PRÉSIDENCE DE M. Charles GuenÉ

vice-président

M. le président. L'amendement n° II-392 rectifié ter, présenté par Mme Keller, MM. Cardoux, B. Fournier, Gilles et Mayet, Mme Jouanno, M. Houel, Mme Bruguière et MM. Cambon, du Luart et Pinton, est ainsi libellé :

Après l'article 47 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Au premier alinéa des articles L. 2333-64 et L. 2531-2 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « reconnues d'utilité publique » sont insérés les mots : « et des associations adhérentes à une association reconnue d'utilité publique ».

II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l'État, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Roland du Luart.

M. Roland du Luart. Mme Keller m’a demandé de défendre en ses lieu et place cet amendement, que j’ai cosigné.

Les personnes publiques et privées employant plus de neuf salariés sont assujetties au versement transport. Les associations et fondations reconnues d’utilité publique, à but non lucratif et dont l’activité est de caractère social en sont toutefois exonérées.

De nombreuses associations gestionnaires d’établissements et de services pour personnes handicapées ont bénéficié, pendant des années, de manière expresse ou tacite, de cette exonération, du fait de leur adhésion à une association reconnue d’utilité publique poursuivant le même objet social.

Pourtant depuis 2007, l’URSSAF remet en cause l’exonération d’un certain nombre d’associations, au motif qu’elles ne disposent pas d’une décision expresse d’exemption de l’autorité organisatrice de transports dont elles dépendent. Les communes et les EPCI s’appuient en effet sur une nouvelle jurisprudence sociale fondée sur la non - reconnaissance de l’utilité publique par affiliation.

Cette remise en cause crée toutefois des situations économiques d’autant plus périlleuses qu’elle revêt parfois un caractère rétroactif et que les associations redressées n’ont pas provisionné les sommes demandées. Dans le département du Nord, une association se voit ainsi réclamer un montant de 130 000 euros, qu’elle ne peut assumer. L’équilibre financier de ces associations est compromis.

Cet amendement tend à garantir la situation qui prévalait avant cette remise en cause, à savoir l’exonération de ces associations gestionnaires d’établissements et de services pour personnes handicapées, adhérentes à une association reconnue d’utilité publique. Ces associations adhérentes ne sont pas elles-mêmes reconnues d’utilité publique, mais les conditions du but non lucratif et d’activité sociale continueraient à leur être appliquées.

Tel est l’objet de cet amendement, qui est particulièrement important.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

Si nous avons bien compris l’intention de ses auteurs, et en particulier de Mme Keller, il s’apparente plus à un amendement d’appel, visant à alerter les pouvoirs publics sur la situation de certaines associations.

Néanmoins, sa rédaction risque d’embrasser un champ beaucoup plus large que celui qui est visé par Mme Keller, à savoir le champ de l’Union nationale des associations de parents, de personnes handicapées mentales et de leurs amis, l’UNAPEI.

Il est donc important d’entendre le Gouvernement sur ce sujet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je demanderai le retrait de cet amendement, qui nous engagerait dans un processus dont on ne connaît pas exactement les contours.

Le critère de reconnaissance d’utilité publique est objectif, indiscutable. En revanche, qu’est-ce qu’une association affiliée à une association reconnue d’utilité publique ? Cette notion d’affiliation me semble bien floue.

À défaut de retrait de cet amendement, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Monsieur du Luart, l’amendement n° II-392 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Roland du Luart. Madame la ministre, madame la rapporteure générale, je comprends vos préoccupations sur le sujet, mais, dans cette affaire, je suis choqué par la rétroactivité. Ainsi, après coup, on réclame de l’argent à des associations ayant un rôle important dans le domaine des services à la personne et elles risquent de se retrouver en état de cessation de paiement si une solution n’est pas trouvée.

J’aurais aimé que Mme la ministre dise que des instructions seront données afin d’éviter toute poursuite rétroactive et que la règle nouvelle s’appliquera seulement pour l’avenir. Sinon, on met les associations en grandes difficultés. Est-ce bien le moment ?

