M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui restreindrait considérablement le champ de la mesure. Nous voulons au contraire optimiser l’impact de ce dispositif.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mme Debré et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

« Le salarié remet au teneur de compte une déclaration sur l’honneur mentionnant l’usage précis des avoirs dont il demande le déblocage. »

II.- Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

« Le salarié remet au teneur de compte une déclaration sur l’honneur mentionnant l’usage précis des avoirs dont il demande le déblocage. »

III.- Alinéa 11

Remplacer le mot :

salarié

par les mots :

teneur de compte

La parole est à Mme Isabelle Debré.

Mme Isabelle Debré. Cet amendement vise à préciser les démarches incombant au salarié avant le déblocage des avoirs par le teneur de compte.

Il tend également à faire du teneur de compte l’interlocuteur unique de l’administration fiscale en cas de contrôle portant sur l’usage des sommes débloquées.

Nous proposons, en premier lieu, que le teneur de compte débloque les avoirs détenus par le salarié sur simple présentation d’une déclaration sur l’honneur mentionnant l’utilisation des sommes qui lui seront versées.

Nous proposons, en second lieu, que le teneur de compte soit le détenteur des factures correspondant aux achats effectués par le salarié en cas de contrôle – rappelons que le teneur de compte est soumis au secret professionnel, comme toutes les banques.

M. le ministre l’a rappelé, l’ambition de cette proposition de loi est de faire que ces sommes débloquées soient utilisées pour réaliser des achats relativement importants – vous avez évoqué des projets d’ensemble comme une cuisine, mais on peut aussi citer tous types de travaux dans l’immobilier, l’achat d’une automobile ou d’un gros appareil électroménager – plutôt que pour acquérir une multitude de petits produits, souvent importés, ce qui ne résoudrait en rien le problème de l’emploi dans notre pays et pourrait accentuer notre déficit commercial.

Cette mesure faciliterait aussi un éventuel contrôle : comme l’ont souligné plusieurs de nos collègues, il me semble aussi impossible pour le salarié de garder toutes ses factures et facturettes que pour le contrôleur de toutes les contrôler.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteur. La commission a constaté que cet amendement aurait pour conséquence de complexifier considérablement le dispositif de contrôle applicable à la mesure de déblocage introduite par nos collègues députés, sans pour autant accroître son efficacité.

D’une part, en amont de la procédure, il prévoit de subordonner le déblocage des fonds à une déclaration sur l’honneur auprès du teneur de compte, précisant l’usage des sommes débloquées. D’autre part, une fois le déblocage effectué, il tend à imposer aux teneurs de compte de garder à la disposition de l’administration fiscale, non seulement la déclaration sur l’honneur, mais aussi l’ensemble des pièces justificatives attestant l’usage des sommes débloquées, y compris les facturettes évoquées par Mme Debré.

Ce dispositif pose un certain nombre de questions : quelle est la valeur juridique d’une déclaration sur l’honneur ? À quel moment et dans quelles conditions le salarié devra-t-il transmettre les pièces justificatives attestant l’usage des sommes débloquées aux teneurs de compte ? Les contraintes supplémentaires imposées aux teneurs de compte – gestion, archivage, classement des millions de justificatifs potentiels – sont-elles justifiées ?

Compte tenu de ces interrogations et de la lourdeur qu’entraînerait en l’état la mise en place d’un tel mécanisme de contrôle, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Certains dispositifs de déblocage de l’épargne salariale ont fonctionné, d’autres moins bien. Tout excès de formalisme risque de compromettre la réussite du dispositif, qui vise à débloquer de l’argent.

L’Assemblée nationale a souhaité mettre en place un système de contrôle sous la forme de l’obligation pour le salarié de conserver les justificatifs de son usage des fonds, qui peuvent être exigibles dans n’importe quel contrôle de l’administration fiscale. Nous estimons que cette mesure est suffisante, sauf à alourdir encore un dispositif dont nous souhaitons qu’il reste le plus simple possible, afin de permettre de débloquer le plus possible d’épargne salariale.

