M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Cet amendement me paraît satisfait. Je rappelle que les services de santé seront dorénavant administrés par un conseil d’administration composé à parité de représentants des salariés et des employeurs. Par ailleurs, le contrat d’objectifs et de moyens est bien conclu après avis des organisations représentatives.

La commission a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car il est satisfait dans son esprit.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.

Mme Isabelle Pasquet. Je suis un peu surprise de la réponse qui m’est faite. Les représentants des salariés seront-ils forcément issus d’organisations syndicales représentatives au niveau national ?

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 36, présenté par M. Godefroy, Mmes Alquier, Blandin, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, Demontès, Ghali, Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Daudigny, Desessard, Gillot, Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher, Le Menn, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 26 et 27

Supprimer ces alinéas.

II. – Alinéa 28

Supprimer les mots :

À défaut, si les compétences dans l’entreprise ne permettent pas d’organiser ces activités,

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Jean-Pierre Godefroy. Le texte proposé pour l’article L. 4644-1, qui figure aux alinéas 26 à 30, débute ainsi : « L’employeur désigne un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels ».

Il indique également que ces salariés suivront une formation à leur demande si les compétences internes à l’entreprise sont insuffisantes.

Qui évaluera si les compétences sont suffisantes ou non ? La question demeure posée. Apparemment, l’employeur et lui seul. Il ne fera, en effet, appel à des intervenants extérieurs qu’après avis du CHSCT ou des délégués du personnel. Que se passe-t-il en cas de carence ?

Le fait que la santé et la sécurité des salariés soient de la responsabilité de l’employeur n’implique pas que les personnels ne puissent pas demander une intervention extérieure s’ils sont convaincus qu’un danger existe.

Par ailleurs, comment sont évalués les moyens dont disposeront ces équipes de prévention dans les entreprises et leur degré d’autonomie par rapport à l’employeur ?

II est évident qu’en pratique deux questions demeurent. D’abord, de quel budget les actions de protection et de prévention disposeront-elles ? Ensuite, de quelle manière sera-t-il tenu compte des observations et des demandes de ces « préventeurs maison » ?

Quel sera leur degré d’autonomie, notamment si les propositions impliquent des dépenses ?

À quel point leur responsabilité sera-t-elle engagée en cas d’accident, alors même qu’ils sont eux-mêmes salariés, et donc sous l’autorité de l’employeur ?

À toutes ces questions, nous n’obtenons aucune réponse.

On nous objecte que ces alinéas ne sont que la transposition de l’article 7 de la directive du 12 juin 1989.

Est-ce à dire que toute directive européenne est un texte sacré ? Faut-il comprendre que le législateur, qu’il soit français ou de tout autre État européen, doit se soumettre, même s’il voit immédiatement les dangers du texte, même s’il voit clairement les lobbies qui sont à l’origine de la directive ? Nous ne devons pas oublier que nous sommes les garants de l’intérêt général et, en l’espèce, de la santé et de la sécurité des travailleurs. C’est pour nous un intérêt supérieur à tous les intérêts financiers !

On le voit bien, le système de protection français se trouve de ce fait tiré vers le bas. Nous devrions nous opposer à ce que l’Europe remette en cause les acquis des luttes sociales menées par les travailleurs de notre pays.

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

I. - Alinéas 26 et 27

Supprimer ces alinéas.

II. – En conséquence, alinéa 28

Rédiger ainsi le début de cet alinéa :

« Art. L. 4644-1. - I. – L’employeur fait appel, après avis du comité…

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L’objet de cet amendement est très simple. Il s’agit de supprimer la possibilité pour les employeurs de désigner un ou plusieurs salariés supposés compétents et chargés de « s’occuper » – ce terme semble particulièrement inapproprié – « des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise ».

Pour toutes les raisons que nous avons déjà développées au cours de la navette parlementaire, nous considérons que la désignation organisée aux alinéas 26 et 27 remet profondément en cause le rôle des CHSCT et des représentants du personnel.

Nous proposons donc que l’employeur fasse obligatoirement appel, après avis du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, en son absence, des délégués du personnel, aux intervenants en prévention des risques professionnels appartenant au service de santé au travail interentreprises auquel il adhère ou dûment enregistrés auprès de l’autorité administrative.

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéas 26 et 27

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 4644-1. I. – Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail s'occupe des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l'entreprise. À défaut, un ou plusieurs délégués du personnel sont chargés de cette activité et, en absence de ces derniers, un délégué de site est mis en place selon des modalités définies par décret en Conseil d'État.