Cela étant dit, je retire mon amendement, mais je souhaite qu’une solution soit trouvée.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je voudrais insister sur le fait que nous avons été alertés par des associations qui se voient opposer une nouvelle jurisprudence sociale, en matière d’exigibilité du versement transport, les prenant à revers et risquant de déstabiliser leur gestion.

Madame la ministre, compte tenu du rôle joué dans nos départements pas ces associations, nous serions heureux, même si la rédaction de cet amendement est sans doute imparfaite, qu’une attention particulière soit portée à ce sujet. Vous pourriez notamment recevoir leurs représentants, afin de trouver une solution assurant la continuité de leur activité.

Il faut faire preuve d’écoute et de compréhension à l’égard de ces associations, animées par des personnes bénévoles, qui font de leur mieux aux côtés des collectivités territoriales.

M. Roland du Luart. Merci, monsieur le président !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Évidemment, s’il y a des cas particuliers d’associations se trouvant à la limite de la reconnaissance d’utilité publique, l’administration fiscale est tout à fait disposée à les étudier.

M. Roland du Luart. Madame la ministre, ce sera surtout utile pour le passé !

M. le président. L’amendement n° II-392 rectifié ter est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II–13 rectifié, présenté par M. Ries, au nom de la commission de l’économie, est ainsi libellé :

Après l’article 47 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° À l’article L. 2333-66, les mots : « ou de l’organe compétent de l’établissement public » sont remplacés par les mots « , de l’organe compétent de l’établissement public de coopération intercommunale, ou du conseil régional » ;

2° L’article L. 2333-67 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« II. - Hors Île-de-France et régions d’outre-mer, le taux du versement est fixé ou modifié par délibération du conseil régional, dans la limite de 0,55 %, dans les territoires situés hors périmètre de transport urbain. » ;

3° L’article L. 2333-68 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, après le mot : « versement », sont insérés les mots : « mentionné au I de l’article L. 2333-67 » ;

b) Il est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le versement visé au II de l’article L. 2333-67 est affecté au financement des dépenses liées à l’organisation des transports régionaux. » ;

4° L’article L. 2333-70 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « ou de l’établissement public », sont remplacés par les mots : « de l’établissement public ou de la région » ;

b) Au premier alinéa du II, les mots : « ou établissements publics territorialement compétents » sont remplacés par les mots : « établissements publics territorialement compétents ou régions » ;

c) Au deuxième alinéa du II, les mots : « aux communes ou aux établissements publics » sont supprimés ;

5° À l’article L. 2333-71, les mots : « ou l’établissement public répartit » sont remplacés par les mots : « , l’établissement public et la région répartissent » ;

6° À l’article L. 2333-74, les mots « est habilité » sont remplacés par les mots « et la région sont habilités ».

La parole est à M. Roland Courteau, au nom de la commission de l'économie.

M. Roland Courteau, au nom de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Madame la ministre, mes chers collègues, je présente cet amendement au nom de la commission de l’économie, qui l’a adopté le 16 novembre dernier, à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables ».

Cet amendement a été proposé par notre collègue Roland Ries, rapporteur pour avis de ces mêmes crédits, mais il n’a malheureusement pas pu être présent aujourd’hui pour le défendre.

Il porte sur un sujet essentiel, puisqu’il vise à instaurer un versement transport au bénéfice des régions, lesquelles sont confrontées à de graves difficultés pour financer les TER compte tenu du mode de calcul quelque peu obsolète de la compensation financière de l’État.

Il tend à doter les régions d’une ressource fiscale dédiée, en permettant de créer un versement transport pouvant atteindre, au maximum, 0,55 % de la masse salariale sur l’ensemble des territoires non couverts par un périmètre de transports urbains, ou PTU.

Il s’agit donc uniquement d’un versement interstitiel et en aucun cas d’un versement additionnel, sur lequel nous devons être, mes chers collègues, extrêmement réservés.

