Mme la présidente. L'amendement n° 46, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les délits économiques et financiers prévus à l’article 704 du code de procédure pénale. »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Ce texte exclut du champ des compétences des tribunaux correctionnels citoyens les délits relevant du domaine économique et financier, qui intéressent néanmoins tout autant les citoyens.

Il nous semble indispensable que, si des citoyens doivent être associés aux tribunaux correctionnels, ils le soient également pour ces affaires, les décisions rendues n’étant pas plus sévères dans ce domaine que dans celui des atteintes aux personnes, bien au contraire.

Le laxisme des juges dénoncé par le Gouvernement semble étrangement s’arrêter aux délits économiques. L’impératif de renforcement du lien entre la population et l’institution judiciaire aurait-il des frontières ? À moins que vous n’ayez peur du jugement que porteront les citoyens sur ces délits-là…

Dès lors qu’il est envisagé de faire participer des citoyens aux tribunaux d’application des peines, qui sont notoirement confrontés à des situations pour le moins complexes, pourquoi empêcherait-on les citoyens de statuer aux côtés des magistrats sur les délits économiques et financiers ?

Car, s’il est un domaine où l’on peut parler d’évolution de la société, c’est bien celui-là ! On ne peut sélectionner ainsi, parmi les délits, ceux pour lesquels les magistrats auraient suivi cette évolution et ceux pour lesquels ils seraient à la traîne... C’est pourquoi, monsieur le garde des sceaux, par cet amendement, nous proposons d'aller au bout de votre propre logique.

Mme la présidente. L'amendement n° 158, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 9

Compléter cet alinéa par les mots :

, ainsi que les extorsions prévues et réprimées par les articles 312-1 et 312-2 du code pénal

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement tend à réparer une omission. En effet, les extorsions, qui sont des infractions d’une particulière violence à l’égard des personnes, ont vocation à être jugées par le tribunal correctionnel citoyen.

Mme la présidente. L'amendement n° 12, présenté par MM. Michel et Anziani, Mmes Klès et Tasca, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° – La corruption active et le trafic d’influence commis par les particuliers prévus aux articles 433-1 et 433-2 du code pénal.

La parole est à Mme Virginie Klès.

Mme Virginie Klès. Par cet amendement, nous entendons ajouter à la liste des délits relevant de la compétence du « tribunal correctionnel citoyen » la corruption active et le trafic d’influence. En effet, s’il est des délits qui sont médiatisés et dont la résolution n’est pas forcément bien comprise des citoyens, en tout cas les exaspère et fait naître toutes sortes de soupçons, ce sont bien ces affaires politico-financières où des élus se laissent corrompre. Car il s’agit d’argent public : ce n’est pas de l’argent qui n’a pas d’odeur ; c’est de l’argent qui vient de la poche des contribuables, des citoyens et qui est détourné de son utilisation première.

Ces délits et l’incompréhension qui découle éventuellement de la façon dont l’affaire a pu être jugée sont à mon sens porteurs de conséquences beaucoup plus graves que toutes les émotions ponctuelles qui sont soulevées par des faits divers, même s’il s’agit d’événements dramatiques.

C’est à partir de cela que se développe chez nos concitoyens une méfiance de fond. C’est cela qui les éloigne des structures politiques et du fonctionnement démocratique. Ces délits et le traitement auquel il donne parfois lieu ont, sur la cohésion républicaine, des effets certainement beaucoup plus destructeurs que tous les autres délits qui sont actuellement visés dans le projet de loi.

C’est la raison pour laquelle il nous paraît fondamental de les ajouter à la liste prévue.

M. Jacky Le Menn. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 10, présenté par MM. Michel et Anziani, Mmes Klès et Tasca, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement vise à supprimer l’usurpation d’identité de la liste des délits relevant de la compétence du tribunal correctionnel avec participation de citoyens assesseurs. Mais je consens à le retirer parce que je sais M. le rapporteur très attaché à la mention de ce délit, et aussi parce que le tribunal aura très rarement à connaître de tels cas, le délit en question étant fort difficile à établir.

Mme la présidente. L’amendement n° 10 est retiré.

L’amendement n° 11, présenté par MM. Michel et Anziani, Mmes Klès et Tasca, M. Badinter, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jean-Pierre Michel.

M. Jean-Pierre Michel. En revanche, je ne retirerai pas cet amendement, qui tend à supprimer de ladite liste les infractions commises en matière d’environnement, car on ne voit pas très bien lesquelles seront concernées.

