compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Carle

vice-président

Secrétaires :

Mme Michelle Demessine,

M. Jean-François Humbert.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

suppression de 370 postes à aéroports de paris malgré des bénéfices en hausse

M. le président. La parole est à M. Michel Billout, auteur de la question n° 629, transmise à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Michel Billout. Monsieur le ministre, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les orientations stratégiques d’Aéroports de Paris, ADP, dont l’État est actionnaire largement majoritaire.

Le président du groupe ADP a annoncé en juillet dernier un plan de départs volontaires concernant 370 postes alors qu’en 2013 le bénéfice net prévu pour Aéroports de Paris s’élève à 280 millions d’euros. Plus globalement, depuis l’ouverture du capital d’ADP en 2006, 1 100 postes ont été supprimés alors que les bénéfices ont été multipliés par 2,2, ce qui a permis aux actionnaires de se partager 1,191 milliard d’euros de dividendes.

Entre 2006 et 2012, le nombre de passagers a progressé de 8 %, le chiffre d’affaires de 32 % et le bénéfice net de 78 %. La part des salaires dans la valeur ajoutée a, quant à elle, diminué de 17 % en six ans tandis que les dividendes n’ont cessé d’augmenter. En mai dernier, la part du résultat net reversé aux actionnaires est passée de 50 % à 60 %.

Le groupe ADP, au nom de la compétitivité, veut continuer d’alléger les dépenses de personnels qui augmentent mécaniquement avec l’ancienneté. Pour casser cette progression des coûts, le précédent président-directeur général s’était engagé en 2010 à réduire les effectifs de 10 % sur la durée du contrat de régulation économique 2011-2015. Une baisse de 1,7 % a été réalisée sous le précédent gouvernement. Aujourd’hui, l’objectif est de réduire les effectifs de 7 %. Les 370 suppressions de poste annoncées correspondent donc aux 5,3 % de baisse à réaliser d’ici à la fin de 2015. D’un point de vue mathématique, les chiffres sont cohérents.

La question de la répartition des richesses créées par le travail est ici clairement posée et renvoie au débat concernant le « coût du travail » et le « coût du capital ». Le refus de la direction d’ADP d’ouvrir des négociations sur l’augmentation des salaires et le maintien des postes est dans la logique de sa stratégie, qui est de privilégier les actionnaires au détriment des conditions sociales et salariales des employés.

Ces suppressions de poste sont d’autant moins acceptables que la santé des aéroports parisiens de Roissy et d’Orly est excellente : ces derniers ont en effet enregistré un nombre record de 90,3 millions de passagers en 2013, en progression de 1,7 % par rapport à 2012.

Dans ce contexte, quelles réponses l’État actionnaire entend-il donner aux revendications des salariés d’ADP concernant le maintien des emplois, l’augmentation des salaires et la lutte contre la précarité ?

À l’heure où le Gouvernement entend inverser la courbe du chômage et où la question du maintien dans l’emploi des seniors est posée, je souhaite obtenir des précisions sur la cohérence de la politique gouvernementale. Alors que le Gouvernement annonce vouloir mener une politique de création d’emplois, comment peut-il accepter qu’une entreprise dégageant d’importants bénéfices et dans laquelle l’État est actionnaire majoritaire continue de supprimer des postes ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, qui a dû se rendre à des obsèques ce matin.

Il ne m’a pas mandaté, et le Gouvernement pas davantage, pour entamer avec vous un débat, qui aurait été fort intéressant, sur les revenus du capital et du travail. Néanmoins, je tâcherai de répondre précisément à vos préoccupations, que j’entends et que je comprends.

Les aéroports s’inscrivent dans une chaîne de transport comprenant d’autres acteurs essentiels tels que les compagnies aériennes et les services de la sécurité aérienne, notamment.

Les principales compagnies françaises traversent depuis maintenant plusieurs années une période difficile, caractérisée par des coûts élevés et des recettes en faible progression, voire en régression. Cette situation est le fait tant de la crise économique mondiale que de la concurrence très vive des transporteurs à bas coûts et des compagnies des pays du Golfe. Ces compagnies sont les principales clientes d’Aéroports de Paris. Je considère que les efforts fournis par les compagnies aériennes doivent être accompagnés par les aéroports, qui se portent plutôt bien dans l’ensemble, comme vous l’avez rappelé. Je suis par conséquent très attentif à ce que cela se traduise par une modération tarifaire des aéroports, laquelle se répercutera évidemment immédiatement sur les compagnies.