L’adoption de cet amendement aurait un autre mérite, et de taille : éviter les effets de seuil et lutter contre une certaine inégalité de traitement entre les entreprises situées dans un PTU et celles qui, implantées juste à sa périphérie, échappent ainsi au versement transport.

Dans l’hypothèse d’une extension d’un PTU existant, il va de soi que les entreprises concernées ne paieraient que le versement transport classique, le versement régional disparaissant automatiquement. Ces deux types de versement ne doivent pas entrer en concurrence, car il ne faut pas pénaliser l’action des autorités organisatrices de transports, qui œuvrent à l’amélioration des transports dans nos territoires.

M. le président. L’amendement n° II–8 rectifié, présenté par Mme Schurch, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 47 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

I. – Après le 2° de l’article L. 2333–64, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 3° Et dans une région, compétente pour l’organisation des transports régionaux de voyageurs. »

II. – L’article L. 2333-66 est ainsi rédigé :

« Art. L. 2333-66. – Le versement est institué par délibération du conseil municipal ou de l’organe compétent de l’établissement public ou du conseil régional. »

III. – L’article L. 2333–67 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« Le taux de versement est fixé ou modifié par délibération du conseil régional, hors région Île-de-France, dans la limite de :

« – 0,20 % en additionnel au taux existant dans un périmètre de transport urbain ;

« – 0,30 % dans un territoire situé hors périmètre de transport urbain. »

IV. – L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale ou l’organisme de recouvrement transmet annuellement aux communes, aux conseils régionaux ou établissements publics territorialement compétents qui en font la demande les données et informations recueillies lors du recouvrement du versement transport contribuant à en établir le montant. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis la généralisation de la décentralisation des transports, les régions ont assuré un nouveau dynamisme aux transports régionaux de voyageurs.

Un tel engagement nécessite des budgets importants, lesquels, au fil des années, sont passés dans de nombreuses régions au premier plan dans le budget général des collectivités. Ces dernières dépendent pourtant, pour la quasi-totalité de leurs ressources, des moyens que l’État consent à leur attribuer, moyens qui, hélas ! ont fortement tendance à diminuer.

Aujourd’hui, seules les autorités organisatrices de transports urbains et la région d’Île-de-France, dans le cadre du STIF, le Syndicat des transports d’Île-de-France, bénéficient de l’apport du versement transport pour financer leur compétence en la matière.

Cette situation doit évoluer : ce qui constitue, aujourd’hui, un cas particulier doit devenir, demain, le droit commun.

Ainsi, la mise en place d’un versement transport régional permettrait de doter les régions d’une ressource propre, pérenne et dynamique, provenant du secteur économique, lui-même bénéficiaire du système des transports régionaux, qui contribuerait, aux côtés des dotations de l’État et des ressources de la billettique, à financer le fonctionnement et les investissements des transports régionaux de voyageurs.

S’il revenait aux régions de percevoir cette recette nouvelle, il conviendrait ensuite, comme c’est le cas en Île-de-France, que lesdites collectivités mettent en place une structure de coordination en vue de l’affectation de cette nouvelle ressource, les départements, les intercommunalités et les communes étant régulièrement invités à investir en la matière.

Il s’agit de favoriser, par une complémentarité renforcée, un maillage fin de l’ensemble du territoire régional. Cette ressource se révèle indispensable pour permettre aux transports régionaux de répondre aux besoins.

Notre proposition vise donc à créer une part de versement transport au profit des régions, se traduisant par un taux régional sur les zones hors périmètre de transports urbains, ou PTU, plafonné à 0,3 %, et par un taux additionnel au versement transport existant dans les PTU, plafonné à 0,2 %.

J’insiste sur la notion de taxe additionnelle, préférable à celle de taxe interstitielle, car, avec cette dernière, il n’est pas possible d’assurer la péréquation nécessaire au niveau de l’ensemble d’un territoire régional.

Le versement transport régional serait mis en œuvre par délibération du conseil régional, et son produit affecté au financement des dépenses d’investissement et de fonctionnement des transports de voyageurs régionaux.