En la matière, les infractions sont multiples : volontaires ou involontaires, elles touchent tous les domaines de la nature, les rivières, le sol, l’air, et l’ensemble des activités, qu’il s’agisse de la chasse, de la pêche ou des cultures d’OGM. Tout cela est extrêmement technique, à tel point que la création d’une police spéciale en matière d’environnement est prévue et qu’une formation spécifique sera dispensée, au sein de l’ENM, afin que, au moins au niveau des cours d’appel, les magistrats siègent en chambres spécialisées pour juger les délits commis en matière d’environnement.

Que signifie donc un tel ajout à cette liste ? Je l’ai dit tout à l’heure, voilà une disposition purement cosmétique : vous maquillez la réalité pour l’enjoliver, pour faire croire que le dispositif ne se limite pas aux violences et aux atteintes aux personnes.

Soyez francs et reconnaissez donc que vos choix ne sont guidés que par une volonté purement répressive !

Mme la présidente. L’amendement n° 159, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 12

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le tribunal correctionnel citoyen n’est toutefois pas compétent pour le jugement des délits prévus au présent article lorsqu’il s’agit d’un délit mentionné aux articles 706-73 et 706-74 ou, sous réserve des dispositions de l’article 399-3, mentionné à l’article 398-1.

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements qui n’émanent pas d’elle.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. L’amendement n° 159 vise à exclure de la compétence d’attribution du tribunal correctionnel comprenant des citoyens assesseurs les délits relevant de la délinquance organisée, comme le trafic de stupéfiants, ou les délits qui sont de la compétence du juge unique en application de l’article 398-1 du code de procédure pénale.

La commission est évidemment défavorable à l’amendement n° 110 rectifié, dont l’adoption aurait pour conséquence de vider totalement de son contenu cette compétence d’attribution.

Elle est également défavorable aux amendements nos 46 et 12, qui tendent à étendre la compétence du tribunal correctionnel citoyen, pour le premier, aux délits économiques et financiers, et, pour le second, aux délits de corruption active et de trafic d’influence.

L’intention des auteurs de ces deux amendements est sans doute de viser une délinquance en « col blanc », afin d’éviter le risque d’une justice à deux vitesses qu’aurait pu entraîner la spécialisation du tribunal correctionnel citoyen sur les faits de violence. Or ce risque est, me semble-t-il, en partie conjuré par l’extension, décidée par la commission, des compétences du tribunal correctionnel citoyen à l’ensemble des atteintes aux personnes.

En outre, à ce stade, il me semble préférable de garder des critères de compétence cohérents, articulés autour des atteintes aux personnes, ce qui n’exclut pas, bien sûr, au vu des résultats de l’expérimentation, de prévoir par la suite une nouvelle extension des attributions du tribunal correctionnel avec citoyens assesseurs.

Tout en remerciant mon collègue Jean-Pierre Michel d’avoir retiré l’amendement n° 10, relatif au délit d’usurpation d’identité, je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur son amendement n° 11. Il nous a semblé que les infractions prévues par le code de l’environnement passibles d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à cinq ans, c’est-à-dire les infractions effectivement les plus graves en la matière, telles les pollutions maritimes, constituaient aussi et même fondamentalement des atteintes graves aux personnes.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable aux amendements nos 158 et 159 de la commission et partage l’avis défavorable de cette dernière sur l’ensemble des autres amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 110 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 46.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 158.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote sur l’amendement n° 12.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Si nous, écologistes, avons souhaité être cosignataires de cet amendement de repli, c’est parce qu’il nous semblait logique que votre « tribunal correctionnel citoyen » soit également compétent pour juger des délits financiers, notamment ceux de corruption active et de trafic d’influence commis par les particuliers.

À l’article 2, le Gouvernement précise en effet les compétences et les modalités de saisine du tribunal correctionnel comprenant deux citoyens assesseurs, puis énumère la liste des délits jugés par ce même tribunal correctionnel, mais en omettant les délits financiers.

Dans son esprit, les citoyens assesseurs ne seraient-ils donc pas suffisamment compétents pour juger de tels délits, qui touchent régulièrement la sphère politique française ? Dans ces cas précis, il semble ne pas s’en remettre à la vox populi… Comme c’est curieux !

Pourtant, parmi les délits dont aura à juger le tribunal correctionnel citoyen, novice en la matière, on trouve des délits beaucoup plus complexes, tels que les atteintes à la personne humaine ou encore les fameux délits environnementaux.

