Mme Jacqueline Gourault. Mais on ne le leur interdit pas !

M. Claude Bérit-Débat, rapporteur. … car d’autres communes disposant de plus de 25 % de logements sociaux apporteraient la compensation.

Enfin, comment construire plus de logements sociaux si on gèle la situation à l’échelle de l’EPCI ?

La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Cécile Duflot, ministre. L’ensemble de ces amendements porte notamment sur la question du taux.

L’amendement n° 7 rectifié, que Mme Procaccia a elle-même qualifié de « provocateur », pose la question du lieu d’application de ce taux.

Ce projet de loi établit une distinction entre zones tendues et détendues, de manière que cette obligation ne s’impose pas aux endroits où ce n’est pas nécessaire. Par conséquent, l’abaissement du seuil est une question que nous avons choisi de ne pas aborder dans le cadre de ce projet de loi puisque, j’ai déjà eu l’occasion de le dire, la robustesse de la loi SRU a montré qu’il était utile de renforcer certaines des obligations qu’elle pose, mais non de changer l’équilibre du texte.

De ce point de vue, la proposition formulée par Mme Procaccia me semble effectivement provocatrice. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

L’amendement n° 72 rectifié vise à comptabiliser les 25 % à l’échelle de l’agglomération ou de l’intercommunalité ; plusieurs amendements tendent d’ailleurs à élargir la mesure du seuil de 25 % à l’échelle de l’intercommunalité, pour différents motifs. Celui-ci pose une difficulté centrale : il ne vise pas à des rééquilibrages territoriaux et il tolérerait une situation où une commune compterait 50 % ou 60 % de logements sociaux quand l’ensemble des autres communes de l’intercommunalité n’en compterait aucun.

C’est une erreur en termes d’équilibre des territoires et ce serait même assez contre-productif au regard de la logique même de la loi, qui est de doter l’ensemble des communes visées de logements sociaux.

Le Gouvernement émet donc un avis tout à fait défavorable.

Il en est de même pour les amendements identiques nos 60 rectifié et 97, qui sont contraires à l’objet de ce projet de loi : on peut bien sûr, monsieur Dubois, monsieur Reichardt, être contre le rehaussement du seuil, mais il se trouve c’est le sens même de ce texte.

J’en profite pour dire, monsieur Reichardt que votre argumentaire sur l’augmentation du nombre de logements qui rend impossible l’augmentation du nombre de logements sociaux est un peu spécieux, car beaucoup de communes, ces dix dernières années, ont été en situation d’augmenter leur nombre de logements, mais ont réalisé un pourcentage de construction de logements sociaux supérieur. Je le dis parce qu’on trouve aujourd'hui des communes qui sont en situation de carence mais qui n’imposent que 20 % de logements sociaux dans leurs programmes de constructions neuves. Évidemment, c’est structurellement une chimère de croire qu’en construisant 20 % de logements neufs alors qu’on est en situation de carence, on pourra atteindre le taux.

M. Dallier a évoqué ce point à propos d’un certain nombre de réalisations dans sa commune : il convient de favoriser, dans certaines communes en situation difficile, des dispositifs de préemption plus simples pour transformer du patrimoine existant en logement social, et il faudra peut-être y réfléchir au printemps.

Cela étant, au cours la dernière période, seules 163 communes sont en réelle carence, ce qui prouve bien qu’avec des situations très diverses, et depuis douze ans que cette loi est applicable, nombre de communes ont trouvé les moyens d’y répondre. (M. André Reichardt s’exclame.)

Aujourd'hui, des maires, avec un vrai volontarisme, ont réussi à résoudre ces difficultés qui semblent insurmontables à d’autres. Mais ce débat se poursuivra dans les médias.