Il est urgent de sortir de l’impasse financière dans laquelle les décisions gouvernementales ont placé le financement de ces transports régionaux de voyageurs.

J’appelle le groupe socialiste-EELV, puisque nous partageons le même état d’esprit en défendant ces deux amendements, à la sagesse, en soutenant le nôtre, qui, de mon point de vue, est un peu plus complet et plus juste.

M. Roland Courteau, au nom de la commission de l’économie. Plus complet, peut-être, plus juste,…

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Avec ces deux amendements, nous en revenons en effet à un sujet important, le versement transport.

M. Roland Courteau, au nom de la commission de l’économie. C’est vrai !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Je précise que les propositions qui nous sont faites ne résultent pas d’un échange de vues de groupe à groupe, puisque l’amendement n° II-8 rectifié a été proposé par la commission de l’économie. La commission des finances l’a d’ailleurs étudié de près.

L’année dernière, à la même époque, faut-il le rappeler, nos collègues Roland Ries et Louis Nègre avaient porté une demande conjointe, au travers de deux amendements identiques, demande qui avait reçu le soutien du GART, le Groupement des autorités responsables de transport. Celle-ci concernait les agglomérations moyennes : il s’agissait d’augmenter le taux plafond du versement transport de 0,55 % à 0,85 % dans les communes et EPCI dont la population est comprise entre 50 000 et 100 000 habitants et où existent des infrastructures de transports collectifs en site propre.

Ces deux amendements identiques étaient, par leur objet, très importants ; leurs auteurs y tenaient vraiment et le Sénat les avait finalement adoptés.

Aujourd’hui, il nous est proposé d’ajouter une strate au dispositif, mais, et c’est là la grande difficulté, qui s’appliquerait, si je lis l’amendement de la commission de l’économie, à des zones interstitielles non couvertes par un périmètre de transports urbains.

M. Roland Courteau, au nom de la commission de l’économie. Exact !

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Or l’existence d’un PTU est véritablement le point cardinal du versement transport, son élément fondateur. Dès lors qu’on lui ôte ce caractère urbain, où allons-nous ?

Madame Cohen, vous avez fait référence à l’Île-de-France. Je vous ferai observer, même si ce n’est pas le sujet aujourd’hui, qu’il faudrait effectivement, comme M. Richert, ministre chargé des collectivités territoriales, l’avait dit, ici même, le 6 décembre 2010, s’interroger globalement sur le versement transport.

Avec votre proposition, où vous mêlez un versement interstitiel et un versement additionnel, nous sommes très loin de ce qu’est, par définition, le versement transport, fondé, j’y insiste, sur l’existence d’un périmètre de transports urbains.

Pour l’Île-de-France, il est vrai que le problème va se poser. Aujourd’hui, il semble que les entreprises soient plutôt favorables au projet de réseau de métro automatique mis en œuvre dans le cadre du Grand Paris. Mais seront-elles prêtes à contribuer davantage, au travers du versement transport, puisque ce sont elles qui le paient ?

Je ne suis donc favorable ni à un versement interstitiel ni à un versement additionnel, dans la mesure où cela pèserait sur les entreprises. Actuellement, en Île-de-France, le versement transport varie, selon la taille des communes, de 1,7 % à 2,6 % et s’applique sur la masse salariale de toutes les entreprises de plus de neuf salariés. J’attire l’attention de tous sur ce point : les territoires interstitiels, qui seraient susceptibles de bénéficier du dispositif proposé dans l’amendement n° II-13 rectifié, comptent un réseau important de petites entreprises. (M. Jean-Claude Frécon opine.)

Par conséquent, il importe de faire un arbitrage entre les nécessités de l’économie et les besoins constatés en termes de transports. J’ajoute que, outre l’existence d’un PTU, le point cardinal, l’élément fondateur du versement transport, son objectif principal, c’est de faciliter le transport entre le domicile et le lieu de travail.

Dans cette logique, puisque les deux propositions sortent du cadre du PTU, la commission des finances a émis un avis défavorable sur les amendements nos II-13 rectifié et II-8 rectifié.