Néanmoins, Aéroports de Paris doit être attentif à sa propre compétitivité par rapport aux autres grands aéroports européens, à la fois pour les compagnies aériennes sur le court terme, mais également dans son intérêt sur le moyen et sur le long terme.

Par ailleurs, outre les aspects financiers, il est nécessaire pour ADP de renouveler son personnel et de procéder à des embauches sur des postes où les besoins sont réels, au-delà de ce que lui permettent les départs naturels à la retraite. Il s’agit donc de trouver un point d’équilibre entre ces différentes préoccupations.

Le plan de départs volontaires annoncé par Aéroports de Paris pour cette année porte sur 370 postes au maximum. Le Gouvernement a demandé que ce plan s’inscrive dans une stratégie de long terme visant à maintenir la dynamique des aéroports parisiens et leurs effets positifs sur les plans économique et social pour les territoires voisins.

En particulier, ce plan pluriannuel prévoit un recrutement significatif dans les filières accueil – 120 collaborateurs – et les métiers techniques et de maintenance – 60 collaborateurs –, qui contribuera à soutenir les efforts actuels de l’exploitant pour améliorer la qualité de service, élément central du contrat de régulation économique 2011-2015.

Dès le 1er février prochain, de nouveaux agents d’accueil aux origines diversifiées rejoindront ainsi l’entreprise. ADP ne recrutait plus dans ces métiers, et une réorientation de sa politique devenait nécessaire. Le plan de départs volontaires contribue, dans le contexte général évoqué, à favoriser le redéploiement des moyens.

La procédure d’information et de consultation avec les organisations syndicales a été engagée en octobre 2013 et se poursuivra jusqu’au mois de février prochain. Les négociations en cours s’inscrivent dans le cadre d’un dialogue social intense, mais aussi apaisé, avec l’engagement de discussions sur des sujets tels que l’égalité entre les hommes et les femmes ou la formation des personnels.

Monsieur le sénateur, si Aéroports de Paris a besoin de s’adapter pour préserver sa compétitivité, ainsi que ses performances en termes d’attractivité des plateformes aéroportuaires et de qualité de service, soyez assuré que le Gouvernement reste attentif et cherche à concilier la protection des emplois des seniors et le recrutement d’une nouvelle génération.

M. le président. La parole est à M. Michel Billout.

M. Michel Billout. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

J’avoue que votre tâche n’est pas facile. À l’heure où l’on nous annonce la création d’un pacte de responsabilité, l’État devrait à mon avis montrer l’exemple lorsqu’il est actionnaire majoritaire d’une entreprise qui se porte particulièrement bien. Or il ne paraît pas le faire ici puisque 1 500 emplois ont été supprimés depuis l’ouverture du capital d’ADP, sans signe d’amélioration.

Je peux comprendre qu’il y ait des changements de métiers au sein de l’entreprise. Mais là n’est pas la question puisque les suppressions nettes de poste évoquées s’accompagnent dans le même temps d’un recours accru à la sous-traitance, y compris via la présence de travailleurs détachés dans les aéroports parisiens.

Cette problématique n’est pas sans nous préoccuper. En tout état de cause, monsieur le ministre, elle fera certainement l’objet d’une prochaine question de notre part.

substances « extrêmement préoccupantes » dans des produits de grande consommation

M. le président. La parole est à M. Dominique Bailly, auteur de la question n° 581, adressée à M. le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

M. Dominique Bailly. Monsieur le ministre, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur la présence de substances « extrêmement préoccupantes » dans certains produits de grande consommation et sur l’information des consommateurs.

L’association de consommateurs UFC-Que Choisir a rendu publique dernièrement une enquête visant quarante produits de grande consommation contenant des matières plastiques ou du cuir, et susceptibles de contenir des substances « extrêmement préoccupantes », telles qu’elles sont définies par le règlement REACH, Registration, Evaluation, Authorization and restriction of Chemicals.