L’amendement n° 17 sur le passage du taux de 25 % à 30 % en zones tendues et 25 % sur l’ensemble du territoire est l’inverse de ceux qui tendent à maintenir le taux à 20 %. Nous avons choisi ce taux de 25 % parce qu’il nous semblait, notamment avec l’échéance précise de l’année 2025, que le franchissement de ces cinq points d’augmentation était réaliste et qu’un rehaussement de ce seuil serait très difficile pour certaines communes et non nécessaire pour d’autres.

Il est d’ailleurs à noter qu’un certain nombre d’intercommunalités ont elles-mêmes fixé ce taux de 30 % dans leur PLH, voire l’ont fixé pour l’ensemble des nouvelles constructions. Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement car il souhaite maintenir le seuil de 25 % en zone tendue.

L’amendement n° 8 rectifié, qui vise à exempter les communes d’Île-de-France comptant entre 1 500 et 3 500 habitants du passage de 20 % à 25 % est à mon sens inopportun, voire contre-productif pour la bonne et simple raison qu’en Île-de-France, la métropole est quasiment continue et que, en zone tendue, la taille des communes n’a pas particulièrement de pertinence sur la répartition du nombre de logements. C'est pourquoi cette disposition figurant dans la loi SRU de 2000 a eu du sens, et son application s’est plutôt bien passée car, en Île-de-France, ce ne sont pas les plus petites communes en nombre d’habitants qui ont été les moins allantes pour la construction de logements sociaux. Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

S’agissant de l’amendement n° 98 rectifié, le Gouvernement émet un avis défavorable parce qu’il faut non pas s’attaquer uniquement aux nouvelles constructions mais bien au stock et à la diversité des logements existants.

L’amendement n° 148 aborde la question des résidences secondaires, qui est un vrai sujet pour certaines zones de notre pays ; je pense en particulier à la Corse, au Pays Basque, où la situation est très particulière. On y observe en outre une tension très forte sur le foncier et sur le niveau des loyers.

Nous devrons réfléchir, me semble-t-il, dans le cadre de la future loi, en lien avec les élus locaux, à un dispositif adapté, en particulier sur le littoral, où il existe une tension très forte qui a des conséquences sociales assez pénibles. Nous sommes donc très conscients de cette situation. Je vous demande donc, monsieur Dantec, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi je devrai émettre un avis défavorable, non pas pour des raisons de fond, mais parce qu’il nous faut trouver le temps de traiter ces situations spécifiques.

Les amendements nos 18, 81 et 118 sont identiques à l’amendement n° 141, présenté par le Gouvernement. Pour nous, il s’agissait de faire en sorte que personne ne s’inquiète d’un raffinement législatif s’appuyant sur les lois récentes en matière de logement social. La suppression du terme « locatifs » ayant suscité quelques inquiétudes, il m’a semblé absolument impératif de le maintenir. Le principe de ce projet de loi, c’est une amélioration du dispositif existant, s’appuyant sur sa robustesse. Le terme « locatifs » sera maintenu.

Monsieur Dallier, s’agissant de l’amendement n° 165, vous nous avez fait, en dix-sept minutes, une brillante démonstration aux termes de laquelle il convenait de se fonder sur le revenu moyen par habitant pour appliquer le taux de 25 %. Cependant, dès lors qu’on tente de mettre des coins dans le dispositif, chacun a pu le voir précédemment, on en affaiblit la robustesse.

Je l’ai dit, la force de cette loi, c’est sa simplicité et sa robustesse. Je ne nie pas que cela soulève quelques questions et crée des situations difficiles. C'est pourquoi je soutiens, au nom du Gouvernement, que l’application des pénalités ne doit pas être automatique. Nous y reviendrons ultérieurement, mais je le dis dès à présent : il faut que l’on puisse prendre en compte la situation particulière de certaines communes. Cette souplesse me paraît très importante. En revanche, la loi en elle-même doit être très claire et identique pour tous. C'est pourquoi j’émets un avis défavorable.