Pour l’Île-de-France, comme pour les autres régions, il faudra réfléchir, ainsi que M. le ministre Richert l’avait laissé entendre, à ce que l’on veut faire du versement transport de manière globale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Valérie Pécresse, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Courteau, l’amendement n° II-13 rectifié est-il maintenu ?

M. Roland Courteau, au nom de la commission de l’économie. Personnellement, je n’ai pas été totalement convaincu par les arguments avancés par Mme la rapporteure générale. Quoi qu’il en soit, dans la mesure où il s’agit d’un amendement de la commission de l’économie, il ne m’appartient pas de le retirer.

M. le président. Madame Cohen, l’amendement n° II-8 rectifié est-il maintenu ?

Mme Laurence Cohen. Nous maintenons l’amendement n° II-8 rectifié, car nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut allouer des moyens considérables en faveur des transports collectifs pour la population et nombreux à insister sur la nécessité de trouver des financements nouveaux.

Mais, au bout d’un moment, ce sont les habitants, les collectivités et les entreprises qui peuvent assurer ces financements. Les régions font déjà un énorme effort pour favoriser un meilleur maillage du territoire. Il importe aussi que nous arrivions à nous mettre d’accord sur le périmètre et le taux du versement transport. Or, là, nous ne sommes pas sur la même échelle, puisque les taux proposés sont 0,2 %, 0,3 % et 0,55 %. Par conséquent, en la matière, il faut raison garder !

M. le président. La parole est à M. Jean Germain, pour explication de vote sur l’amendement n° II-13 rectifié.

M. Jean Germain. Même s’il faudra, bien sûr, travailler sur ce sujet, il serait à la fois très complexe et extrêmement dangereux de mettre en place une déliaison entre le versement transport et l’existence d’un périmètre de transports urbains, de surcroît en mélangeant l’interstitiel et l’additionnel.

N’oublions pas non plus l’argument économique, puisque le versement transport est payé non seulement par les entreprises, mais aussi par les collectivités territoriales et les établissements publics. Avant de se lancer dans une opération de cette nature, il y a tout de même lieu d’examiner d’autres possibilités.

J’ajoute que les régions, pour financer leurs investissements ferroviaires, perçoivent une partie de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP. L’application du versement transport dans les zones interstitielles constituerait une charge trop lourde pour un certain nombre d’entreprises et de collectivités.

M. le président. La parole est à M. Roland du Luart, pour explication de vote.

M. Roland du Luart. Je tiens à apporter mon appui total aux propos qui viennent d’être tenus par Mme la rapporteure générale et M. Germain.

Le versement transport, dans la plupart des endroits, est appliqué à son taux maximal. C’est une charge pour les entreprises, comme pour les collectivités.

Compte tenu des modifications de périmètre opérées en ce moment par les CDCI, les commissions départementales de la coopération intercommunale, dès lors que telle ou telle commune nouvelle intègre une agglomération, les entreprises installées sur le territoire de cette commune risquent d’être assujetties au versement transport, alors que leurs salariés ne bénéficient sans doute pas des infrastructures existantes. Cela ne manquera pas d’entraîner un certain nombre de réactions.

Il ne faut surtout pas changer le cadre tel qu’il a été défini. Instaurer une taxe additionnelle aujourd’hui me paraît pénalisant tant pour les entreprises que pour les collectivités, et donc dangereux. Personnellement, je voterai contre les deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Valérie Pécresse, ministre. Je tiens, madame Cohen, à répondre à votre interpellation sur ce sujet, que nous connaissons bien toutes les deux, du financement des transports en Île-de-France.

Comme vous le savez, Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, missionné pour réfléchir au financement du projet de transport dans le cadre du Grand Paris, notamment des nouvelles lignes prévues en Île-de-France, avait suggéré une augmentation du versement transport.

Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Nous y sommes favorables !

Mme Valérie Pécresse, ministre. Comme nous tous, ici, je l’imagine.