Faut-il le rappeler, ces citoyens assesseurs seront amenés à prendre la « décision sur la qualification des faits ». Or le doute plane sur la manière dont ils seront formés à la complexité de notre droit pénal.

La qualification des délits énumérés à l'article 2 est relativement délicate, notamment lorsqu’il s’agit de raisonner sur les éléments constitutifs de l’infraction. Je me permets de reprendre l’exemple des infractions prévues par le code de l’environnement, dont les subtilités peuvent même parfois échapper à des juristes généralistes. Le droit de l’environnement, extrêmement spécifique, est assez difficile à cerner. Si certains juristes, avocats et enseignants en droit, avouent éprouver des difficultés en la matière, on peut déduire que vos deux citoyens assesseurs ne manqueront évidemment pas de rencontrer des problèmes pratiques, sauf à ce que les magistrats présents dans la formation correctionnelle consacrent un temps important à leur expliquer les « bases » dans ce domaine.

Ce n’est donc pas l’excuse de la complexité des délits financiers qui a conduit le Gouvernement à les exclure de cette liste, auquel cas les atteintes à la personne, l’usurpation d’identité ou encore les infractions environnementales ne pourraient pas y figurer non plus !

Cette liste de délits, de laquelle les délits financiers ont été curieusement « oubliés », marque bien les limites de la confiance que place le Gouvernement dans ces jurés populaires.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 11.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 159.

(L’amendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 111 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéas 13 à 15

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Les alinéas 13 à 15 de l'article 2, relatifs aux infractions connexes, loin d’être anodins, posent un véritable problème juridique, que j’ai déjà soulevé hier en défendant la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.

Ainsi que le relève le Gouvernement dans l’étude d’impact, « 1 500 affaires relevant de la compétence d’attribution du tribunal correctionnel avec des citoyens assesseurs seront en définitive jugées par le tribunal correctionnel sans citoyens assesseurs ».

L’aiguillage se fera selon qu’il existe ou non des infractions connexes. Or le Conseil constitutionnel a déjà rappelé, dans sa décision du 23 juillet 1975, que le respect du principe d’égalité « fait obstacle à ce que des citoyens se trouvant dans des conditions semblables et poursuivis pour les mêmes infractions soient jugés par des juridictions composées selon des règles différentes ».

Ce qui nous est proposé, avec ces alinéas 13 à 15, c’est une ventilation extrêmement compliquée des infractions connexes. À ceux d’entre vous, mes chers collègues, qui n’ont pas eu l’occasion de fréquenter les salles d’audience ou de rédiger des conclusions je précise que les magistrats professionnels, en particulier ceux du parquet, pourront arguer de l’existence ou non d’infractions connexes pour diriger les affaires vers telle ou telle composition de chambre.

Pour me répondre, on bottera certainement en touche, comme d’habitude, et on remplacera l’absence d’argument juridique par de l’onctuosité… (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Il n’en reste pas moins, monsieur le garde des sceaux, que ce réel problème juridique est, avec d’autres éléments, de nature à vicier très fortement le dispositif de l’article 2, en particulier son alinéa 15 : « Hors les cas prévus au présent article, le tribunal statue dans la composition prévue par le premier alinéa de l’article 398… » – c’est-à-dire la composition classique – « … pour le jugement des délits prévus à l’article 399-2 lorsqu’ils sont connexes à d’autres délits. »

Voilà donc une possibilité d’aiguillage réellement arbitraire !

Vous pourrez toujours chercher toutes les explications possibles – et vous aurez d’ailleurs du mal à en trouver –, vous serez de toute façon bien en peine de répondre d’un point de vue technique à mon interrogation, laquelle justifie la suppression pure et simple de ces trois alinéas.

Mme Catherine Tasca et M. Jacky Le Menn. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Monsieur Mézard, je m’efforcerai de ne pas confondre onctuosité et courtoisie !

Si vos remarques sont tout à fait dignes d’être prises en considération, on se trouve ici dans le cadre de l’application des règles en matière de connexité utilisées, par exemple, au niveau des cours d’assises. Le fait de revenir sur des règles différentes risquerait de vider de sa substance la compétence du tribunal correctionnel citoyen.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Même avis !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Plus qu’une explication de vote, je voudrais faire une observation générale à la suite des avis exprimés par M. le rapporteur et M. le ministre.