Avec l’amendement n° 48 rectifié, il s’agit de la même idée : maintenir le taux de 20 % dans des cas particuliers. Je vous réponds exactement la même chose, madame Létard : la prise en compte de cas particuliers ouvre la porte à d’autres cas particuliers. On sait bien que l’ancienne loi SRU avait fait l’objet d’attaques plus ou moins subtiles. J’ai rappelé que cela avait conduit l’abbé Pierre à insister pour que des formules qui pouvaient parfois sembler intelligentes, mais qui avaient pour objectif final d’affadir le dispositif, et donc de réduire la construction de logements sociaux, soient repoussées.

Je ne mets pas en cause votre démarche, madame la sénatrice. Je connais votre attachement à cette question et vos réalisations à Valenciennes. Je suis donc absolument certaine de votre sincérité. Néanmoins, je pense que cette loi, par sa simplicité, garde une cohérence, qu’il me semble absolument indispensable de conserver. C'est pourquoi j’émets un avis défavorable sur votre amendement n° 48 rectifié ainsi que sur l’amendement n° 38 rectifié, qui, de la même manière, vise à ouvrir la porte une exception sur le passage au seuil de 25 %.

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote sur l'amendement n° 7 rectifié.

M. André Reichardt. Je n’ai pas souhaité m’associer à cet amendement pour une raison majeure : il vise à étendre à toutes les communes de France un taux de 25 %. Or le taux de 20 % ne me paraît déjà pas convenable. J’ai eu l’occasion d’expliquer tout à l’heure que, pour certaines communes qui partent de zéro, il est impossible d’arriver à 20 %.

J’en profite pour dire à Mme la ministre que, manifestement, elle ne m’a pas écouté attentivement parce que, dans les programmes de logements que j’ai réalisés, nous avons largement dépassé les 20 % et, à certains égards, nous ne sommes pas loin de 40 % – mes concitoyens me l’ont même reproché !

Pour autant, l’idée qui est la base de cet amendement n’est pas sans fondement : il aurait en effet été utile que chaque commune se sente concernée et fasse un effort en matière de logement locatif social.

Je vous fais donc, madame la ministre, la proposition que j’ai faite à d’autres ministres du logement avant vous, sans être entendu.

Pourquoi ne pas substituer à cette contrainte – sur les 36 000 communes que compte la France, ce ne sont que quelques milliers de communes qui sont concernées – une véritable concertation entre l’État et toutes les communes de France, quelle que soit leur taille ? Une négociation, que la loi rendrait obligatoire, pourrait avoir lieu, sur l’initiative du préfet, avec toutes les communes. Chacune d’entre elles, en fonction de sa taille, pourrait s’engager sur un nombre de logements sociaux à construire sur une période déterminée. Un contrat serait signé entre les parties et des sanctions seraient appliquées en cas de non-respect de cet engagement. Pourquoi alors ne pas prévoir des taux différents ? Une commune de 500 habitants qui n’aurait pas de logements sociaux du tout ne serait pas obligatoirement soumise au même taux qu’une autre commune. Il en serait autrement si elle en avait déjà 10 %.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. La proposition que vient de formuler mon collègue André Reichardt, ne serait-ce qu’un seul logement social dans les 35 600 communes qui n’en ont aucun vous permettrait, madame la ministre, de régler une grande partie des problèmes que connaît la France en la matière, tout en évitant que les gens se précipitent dans la région parisienne et dans les grandes villes ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Daniel Reiner. Il faut être sérieux !

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je ne peux pas laisser dire qu’il n’y a pas de logements sociaux sur l’ensemble du territoire français, y compris dans les communes de moins de 3 500 habitants. C’est méconnaître, madame Procaccia, vous qui êtes l’élue d’un département de la couronne parisienne, la réalité : toutes nos communes, dans tous les départements, consentent des efforts absolument considérables pour avoir des logements sociaux, soit parce que telle est leur volonté soit en raison du niveau de vie de la population.

Cela étant, madame la ministre, je profite des quelques minutes qui me restent pour évoquer le problème que rencontrent les départements ruraux et les petites communes qui n’ont pas de document d’urbanisme, un problème sur lequel nous reviendrons lors de l’examen de l’article 6.