« Les personnes mentionnées à l'alinéa précédent peuvent saisir à tout moment les médecins du travail ou le service de médecine du travail.

« Un ou plusieurs salariés du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les délégués du personnel, les délégués de site chargés du suivi des questions de santé au travail doivent recevoir une formation en matière de santé au travail dans les conditions prévues aux articles L. 4614-14 à L. 4614-16.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement tend à réécrire les alinéas 26 et 27, qui prévoient de laisser à l’employeur le soin de désigner un ou plusieurs salariés. Nous proposons au contraire de renforcer les missions confiées aux CHSCT et d’organiser leur substitution dans les entreprises qui n’en sont pas dotées.

Ce faisant, nous entendons réaffirmer le rôle central et crucial des CHSCT, dont l’existence est sans cesse menacée par le MEDEF. La proposition de loi vide cet organe de son contenu en prévoyant la nomination par le chef d’entreprise d’un salarié chargé de la protection et de la prévention des risques professionnels. Monsieur le ministre, que se passera-t-il quand le salarié nommé par le chef d’entreprise émettra un avis contraire à celui du CHSCT ? Comment le différend sera-t-il réglé ?

Par conséquent, il nous semble souhaitable que le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail s’occupe des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise. À défaut, un ou plusieurs délégués du personnel devront être chargés de cette activité et, en l’absence de ces derniers, un délégué de site sera mis en place selon des modalités définies par décret en Conseil d’État.

Le Gouvernement a déjà émis un avis défavorable sur un amendement ayant le même objet, au prétexte qu’il constituait une remise en cause du pouvoir de direction du chef d’entreprise. Nous ne pouvons accepter un tel argument. En effet, je rappelle que l’employeur dispose de trois pouvoirs sur ses salariés : un pouvoir de direction qui s’exprime par le lien de subordination, un pouvoir réglementaire concernant la vie de l’entreprise et un pouvoir disciplinaire.

En quoi le fait de décider que la protection et la prévention des risques professionnels au sein de l’entreprise relèvent de la compétence du CHSCT et non de celle des salariés nommés par le patron remet-il en cause le pouvoir de direction de ce dernier ?

M. le président. L'amendement n° 38, présenté par M. Godefroy, Mmes Alquier, Blandin, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, Demontès, Ghali, Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Daudigny, Desessard, Gillot, Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher, Le Menn, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 26

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Pour ces salariés, le licenciement ou la rupture conventionnelle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail dans les conditions prévues à l’article L. 2421-3.

La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Mme Jacqueline Alquier. Cet amendement s’inscrit dans la suite logique de l'amendement n° 36. Les salariés des équipes de prévention et de protection des risques professionnels, s’ils veulent remplir leurs missions, devront formuler des propositions pour améliorer la protection des salariés. Certaines d’entre elles induiront un coût financier, une réorganisation, voire, dans des cas extrêmes, un arrêt d’activité de telle ou telle équipe. Quelle sera alors la réaction de l’employeur ?

Nous pouvons craindre que ces salariés ne soient victimes de harcèlement, de sanctions, menacés de mutation ou de licenciement pour faute sous un prétexte quelconque. Ce n’est pas là affaire d’imagination : c’est bien plutôt le fruit de l’expérience, y compris de médecins du travail dans des services de la santé au travail d’entreprise. Nous proposons donc que, puisqu’ils traitent des mêmes questions, ces salariés désignés bénéficient de la protection prévue pour les membres du CHSCT à l’article L. 2421-3 du code du travail, qui dispose que le licenciement d’un membre du CHSCT est soumis au comité d’entreprise et, à défaut, pour autorisation à l’inspecteur du travail.

M. le président. Les amendements nos 12 et 39 sont identiques.

L'amendement n° 12 est présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 39 est présenté par M. Godefroy, Mmes Alquier, Blandin, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, Demontès, Ghali, Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Daudigny, Desessard, Gillot, Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher, Le Menn, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 27

Supprimer les mots :

, à leur demande,

La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 12.

Mme Annie David. Lors de l’examen de la proposition de loi en première lecture, le Sénat a adopté, contre l’avis du Gouvernement, un amendement prévoyant que le salarié désigné par l’employeur pour s’occuper de la prévention des risques bénéficie, à sa demande, d’une formation. Même si cette possibilité est déjà prévue par le code du travail pour les membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, comme l’a fait remarquer Mme le rapporteur, « cet ajout peut être utile, car il concerne les salariés désignés par l’employeur ».

