéristiques génétiques, mais nous savons toutes et tous que ces recherches doivent être effectuées de manière très encadrée, d’une part, et en dehors de tout circuit commercial, d’autre part.

En effet, nous connaissons bien les dérives de la commercialisation : publicité invasive, suspicions généralisées, conflits dans les familles – notamment du fait des tests de paternité – et, en dernier lieu, charlatanisme et arnaques. C’est d’ailleurs pour cette raison que le projet de loi que nous examinons aujourd’hui encadre ces pratiques d’examen génétique.

Vous me demanderez certainement pourquoi ajouter une disposition qui serait redondante. Après tout, le texte définit les laboratoires concernés et les critères d’habilitation de ces laboratoires. Bref, vous pourriez m’opposer que l’encadrement est suffisant.

Nous pensons, quant à nous, qu’il faudrait accompagner cet encadrement en posant le principe de l’interdiction de la commercialisation des tests génétiques, qui pullulent aujourd’hui sur internet. Parce que ce principe inspire la loi et son application, son affirmation est nécessaire. Il est évident que si nous n’énonçons pas ce principe et les sanctions qui frapperaient ceux qui s’en affranchiraient, des dérives commerciales apparaîtront, comme le fichage des caractéristiques génétiques, par exemple.

Nous ne nions pas le besoin ressenti par certains de connaître leurs origines, nous ne nions pas le droit de chacun à connaître ses caractéristiques génétiques, mais pour garantir que l’analyse des caractéristiques demeurera parfaitement encadrée et, surtout, ne sortira pas de son cadre médical, il faut empêcher que le commerce, le marché ne s’approprient ce domaine. Il faut donc s’assurer que le test des caractéristiques génétiques soit, comme le recommande le CCNE, limité à « certains laboratoires spécialement agréés », et que la réalisation de ces tests ne soit autorisée « qu’en exécution d’une décision de justice ».

L’affirmation du principe de la restriction des examens génétiques à des fins scientifiques et thérapeutiques ainsi que l’établissement de sanctions en cas de non-respect de ce principe sont donc, à notre avis, très importants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à interdire la commercialisation des tests génétiques, notamment sur internet.

Or cette disposition s’avère difficilement applicable : la plupart des tests actuellement proposés sont réalisés dans d’autres pays, qu’il s’agisse de pays proches, tels que la Belgique ou la Suisse, ou de pays beaucoup plus lointains, situés en Amérique du Nord ou même en Asie. L’interdiction de la vente de ces tests risquerait donc de n’avoir aucune portée réelle.

La commission a retenu une solution qui devrait être plus opérationnelle et plus efficace : ainsi, l’article 4 ter interdit le recours à des tests génétiques en l’absence de prescription médicale et en dehors des laboratoires autorisés à cet effet.

C’est pourquoi, ma chère collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, je serais contraint d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande également aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame David, l’amendement n° 85 est-il maintenu ?

Mme Annie David. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Michel. Je m’interroge sur ce que signifie le « droit de ne pas savoir ». Cette notion m’échappe totalement.

Chacun a le droit de savoir, d’accéder à la connaissance, à la culture. Or, dans le cas présent, on proclame un droit « de ne pas savoir », sans préciser sur quoi il porte : l’origine, l’identité, la maladie ? C’est aberrant ! Certains des propos que j’entends ici dépassent l’entendement.

En ce qui me concerne, je pense que l’on a le droit de savoir et que ceux qui savent ont le devoir de dire. Voilà la base d’une civilisation fondée sur la raison !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Lorrain. Mon cher collègue, vous aurez peut-être l’occasion de découvrir le sens du « droit de ne pas savoir ». Si, à la suite d’un test, on vous annonce que, dans quarante ans, vous risquez de souffrir d’une maladie grave, pensez-vous que vous allez vivre tranquillement pendant cette période ?

Nous pouvons donc admettre que certains ne souhaitent pas être informés qu’ils courent le risque de tomber éventuellement malades, alors que ce risque ne se réalisera peut-être pas. Nos concitoyens ont droit, eux aussi, à un certain repos.

M. Jean-Pierre Michel. Ce sont les médecins qui ne veulent rien dire !

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Je souhaite dissiper un éventuel malentendu.

Comme M. Lorrain, je pense que les patients ont le droit de savoir ou de ne pas savoir, car c’est un choix personnel.

Cela étant, notre amendement ne porte pas sur cette question. Il vise uniquement à interdire la commercialisation des tests génétiques, notamment sur internet. Dans ce cas, non seulement ces tests sont vendus n’importe comment, mais les personnes n’accèdent à l’information qu’en fonction de leurs moyens.

