Mme Geneviève Fioraso, ministre. Permettez-moi, pour la clarté du débat, de rappeler les termes du 1° du I de la rédaction ici proposée, qui ont seuls été réécrits :

« 1° D’adapter le code, à droit constant, afin d’y créer un nouveau livre relatif à la valorisation de la recherche en direction du monde économique, des structures associatives, des fondations reconnues d’utilité publique et de la société civile ; l’exercice des activités de transfert pour la création de valeur économique ; ».

Le reste est sans changement.

Je souhaite maintenant savoir si cela correspond bien aux travaux de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Nous sommes favorables à l’amendement, sous réserve que le Gouvernement accepte quelques modifications rédactionnelles au 1° du I de l’article dans la rédaction prévue par l’amendement n° A-2.

Dans le 1°, après les mots « des structures associatives », il s’agirait de rédiger ainsi la fin de l’alinéa : « et fondations, reconnues d’utilité publique » de sorte que le « reconnues d’utilité publique » concerne tout à la fois les structures associatives et les fondations.

Nous souhaitons par ailleurs la suppression de la fin de l’alinéa, car, d’une part, la société civile s’incarne dans les associations et fondations, d’autre part, le membre de phrase « l’exercice des activités de transfert pour la création de valeur économique » ne se raccroche plus à rien. Sans doute s’agit-il d’une coquille résiduelle.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un sous-amendement n° A-4, présenté par Mme D. Gillot, au nom de la commission, et ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

associatives

rédiger comme suit la fin de l'alinéa :

et fondations, reconnues d'utilité publique

Quel est l’avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?

Mme Geneviève Fioraso, ministre. Je suis favorable à ce sous-amendement. Toutefois, la suppression de la fin de l’alinéa fait que le mot « transfert » n’apparaît plus. Je souhaite donc, outre les modifications suggérées par la commission, ajouter les mots « et au transfert », après les mots « afin d’y créer un nouveau livre relatif à la valorisation ».

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° A-2 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :

Rédiger comme suit cet article :

I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à modifier par ordonnance le code de la recherche afin :

1° D’adapter le code, à droit constant, afin d’y créer un nouveau livre relatif à la valorisation et au transfert de la recherche en direction du monde économique, des structures associatives et fondations, reconnues d’utilité publique ;

2° De remédier aux éventuelles erreurs de codification ;

3° D’abroger les dispositions devenues sans objet ;

4° D’étendre, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, l’application des dispositions du code de la recherche en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et dans les Terres australes et antarctiques françaises ainsi que de permettre les adaptations nécessaires à l’application de ces dispositions à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à modifier par ordonnance la partie législative du code de l’éducation afin :

1° D’adapter le code afin, notamment, d’introduire des dispositions relatives aux études de maïeutique et de modifier celles relatives aux établissements d’enseignement supérieur spécialisés ;

2° De remédier aux éventuelles erreurs de codification ;

3° D’abroger les dispositions devenues sans objet ;

4° D’étendre, le cas échéant avec les adaptations nécessaires, l’application de ces dispositions du code de l’éducation à Mayotte, en

Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.

III. – Les ordonnances prévues aux I et II doivent être prises dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi.

Pour chaque ordonnance, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l’ordonnance.

Quel est l’avis de la commission sur cet amendement ainsi rectifié ?

Mme la présidente. Le sous-amendement n° A-4 n’a donc plus d’objet.

Je mets aux voix l'amendement n° A-2 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 65 est ainsi rédigé.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Geneviève Fioraso, ministre. Notre discussion touche à sa fin et nous en sommes tous, me semble-t-il, assez satisfaits.

Je veux toutefois signaler certaines intentions qui, même si elles n’ont pas pu être intégrées, font néanmoins l’objet de mon attention.

Il s’agit en particulier de l’ambition de mieux protéger les stagiaires, notamment du harcèlement moral, et de soutenir par la recherche publique les travaux « des structures associatives et fondations, reconnues d’utilité publique ». Je ne doute pas que la commission mixte paritaire prendra ces intentions en compte de façon plus explicite.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Madame la présidente, je souhaite une très courte suspension de séance.

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à zéro heure cinquante-cinq, est reprise à une heure.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Vote sur l'ensemble

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.