Les analyses menées dans le cadre de cette enquête ont révélé la présence de ces substances dans neuf produits. Pour ne prendre qu’un exemple, un produit pour enfant contenait, notamment, un retardateur de flamme chloré – le SCCP, Short Chain Chlorinated Paraffins –, alors que cette substance est interdite.

Par ailleurs, alors que le règlement REACH oblige les professionnels à informer les consommateurs qui le demandent de la présence éventuelle dans leurs produits de plus d’une centaine de substances répertoriées comme « extrêmement préoccupantes », aucun des professionnels interrogés par l’UFC-Que Choisir n’a fait mention de ces substances. Dès lors apparaît un réel problème d’information des consommateurs.

Une intervention des pouvoirs publics me semble nécessaire. Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre afin, d’une part, de retirer du marché français les produits contenant les substances interdites et, d’autre part, d’améliorer à l’avenir la sécurité et l’information des consommateurs ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Philippe Martin, qui m’a chargé de vous apporter certains éléments de réponse.

La protection de la santé environnementale est un enjeu majeur pour le Gouvernement. C’est ce qu’a acté la première Conférence environnementale. Prévenir les risques sanitaires environnementaux doit être une préoccupation constante. Il s’agit notamment, vous l’avez rappelé, de mieux connaître les effets des substances chimiques, de mettre en place les évaluations de risque nécessaires, de développer la formation de tous les secteurs professionnels de la société et d’assurer l’information du public.

En Europe, un processus d’enregistrement, d’évaluation, d’autorisation et de restriction des substances chimiques a été lancé en 2007. Il est fondé sur le règlement REACH du 18 décembre 2006. Le processus est long, mais il est essentiel, et la France fait partie des États actifs en la matière.

Le règlement REACH a défini des substances dites « extrêmement préoccupantes », qui présentent des caractéristiques intrinsèques de danger. Il s’agit, par exemple, des substances cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques, des perturbateurs endocriniens ou encore des substances PBT, c'est-à-dire persistantes, bioaccumulables et toxiques.

Dans un premier temps, ces substances sont inscrites sur une liste candidate. L’inscription déclenche l’obligation pour les entreprises de notifier à l’Agence européenne des produits chimiques les usages de la substance, la présence de cette dernière dans des articles à des teneurs supérieures à 0,1 %, et d’informer les clients ainsi que les consommateurs qui en font la demande. Toutefois, cette inscription ne vaut pas interdiction.

Différentes procédures d’autorisation, de restriction ou d’interdiction stricte peuvent ensuite être appliquées à ces produits. Le SCCP que vous évoquez, monsieur le sénateur, n’était pas interdit au début de l’enquête de l’association UFC-Que Choisir ; son interdiction est intervenue récemment.

Soyez assuré que le Gouvernement propose lui-même de telles mesures chaque fois qu’il dispose d’informations suffisantes sur une substance. J’en veux pour preuve la proposition de restriction du bisphénol A dans les tickets thermiques que nous soutenons actuellement fortement.

Pour faire respecter ces obligations, des contrôles ciblés incluant des prélèvements en laboratoires sont effectués en coordination interministérielle. Nous allons intensifier ces contrôles.

Nous travaillons aussi en amont avec les industriels concernés afin de mieux répondre à leurs interrogations et de leur faciliter l’accès aux informations concernant leurs obligations. Un guide en ce sens a été élaboré par le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Nous veillerons également à ce que l’information des consommateurs soit toujours mieux diffusée, et l’étiquetage mieux assuré.

M. le président. La parole est à M. Dominique Bailly.

M. Dominique Bailly. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse.

Ma volonté était d’attirer l’attention du Gouvernement sur cette question. Il faut être vigilant, renforcer les contrôles, car, en ce domaine, la situation est évolutive : certains produits jusque-là autorisés se retrouvent interdits parce que leur nocivité a été découverte. Je remercie donc le Gouvernement de l’attention toute particulière qu’il porte à ce dossier.

création d'une filière d'auxiliaires de vie scolaire

M. le président. La parole est à M. Roger Madec, auteur de la question n° 553, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Roger Madec. Monsieur le ministre, depuis l’adoption de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, de nouvelles dispositions en matière d’accueil, de ressources, d’emploi ou encore d’accessibilité des personnes en situation de handicap ont été créées.