Vous ne pouvez pas appliquer indistinctement ce texte à une commune qui va entrer dans une intercommunalité de 50 000 habitants et sera donc soumise à l’article 55 de la loi SRU dans le cadre de la réforme territoriale alors même qu’elle n’a aucun document d’urbanisme, ni même les moyens d’en élaborer, et que l’urbanisme ne fait pas partie des compétences de l’intercommunalité qu’elle va rejoindre. Cela va poser un certain nombre de problèmes.

Cela étant dit, je le répète, madame Procaccia, nombreuses sont les communes de moins de 3 500 habitants qui ont des logements sociaux. Et heureusement pour les Français qui vivent en zone rurale !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.

Mme Jacqueline Gourault. Je veux simplement dire que l’on ne construit pas des logements sociaux seulement par obligation !

Mme Valérie Létard. Absolument !

Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, je retire l’amendement n° 7 rectifié pour ne pas obliger mes collègues qui ne sont pas concernés, telle Catherine Deroche, à le voter ! (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 7 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 72 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Claude Dilain, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 60 rectifié et 97.

M. Claude Dilain. Certains des amendements qui nous sont présentés visent à supprimer l’alinéa prévoyant de relever de 20 % à 25 % le seuil minimal de logements sociaux, tels ces deux amendements identiques, tandis que d’autres tendent à édulcorer la mesure.

Pensez, mes chers collègues, aux 1 700 000 personnes qui attendent un logement social ! Elles ont besoin d’une telle loi !

Pour ma part, j’ai été surpris de voir dès hier, lors de la discussion générale, combien la loi SRU d’origine avait repris du « poil de la bête » : maintenant, tout le monde la considère comme une référence ; on nous demande même d’y revenir ! Lorsqu’on se souvient des discussions qui ont précédé, dans cet hémicycle, le vote de cette loi, cela ne peut que nous remplir d’espoir : dans dix ans, madame la ministre, vous serez sans doute regardée par ceux qui critiquent aujourd'hui ce projet de loi comme le modèle à suivre en matière de logement social ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Certains de nos collègues veulent édulcorer la mesure proposée en prônant l’accession sociale.

Pour ma part, je suis très favorable à l’accession sociale, mais cela ne peut en aucun cas se faire au détriment du logement locatif social. Je pense que la promotion de l’accession sociale relève d’une autre démarche.

Par ailleurs, j’ai trop souvent entendu dire que tout va bien dès qu’on est propriétaire.

Mme Jacqueline Gourault. Ce n’est pas ce que nous avons dit !

M. Claude Dilain. D’autres que vous l’ont au moins laissé entendre ! Certains considèrent que, dès lors qu’on est propriétaire de son logement, on s’en occupe mieux parce qu’il s’agit de son patrimoine. C’est souvent vrai mais, malheureusement, ça ne l’est pas toujours et partout.

Les bailleurs sociaux disent connaître les familles auxquelles ils vendent des logements HLM. Mais il faut prendre garde, car on ne sait pas ce que deviendront ces familles dans un an, deux ans ou trois ans. Veillons donc à ne pas faire de l’accession sociale la solution miracle, d’autant que l’on risque d’inciter à acheter leur logement des familles qui sont déjà financièrement « ric-rac » et qui peuvent se retrouver, à la suite d’un accident de la vie – même pas forcément, d’ailleurs –, très endettées, donc dans l’incapacité de payer.

C’est pour cette raison que le groupe socialiste ne votera pas les amendements tendant à édulcorer le projet de loi.

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, pour explication de vote.

M. Christian Cambon. Je dirai un mot en réponse à l’intervention de M. Dilain pour lui apporter un éclairage sur les amendements déposés par l’opposition.