Article 65
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. Nicolas Alfonsi. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, quel était l’objectif de ce texte, quelle était son ambition ? Il s’agissait de donner un nouveau souffle à l’enseignement supérieur et à la recherche par la définition d’une stratégie nationale qui doit être source de cohérence, de coordination et d’efficacité des politiques menées par les différents acteurs. À ce titre, on ne peut que saluer la volonté de retour de l’État stratège.

Bien évidemment, nous nous réjouissons de la volonté de l’État de favoriser la valorisation de la recherche. Cependant, nous craignons que les mesures proposées ne soient insuffisantes, alors que la recherche technologique ne représente que 10 % de notre dépense intérieure de recherche.

Aujourd’hui, chacun s’accorde à dire que la situation des universités est particulièrement grave, pour le quart d’entre elles. Et l’adoption de ce texte, sans les moyens financiers correspondants, aboutirait à la mise en œuvre d’une loi LRU « déguisée ». La sanctuarisation du budget de l’enseignement supérieur et de la recherche au sein du budget de l’État est rassurante, mais elle ne saurait être suffisante. Il faut aller plus loin et donner de nouvelles assurances.

Comment en effet les universités répondraient-elles aux attentes de la société si leur autonomie devait se résumer à réduire les dépenses qui permettent de dispenser des cours de qualité dans des conditions d’accueil dignes de ce nom ?

Le taux d’échec demeure élevé à l’université et nous nous éloignons de l’objectif de Lisbonne, qui veut que 50 % d’une classe d’âge soit titulaire d’un diplôme d’enseignement supérieur. Mais, au-delà de la quantité, c’est bien la qualité et l’excellence qu’il faut rechercher.

La clarification du paysage des formations grâce à la procédure d’accréditation, la spécialisation progressive en licence et la création de passerelles entre formations devraient participer à l’amélioration de la réussite des étudiants.

De même, en matière d’orientation, la mise en place d’un pourcentage minimum de bacheliers technologiques et professionnels au sein des IUT et des STS peut contribuer à la réussite de ces élèves.

Notre plus grande déception, toutefois, concerne la gouvernance de nos universités. Nous regrettons beaucoup que l’amendement que nous avions présenté à l’article 25, et qui a été adopté par le Sénat, soit devenu sans objet du fait de la suppression de l’article. Il avait pour vertu de permettre la démocratisation de la gouvernance des universités sans ouvrir la porte au bicéphalisme et au risque de conflits paralysants.

Nous espérons que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un nouveau texte tiendra compte de cette préoccupation fondamentale pour les universités, afin de ne pas envenimer les relations entre le conseil d’administration et le conseil académique. Nous y serons très attentifs ! En effet, il convient de ne pas ajouter des blocages institutionnels aux problèmes de gestion et de finances que connaissent les universités.

Pour conclure, je salue l’engagement et la volonté du Gouvernement attestés par deux réformes, encore inachevées, mais qui se complètent : celle qui vise à refonder l’école de la République et celle-ci, qui concerne l’enseignement supérieur et la recherche.

Malgré des réserves certaines, mais aussi quelques regrets de ne pas avoir vu davantage de nos amendements adoptés, le groupe du RDSE, dans sa grande majorité, approuvera le texte issu ce soir des travaux de la Haute Assemblée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen, animé et serein à la fois, d’un texte passionnant à de nombreux égards : d’abord, comme je l’ai rappelé, par le fond des sujets traités et leur importance pour l’avenir des universités et de la recherche françaises ; ensuite, par la nature des débats et par les rebondissements que nous avons connus collectivement.

Avant de commenter le texte qui résulte de nos discussions, je souhaiterais saluer la qualité des échanges qui ont eu lieu entre tous les groupes du Sénat, ainsi qu’avec Mme la ministre et Mme la rapporteur. Ces échanges ont été constructifs, car chacun a pu défendre ses arguments, faire adopter un certain nombre d’amendements, et tout cela sans dogmatisme ni excès.

Je tiens à remercier la commission de la culture, en particulier Mme la rapporteur, avec qui j’ai pu préparer ce texte et avancer en cohérence au nom de la commission des affaires économiques.