Mme Isabelle Debré. C’est donc un avis défavorable !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. En conséquence, l'avis est en effet défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 7, présenté par MM. Vanlerenberghe, Marseille et Amoudry, Mme Dini et MM. Roche et Zocchetto, est ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Supprimer les mots :

l'achat d'un ou plusieurs biens ou

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. L’objet de cet amendement est de concentrer le dispositif du déblocage exceptionnel sur la fourniture de services en excluant l’achat de biens manufacturés. Autrement dit, il faut favoriser l’investissement et non espérer relancer la croissance par la consommation. Sinon, au lieu de relancer l’investissement, le déblocage de la participation et de l’intéressement pourrait contribuer à le fragiliser davantage en privant les entreprises de fonds propres.

Dans ces conditions, il faut a minima s’assurer que les fonds débloqués servent pleinement à alimenter l’économie nationale et qu’ils ne soient donc pas détournés de leur objet.

Pour éviter cet écueil, nos collègues députés ont limité l’usage des sommes débloquées. C’est une première assurance, incontestablement, mais nous pensons qu’il faut aller plus loin, pour que chaque euro débloqué soutienne pleinement l’économie nationale en ciblant la mesure sur la fourniture de services, donc en excluant l’achat de biens manufacturés du champ d’application du dispositif.

En effet, par définition, les services ne sont pas délocalisables, et ce serait un premier signal tangible en direction de secteurs aussi cruciaux que ceux du bâtiment ou des services à la personne, ce dernier étant souvent géré, d’ailleurs, par des associations relevant de l’économie sociale et solidaire.

Ces deux secteurs ont jusqu’ici été très durement affectés par la politique menée par votre majorité, alors qu’ils recèlent un potentiel de croissance et d’emploi considérable. Ils méritent donc à présent d’être substantiellement soutenus.

Au contraire, si on ne le contrôlait pas, l’achat de biens manufacturés contribuerait à la dégradation de la balance commerciale, nombre desdits produits étant importés.

Vous nous répondez qu’il s’agit de soutenir la grande distribution, qui crée des emplois en France. Nous l’entendons, mais, à ma connaissance, la grande distribution n’est pas en crise, alors que la France l’est…

Mme Isabelle Debré. Absolument !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Il est aussi allégué que la mesure a pour objet de soutenir le secteur automobile. J’entends bien, mais, soyons francs, le dispositif est bien trop modeste pour avoir un impact sur la croissance durable de ce secteur.

Mais je m’adresse à vous, monsieur le ministre, vous qui avez à cœur de faire voter cette proposition de loi : nous serions peut-être prêts à faire une exception pour l’automobile, et à examiner une modification de la rédaction du texte transmis qui limiterait l’achat de biens à l’automobile… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Quoi qu’il en soit, il s’agit pour nous d’un amendement important, qui reflète une certaine logique du développement de l’économie visant à préserver l’emploi, et l’emploi durable en France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteur. Cet amendement part d’une intention louable, puisque, en l’état du texte, les sommes débloquées peuvent effectivement pour partie financer l’acquisition de biens d’importation. Pour autant, il nous apparaît trop restrictif, pour plusieurs raisons.

Il réduirait tout d’abord à néant l’objectif essentiel de la mesure, qui consiste à relancer la consommation des ménages, notamment à l’heure où celle-ci atteint un point bas historique.

Il décevrait ensuite les attentes de la plupart de nos compatriotes, qui souhaitent utiliser cette épargne pour s’équiper comme ils l’entendent.

Il ferait enfin sortir du champ de la mesure des pans entiers de notre industrie et donc de notre économie, à commencer par l’automobile, que vous avez citée, ou le commerce de proximité, susceptible de bénéficier des sommes libérées à l’occasion du déblocage.

Historiquement, aucune des mesures de déblocage précédentes, dont on a pourtant évoqué l’efficacité, n’a été assortie d’une telle restriction.