La principale innovation de cette loi, dans son volet éducatif, est d’affirmer que tout enfant, tout adolescent présentant un handicap ou un trouble invalidant de la santé est inscrit dans l’école de son quartier. Ainsi, des milliers d’enfants en situation de handicap fréquentent désormais l’école publique et ont pu recourir au dispositif des assistants de vie scolaire. Actuellement, ce sont plus de 28 000 assistants d’éducation qui exercent ces missions d’accompagnement. Cependant, ces emplois demeuraient à ce jour précaires et sans réel statut.

Le projet de reconnaissance et de revalorisation du métier des auxiliaires de vie scolaire, ou AVS, qui accompagnent les enfants en situation de handicap dans leur scolarité a été annoncé par le Premier ministre le 22 août dernier et s’inscrit dans le cadre plus vaste et très ambitieux du plan de refondation de l’école que vous portez, monsieur le ministre, avec force, vigueur et talent.

Cette évolution était, de l’avis de tous, nécessaire. En effet, la précarité du statut des auxiliaires de vie scolaire entraînait trop souvent des prises en charge courtes et sans suivi, peu propices à l’épanouissement des élèves en situation de handicap.

De plus, l’absence de formation de ces personnels, mis en difficulté de ce fait dans leur mission, constituait un risque supplémentaire d’échec scolaire pour les enfants en situation de handicap.

De nombreuses familles sont donc concernées par cette mesure qui pourrait fortement améliorer l’accompagnement des élèves en situation de handicap dans nos écoles.

Ces arguments militent avec force pour la création d’une filière d’auxiliaire de vie scolaire mieux reconnue et revalorisée.

Cela doit passer, à mon avis, tout d’abord par une pérennisation des emplois d’auxiliaire de vie scolaire. Ainsi, au terme de six années d’exercice en contrat à durée déterminée, les auxiliaires de vie scolaire se verraient proposer un contrat à durée indéterminée.

Cette mesure est gage de stabilité puisque les enfants pourront être accompagnés sur le long terme par les auxiliaires de vie scolaire qu’ils connaissent. Le métier d’auxiliaire de vie scolaire fera l’objet d’une nouvelle formation et d’un diplôme d’État. Les auxiliaires de vie scolaire seront donc enfin fidélisés, mieux formés, et reconnus dans leurs missions.

Enfin, il est prévu de recruter 8 000 auxiliaires de vie scolaire supplémentaires pour la rentrée 2014.

Monsieur le ministre, dans cette perspective, je souhaiterais connaître les conditions dans lesquelles ces recrutements seront réalisés ainsi que les modalités de titularisation dans l’emploi d’auxiliaire de vie scolaire. En outre, je vous demande de bien vouloir nous préciser quelles formations seront proposées à ces personnels et quelles mesures seront prises en faveur d’une école plus inclusive, permettant la réussite éducative de tous.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, le rôle de l’école de la République est effectivement, vous l’avez rappelé, d’accueillir et d’assurer la réussite de tous les élèves.

C’est l’ambition qui est portée par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, qui a intégré la notion d’école inclusive. C’est la première fois qu’intervient la reconnaissance de cette idée, et je remercie de nouveau le Sénat qui s’est beaucoup impliqué lors des débats parlementaires pour que ce soit le cas.

Je sais, monsieur le sénateur, que vous partagez aussi cette préoccupation en tant qu’élu parisien. Dans votre académie, 5 000 élèves handicapés sont actuellement scolarisés en milieu scolaire ordinaire et 3 000 le sont en milieu spécialisé. Chacun d’entre eux est suivi par un enseignant référent qui veille à la mise en œuvre du « projet personnalisé de scolarisation », pour reprendre le jargon en usage. Chaque enfant a un projet individuel et est suivi par un enseignant qui tient compte des souhaits de l’enfant dans un esprit de dialogue et d’écoute constante avec ses parents. Pour ces enfants, comme pour ceux qui sont issus de milieux plus difficiles, l’inclusion des parents dans le projet éducatif est l’une des clés indispensables du succès. Il y a ceux qui le font spontanément et il y a ceux qu’il faut aider.

