Mme la présidente. L’amendement n° 568, présenté par MM. Placé et Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Par exception, en cas de durée de maintien des droits inférieure ou égale à trois mois, le salarié peut préférer bénéficier du maintien des garanties au titre des risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité sous la forme d’une adhésion volontaire et individuelle à une participation forfaitaire, égale au montant de sa participation sur une période égale à la période théorique de maintien, versée par l’employeur et dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Il est des cas où la couverture prévoyance prévue à l’alinéa 21 du présent article n’est pas nécessairement adaptée aux besoins des salariés en place.

Cet alinéa prévoit les conditions de couverture prévoyance pour les anciens salariés. Le maintien de ces garanties est lié à la durée d’indemnisation du chômage.

Le problème réside dans le fait que les salariés qui enchaînent les contrats courts devront effectuer de fréquentes démarches administratives et changer souvent d’organisme assureur, puisque cet organisme dépend directement de l’employeur.

Aussi, l’objet de cet amendement est de laisser aux salariés en CDD d’une durée égale ou inférieure à trois mois le choix entre le maintien des garanties et le versement d’une indemnité forfaitaire, laquelle lui permettra de s’assurer individuellement auprès d’un organisme assureur de son choix pour une période plus longue. À défaut, il devra, selon la durée de ses CDD, changer d’organisme assureur plusieurs fois dans l’année, ce qui complexifie le dispositif.

Cet amendement vise uniquement les contrats de courte durée pour les salariés qui le demandent expressément, afin de faciliter l’accès au maintien des garanties au titre des risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 221 rectifié et 568 ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Ces deux amendements, d’inspiration identique, tendent à faire en sorte que, dans certaines situations, notamment en cas de contrat de courte durée, l’employeur verse une indemnité supplémentaire à l’ancien salarié si celui-ci ne souhaite pas bénéficier du maintien des droits.

Cette proposition me paraît contraire à l’esprit même de l’accord puisque cette couverture complémentaire a vocation à donner des droits à portabilité précisément lorsque le contrat est rompu.

Par ailleurs, dans l’objet écrit du premier amendement, soutenu par M. Watrin après qu’il eut été repris par le groupe CRC, est évoquée la situation de salariés qui « s’assurent individuellement à l’année ». Or, dans ce cas, il ne peut y avoir de portabilité puisque ces salariés auront demandé une dispense d’affiliation : en l’absence de droits ouverts au moment où le salarié travaille au sein de l’entreprise, par définition, il ne peut y avoir prolongation des droits quand il n’y travaille plus. L’argumentaire n’a donc pas beaucoup de sens.

C’est la raison pour laquelle je demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. L’intention des auteurs des amendements est effectivement louable. M. Desessard sera certainement heureux de cette appréciation ! (Sourires.)

En fait, chacun cherche à mettre en place, par le biais de la portabilité d’un salarié licencié, toutes les solidarités possibles, et par ailleurs justifiées, nécessaires même, vis-à-vis des stagiaires, des jeunes chômeurs, etc. Mais, je vous le répète, ce n’est pas avec ce dispositif qu’on relèvera ce défi, sauf à charger encore la barque financière et des entreprises et des salariés !

La réponse, on la trouvera dans les dispositifs dont nous avons parlé, ceux que le Président de la République a annoncés, c’est-à-dire une universalité, quelles que soient les situations. Dés lors, les mécanismes de mutualisation et de solidarité porteront sur un spectre plus large que les seules entreprises et les seuls salariés.

L’idée qui sous-tend ces amendements est parfaitement recevable : il faut effectivement étendre progressivement la solidarité. Mais ne faisons pas porter aux seules entreprises et aux seuls salariés le poids de cette solidarité !

Ces amendements soulèvent par ailleurs des difficultés techniques, mais ce n’est pas cet aspect-là que je veux mettre en avant : nous ne sommes pas là pour parler de technique, en tout cas pas uniquement, mais avant tout pour bien nous comprendre.

Ici, nous proposons de faire le premier pas de la complémentaire santé. Puisqu’elle est liée au fait qu’on est salarié, elle est portée par les entreprises et par les salariés. Il y aura ensuite un deuxième, voire un troisième pas, pour en faire bénéficier tout le monde. La complémentaire santé sera, alors, portée par la solidarité générale, et non par les seules entreprises et par les seuls salariés.