Effectivement, il n’y a plus grand monde pour s’opposer à l’application de la loi SRU. Notre collègue Christian Favier a cité tout à l'heure des chiffres qui nous interpellent. Cela tient, c’est vrai, à ce que des communes ont été, dans le passé, tout à fait hostiles à cette loi. Mais tous les maires, quelle que soit leur appartenance politique, sont sensibles aux demandes de logements sociaux émanant de jeunes ménages, de personnes rencontrant des difficultés ou souhaitant disposer d’un logement plus petit en raison d’une diminution de leurs ressources.

En revanche, en défendant, comme l’ont fait nos collègues Daniel Dubois et Jacqueline Gourault, l’accession sociale à la propriété, nous avons souhaité vous démontrer qu’il ne faut pas agir de manière idéologique et sectaire dans ce domaine. Il convient de considérer toutes les possibilités, et l’accession sociale à la propriété répond bien à un certain nombre de besoins.

De la même manière, nous avons dit au cours de ce débat que certaines personnes, dont le niveau de vie a progressé – et c’est une bonne chose – ne doivent plus disposer d’un logement social. Or le projet de loi ne répond pas à ce problème.

Nous avons été nombreux à demander plus de fluidité lors des débats précédents ; je pense notamment au débat sur la loi portant engagement national pour le logement. Certes, des pénalités ont été mises en œuvre, mais nous savons bien qu’une partie de notre parc social est occupée par des personnes qui pourraient être orientées, dans le cadre du parcours social de l’habitat, vers l’accession sociale à la propriété.

J’ajoute que certains maires veulent bien faire, mais ne peuvent rien faire. Plusieurs de nos collègues ont évoqué la situation de maires de villes et de villages. En tant qu’élu du Val-de-Marne, j’aborde évidemment les mêmes problématiques que ma collègue Catherine Procaccia. Dans certaines villes plus importantes – je pense au Perreux, par exemple –, il faudrait détruire purement et simplement des quartiers dans un délai extrêmement court pour se mettre en conformité avec les exigences de la loi.

Madame la ministre, il s’agit là d’amendements d’appel. J’ai dit précédemment lors de l’examen d’un amendement qui a été adopté par l’ensemble du Sénat qu’une immense majorité des maires étaient conscients de ces difficultés et voulaient contribuer à la réalisation de cet objectif. Toutefois, il faut aussi entendre les maires qui ne sont matériellement pas en situation de faire cet effort. J’en parle d’autant plus facilement que je suis le maire d’une commune qui va bien au-delà des 20 %. Mais tous n’ont pas cette possibilité. Le devoir du Sénat est de faire entendre les préoccupations de ces maires-là.

M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.

M. Daniel Dubois. Non, madame la ministre, je ne suis pas contre ce projet de loi. Lorsque j’ai défendu tout à l'heure l’amendement n° 60 rectifié, j’ai bien dit que je le rattachais aux deux amendements suivants relatifs à l’accession sociale à la propriété.

Je considère que le parcours résidentiel est un élément essentiel, comme cela vient d’être dit, et j’y intègre, avec un délai de dix ans, les locataires qui achètent un logement à leur bailleur social. Je ne vois pas en quoi c’est incohérent. Tout le monde a envie, à un moment donné, d’accéder à la propriété après avoir habité un logement locatif. Cela ne me choque pas du tout.

En tant que président d’une communauté de communes, je ne suis en aucun cas tenu par l’article 55 de la loi SRU. Pourtant, j’achète des terrains que j’attribue aux organismes d’HLM, et je donne 10 000 euros par logement pour construire des logements locatifs. Je suis donc tout à fait conscient de la nécessité de proposer des logements locatifs dans nos communes, c’est une évidence, et je crois à la mixité.

Cela étant, le seuil passe de 20 % à 25 % et les pénalités remontent au niveau national. Or ce sont les élus qui financent aujourd'hui en grande partie le logement social. Des collègues l’ont souligné tout à l'heure : au-delà du financement du logement social, il faut également financer les services publics, les écoles, etc. L’État commande et les communes paient ! À un moment donné, cela mérite discussion ! (Mme Valérie Létard et M. Hervé Marseille applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.