En conséquence, l'avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous l’aurez anticipé, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Imaginons, pour changer d’exemple, que je veuille profiter de mon épargne salariale pour faire construire une véranda. Je pourrais utiliser les fonds débloqués pour payer la main-d’œuvre, qui relève d’une prestation de service, mais pas la fourniture de l’équipement ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Non ! C’est une prestation globale !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. La main-d’œuvre est certes considérée comme une prestation globale, mais vous n’auriez pas la possibilité d’utiliser l’épargne salariale pour acheter l’équipement – les meubles, le réfrigérateur et la cuisinière dans le cas d’une cuisine, pour prendre un autre exemple.

M. Jacques Chiron. Très bien !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous avez par ailleurs évoqué la grande distribution, monsieur le sénateur. Mais elle n’est pas la seule concernée par cette mesure. Des dizaines de milliers d’emplois, dans l’économie nationale, sont en effet liés à la vente et à la commercialisation de produits importés. Le fait de soutenir aujourd’hui l’achat d’un bien permet aussi de soutenir ces emplois-là, et il ne nous revient pas d’établir une hiérarchie entre un emploi dans la grande distribution, le commerce ou le petit commerce – on y vend des biens d’équipement - et un emploi dans l’industrie, au motif que tel ou tel produit serait importé.

Il m’est donc difficile de vous donner raison, monsieur Vanlerenberghe, y compris sur la proposition – un sous-amendement ? - que vous formulez pour les véhicules français.

En effet, si nous voulons que la mesure ait un impact, elle doit concerner les biens d’équipement et les services, sauf à rater sa cible, la consommation des ménages, dont la relance favorisera l’emploi. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.

M. François Rebsamen. Je comprends l’esprit de votre amendement, monsieur Vanlerenberghe, qui vise à orienter les sommes débloquées vers la fourniture de services non délocalisables.

L’impact de ce déblocage ne sera pas forcément insignifiant sur l’économie française. Quand on en est à rechercher des petits dixièmes de point de croissance, des demi-points de PIB, tout ce qui concourt à relancer la consommation et, partant, l’activité économique au sens large est bienvenu.

Une chose m’échappe toutefois : lorsque des mesures similaires ont été adoptées dans le passé, vous n’avez pas cherché à en limiter ainsi la portée. Vous pouvez certes proposer cette limitation aujourd’hui, mais, étant donné que les dernières mesures de ce type datent, me semble-t-il, de 2008 – les premières remontent quant à elles à 1994 – est-ce à dire qu’il s’agissait à l’époque de mauvaises mesures ?

Lorsqu’on constate une panne de croissance liée à un défaut de consommation, et alors que la situation est difficile, il est normal de permettre à la consommation de repartir.

Au demeurant, la démonstration que vient de livrer M. le ministre me semble assez juste, mon cher collègue. Pour reprendre l’exemple de la véranda, il est difficile de penser que le salarié aura besoin de débloquer sa participation pour les travaux, mais qu’il aura par ailleurs les moyens d’acheter tout le matériel nécessaire à son installation.

Parce que cette mesure devrait nous rassembler, ne pouvons-nous réfléchir à la rédaction d’un sous-amendement qui pourrait prendre en compte les préoccupations qui se sont exprimées ? On ne peut pas écarter les biens de consommation courante et les biens d’équipement, mais on pourrait préciser que ce sont notamment les services qui sont concernés.

En revanche, il n’est pas envisageable de réserver le déblocage de la participation et de l’intéressement à l’achat de biens français – vous ne l’avez d'ailleurs pas demandé, et je ne vous fais aucun procès d’intention –, cela serait contraire aux règles de libre concurrence. Cependant, rien n’empêche d’acheter des véhicules français, surtout s’ils ont été produits en France. La mesure que propose le Gouvernement est d'ailleurs attendue par les constructeurs automobiles français qui produisent en France.

J’essaie de trouver un point d’accord entre nous. Peut-être qu’un sous-amendement pourrait préciser que la mesure concerne notamment les services. Nous devrions parvenir à un accord. En tout cas, c’est le sens de mon intervention.