Cette mesure constitue pour nous une importante avancée dans la reconnaissance de l’importance de la formation en matière de santé au travail. Les médecins du travail consacrent un tiers de leur temps d’activité à la formation. Comme nous le rappelions en première lecture, au regard de l’apparition de nouvelles formes de troubles musculo-squelettiques et de l’émergence rapide de troubles psychosociaux très divers, il est impératif de mettre en place une véritable formation dans ce domaine. La complexité et la diversité des problèmes inhérents à la protection et à la prévention des risques professionnels de l’entreprise nous conduisent à proposer une rédaction plus contraignante de l’alinéa 27.

C’est pourquoi nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, qui tend à prévoir que la formation est obligatoire et n’est pas soumise à la demande du salarié.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 39.

M. Jean-Pierre Godefroy. La rédaction de l’alinéa 27 ne fait que confirmer notre profonde réticence à l’égard de cette disposition qui prévoit que l’employeur désigne les salariés en charge des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise.

De deux choses l’une : ou ces salariés sont les « préventeurs » compétents et confirmés que l’on nous décrit ou il convient de leur assurer une formation pour qu’ils le deviennent.

Il s’agit donc d’un amendement de précaution qui vise à supprimer la mention selon laquelle la formation serait accessible aux salariés désignés « à leur demande ». D’une part, il n’est pas certain qu’ils en fassent spontanément la demande ; d’autre part, il se peut qu’ils en soient dissuadés.

Nous proposons donc d’inverser le dispositif : la formation est systématique, sauf si la compétence du salarié désigné est avérée.

Au demeurant, étant donné les modifications qui interviennent régulièrement dans les processus de production, il est indispensable que les connaissances soient actualisées. Cela exige des actions de formation, qui doivent alors être obligatoires et non pas laissées à la discrétion des salariés désignés, et ce dans l’intérêt de tous les salariés de l’entreprise, mais aussi de leurs responsables.

M. le président. L'amendement n° 13, présenté par Mme David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 27

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Ces derniers ne peuvent pas être licenciés sans autorisation préalable de l'inspection du travail, durant la période d'accomplissement des missions visées à l'alinéa précédent, et durant une période de douze mois suivant la fin de celle-ci.

« L'employeur qui décide d'opter pour la nomination d'un ou plusieurs salariés pour s'occuper des activités de protection et de prévention est tenu d'opérer ce choix parmi les salariés recrutés par son entreprise en contrat à durée indéterminé et dont la période d'essai et de renouvellement est expirée.

La parole est à Mme Isabelle Pasquet.

Mme Isabelle Pasquet. Il s’agit d’un amendement de repli qui tend à instaurer un garde-fou au dispositif prévu à l’article 1er. Il vise à protéger les salariés en charge des missions de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise. En effet, ces salariés peuvent être amenés à formuler des observations, à proposer des modifications ou à demander l’intervention d’acteurs extérieurs à l’entreprise, notamment l’inspection du travail ; autant de décisions qui peuvent entrer en contradiction avec les intérêts de la direction de l’entreprise.

Afin qu’ils ne puissent être intimidés ou sanctionnés, nous proposons que ces salariés ne puissent être licenciés sans autorisation préalable de l’inspection du travail durant la période d’accomplissement desdites missions et durant une période de douze mois suivant la fin de celles-ci.

De plus, nous demandons que l’employeur qui décide d’opter pour la nomination d’un ou plusieurs salariés pour s’occuper des activités de protection et de prévention soit tenu d’opérer ce choix parmi les salariés recrutés par son entreprise en contrat à durée indéterminé et dont la période d’essai et de renouvellement est expirée.

Mes chers collègues, vous ne pouvez ignorer les risques qui sont attachés à ces missions nouvelles des salariés. En protégeant les salariés, nous renforçons l’effectivité des missions prévues à l’article 1er. Par conséquent, vous avez toutes les raisons de voter cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 37, présenté par M. Godefroy, Mmes Alquier, Blandin, Le Texier, Jarraud-Vergnolle, Campion, Demontès, Ghali, Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Cazeau, Daudigny, Desessard, Gillot, Jeannerot, Kerdraon, S. Larcher, Le Menn, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 28

Remplacer les mots :

les compétences

par les mots :

des qualifications reconnues par des titres ou des diplômes

La parole est à Mme Jacqueline Alquier.

Mme Jacqueline Alquier. Le terme « compétences » pour qualifier les intervenants en prévention des risques professionnels est beaucoup trop flou. Il ne s’agit pas d’entrer dans la logique du soupçon, mais il faut veiller à ce que le texte que nous votons soit applicable de manière efficace.