Notre amendement ne porte donc pas atteinte à la liberté de choix du patient – savoir ou non –, mais il nous semble que, pour que l’information des intéressés soit la meilleure possible, il faut qu’elle intervienne en dehors de toute commercialisation et fasse suite à une prescription médicale, dans un cadre spécifique.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 85.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 76 rectifié bis, présenté par Mmes Létard, Cros, Morin-Desailly et Payet et MM. Amoudry, Dubois et Jarlier, est ainsi libellé :

Alinéa 4, après la deuxième phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

« Lorsque cette personne a fait un don de gamètes ayant abouti à la conception d’un ou plusieurs enfants, cette information est également transmise au médecin responsable du centre d’assistance médicale à la procréation afin qu’elle puisse aussi être portée à la connaissance du médecin traitant des enfants concernés. »

La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. L’article 1er du projet de loi améliore la procédure de l’information médicale à caractère familial afin que, en cas de diagnostic d’une anomalie génétique grave, tous les membres d’une famille qui pourraient être concernés puissent avoir connaissance de cette information, même si la personne diagnostiquée n’a pas souhaité connaître elle-même les résultats de cet examen ou les en informer directement.

Notre amendement a pour objet de prévoir le cas où cette personne a fait antérieurement un don de gamètes et que des enfants ont été conçus à la suite de ce don. Même si cette situation peut s’avérer rare, il semble normal que les enfants, porteurs eux aussi d’une partie de ce patrimoine génétique, puissent avoir accès à cette information décisive, par l’intermédiaire de leur médecin traitant que saisira le médecin responsable du centre d’assistance médicale à la procréation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Milon, rapporteur. Cet amendement vise à étendre l’information de la parentèle au cas particulier du don de gamètes.

Si une personne qui a fait un tel don découvre qu’elle est atteinte d’une anomalie génétique grave susceptible de mesures de prévention ou de soins, le centre d’assistance médicale à la procréation serait informé et prendrait contact avec le médecin traitant des enfants nés de ce don.

Un tel cas peut effectivement se produire. C’est pourquoi la commission souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. Cet amendement me paraît tout à fait légitime ; en tout cas, l’intention de ses auteurs est bonne.

Pour ma part, je m’en remettrai donc à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. Jean-Pierre Michel. Avec de tels avis, nous sommes bien informés !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je souhaite moins expliquer mon vote qu’obtenir un complément d’information de la part de notre collègue Valérie Létard.

À partir du moment où une personne qui a fait un don de gamètes découvre qu’elle est atteinte d’une maladie génétique, les enfants en sont informés par l’intermédiaire des médecins du centre d’assistance médicale à la procréation saisis par le médecin traitant du donneur. Cela sous-entend-il que l’anonymat est levé ?

M. Alain Milon, rapporteur. Non !

Mme Marie-Thérèse Hermange. Si, évidemment !

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Non, pas forcément !

M. Jean-Pierre Godefroy. Mes chers collègues, sachez que mon vote s’établira en fonction de la réponse que j’obtiendrai à cette question.

Pour l’instant, cet amendement tel qu’il est rédigé me laisse supposer que l’anonymat sera nécessairement levé. Mme la présidente de la commission semble penser que ce ne sera pas obligatoire. Il n’empêche qu’un certain nombre de personnes seront informées de la situation, même si l’on peut m’objecter que celles-ci seront soumises au respect du secret médical.

Je comprends parfaitement la démarche de Mme Létard. Néanmoins, je le répète, je souhaite savoir si l’adoption de cet amendement n’entraînera pas, de fait, la levée de l’anonymat.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Lorsque nous avons rédigé cet amendement, nous n’avions absolument pas l’intention de lever l’anonymat du donneur. L’information sera traitée par le Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains, le CECOS, qui informera la ou les personnes nées du don de gamètes, sans pour autant diffuser l’identité du donneur.

Pour les signataires de cet amendement, il s’agit uniquement de transmettre des informations médicales portant sur les risques d’anomalies génétiques liées au don de gamètes, sans communiquer, je le répète, l’identité du donneur.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Alain Milon, rapporteur. J’ajoute que le secret médical n’est pas levé dans le cadre des échanges entre médecins.

Au nom de la commission, j’émets donc un avis favorable sur l’amendement n° 76 rectifié bis.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Michel. Nous sommes dans une confusion totale ! Ceux qui sont favorables à la levée de l’anonymat voteront cet amendement…

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Mais non !

M. Jean-Pierre Michel. ... et ceux qui y sont opposés ne le voteront pas, quelles que soient les précautions sémantiques employées par Mme Létard.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je suis entièrement d’accord avec notre collègue Jean-Pierre Michel. Le texte de l’amendement présuppose indirectement, même si le respect du secret médical s’impose, une levée de l’anonymat, au moins partielle.

Je voterai donc cet amendement, parce que je ne vois pas pourquoi on empêcherait la communication d’un certain nombre d’informations au médecin traitant des enfants concernés.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.