Plus de 300 professeurs et plus de 1 000 auxiliaires de vie scolaire, à Paris, offrent chaque jour à ces enfants la joie d’apprendre à l’école. Je veux rendre hommage à leur action et saluer leur dévouement. Chaque fois que l’occasion m’est donnée d’assister, dans une école, au travail qu’ils accomplissent, j’en repars avec une très haute idée de la qualité des personnels de l’éducation nationale et du dévouement qui s’attache dans la fonction publique à l’exercice de tâches nobles.

Ces personnels contribuent à une réussite majeure – j’insiste sur cet adjectif – de l’éducation nationale. En effet, monsieur Madec, l’accueil que nous réservons à ces enfants ne relève pas de la charité. À chacun de nos déplacements dans les établissements scolaires, nous mesurons à quel point l’accueil des enfants en situation de handicap transforme la pédagogie elle-même : la façon de noter, de travailler par projet, de travailler en coopération, de s’attacher à la différence de chacun. Au final, l’ensemble des enseignants de l’équipe éducative et souvent les autres élèves nous disent que ces élèves en situation de handicap ont entraîné une pacification au sein de l’établissement, qu’ils ont modifié, transformé l’établissement lui-même et ont permis à tous de mieux travailler.

S’agissant plus particulièrement des auxiliaires de vie scolaire, vous avez vous-même rappelé que ces auxiliaires étaient, après six années de service, contraints de quitter leurs fonctions, sans possibilité d’être pérennisés dans leur emploi : c’était un scandale français !

Ces situations dramatiques, inacceptables pour eux, étaient intolérables pour les enfants qui perdaient les personnes les accompagnant depuis parfois un ou deux ans.

J’ai dénoncé à plusieurs reprises, devant votre assemblée comme devant l’Assemblée nationale, l’hypocrisie de ceux qui voulaient l’école inclusive mais n’y consacraient pas les moyens nécessaires et créaient des situations de gâchis humain intolérables.

Le gouvernement issu de la gauche s’est donc donné les moyens, au-delà des déclarations de bonnes intentions, de résoudre cette situation. À la suite du rapport de Mme Pénélope Komitès, nous avons pu proposer au Premier ministre, soutenus en cela par les différents ministères qui travaillent sur cette question – je pense en particulier à ceux de Marie-Arlette Carlotti et de George Pau-Langevin –, la « CDIsation », dès 2014, des AVS qui auront exercé pendant six ans sous le statut d’assistant d’éducation : ces personnes seront, à la fin de leur contrat, progressivement « CDIsées », c'est-à-dire qu’elles demeureront en fait dans leurs fonctions. Ces contrats à durée indéterminée concerneront 3 000 personnes dès cette année, et de 3 000 à 9 000 personnes dans les années qui viennent ; cela représentera au total, pour tous les AVS répondant à ces critères, plus de 28 000 CDI créés.

Toutefois, j’ai souhaité que des mesures transitoires soient prévues pour les AVS qui, en cours d’année, se trouveront en fin de contrat ; j’ai demandé que tous les contrats soient renouvelés jusqu’à la « CDIsation ».

Par ailleurs, nous avons engagé en faveur de ces personnels une démarche de validation des acquis de l’expérience permettant de valider un nouveau diplôme, en cours d’élaboration, relatif à l’accompagnement des personnes.

J’ajoute que la rémunération de ces personnels sera désormais indexée sur la grille de la catégorie C de la fonction publique.

Vous le voyez, nous sommes pleinement engagés dans cette action, qui est non pas de charité mais de justice. Je considère qu’il s’agit là d’un progrès pour l’école et sa refondation, qui sera toujours pédagogique. Une fois encore, je remercie les parlementaires qui, par leur investissement, nous ont aidés à obtenir cet arbitrage et à accomplir ce progrès d’ordre social : il peut y en avoir encore dans ce pays !

M. le président. La parole est à M. Roger Madec.

M. Roger Madec. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse très complète, qui me satisfait pleinement ; je n’ai rien à ajouter.

déchets d'activités de soins infectieux provenant de malades soignés à domicile

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, auteur de la question n° 624, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Aline Archimbaud. Madame la ministre, les déchets d’activités de soins infectieux, ou DASRI, provenant de malades soignés à domicile, lesquels sont de plus en plus nombreux, représentent un volume croissant de déchets. Leur nature est spécifique et leur traitement très encadré, car il s’agit de déchets contondants et à risque infectieux : aiguilles, lancettes test, stylos à injections, cotons souillés, etc.