Je me permets de vous exposer, de nouveau, ce raisonnement, qui me paraît être de bon sens, en vous demandant de ne pas chercher, à l’occasion de ce texte, à résoudre tous les problèmes de notre société. (Très bien ! sur plusieurs travées socialistes.)

Mme la présidente. Je suppose que l'amendement n° 221 rectifié est maintenu…

Mme Laurence Cohen. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, l'amendement n° 568 est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. Je le retire au profit de l’amendement n° 221 rectifié.

Je saisis cette occasion pour réagir aux explications de M. le ministre. Il a dit à deux reprises qu’il ne fallait pas « charger la barque ». Lors de la discussion générale, j’avais dit, pour ma part, que nous devions traverser l’océan dans un canot de sauvetage ! M. le ministre vient donc de m’apporter une confirmation ! (Sourires.)

En fait, monsieur le ministre, ce texte finit par mettre en relief les problèmes que posent les CDD de très courte durée. Et vous-même y êtes confronté ! C’est la difficulté de demain ! Cette précarité s’étend parce que les contrats de courte durée, le temps partiel, l’intérim, etc. sont, pour les entreprises, un moyen de faire face à la situation économique : pour elles, il s’agit d’une sorte de variable d’ajustement. Voilà pourquoi, tant que dure la crise, on ne sait pas comment combattre la précarité !

Ce que nous voulons souligner, c’est que le code du travail est rédigé pour des contrats à durée indéterminée, pour des gens qui restent longtemps dans la même entreprise. C’est en fonction de ce modèle que nous continuons à établir les règles qui régissent le travail. Or, dans la réalité d’aujourd'hui, celle de la crise, le modèle qui se met en place, qui tend à devenir dominant, c’est celui du contrat de courte durée, du contrat précaire.

Plutôt que d’attendre que tout le monde soit en CDI et bénéficie de la protection que procure ce type de contrats, nous préconisons une réflexion pour donner une stabilité sociale aux précaires et aux gens qui changent souvent d’employeur. Ce qu’ils vivent, c’est peut-être le fruit d’accidents économiques, mais ce ne sont plus des situations « accidentelles ».

Nous voulons donc attirer l’attention sur le risque d’exclusion du dispositif de toute une catégorie de personnes du fait de la précarité économique. Le patron va-t-il prendre le temps de faire les déclarations nécessaires pour le salarié qui ne restera que deux mois dans l’entreprise ? Quel sera le suivi des dossiers ?

Ce que nous proposons, c’est de donner une stabilité sociale, c’est-à-dire des garanties sociales, à ceux qui sont dans la précarité économique. Et je pense que c’est le bon raisonnement. On ne peut pas faire des lois seulement pour les gens qui ont un CDI ! Il faut aussi adapter les lois en pensant à ceux qui sont dans la précarité, à ceux qui ont des contrats de travail de courte durée. (M. Jean-Vincent Placé applaudit.)

Mme Laurence Cohen. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 568 est retiré.

La parole est à M. le ministre.

M. Michel Sapin, ministre. Je prends la parole même si j’ai le sentiment de ramer en vain ! (Sourires.)

M. Michel Sapin, ministre. J’ai tout de même l’impression d’avoir du mal à faire entendre mes arguments !

Monsieur Desessard, toutes les remarques que vous faites sont fondées. Il y a des gens qui sont actuellement dans une situation économique déplorable et qui méritent, en effet, plus de solidarité encore que n’en offrent les mécanismes existants.

Mais la question que je me pose n’est pas de savoir s’il faut mettre en place de nouveaux mécanismes de solidarité – bien sûr qu’il faut le faire, et nous le ferons ensemble, avec le gouvernement « socialo-écolo » que vous évoquez toujours avec beaucoup d’enthousiasme –, elle est de savoir qui va les financer.

Vous voulez faire financer toutes les difficultés par les seules entreprises et les seuls salariés. Cela ne marchera pas ! En effet, c’est faire peser sur une partie de l’économie et sur une partie des Français le financement de tous les problèmes à résoudre. La bonne manière de procéder, c’est d’en appeler à la solidarité nationale. Ces questions doivent être abordées ainsi plutôt qu’en sollicitant exclusivement les entreprises et les salariés.