Je remercie aussi la commission des affaires économiques, qui a soutenu, en amont de ce texte, un certain nombre des amendements que je lui avais proposés, ce qui n’était pas une évidence au début de ce débat. Le travail que nous avons mené tout au long de ces trois jours nous a permis de donner satisfaction à la commission des affaires économique sur une partie de ses amendements.

Sur le fond même du texte, je note de nombreuses évolutions allant dans un sens qui satisfait l’UDI-UC. Si le travail en commission n’a pas abouti à une ouverture suffisante sur nos propositions, celui qui a été effectué en séance nous permet d’aboutir à un texte largement plus recevable.

Je tiens à rappeler en cet instant l’adoption d’amendements qui tenaient à cœur à l’UDI-UC.

En premier lieu, le vote de notre proposition visant à créer un véritable statut pour les établissements d’enseignement supérieur privés à but non lucratif est une très grande satisfaction. Cela favorisera non seulement une plus grande transparence et une clarification de la situation de ces établissements associatifs, mais aussi la sécurisation des diplômes pour les 77 000 étudiants qui les fréquentent.

En deuxième lieu, les propositions de mon collègue Jean-Léonce Dupont sur la publication des statistiques du taux d’intégration professionnelle des étudiants ainsi que des véritables chiffres des inscriptions dans les universités, permettront de mieux évaluer la qualité et l’intérêt des formations proposées.

En troisième lieu, l’adoption d’un amendement de notre collègue Hervé Maurey visant à régionaliser les épreuves « classantes » des études de médecine, en ouvrant dans chaque région un quota de postes qui soit en adéquation avec les particularités de la démographie médicale régionale, constituera un premier pas dans la lutte contre les déserts médicaux.

Enfin, sur la valorisation des résultats de la recherche, je me réjouis de l’adoption des amendements à l’article 55, qui tendent à assurer une meilleure exploitation des inventions, en particulier vers les PME-PMI et les entreprises de taille intermédiaire, sans pour autant aboutir à un dispositif qui ne permette pas d’aller en toute sécurité au maximum de ce qu’il est possible de faire en matière de valorisation des brevets français.

Ces possibilités de transfert sont effectivement essentielles pour la compétitivité de nos entreprises. La garantie qu’a donnée Mme la ministre sur le brevet unifié européen quant à sa présentation devant le Parlement avant la fin de l’année est aussi importante. L’article 38, nous l’avons vu, a intégré des propositions d’amendements des commissions et a aujourd’hui satisfait plusieurs des groupes sénatoriaux, ce qui a contribué à faire évoluer notre position.

Au final, chers collègues, nous sommes face à un texte qui, malgré tout loin d’être parfait, est cependant largement meilleur que celui qui nous était revenu de l’Assemblée nationale. Nos collègues députés centristes s’y étaient au reste totalement opposés. Cependant, les progrès accomplis convainquent l’UDI-UC du Sénat de réviser son jugement sur le projet de loi.

En outre, alors que nous examinons le présent projet de loi en procédure accélérée, ce que nous regrettons, évidemment, cette lecture est la seule occasion pour le Sénat de présenter un texte qui lui appartienne, avec des spécificités et des ajouts qui seront discutés en commission mixte paritaire. Sans cela, une fois de plus allais-je dire, la voix du Sénat ne porterait pas.

Mes collègues centristes et moi-même souhaitons qu’un texte sorte de notre assemblée. Nous serons extrêmement vigilants et combattifs lors de la commission mixte paritaire, pour que les avancées que j’ai citées soient maintenues et que les batailles que nous avons menées ces derniers jours se transforment en véritable victoire.

Pour toutes ces raisons, le vote des sénateurs de l’UDI-UC sera partagé entre l’abstention et le soutien au projet de loi. Pour ma part, je voterai le présent texte, souhaitant qu’il permette au Sénat de contribuer à faire progresser utilement cette question dans le sens de l’intérêt général. (Mme la rapporteur, M. Thani Mohamed Soilihi et Mme Corinne Bouchoux applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, à l’issue de nos travaux, je vais sans surprise confirmer le vote du groupe CRC contre ce projet de loi.

La discussion au Sénat et les modifications introduites n’ont pas été de nature à changer profondément le texte et, par voie de conséquence, le vote que nous allons émettre.