Néanmoins, il serait extrêmement dangereux de prévoir une hausse de ce versement transport pour les entreprises non pas en vue de financer ce qui est l'objectif prioritaire du Gouvernement pour l’Île-de-France, à savoir de nouvelles lignes et de nouvelles rames, la rénovation des RER franciliens et des lignes existantes ainsi que le matériel roulant, mais en vue de permettre artificiellement une baisse des tarifs en Île-de-France.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-13 rectifié.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-8 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° II-93 rectifié bis, présenté par M. Courtois, est ainsi libellé :

Après l’article 47 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2333-68 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il ne peut être affecté au financement des transports scolaires au sens de l’article L. 213–11 du code de l’éducation. »

La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.

M. Jean-Patrick Courtois. L'article L. 2333–68 du code général des collectivités territoriales dispose que le versement transport est : « affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics urbains et des autres services de transports publics qui, sans être effectués entièrement à l'intérieur du périmètre des transports urbains, concourent à la desserte de l’agglomération dans le cadre d'un contrat passé avec l'autorité responsable de l'organisation des transports urbains. Le versement est également affecté au financement des opérations visant à améliorer l'intermodalité transports en commun-vélo. »

Par ailleurs, il est précisé, conformément à l'article D. 2333–86 du code général des collectivités territoriales encadrant l’utilisation du versement transport : « Ouvrent droit au bénéfice du produit du versement de transport, d'une part, les transports urbains mentionnés à l'article 27 de la loi n° 82–1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, d'autre part, les transports qui, sans être effectués entièrement à l'intérieur d'un périmètre de transports urbains, concourent à la desserte de l'agglomération tels que mentionnés à l'article L. 2333–68… ».

Or, dans la pratique, on constate une certaine dérive dans l’affectation des recettes du versement transport par les organismes en charge du transport urbain.

En effet, certains syndicats intercommunaux ayant la compétence de service public et celle des transports urbains et scolaires ne présentent pas distinctement le budget des transports publics, d’une part, et le budget annexe des transports scolaires, d’autre part.

De même, dans les faits, ces syndicats utilisent le produit du versement transport pour financer les transports scolaires, qui eux, je le rappelle, relèvent de l’article 29 de la loi n° 82–1153.

Ce « détournement » fiscal au bénéfice du transport scolaire d’une recette ayant pour objet de financer le transport public a pour conséquence d’organiser le transport public urbain en termes de lignes et d’horaires, en fonction des besoins des usagers scolaires et non du public, à savoir les salariés et autres usagers.

Une telle politique conduit à léser les usagers des transports publics en ne permettant pas, du fait de la diminution des financements, d’instaurer une politique tarifaire incitative, en particulier au profit des catégories sociales les plus défavorisées, et notamment la gratuité.

De plus, certains syndicats utilisent le versement transport pour financer des lignes exclusivement réservées aux transports scolaires, qui ne fonctionnent pas pendant les vacances scolaires. Ces mêmes syndicats ont été conduits à équilibrer leur budget pour éviter la participation financière des communes, à réorganiser, voire à supprimer les transports de voyageurs et à annuler les avantages tarifaires qui s’y rapportent, en demandant aux centres communaux d’action sociale, les CCAS, de se substituer à eux.

Dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2011, lors de la séance du 6 décembre 2010, le ministre de l’intérieur de l’époque avait assuré que le droit méritait d’être clarifié pour éviter toute ambiguïté quant au versement transport.

En effet, il a été précisé qu’« au regard des textes, le versement transport ne peut pas servir à financer les transports scolaires, quand bien même un syndicat intercommunal cumulerait cette responsabilité avec une compétence plus générale en matière de transport. »

Or force est de constater aujourd’hui que l’ambiguïté persiste : certains syndicats continuent à utiliser le versement transport pour financer des lignes exclusivement réservées aux transports scolaires, qui ne fonctionnent pas pendant les vacances scolaires.

Je soumets donc, à nouveau, à la Haute Assemblée cet amendement qui vise à clarifier cette distinction dans la présentation du budget des transports publics et le budget des transports scolaires dans les budgets communaux.