M. Michel Sapin, ministre. J’ai à nouveau exposé mon raisonnement pour vous sensibiliser à notre préoccupation, monsieur Desessard, même si vous n’en tenez pas compte dans votre vote, ce que je peux tout à fait comprendre. Il ne s’agit pas, pour nous, d’opposer les plus généreux aux moins généreux. Notre préoccupation, c’est de savoir quel est le bon mécanisme de mutualisation et de solidarité. Et celui que vous proposez ne nous paraît pas être le bon.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote sur l’amendement n° 221 rectifié.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’entends bien l’argument de M. le ministre, qui est parfaitement recevable quand on raisonne sujet par sujet. Toutefois, pour celles et ceux qui trouvent que cet accord n’est pas tout à fait équilibré, autrement dit qu’il est surtout défavorable aux salariés, il y a plusieurs sujets qui font un « paquet ».

Dès lors qu’on n’augmente pas la taxation sur les contrats précaires, par exemple sur les contrats d’intérim, de manière à rendre réellement la précarité plus coûteuse pour les entreprises, conformément aux engagements qui avaient été pris par le Président de la République, c’est qu’on renonce à « internaliser » au niveau de l’entreprise la prise en compte de la précarité.

Or, en dégageant ainsi l’entreprise, on accroît les déficits publics au nom d’une solidarité nationale qui devient une sorte de « voiture-balai » de l’incurie du droit social en France.

Prévoir un dispositif de portabilité d’un certain nombre de droits dans l’entreprise concourt à l’objectif final de rendre plus coûteuse la mise en place de la précarité, source de fragilité.

Cet amendement ne peut se comprendre que mis en perspective avec un ensemble de propositions qui visent à renchérir le coût de la précarité, de façon à la faire reculer, et faire en sorte que les droits des travailleurs précaires, à temps partiel, en intérim, etc. se rapprochent de plus en plus de ceux des autres salariés.

J’entends tout à fait la logique exposée par M. le ministre, qui répond à une préoccupation réelle. Je comprends le point de vue du Gouvernement, qui n’est pas du tout insensible à ces problèmes. Simplement, il y a, entre le Gouvernement et les auteurs de ces amendements, un léger écart de conception quant à la manière de faire porter la charge de la lutte contre la précarité et du maintien des droits pour les travailleurs précaires.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 221 rectifié.

J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public, émanant, l'une, du groupe CRC, l'autre, du groupe socialiste.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 190 :

Nombre de votants 175
Nombre de suffrages exprimés 175
Majorité absolue des suffrages exprimés 88
Pour l’adoption 33
Contre 142

Le Sénat n’a pas adopté.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 571, présenté par MM. Desessard et Placé, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° En cas de reprise d’une activité de durée inférieure à douze mois mettant fin à une période de maintien de garantie, l’ancien salarié bénéficie, à l’issue de sa nouvelle période de maintien, de la reprise du maintien de ses garanties au titre du précédent emploi, jusqu’à la date initialement prévue. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Cet amendement vise à créer un « droit rechargeable » à la prévoyance, à l’instar de ce que prévoit l’article 6 en matière d’assurance chômage. Nous proposons de rendre le maintien des garanties de prévoyance plus protecteur pour les chômeurs.

Aux termes de la rédaction actuelle de l’article 1er, un salarié qui se fait licencier ou quitte son emploi voit sa garantie prévoyance maintenue pendant une durée proportionnelle à celle de son dernier contrat de travail, dans la limite de douze mois.

Pour illustrer mon propos, je prendrai l’exemple d’un salarié qui, après être resté en poste pendant dix ans, se retrouve du jour au lendemain au chômage. Ce salarié bénéficiera du maintien de sa garantie prévoyance pendant une période de douze mois. Toutefois, s’il a l’opportunité d’effectuer un CDD de trois mois quelques semaines après la perte de son ancien emploi, au terme du CDD, le maintien de sa garantie prévoyance sera calculé sur la base de ces trois mois, et il perdra le maintien des garanties assuré par son ancien emploi.