La suppression puis la réécriture de l’article 38 à la suite d’une demande de seconde délibération formulée par le Gouvernement n’ont pas apaisé nos inquiétudes sur les nouvelles modalités de regroupements territoriaux.

Comme je l’ai indiqué, nous attendions des signes de rupture clairs avec les politiques précédemment menées. Or nous ne les trouvons pas dans ce texte.

En effet, les responsabilités et compétences élargies sont maintenues, tout comme la logique d’évaluation mise en œuvre par l’AERES, même si la dénomination de l’autorité a été changée. Il n’y a pas de retour sur l’ANR ni d’encadrement de ses appels à projets, qui favorisent l’emploi précaire. De plus, les mesures en faveur de la résorption de la précarité sont extrêmement faibles en raison de l’absence de programmation de moyens et d’emplois dans l’enseignement supérieur et la recherche à l’heure où nous parlons.

Nous déplorons par ailleurs, nous l’avons rappelé tout au long de l’examen de ce texte, la focalisation excessive des objectifs de l’enseignement supérieur et de la recherche sur des visées utilitaristes en vue de retombées économiques et d’employabilité.

Pour toutes ces raisons, nous confirmons notre vote contre ce texte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission de la culture, madame la rapporteur, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord adresser des remerciements qui ne seront pas que de forme, exprimer un certain nombre de regrets et expliquer le sens de notre vote.

Je commencerai par remercier la présidente de séance, qui est parfois oubliée, mais sans laquelle notre discussion – à l’instar de ce qui s’était passé lors du vote du projet de loi porté par Vincent Peillon – n’aurait peut-être pas pu se tenir dans un climat aussi serein, à cette heure tardive, mais encore raisonnable. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur les travées de l’UDI-UC.)

Je remercie également l’ensemble de celles et ceux qui nous ont permis de travailler dans de bonnes conditions, notamment les personnels du Sénat et ceux de nos collaborateurs que nous avons malmenés avec des horaires de travail particulièrement exigeants.

Pour ce qui est maintenant des regrets, soyons clairs, sans en dresser la liste exhaustive, permettez-moi de dire notre déception devant l’engagement de la procédure accélérée sur ce texte. En l’espèce, cette urgence a été synonyme de précipitation et de travail bâclé, sans parler de nombreux « pas entendus », « mal entendus » et désaccords profonds. Ce n’était donc pas la bonne méthode.

Nous regrettons par ailleurs non seulement que l’ANR n’ait pas été supprimée - la course aux projets ne s’arrêtera pas, c’est maintenant chose claire -, mais aussi que ce texte ne soit pas une loi de programmation : nous l’avons constaté, si des postes ont été annoncés avec la sécurisation de l’emploi, les « cinq fois mille postes » sont toujours attendus, et nous devrons vérifier qu’ils sont effectivement créés. Nous devrons aussi nous assurer de la sécurisation dans le cadre des protocoles existants.

Par conséquent, nous sommes très loin du grand soir, très loin d’une loi qui aurait constitué cette rupture significative que nous attendions.

Un certain nombre de nos inquiétudes ne se sont pas concrétisées. Nous resterons donc vigilants, notamment sur toutes les questions relatives à la brevetabilité du vivant.

Certains points, dans ce projet de loi, sont clairement positifs. Le texte initial nous apparaissait très mauvais et, à l’issue de notre travail collectif, il nous semble plus acceptable, car il tient compte des contradictions très profondes qui ont été soulignées et des questions soulevées.

Nous voulons montrer que le travail législatif au Sénat a un sens et qu’il relève de la coconstruction et pas uniquement de la démolition, quand bien même cette dernière est parfois tout à fait nécessaire.

Ce projet de loi ne nous satisfait donc pas sur le fond ; ce n’est pas un grand texte, d’autant qu’il manque certains éléments et que des inquiétudes subsistent. En outre, nous avons montré, notamment lors du dernier vote sur l’article 65, que le transfert a sa juste place et qu’il ne faut pas trop en faire à ce sujet.

La discussion sur le brevet a montré qu’il faut aussi être attentif au fait que l’université publique est le bien commun, c’est-à-dire le partage des richesses vers l’entreprise, mais aussi vers la société civile.