Mes chers collègues, tout concourt à tout dans l’économie. Les propos de M. le ministre sont tout à fait justes : il n’existe pas de « sous-emplois », il y a seulement des emplois créés ou maintenus par l’activité économique et commerciale. Je pense que le déblocage de la participation et de l’intéressement peut y contribuer. Ce ne sera certes pas une révolution, mais tout compte, en ce moment. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. J’entends bien ce que nous dit le président du groupe socialiste. L’UDI-UC est, quant à lui, tout à fait ouvert à la discussion, pour peu que M. le ministre soit prêt de son côté à revoir son texte. Jusqu’à présent, il nous a donné le sentiment que la rédaction en était intangible à ses yeux, qu’il la considérait comme l’alpha et l’oméga et qu’il fallait donc accepter le texte tel quel si l’on approuvait un dispositif apparemment exemplaire. Or nous savons pertinemment qu’il comporte des dangers ; nous venons d'ailleurs de vous les rappeler. Cependant, nous sommes également conscients qu’il faut maintenir, ou du moins sauvegarder l’emploi. C'est la raison pour laquelle j’ai évoqué le secteur automobile.

Monsieur le ministre, je reviens sur vos propos au sujet des services. Quand on fait appel à un artisan pour installer une véranda, il peut fournir la véranda. L’achat de cette dernière peut donc être comptabilisé comme faisant partie de la prestation de service. L’achat et l’installation constituent une prestation globale. Il en va de même pour les cuisines, que vous avez citées tout à l'heure. Là encore, il s'agit d’une prestation globale ; je peux vous le dire d’expérience. (Mme Christiane Demontès s’exclame.) Les produits sont compris dans la prestation, je vous l’assure. Tout dépend de l’interprétation que l’on fait des notions de services et de biens d’équipement.

Vous dites que vous voulez favoriser le commerce de proximité. Soyons sérieux : à moins qu’il ne s’agisse d’un tour de passe-passe pour protéger une autre épargne, on ne va pas débloquer 5 000 ou 8 000 euros pour acheter des choux et des carottes au marché du coin… (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Monsieur Rebsamen, je suis tout disposé à examiner, avec mon groupe et peut-être avec d’autres, un amendement qui irait dans le sens de notre proposition.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je demande une suspension de séance, monsieur le président.

M. le président. Le Sénat va, bien sûr, accéder à votre demande, monsieur le ministre.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt heures dix.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. J’ai profité de cette suspension de séance pour me rapprocher de M. Rebsamen et de Mme Demontès.

Monsieur le ministre, j’ignore si vous donnerez un avis favorable à la rectification de l’amendement que je compte proposer, mais il s’agirait de cibler le secteur automobile pour que le déblocage de la participation et de l’intéressement puisse servir à financer l’achat d’un ou plusieurs biens, « notamment dans l’automobile ». (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Vous avez souligné vous-même que ce secteur était en difficulté. Or la mesure que nous proposons favoriserait l’achat d’automobiles fabriquées en France, car, qu’elles soient fabriquées par une entreprise française ou par une entreprise étrangère, c’est bien l’emploi français qui en bénéficierait. Cela correspond à l’ambition de notre amendement initial : défendre l’emploi non délocalisable.

Je ne dis pas que l’amendement ainsi rectifié est parfait, loin de là, mais je pense que l’on peut lui donner sa chance. Nous évaluerons ensuite le dispositif, comme le prévoit l’article 1er bis de la proposition de loi. Nous verrons alors si nous obtenons un meilleur résultat qu’en 2004 et 2008. Je rappelle que le déblocage est une mesure one shot, elle ne peut valoir qu’une seule fois. Nous pourrons donc en mesurer assez rapidement – sans doute dès 2014 – les effets.

M. le président. Il s’agirait donc d’un amendement n° 7 rectifié qui, au lieu de supprimer les mots : « l’achat d’un ou plusieurs biens ou », aux alinéas 1 et 2 de l’article 1er, compléterait ces mêmes alinéas par les mots : «, notamment dans l’automobile ».