Le manque à gagner peut donc avoir des effets « désincitatifs » à la reprise de l’emploi, surtout pour les personnes qui ont des difficultés à en retrouver un et qui sont plus exposées aux risques de la vie, comme les seniors.

Pour remédier à cette carence du texte, nous proposons d’instaurer une sorte de « droit rechargeable » au maintien des garanties : le chômeur pourra bénéficier de la reprise de l’ancien maintien de ses droits jusqu’à la date initialement prévue, afin de ne pas pénaliser la reprise du travail.

Mme la présidente. L’amendement n° 224, présenté par Mme Lienemann et MM. Courteau et Povinelli, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ...° En cas de reprise d’une activité de durée inférieure à douze mois mettant fin à une période de maintien de garantie, l’ancien salarié pourra éventuellement demander à bénéficier, à l’issue de sa nouvelle période de maintien, de la reprise du maintien de ses garanties au titre du précédent emploi, jusqu’à la date qui avait été initialement prévue. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 224 est retiré.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 571 ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement part d’une idée très intéressante : créer un « droit rechargeable » au maintien des garanties pour les anciens salariés qui se retrouvent au chômage, à l’instar de ce qui est prévu pour l’indemnisation du chômage.

Or il s’agit de deux situations très différentes, et le régime d’indemnisation du chômage est unique.

Le droit que vous proposez de créer, monsieur Desessard, serait très complexe à mettre en place, car les organismes assureurs, voire les conventions collectives, ne sont pas les mêmes. Cela rendrait la gestion d’un tel mécanisme quasiment impossible. En effet, des droits pourraient encore être ouverts longtemps après que le salarié a quitté une entreprise. Par ailleurs, un salarié peut cumuler, de manière discontinue, plusieurs CDD dans différentes entreprises : dans ce cas, quelle « portabilité » appliquer ? Je ne vois pas comment nous pourrions, à ce jour, surmonter ces difficultés techniques.

J’ajoute que cette question de la durée des droits à la complémentaire santé sera utilement étudiée dans le cadre du rapport demandé par le Gouvernement au Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie.

Je vous invite donc, mon cher collègue, à retirer votre amendement, au regard à la fois de l’impossibilité pratique de mettre en œuvre cette portabilité que vous appelez de vos vœux et de l’ouverture pour l’avenir de perspectives au titre de la solidarité nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Je partage l’avis du rapporteur.

Tout d’abord, cet amendement, qui part d’une très bonne intention, est inapplicable. Le dispositif proposé est en effet d’une extraordinaire complexité et n’aboutirait pas au résultat souhaité. Même si nous n’avons pas vocation à évoquer seulement les difficultés techniques, il me semblait utile de souligner ce point.

Ensuite, je le répète, nous ne sommes pas là pour régler tous les problèmes.

Comme je l’ai rappelé au début de notre discussion, nous réfléchissons globalement, à la demande de la ministre des affaires sociales et de la santé, aux mécanismes de solidarité qu’il serait nécessaire de mettre en place dans divers domaines.

Votre démarche consiste une fois encore, monsieur Desessard, à pointer du doigt un problème précis et à tenter de le résoudre au travers de ce texte, et de lui seul. Non ! Je propose plutôt que nous engrangions tous ces cas en vue de les examiner de façon globale.

Ici, nous traitons des salariés dont le cas n’est pas extraordinairement compliqué, même si nous répondons déjà à des situations très compliquées. Si nous cherchons à traiter toutes les situations dans ce texte, nous n’y arriverons pas ! D’ailleurs, techniquement, votre amendement ne le permet pas.

C’est la raison pour laquelle, tout en prenant bonne note de votre préoccupation, dont je vais faire part à mes collègues du Gouvernement, et en particulier au ministre chargé de ces questions, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Desessard, l’amendement n° 571 est-il maintenu ?

M. Jean Desessard. Nous sommes là au cœur du problème !

Il ne s’agit pas d’une question technique, monsieur le ministre. Derrière cela, il y a une question d’idéologie. Moi, je considère que nous devons prendre le temps, aujourd'hui, de résoudre les problèmes des précaires !