M. Joël Guerriau. Je voterai en faveur des amendements identiques nos 60 rectifié et 97.

Votre vision uniforme des communes de France selon laquelle tout le monde vit la même chose et les mêmes règles doivent s’appliquer à toutes est parfaitement illusoire. La réalité du terrain est tout autre.

Les difficultés que les uns et les autres rencontreront pour atteindre cet objectif ne sont pas de même nature. Il convient de prendre en considération ces particularités et de faire confiance aux maires. Il est essentiel d’adapter le texte qui nous est proposé.

Je regrette une fois encore que le temps nous ait manqué pour affiner ce texte de telle sorte que la règle retenue soit applicable par tous. Or tel n’est pas le cas. Des communes, quelle que soit leur bonne volonté, ne pourront pas respecter le quota. Je ne comprends pas cette manière jacobine d’agir uniformément, car elle est complètement contraire à la philosophie qui voudrait que les maires aient, avec les lois de décentralisation, de véritables capacités d’agir.

Car ces capacités, nous ne les avons pas : la préemption, c’est l’EPCI ; les agences foncières, c’est l’EPCI. Comment font les petites communes ? Et les communes intermédiaires ? Comment agissent-elles quand elles n’ont pas toutes les cartes en main et ne disposent pas de tous les moyens pour agir ?

On peut afficher sa bonne volonté, fixer des règles dans les PLU, y mettre tout ce que l’on veut, mais les résultats ne seront pas forcément au rendez-vous. Autrement dit, on se retrouve en situation d’être une société de services pour l’État. L’État se décharge d’une responsabilité et nous met à l’amende, mais on aura beau faire tout ce que l’on peut, on n’arrivera pas à atteindre le seuil fixé. Soyons réalistes ! Mettons en place des lois qui puissent être réellement exécutées afin qu’il n’y ait pas, d’un côté, des communes vertueuses et, de l’autre, celles qui ne le sont pas, alors même qu’elles ont toutes la même volonté, celle de réussir, car elles savent l’importance que revêt le logement social. (MM. Daniel Dubois et André Reichardt applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.

M. François Rebsamen. Je veux relever une avancée : aujourd'hui, si j’ai bien compris, plus personne ici ne conteste la portée historique de la loi SRU et de son article 55. C’est une grande avancée !

Tous nos collègues de l’opposition qui se sont exprimés semblent désormais remplis de bonnes intentions. Il n’empêche que, au cours de la dernière décennie, nous avons assisté à des reculs et, pour le moins, à des tentatives de porter atteinte à l’efficacité de l’article 55 de la loi SRU...

Tous se sont déclarés désireux de favoriser la construction de logements locatifs à loyer modéré. Nous ne pouvons que nous en féliciter.

Cependant, mieux vaut éviter de donner l’impression qu’on cherche à diminuer la portée du texte que nous sommes en train d’examiner. Or c’est bien ce qui se passe, alors que la loi SRU offre déjà, tout en étant très claire, une certaine souplesse. Nous devons dire franchement les choses.

Sur les petites communes de moins de 3 500 habitants, arrêtons les faux débats !

Les maires qui veulent faire du logement locatif en font parce qu’ils savent que leurs enfants ne sont pas forcément capables de devenir propriétaires du jour au lendemain. Et ils en ont parfois assez d’écrire à leurs collègues des communes avoisinantes pour leur demander de loger ceux qui ne peuvent l’être dans leur propre commune.

Chacun fait des efforts et en comprend la nécessité. Il y a une pédagogie de la construction du logement locatif à l’échelon de chaque commune.

Il y a aussi des documents d’urbanisme, qui permettent de fixer des règles. Celles des SCOT ne sont imposées par personne : les niveaux de construction de logements locatifs ne sont pas définis autrement que par le consensus et l’accord entre tous les maires.