La liste de nos regrets est extrêmement longue, mais nous nous attacherons à signaler les modestes avancées que nous avons obtenues. Cela supposera que nous explicitions avec pédagogie le sens du travail législatif au Sénat et les raisons pour lesquelles nous présenterons, en commission mixte paritaire, une copie bien différente de celle de l’Assemblée nationale, que nous trouvions extrêmement mauvaise.

Choisir entre un texte extrêmement mauvais et un texte qui n’est pas bon requiert de savoir faire preuve de pragmatisme… Nous souhaitons que ce projet de loi puisse vivre en CMP, et nous espérons que cette dernière pourra trancher.

Je le répète, ce texte ne correspond pas à nos attentes. Toutefois, nous le voterons, afin de pouvoir le porter jusqu’en commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Madame la présidente, mesdames les rapporteurs, mes chers collègues, au début de l’examen de ce texte, Mme la ministre a exprimé son étonnement à double titre : d’une part, parce que notre groupe reprochait à ce projet de loi de ne pas être un « acte II » de l’autonomie, et, de l’autre, parce que nous dénoncions le fait que l’université risquait de voir son élan brisé.

Après trois jours de débats cordiaux, argumentés et attentifs de part et d’autre, nous estimons toujours que ce texte ne porte pas une réforme majeure. La réforme majeure de l’enseignement supérieur et de la recherche a déjà eu lieu, il y a cinq ans, avec la loi LRU !

Au reste, madame la ministre, votre texte ne revient pas sur l’acquisition de l’autonomie, dont vous avez maintes fois demandé la suppression. Dans certains cas, il va même jusqu’à étendre cette autonomie ! Ainsi, le présent projet de loi donne un accord tacite à un grand nombre de mesures que nous avons mises en œuvre, même si vous exprimez naturellement certaines réserves.

Ce texte d’orientation énonce des principes et exprime des intentions, mais n’évoque pas les moyens permettant d’atteindre ses objectifs. Nous l’avons dit, comme plusieurs de nos collègues appartenant à d’autres groupes politiques : ce texte n’est pas une loi de programmation et, surtout, il ne comporte pas d’engagements chiffrés.

L’enseignement supérieur et la recherche ont besoin d’investissements et de visibilité. Vous avez reconnu que l’attribution des moyens relevait de décisions qui ne vous appartiennent pas, et tel est bien le cas. (Mme la ministre manifeste son désaccord.) Nous regrettons avec vous que vous n’ayez pas été entendue lors des arbitrages budgétaires.

Non seulement ce projet de loi n’est pas un grand texte, mais, en l’état, sa mise en œuvre reviendra à faire perdre du temps à l’université. En effet, le texte porte atteinte à plusieurs équilibres déterminants pour le bon fonctionnement et le succès de notre enseignement supérieur et de notre recherche.

Premièrement, il met en œuvre la gouvernance bicéphale des universités, avec la création d’un pléthorique conseil académique, au côté du conseil d’administration, également doté d’un pouvoir décisionnaire. Il s’agit là, à nos yeux, d’une disposition incompréhensible.

De fait, comme nous l’avons rappelé à plusieurs reprises au cours de nos débats, ce système crée un véritable risque de blocage au sein de nos universités, et ce au moment même où celles-ci – notamment lorsqu’elles se heurtent à des difficultés dans l’acquisition de l’autonomie – ont besoin d’un pilotage fort. La loi LRU avait simplifié et resserré la composition du conseil d’administration pour faciliter les prises de position. Vous revenez ainsi sur un acquis qui nous semble essentiel.

Deuxièmement, ce projet de loi enterre l’AERES. Nous ne sommes toujours pas convaincus par vos arguments en la matière. Vous souhaitez supprimer cette autorité qui fonctionne, qui est reconnue par nos partenaires européens et internationaux, et qui propose un dispositif d’évaluation efficace. Pourtant, l’AERES n’a besoin que de quelques améliorations tant pour satisfaire les organismes évalués que répondre aux exigences de qualité qui sont celles de notre enseignement supérieur et notre recherche.

Troisièmement, nous continuons à nous opposer à la fragilisation des IUT, non pas parce qu’ils sont nos « chouchous », comme vous le prétendez, madame la ministre, mais parce qu’ils sont des établissements d’excellence. Ces instituts conjuguent plusieurs qualités : proches du monde de l’entreprise, ils assurent un encadrement des élèves leur permettant de mieux progresser. Les méthodes de travail des IUT sont certainement des recettes à reproduire pour la première année d’université.