Vous me dites qu’il y a les problèmes de l’ensemble des salariés et que, pour eux, nous pouvons prendre dès maintenant des mesures sans que cela pose trop de difficultés. Mais voyons le cas de quelqu’un qui a travaillé un an, qui bénéficiera donc du droit à la prévoyance sur douze mois. S’il est au chômage pendant trois mois, puis retrouve un travail durant deux mois, doit-on calculer la prévoyance sur la base de son dernier contrat ? Ce serait injuste ! Sans compter que les personnes concernées sont des précaires, qui connaissent d’ores et déjà bien des difficultés...

Sous prétexte que c’est compliqué, vous nous dites que l’on verra plus tard… Mais c’est aujourd’hui que se pose le problème crucial de la précarité ! Nous ne devons donc pas attendre demain pour le résoudre !

C’est justement la complexité de ce problème qui justifie que l’on y prête une attention toute particulière. Voilà tout le sens de mon intervention précédente et de celle-ci !

Il faut un changement de mentalité.

J’ajouterai même, au risque d’être en désaccord avec vous, que les partenaires sociaux raisonnent encore trop par grandes masses de salariés. Ils ne prennent pas suffisamment en compte, parce qu’il s’agit en effet d’un problème techniquement difficile, ces précaires qui passent d’un boulot à l’autre et qui, par la force des choses, sont moins syndiqués. Où pourraient-ils l’être, d’ailleurs ? Dans quelle entreprise ? Du reste, se syndiquer, s’organiser, ils n’en ont pas le temps ! Combien d’articles et de livres ont montré qu’il était extrêmement difficile pour les précaires de chercher un emploi, qu’ils consacraient autant de temps à leurs déplacements qu’au travail lui-même.

L’idée qui sous-tend votre raisonnement, monsieur le ministre, c’est que cette situation est une anomalie. À vous entendre, le gouvernement de gauche et « écolo » va résoudre le problème et, une fois la croissance revenue, dans quelques années, chacun aura un CDI… Dans ces conditions, pourquoi s’embêter à prendre, pour deux ou trois ans, des mesures partielles, spécifiques aux précaires, et difficiles à mettre en place ?

Tout en soutenant ce gouvernement et en souhaitant que l’on tende vers cette issue, je considère que la précarité économique n’est pas près de disparaître, et qu’elle va même s’accroître.

M. Jean Desessard. On ne peut pas, chaque fois qu’il est question des précaires, dire que ce problème est difficile et que l’on ne sait pas comment faire ! C’est précisément de cela qu’ils souffrent ! On ne prend pas le temps de donner des réponses sociales à cette difficulté nouvelle que l’on n’a pas l’habitude de traiter.

Mme Catherine Génisson, rapporteur de la délégation aux droits des femmes. Vous ne pouvez pas dire cela !

M. Jean Desessard. Le message que je veux faire passer à travers de cet amendement, c’est qu’il faut accorder de l’importance à la question de la précarité et donner les mêmes droits aux précaires qu’aux autres salariés. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)

Mme la présidente. Dois-je penser que vous ne retirez pas votre amendement, monsieur Desessard ?...

M. Jean Desessard. Ai-je été si peu clair, madame la présidente ? (Sourires.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 571.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 191 :

Nombre de votants 176
Nombre de suffrages exprimés 174
Majorité absolue des suffrages exprimés 88
Pour l’adoption 33
Contre 141

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 225, présenté par Mme Lienemann et MM. Courteau et Povinelli, est ainsi libellé :

I. - Après l'alinéa 27

Insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé :

« ...° En cas de reprise d’une activité à temps partiel, conciliable avec le maintien d’une indemnisation partielle de l’assurance chômage, l’ancien salarié conservera au prorata de non-activité le bénéfice du maintien des garanties liées aux risque décès, ou aux risques d’incapacité de travail ou d’invalidité.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je retire cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 225 est retiré.

L'amendement n° 572, présenté par MM. Placé et Desessard, Mme Archimbaud et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° En cas de cessation de l’indemnisation chômage en cas de décès, Pôle emploi informe par courrier les ayants droit de l’existence du dispositif prévu au présent article.

La parole est à M. Jean-Vincent Placé.