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Exactement : nous ne retranchons plus rien du texte initial, nous le complétons.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, la commission ne s’est pas réunie pour examiner cette proposition. Or l’amendement, ou le sous-amendement, présenté par M. Vanlerenberghe est complètement différent de l’amendement n° 7.

Je ne sais d’ailleurs pas s’il est possible de sous-amender ici, puisque, en l’espèce, M. Vanlerenberghe propose de compléter des alinéas dont il demandait initialement de retrancher certaines mentions. Peut-on dire encore qu’il s’agit d’un sous-amendement ? Pour ma part, il me semble que nous sommes plutôt en présence d’un nouvel amendement. Or je crois savoir qu’un groupe ou un sénateur isolé n’a pas la possibilité d’en déposer un en séance.

En tout cas, je pense que la commission doit prendre le temps de regarder cette proposition de près, qui modifie considérablement le texte de l’amendement initial.

M. le président. Madame la présidente, il s’agissait plutôt de la rectification d’un amendement.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je n’ai pas la science parlementaire qui est la vôtre, mais, à mon sens, vous pourriez, mesdames, messieurs les sénateurs, rejeter l’amendement initial n° 7, présenté par le groupe UDI-UC, et adopter un amendement, que le Gouvernement déposerait, reprenant la préoccupation de M. Vanlerenberghe, que je tiens d’ailleurs à remercier, en faveur du secteur automobile.

Mme Christiane Demontès. Ce sera un amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Nous n’avons pas besoin de rejeter l’amendement n° 7 : je le retire, à charge pour le Gouvernement d’en déposer un reprenant notre préoccupation, ce qui réglera le problème de procédure que vous avez à bon droit soulevé, madame la présidente de la commission.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Le Gouvernement dépose en effet un amendement en ce sens, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 7 est retiré et je suis saisi d’un amendement n° 9, présenté par le Gouvernement, ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Après les mots :

l'achat d'un ou plusieurs biens

Insérer les mots :

, notamment dans le secteur de l'automobile,

La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.

Mme Isabelle Debré. Pardonnez-moi, mais je ne vois pas ce que cet amendement va apporter au texte. Il s’agit de « financer l’achat d’un ou plusieurs biens ». Pourquoi préciser «, notamment dans le secteur de l’automobile » ? La précision est superfétatoire. Dans ces biens figure naturellement l’automobile. Pourquoi ne pas ajouter aussi les cuisines, l’électroménager, les voyages ? Autant en rester au texte de l’article 1er tel qu’il nous a été transmis.

M. Gérard Bailly. C’est vrai !

M. Jean-Noël Cardoux. C’est ce que l’on appelle un vœu pieux !

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.

M. François Rebsamen. Sur la procédure, la bonne solution a été trouvée avec le dépôt d’un amendement par le Gouvernement.

Sur le fond, madame Debré, l’adverbe « notamment » a un sens, et il n’est pas besoin de procéder à une énumération exhaustive.

Nous savons que le secteur de l’automobile est aujourd’hui particulièrement touché, et l’industrie en général.

Mme Isabelle Debré. Et le bâtiment ?

M. François Rebsamen. Non, pour le bâtiment, ce n’est pas la même chose.

Ce qui est surprenant, c’est que des gouvernements que vous avez soutenus ont eu recours à ce type de procédé, en précisant « notamment l’automobile » ou « spécialement l’automobile ». Que vous fassiez cette critique au moment où cette industrie est en crise du fait d’une baisse de la consommation me semble surprenant.

Mme Isabelle Debré. Vous n’avez pas écouté ce que j’ai dit !

M. François Rebsamen. La précision me semble assez claire et compréhensible ! C’est du français que tout le monde comprend.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même si je ne suis peut-être pas le meilleur interprète de ce groupe, il me semble que cet amendement se comprend au regard de la préoccupation des membres de l’UDI-UC, qui souhaitent privilégier la consommation de biens ou de services dans des secteurs non délocalisables.