Quatrièmement, enfin, j’achèverai par un enjeu essentiel à nos yeux, et déterminant quant à notre vote : le présent projet de loi supprime les PRES et les réseaux thématiques de recherche avancée, qui sont, eux aussi, des structures d’excellence nées de l’alliance de nos meilleurs établissements. À ces organismes, vous substituez des « communautés », dont le mode de fonctionnement diffère de celui qui existe aujourd’hui. Leur mode d’organisation complexe risque de nuire à leur bon fonctionnement : le passage des PRES à ces « communautés » risque, là encore, de faire perdre du temps à nos universités.

Notre détermination à maintenir les PRES – et nous avons été bien aidés, il faut le dire, par la faible mobilisation de la majorité sénatoriale en début d’après-midi -, a conduit à la suppression de l’article 38. Toutefois, le Gouvernement a demandé une seconde délibération pour effacer ce vote fâcheux de la Haute Assemblée. Madame la ministre, à cette occasion, vous avez certes introduit des modifications importantes auxquelles nous sommes favorables. Mais nous restons loin du compte !

Parallèlement, un de nos amendements, déposé en même temps par l’UDI-UC, a été adopté. Il permettra un réel progrès, notamment en clarifiant le statut des établissements privés d’enseignement supérieur et de recherche – si toutefois cette disposition parvient à franchir l’étape de la commission mixte paritaire, ce que nous souhaitons, naturellement.

Malgré les quelques amendements issus de nos rangs que le Sénat a bien voulu adopter, notamment pour ce qui concerne la vie étudiante, nous n’avons pas pu rétablir une gouvernance forte des universités, maintenir l’AERES et les PRES, ou encore aider les IUT. Nous ne pouvons donc voter ce texte, qui conserve des dispositions susceptibles de freiner gravement les universités dans le développement de leur autonomie.

Avant de conclure, je tiens à m’associer, au nom de notre groupe, aux remerciements précédemment adressés à Mme la présidente, à l’ensemble des services du Sénat, qui ont permis la bonne tenue de nos travaux, ainsi qu’à Mme la ministre, qui a garanti un débat apaisé, serein et attentif, en dépit des désaccords qui subsistent.

Comme Mme Bouchoux, je déplore que la procédure accélérée ait été engagée : tous les groupes représentés dans cet hémicycle ont fortement participé à l’évolution de ce projet de loi, prouvant de la sorte que les lectures successives, les navettes, sont essentielles à l’évolution d’un texte.

Pour toutes ces raisons, et en regrettant vivement que nos arguments n’aient pas été mieux entendus, nous voterons contre ce projet de loi. (M. Jacques Legendre applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. Madame la présidente, madame la ministre, madame la présidente de la commission de la culture, mesdames les rapporteurs, mes chers collègues, nous approchons de l’issue d’un débat sur un texte d’envergure, qui n’en a pas moins été enrichi par des apports sur tous ses aspects et émanant de tous les participants.

Je me réjouis que, bientôt, des coopérations et des interactions effectives entre le monde universitaire et le monde de la recherche deviennent réalité, grâce au rapprochement des structures mais aussi grâce à des améliorations d’ordre pédagogique.

De même, les nombreuses dispositions en faveur de la réussite des étudiants devraient permettre à ces derniers de choisir leur filière, leur orientation et leur voie professionnelle dans de meilleures conditions. En effet, mieux formés, mieux épaulés, les étudiants bénéficieront de plus de conseils de la part des structures chargées de leur formation.

Ce projet de loi va enfin permettre d’aborder, dans des conditions rationalisées et démocratisées, un nouvel âge de l’autonomie des établissements, chargée d’un nouveau contenu et porteuse d’une nouvelle dynamique.

Je me réjouis encore que ce texte ait été enrichi par les apports du Sénat, en commission puis en séance publique. À titre personnel et au nom du groupe socialiste, je me félicite que presque tous les amendements que nous avons défendus à l’occasion des deux étapes de la procédure aient été adoptés.