La profession de « préventeur », qui se développe actuellement, particulièrement dans de grandes entreprises, recouvre des compétences très diverses. Il convient donc de préciser, au regard des activités de l’entreprise et des risques professionnels encourus par les travailleurs, quelles sont exactement les compétences des personnes auxquelles il est fait appel et de veiller à ce que celles-ci soient suffisantes et adaptées aux situations.

Le moyen le plus simple d’y parvenir est d’exiger des qualifications reconnues par des titres ou des diplômes. Cela permettra aussi aux intervenants de disposer d’une crédibilité suffisante auprès de l’employeur et de l’ensemble des services extérieurs : médecine du travail, inspection du travail et autres.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces huit amendements en discussion commune.

L'amendement n° 36 tend à supprimer la désignation par l’employeur d’un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques. Or la commission a estimé que cette disposition nouvelle pouvait utilement compléter la prise en compte des préoccupations liées à la santé et à la sécurité des salariés.

Contrairement à ce qui est écrit dans l’objet de l'amendement n° 11, la proposition de loi ne remet pas du tout en cause les missions ou le rôle des CHSCT, qui sont définis dans d’autres articles du code du travail et que cette proposition de loi ne modifie aucunement.

L'amendement n° 10 tend à supprimer une disposition innovante du texte, la désignation par l’employeur d’un ou plusieurs salariés compétents pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels dans l’entreprise. Il s’agit pourtant d’un complément intéressant aux activités de la médecine du travail et qui est directement en lien avec la responsabilité de l’employeur. Or on ne peut confondre cette responsabilité avec les actions des CHSCT, lesquels sont des organes élus par les salariés. C’est ce qu’ont tendance à faire les auteurs de cet amendement.

L'amendement n° 38 tend à soumettre à l’autorisation de l’inspecteur du travail le licenciement ou la rupture conventionnelle d’un salarié désigné par l’employeur pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels. Cette mesure n’est pas à même d’inciter l’employeur à recourir aux compétences internes à l’entreprise, ce qui est dommage en termes de dynamique et de ressources humaines.

Sur les amendements identiques nos 12 et 39, je répondrai qu’il semble préférable de conserver une certaine souplesse dans la loi ; en tout état de cause, le devoir de formation est général pour l’employeur.

L'amendement n° 13 prévoit que les salariés désignés par l’employeur pour s’occuper de la prévention des risques professionnels ont une protection identique à celle des délégués du personnel en cas de licenciement. Cela ne peut que décourager les employeurs et empêcher le développement d’une relation de confiance sur la prévention des risques. Peu d’employeurs utiliseront cette procédure si l’amendement est adopté : ils feront appel à des organismes extérieurs, alors qu’il est sûrement plus pertinent d’engager une dynamique au sein de l’entreprise elle-même.

Enfin, selon les auteurs de l'amendement n° 37, les seules compétences possibles sont celles qui sont reconnues par un titre ou un diplôme. Si leur possession est en effet un élément d’évaluation d’une qualification, il serait réducteur de s’en tenir à ce seul critère ; cela pourrait même priver l’entreprise des expériences acquises en son sein, ce qui ne serait pas un signal positif adressé aux salariés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

Il s’agit, avec ce texte, de procéder à la transposition littérale d'une directive européenne, qui ne peut être ni restrictive ni extensive. Par conséquent, tous les amendements qui visent à s'écarter de ce principe ne peuvent recueillir notre approbation.

Par ailleurs, un problème de fond se pose. L'employeur est responsable, y compris pénalement, de la santé au travail de ses salariés. Si une personne qu’il a désignée émet un avis contraire au sien, c'est sa responsabilité en tant qu’employeur qui sera engagée.

Mme Isabelle Debré. Tout à fait !

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Je souhaite revenir sur les explications qui nous ont été apportées à la fois par la commission et par le Gouvernement.

Madame le rapporteur, vous avez raison, dans l'objet de l’amendement n° 11, il est précisé que « la désignation par l’employeur d’un ou plusieurs salariés pour s’occuper des actions de prévention et de protection remet en cause le rôle des CHSCT ». Cela ne figure pas dans le texte de l'amendement car il est évident que le Gouvernement ne pouvait s'attaquer au code du travail pour remettre en cause le CHSCT : les partenaires sociaux n'auraient jamais accepté de discuter de ce texte dans ces conditions. Il n’en reste pas moins que la mesure que prévoit cette proposition de loi constitue bel et bien une atteinte au CHSCT et à ses missions, puisqu’elle offre à l'employeur la possibilité de nommer discrétionnairement des salariés pour qu'ils s'occupent des problèmes de santé au sein de l'entreprise.