À propos de la liste des délits entrant ou non dans le champ de compétence de ce tribunal, on a beaucoup parlé de « cohérence ». Vous-même, monsieur le rapporteur, avez tenté de rendre le dispositif plus cohérent. Mais il y a tout de même une certaine cohérence, et elle est déjà présente dans le projet initial.

Ainsi les délits visés sont-ils très connotés socialement et touchent-ils particulièrement les catégories populaires. Parce qu’ils sont fortement médiatisés par les journaux locaux, et surtout par la télévision – certains de ses journalistes ou animateurs se font quotidiennement les spécialistes de ce genre de « sujets » –, ces délits courants ternissent le « vivre ensemble » dans les quartiers populaires. Évidemment, dans les quartiers qui le sont beaucoup moins, c’est bien connu, on ne vit pas beaucoup ensemble : on vit entre soi !

Votre refus de sortir de cette logique est manifeste. Ainsi, lorsque nous proposons d’ajouter les délits financiers ou le trafic de stupéfiants à la liste – vous pouvez certes y voir de la provocation de notre part puisque nous sommes hostiles au principe ! –, vous ne nous donnez aucune raison valable pour vous y opposer.

Notre collègue Jacques Mézard soulève le problème des infractions connexes aux infractions entrant dans le champ de compétences du tribunal correctionnel citoyen. Ces dispositions nous entraînent dans une complexité très grande et aboutissent à de multiples incohérences puisque les infractions connexes peuvent être extrêmement diverses.

Vous vous préoccupez de la façon dont la société apprécie les décisions de justice. Toutefois, il faudrait se demander comment les auteurs d’infractions, qui sont aussi nos concitoyens, comprendront qu’ils soient renvoyés soit devant le tribunal correctionnel dit « citoyen » – avec tout ce que cette qualification peut avoir d’ambigu, cela a été dit –, soit devant le tribunal correctionnel composé uniquement de magistrats professionnels, ou encore devant le tribunal correctionnel comprenant d’ex-juges de proximité.

Quid de l’égalité des citoyens devant la justice ? Ces dispositions ne font que complexifier le fonctionnement de la justice aux yeux de nos concitoyens.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 111 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 160, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Après les mots :

de l’article 398-1,

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

ainsi que les délits d’atteintes aux biens prévus par le chapitre Ier du titre Ier et par les chapitres Ier et II du titre II du livre III du code pénal.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Il s’agit de simplifier l’écriture de l’alinéa et de supprimer des références inutiles ou erronées.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 160.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 112 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Je rappelle les termes de cet alinéa 16 : « La décision sur la qualification des faits, la culpabilité du prévenu et la peine est prise par les magistrats et les citoyens assesseurs. Sur toute autre question, la décision est prise par les seuls magistrats. »

Je souhaite obtenir une précision, monsieur le garde des sceaux, et je ne doute pas que vous allez me la donner.

J’ai sous les yeux les articles 384 et 385 du code de procédure pénale. Qu’en est-il des exceptions qui peuvent être proposées par le prévenu pour sa défense, le principe dans notre droit pénal étant, vous le savez, que le juge de l’action est le juge de l’exception ? Qu’en est-il, en particulier, des questions préjudicielles relatives à la qualification, sachant que les exceptions de nullité visées à l’article 385 restent – vous me le confirmerez certainement – de la compétence des magistrats professionnels ?

Pour le cas où ce texte trouverait application, ce sont là des débats très intéressants non seulement pour les praticiens, mais aussi et surtout, car c’est l’essentiel, pour les justiciables.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.

Le texte, en l’espèce, reprend directement la disposition qui s’applique devant les cours d’assises. S’agissant des questions préjudicielles, si l’on prend le cas de celles qui sont liées à l’appréciation de légalité ou à l’interprétation d’un acte administratif, le droit qui s’appliquera – c’est le droit dégagé par le Conseil d’État et le tribunal des conflits – sera exactement le même que celui qui est applicable devant les juridictions d’assises.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Cet alinéa important ne saurait être supprimé : il prévoit que les citoyens assesseurs statueront non pas sur des incidents de procédure, mais uniquement sur la culpabilité et la peine. Comme vient de l’indiquer M. le rapporteur, cette disposition est similaire à celle qui s’applique pour les jurés d’assises

Elle ne devrait pas soulever de difficulté puisque les assesseurs feront l’objet d’une information générale adaptée. En complément, l’article 4 du projet de loi prévoit des adaptations nécessaires de la procédure devant les tribunaux correctionnels citoyens afin de garantir l’aptitude des citoyens assesseurs à participer de manière effective au jugement des affaires qui leur seront soumises.