Il y a enfin les besoins, dont l’ampleur a été rappelée avec force par notre collègue Claude Dilain. Nous devons répondre à cette attente forte, ce qui suppose nécessairement de fournir un effort supplémentaire de construction de logements locatifs.

On sait très bien qu’on peut trouver, ici ou là, tel ou tel cas particulier. Nous aurons sûrement l’occasion d’en reparler dans les prochaines années. Mais, de manière générale, nous manquons de logements locatifs à loyer modéré et nos concitoyens attendent qu’on en construise.

Les associations sont très vigilantes sur ce sujet, et elles ont raison. Je crois que leur action a contribué à faire évoluer les mentalités.

Aujourd’hui, le temps est venu de faire un nouveau pas en avant en portant le seuil à 25 %. Nous devons les uns et les autres essayer de nous conformer à cet objectif, en évitant de mener des batailles d’arrière-garde. Ce n’est d’ailleurs pas du tout l’état d’esprit que j’ai ressenti dans cet hémicycle.

M. Philippe Dallier. Merci de le reconnaître !

M. François Rebsamen. Mais cela pourrait arriver !

Aujourd’hui, nous prenons acte du consensus qui règne sur ces travées : une volonté commune existe de construire des logements locatifs à loyer modéré partout en France, de manière équilibrée et en respectant le principe de mixité. Nous voulons pour cela utiliser toutes les possibilités qui nous sont offertes.

Tout juste me faut-il regretter que, depuis dix ans, les aides de l’État aient autant diminué. Monsieur Dubois, c’est d’ailleurs un comble de vous entendre le faire remarquer aujourd’hui, alors que vous n’avez rien dit avant, quand ces aides diminuaient année après année et que les collectivités territoriales prenaient progressivement le relais…

C’est la raison pour laquelle le Président de la République et le Gouvernement nous proposent aujourd’hui que des terrains puissent être cédés avec des décotes importantes, voire intégrales. Il s’agit d’aider les collectivités territoriales, qui font aujourd’hui de gros efforts, et les organismes HLM à construire des logements locatifs.

À ce stade du débat, nous pouvons arrêter la discussion sur ces amendements – d’autres restent à examiner –, prendre acte du consensus qui nous rassemble et avancer dans le sens du projet de loi défendu par Mme la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

M. Ronan Dantec. Je souhaite répondre à Joël Guerriau.

Nous débattons depuis un certain temps maintenant de nombreux amendements qui sont fondamentalement dilatoires et dont le but est, Mme la ministre l’a souligné, de fragiliser la robustesse de la loi.

Nous l’avons dit, finalement, personne ne remet plus en cause la loi SRU. J’ai cité hier soir les propos tenus il y a dix ans par Gilles Carrez, qui parlait de « Gosplan » à propos de cette loi…

Aujourd’hui, il n’y a certes plus d’attaques frontales, mais, à bien écouter les propos des uns et les autres, on retrouve, de façon récurrente, des critiques que l’on entendait déjà voilà dix ans.

Je pense, par exemple, au discours sur la libre administration des communes qui est toujours à peu près le même et dont le seul objectif est d’affaiblir la loi.

Monsieur Guerriau, vous qui êtes maire et président d’une grande intercommunalité, vous savez très bien qu’un dialogue a lieu entre le maire et l’intercommunalité, de sorte que le logement n’est pas une compétence qui échappe à la commune.

Ce dialogue est au cœur de l’élaboration des PLU, même quand il s’agit d’une compétence communautaire, ce qui est le cas pour Nantes Métropole.

Par conséquent, maintenir à l’échelle de la commune l’objectif de 25 % revient à favoriser le dialogue entre les maires et l’intercommunalité, celle-ci n’étant jamais qu’un rassemblement de communes.

À la vérité, les amendements qui ont été présentés n’ont qu’un seul objectif : permettre à certaines communes d’échapper au seuil de 25 %.