Pendant des années, ces DASRI étaient collectés par des associations locales, souvent avec une mission d’insertion. Mais ces structures locales qui avaient permis de pallier un vrai besoin de « service public » ont progressivement renoncé à ces collectes de DASRI, du fait de leur faible capacité d’organisation à un niveau national.

L’éco-organisme DASTRI, financé par les producteurs de matériel de soins, a été créé depuis, et il lui a été demandé d’organiser l’ensemble de la filière, et donc la collecte, avant le 30 septembre 2013. Mais, entre l’interruption des collectes précédentes et le retard dans l’organisation de cette filière DASRI, les usagers se trouvent confrontés à un réel souci de stockage de ces déchets médicaux spécifiques.

Madame la ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour activer les délais de mise en œuvre de cette nouvelle filière de collecte des DASRI diffus ? En attendant, ne serait-il pas opportun d’organiser, dans chaque territoire, des opérations de déstockage des DASRI, comme celle qui est en cours à Saint-Etienne Métropole afin de réduire les risques de mise en déchets assimilés aux ordures ménagères, ou DAOM ? Il s’agit d’éviter que ces déchets dangereux ne partent dans les circuits classiques dévolus aux emballages qui ne présentent pas de risques infectieux.

Quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour irriguer l’ensemble du territoire français avec des points de collecte bien répartis géographiquement ? Dans quels délais ?

Enfin, comment comptez-vous inciter les pharmacies encore résistantes au nouveau dispositif à respecter cette nouvelle filière de collecte des DASRI, dans la mesure où leurs locaux répondent aux exigences des règles de stockage, et à participer à leur niveau au réseau des « pharmacies collectrices » ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Madame la sénatrice, comme vous l’avez expliqué, l’éco-organisme DASTRI a été agréé le 12 décembre 2012 par les pouvoirs publics pour constituer la filière dite à « responsabilité élargie du producteur », ou REP, pour les déchets d’activités de soins à risques infectieux produits par les patients en auto-traitement.

Depuis le début de l’année 2013, cette filière s’attache à répondre aux objectifs fixés par son cahier des charges, dont le contenu a été défini par arrêté du ministre chargé de l’écologie et de moi-même.

Ce cahier des charges prévoit la constitution d’un réseau de points de collecte qui peuvent être des pharmacies d’officine. Vous vous êtes interrogée sur l’engagement et l’implication des pharmacies. Je veux vous rassurer sur ce point.

Le cahier des charges fixe des objectifs d’accessibilité et de proximité géographique puisqu’il prévoit un point de collecte pour 50 000 habitants et la possibilité pour chacun d’accéder à un point de collecte dans un rayon de quinze kilomètres. Ce réseau est actuellement en cours de consolidation.

Les services des ministères concernés, c’est-à-dire les miens et ceux du ministère chargé de l’écologie, ont défini, avec l’éco-organisme et les représentants des pharmaciens d’officine, les modalités du déploiement opérationnel du réseau de points de collecte.

Dans un premier temps, toutes les pharmacies qui assuraient jusqu’alors la fonction de point de collecte ont été sollicitées afin de savoir si elles souhaitaient intégrer ce réseau. Au 24 décembre 2013, 6 200 points de collecte avaient été identifiés par l’éco-organisme.

Depuis l’été dernier, les opérations de collecte ont permis à l’éco-organisme de collecter vingt-cinq tonnes sur l’ensemble du territoire national.

Des opérations de déstockage sont régulièrement organisées à la demande des pharmaciens. Par ailleurs, le réseau DASTRI a également accepté de collecter les DASRI perforants conservés par les patients en auto-traitement dans des emballages non conformes, tels que des bouteilles en plastique.

Mes services et ceux du ministère de l’écologie procèdent à des points d’étape réguliers afin de suivre l’avancée de la mise en place du réseau de points de collecte, en lien avec les agences régionales de santé.

Madame la sénatrice, vous le voyez, nous sommes mobilisés et, je le crois, sur la bonne voie.