Ces adaptations procédurales garantissent la constitutionnalité de l’intervention des citoyens assesseurs.

Pour autant, si ces garanties permettent aux citoyens assesseurs de se prononcer de manière éclairée sur la qualification des faits, la culpabilité et la peine, ainsi que le prévoit l’alinéa 16 de l’article 2 du projet de loi, les autres décisions techniques seront prises par les seuls magistrats professionnels.

Mme la présidente. La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote.

Mme Virginie Klès. Monsieur le ministre, je m’interroge sur la réelle efficacité d’une journée de formation en la matière.

Depuis maintenant trois ans que je me forme en droit au sein de notre assemblée, je suis encore loin de tout connaître et de tout comprendre. Dès lors, j’ai vraiment beaucoup de mal à imaginer qu’en une seule journée de formation les citoyens sélectionnés sur la base d’un tirage au sort seront tous capables, quels que soient leur milieu social et leur niveau culturel, d’assurer avec compétence les missions qu’on va leur confier.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 112.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 113 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéas 17 et 18

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Ces deux alinéas dont nous demandons la suppression instaurent en réalité des procédures de renvoi en cas de jugement par défaut, c’est-à-dire quand le prévenu ne se présente pas, ou en cas d’audience de fixation de la consignation de la partie civile, c’est-à-dire du plaignant.

On peut s’étonner de ce système, et d’abord parce que les parties civiles peuvent être présentes à l’audience de jugement par défaut. Ensuite, dans tous les cas, si le prévenu fait opposition, il sera jugé par la formation créée à l’article 399-1.

La bonne administration de la justice et le principe d’égalité devant la loi imposent, selon nous, que toutes les infractions relevant de l’article 399-2 nouveau soient jugées par une formation identique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission émet un avis défavorable.

En l’occurrence, il ne s’agit pas de procédures de renvoi. Ce sont des cas où le tribunal qui statue doit être exclusivement composé de magistrats.

En l’espèce, nous estimons que, dans l’hypothèse où le prévenu est absent et où il n’y a pas de coprévenus, il n’est pas utile de faire appel aux assesseurs citoyens.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Mercier, garde des sceaux. Le Gouvernement émet le même avis. Il s’agit de mesures d’administration judiciaire.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. La réponse qui m’est apportée à la fois par la commission et par le Gouvernement est parfaitement compréhensible. Toutes les opinions sont respectables, en particulier en matière juridique. Cependant, monsieur le rapporteur, monsieur le garde des sceaux, votre raisonnement me paraît illogique. Vous considérez que le citoyen assesseur ne doit pas participer au tribunal lorsqu’il y a jugement par défaut. Or un jugement par défaut implique une décision.

D’un côté, vous visez un certain nombre d’infractions qui justifient la composition du « tribunal correctionnel citoyen », futur ex-citoyen, mais, d’un autre côté, si le prévenu ne vient pas, exit le citoyen assesseur. C’est la démonstration qu’il s’agit bien là d’un problème d’opinion publique et de médiatisation !

Je rappelle en outre que le prévenu condamné par défaut peut faire opposition dans certains cas. D’autres voies de recours peuvent aussi être utilisées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote.

Mme Virginie Klès. J’espère qu’au cours de la journée de formation vous n’oublierez pas d’expliquer aux citoyens assesseurs tous ces systèmes et procédures de renvoi d’une formation à une autre afin qu’ils comprennent pourquoi, parfois, ils siègent tandis que, en d’autres occasions, ils ne siègent pas. Cela va les intéresser !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faudra expliquer aussi au prévenu que, s’il ne se présente pas, il sera jugé de telle façon et, s’il se présente, de telle autre. Il pourrait d’ailleurs, s’il est bien informé, choisir d’être présent ou non en fonction de la formation devant laquelle il sera jugé et de sa sévérité, ou de sa bienveillance, présumée. On frise le ridicule !

Vous avez fixé une liste de délits relevant du tribunal correctionnel citoyen. Ou vous vous y tenez ou vous entrez dans une autre logique ! Faut-il, comme l’a dit Jacques Mézard, que le citoyen voie la tête du prévenu pour juger de telle ou telle façon ? C’est absolument injustifiable ! Il faut vraiment arrêter cela !

Ce raisonnement ne correspond pas du tout à votre propre logique puisque celle-ci est censée se fonder sur certaines catégories de délits.