Selon vous, les protections que nous demandons par le biais de ces différents amendements décourageraient les employeurs de nommer des salariés responsables de la sécurité de la santé au travail. Mais c’est une forme d’aveu, madame le rapporteur ! Cela signifie en creux que les employeurs veulent absolument choisir les salariés en charge de ces actions de prévention et de protection, afin que ceux-ci répondent à leurs desiderata au lieu de s’attacher à résoudre les problèmes posés par la santé des travailleurs au sein de l'entreprise. Si ces salariés étaient protégés, les employeurs n’auraient plus aucune prise sur eux.

Quant à vous, monsieur le ministre, vous nous expliquez qu’il faut laisser un peu de souplesse. Mais, tout à l'heure, alors que nous proposions d’introduire plus de souplesse concernant les priorités, vous nous avez au contraire objecté qu’il fallait être plus précis, afin de prendre en compte les problématiques locales du bassin de vie où intervient tel service de santé au travail.

Tout à l'heure, si nous demandions plus de souplesse, c’était pour permettre aux services de santé au travail d’avoir les mains un peu plus libres pour intervenir sur l’ensemble des secteurs qu’ils jugeaient utiles. Si, maintenant, nous plaidons pour moins de souplesse, en effet, c’est parce que nous ne voulons pas que les salariés désignés pour s’occuper de la prévention des risques professionnels aient en permanence une épée de Damoclès au-dessus de la tête.

Vous nous dites par ailleurs qu’il s’agit, avec ces dispositions, de la transposition littérale d’une directive. Mais, vous savez fort bien, monsieur le ministre, que chaque pays peut transposer les directives en fonction de sa propre législation. Certes, cette directive dispose que les employeurs peuvent nommer des salariés pour s’occuper de la santé des travailleurs, mais elle ne dit pas de quelle façon nous devons organiser cela dans notre code du travail. Nous avons donc tout à fait la possibilité d’apporter ces précisions.

Pour toutes ces raisons, nous maintiendrons l’ensemble des amendements que nous avons déposés.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je partage l’essentiel des propos de notre collègue Annie David, mais je tiens à revenir sur deux points.

Selon Mme le rapporteur, le fait d’accorder une protection aux salariés désignés comme « préventeurs » dissuaderait les responsables de l’entreprise de les choisir. Mais si tel est le cas, j’ai de quoi être inquiet, car cela signifie que l’on veut garder un moyen de pression sur les salariés ainsi désignés !

Mme Annie David. Exactement !

Mme Anne-Marie Payet, rapporteur. Ce n’est pas du tout ce que j’ai dit !

M. Jean-Pierre Godefroy. Pour ma part, je ne vois pas d’inconvénient à ce que l’on nomme des « préventeurs » en matière de santé au travail, bien au contraire ! Mais le meilleur moyen de rendre ce dispositif efficace est de leur accorder une certaine indépendance, de façon qu’ils puissent au moins s’exprimer librement sans risquer de perdre leur emploi.

Or vous leur refusez précisément cette protection au prétexte que les employeurs ne désigneront plus les personnes en question. C’est bien l’aveu qu’on veut donner aux employeurs la possibilité de désigner des personnes sur lesquelles ils seront en mesure de faire pression !

Par ailleurs, j’aimerais demander à M. le ministre une précision : quelle sera la responsabilité juridique des « préventeurs » nommés par l’employeur s’il advient un problème et qu’il leur est alors reproché de ne pas avoir signalé l’existence du risque à l’origine de ce problème ? Revient-il au responsable de l’entreprise, patron ou directeur, de couvrir ces « préventeurs » ou ces derniers encourront-ils des poursuites ?

M. Xavier Bertrand, ministre. C’est le chef d’entreprise qui est responsable.

M. Jean-Pierre Godefroy. Je veux bien vous croire, monsieur le ministre, mais j’aimerais en avoir la certitude, car il s’agit d’un point extrêmement important, et la rédaction proposée n’est pas très claire. Mieux vaudrait qu’il n’y ait aucune ambiguïté en la matière. Il importe que ces « préventeurs » soient dégagés de toute responsabilité en cas d’accident grave. Je connais, dans ma région, des entreprises où se produisent des accidents du travail à répétition !

Monsieur le ministre, pouvez-vous me donner des assurances en la matière ?