Je reviendrai, plus précisément, sur diverses dispositions qui ont été votées ou précisées sur l’initiative des sénateurs socialistes.

Premièrement, le présent texte inclut désormais les partenaires de la société civile – associations et fondations reconnues d’utilité publique, ONG – comme destinataires du transfert de la recherche. Cette exigence sera traduite dans de très nombreux articles des codes de l’éducation et de la recherche. Nous étions nombreux, au sein de la Haute Assemblée, à appeler de nos vœux ces ajouts !

Deuxièmement, l’indication que les regroupements d’établissements et d’organismes resteront facultatifs et se feront avec une grande souplesse figure désormais à l’article 38 du présent texte, dans une rédaction qui, à mon sens, est de nature à satisfaire le plus grand nombre d’entre nous.

Troisièmement, deux dispositions particulièrement importantes concernant les stages étudiants ont été introduites grâce au groupe socialiste.

D’une part, le droit pour tout étudiant d’effectuer un stage pendant les vacances universitaires est une avancée très positive. Les établissements seront désormais tenus d’accorder une convention à tout jeune souhaitant effectuer un stage de deux mois en rapport avec sa formation.

D’autre part, garantie est posée pour qu’au cours d’une même année universitaire seuls les stages s’appliquant à des formations à des métiers pour lesquels six mois sont insuffisants puissent excéder cette durée.

Quatrièmement, une nouvelle compétence est confiée aux bureaux d’aide à l’insertion professionnelle des étudiants. Je suis très attaché à cette mesure. Cette instance aura désormais pour mission de préparer les étudiants à leurs entretiens d’embauche. Je rappelle que ces BAIP résultent aussi d’un amendement déposé par les sénateurs socialistes lors de l’examen de la loi LRU.

Cinquièmement, la nouvelle mission d’éducation à la santé des étudiants confiée au CROUS constitue un point positif.

Sixièmement, les conventions conclues entre les formations d’enseignement supérieur des lycées et les universités prévoyant des enseignements communs permettront de faciliter les passerelles entre ces deux cursus.

Septièmement, nous avons obtenu le maintien de la carte de séjour mention « scientifique-chercheur » pour les résidents involontairement privés d’emploi, jusqu’à expiration des droits au chômage ouverts par leurs cotisations. Cette mesure, au-delà de son caractère emblématique, est de nature à renforcer l’attractivité de l’université et de la recherche dans notre pays.

Huitièmement et enfin, la mise en œuvre du dispositif permettant de favoriser la coproduction des schémas régionaux de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, les SRESRI, avec les autres niveaux de collectivités territoriales et d’en assurer, partant, la portée prescriptive, permettra enfin aux régions comme à toutes les collectivités d’être associées à la politique d’enseignement supérieur et de recherche.

Mes chers collègues, la plupart de nos apports ont fait l’objet d’un quasi-consensus, puisqu’ils ont été le plus souvent votés par une large part de cet hémicycle, allant de la gauche jusqu’au centre. Les explications de vote que je viens d’entendre matérialisent ce rassemblement très large, permettant à ce texte de poursuivre son chemin et d’atteindre la CMP en reflétant les positions du Sénat.

De nombreux amendements défendus par nos collègues issus des divers groupes de la Haute Assemblée ont également fait l’objet d’une large approbation et permis d’enrichir considérablement le texte.

Je veux saluer le travail de la commission et celui de sa rapporteur. Surtout, comme je l’ai fait dès le début de nos travaux, je remercie Mme la ministre, qui a pris la peine de nous aider à atteindre des rédactions pointues, et ce en associant l’ensemble des présents. Elle s’est montrée ouverte, et elle a pris le temps de trouver la bonne formulation des dispositions proposées par les uns et les autres, ce qui nous a permis de parvenir à l’accord le plus large possible sur de nombreux articles. Cet apport a été décisif !

Mes chers collègues, je ne doute pas que la CMP nous permettra encore de progresser sur certains points. Cela étant, dès à présent, je vous indique que les sénateurs du groupe socialiste apportent leur entier soutien à ce projet de loi ambitieux pour l’avenir de la recherche et de la formation des étudiants. Nous voterons le texte issu de nos travaux, et nous le porterons fièrement, dans tous ses aspects, jusqu’à la commission mixte paritaire !