Or, au nombre des secteurs où l’on continue à produire des biens en France figure l’automobile. En apportant cette précision, on traduit la volonté qui est, je pense, partagée par beaucoup, de soutenir l’emploi en France, y compris dans le tissu industriel producteur de biens. À mes yeux, cette précision n’est pas superfétatoire ; elle est au contraire utile dans ce texte.

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. J’entends bien les arguments des uns et des autres, mais il n’empêche que l’amendement du Gouvernement est nouveau. Il me semble donc important que la commission puisse avoir le temps de l’étudier.

Je vous rappelle que, ici même, voilà quelques semaines, lors du débat sur la biologie médicale, dans des circonstances similaires, je n’avais pas demandé la réunion de la commission sur un amendement déposé en séance par le Gouvernement, pensant que ce n’était pas nécessaire, et MM. Barbier et Roche m’en avaient fait le reproche.

Je maintiens que l’amendement n° 9 est très différent de l’amendement n° 7. En outre, mes chers collègues, je vous rappelle l’aversion du Sénat pour l’adverbe « notamment » dans les textes de loi.

Mme Isabelle Debré. Ce n’est pas juridique !

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Il serait paradoxal que nous en insérions un ici, alors qu’habituellement nous nous efforçons de le supprimer dès que nous le pouvons pour éviter que la loi ne soit ambiguë.

Monsieur le président, pardonnez-moi, mais la procédure utilisée n’étant pas tout à fait respectueuse des prérogatives de la commission, je vous demande une suspension de séance pour que nous puissions nous réunir et discuter tranquillement de cet amendement déposé par le Gouvernement.

M. le président. Madame la présidente, je vous accorde une courte suspension de séance, temps de trajets compris ! (Rires.)

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures vingt, est reprise à vingt heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Pour tenir compte des observations de Mme la présidente de la commission, je rectifie l’amendement n° 9 afin de remplacer le mot « notamment » par les mots « en particulier ». (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

Mme Isabelle Debré. Oh non ! C’est une plaisanterie ?

M. Charles Revet. C’est en effet très différent… Ce n’est pas à l’honneur du Sénat de travailler ainsi.

Mme Isabelle Debré. C’est du théâtre, je n’ai jamais vu ça !

M. le président. Il s’agit donc de l’'amendement n° 9 rectifié, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :

Alinéas 1 et 2

Après les mots :

l'achat d'un ou plusieurs biens

Insérer les mots :

, en particulier dans le secteur de l'automobile,

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Anne Emery-Dumas, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.

Mme Isabelle Debré. Cela fait maintenant huit ans que je siège au Sénat, et je n’avais jamais vu cela !

Mme Isabelle Debré. Non ! Je n’ai jamais vu rectifier un amendement simplement pour remplacer « notamment » par « en particulier ».

M. Jean-Pierre Godefroy. Relisez le Journal officiel !

Mme Isabelle Debré. On n’est pas au théâtre ici, on travaille !

Mme Christiane Demontès. Pas de leçon, madame Debré !

Mme Isabelle Debré. Madame Demontès, vous me connaissez depuis longtemps : je me mets rarement en colère, mais là, vraiment, il y a de quoi ! Il n’est pas admissible d’aller ainsi à la pêche aux voix !

Mme Christiane Demontès. La droite ne l’a jamais fait ?

Mme Isabelle Debré. Si, madame, nous l’avons fait, mais je sais reconnaître les torts que nous avons pu avoir. M. le ministre a d’ailleurs salué mon honnêteté intellectuelle. Je le répète, je ne suis pas au théâtre, je suis là pour travailler !

Monsieur le ministre, cibler spécifiquement l’automobile, alors que le bâtiment et d’autres secteurs vont eux aussi très mal, n’a pas de sens, d’autant que l’expression « en particulier » n’a aucune portée juridique.

Le groupe UMP votera donc contre cet amendement et demande qu’il soit mis aux voix par scrutin public.