M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Même si l’on tourne toujours un peu autour de la même problématique, la proposition qui est faite est plutôt régressive et j’approuve ce qu’a dit M. le rapporteur sur cette question. Une fois de plus, la démonstration paraît faite que le socle commun de compétences et de connaissances peut être variable d’une branche professionnelle à l’autre. Aussi, on ne peut que s’interroger une fois encore sur le socle commun de connaissances, de compétences et de culture.

Par ailleurs, cet amendement témoigne de ce que nous avons dénoncé au cours de nos précédentes interventions, à savoir que le socle commun de compétences répond effectivement à un besoin légitime du salarié pour son épanouissement personnel, mais également et surtout aux besoins des employeurs et des entreprises. La preuve en est qu’il est proposé que ce soient notamment les employeurs qui définissent les compétences minimales devant composer ce socle. Or, si ces connaissances sont indispensables, elles doivent être acquises au plus vite et sans condition : elles relèvent donc, comme l’a souligné le rapporteur, spécifiquement des plans de formation de l’entreprise, non du CPF. Celui-ci, pour être utilisé, implique une démarche volontaire du salarié.

Cela suppose d’ailleurs que ce dernier ait acquis suffisamment de droits pour obtenir sa formation. Car une autre question, dont il n’a pas été fait état, entre en ligne de compte : seul le salarié qui a acquis suffisamment de droits peut avoir accès à une formation ; celui qui n’en a pas acquis n’y a pas accès.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 111 rectifié, présenté par M. Cardoux, Mmes Boog, Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. de Raincourt, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mmes Giudicelli et Hummel, M. Husson, Mme Kammermann, MM. Laménie, Longuet, Milon et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary, Reichardt et Mayet, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 35

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les formations imposées à titre personnel par la réglementation au titre d’une obligation de formation conditionnant la poursuite de leur exercice professionnel.

La parole est à Mme Catherine Deroche.

Mme Catherine Deroche. La loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a introduit une obligation de développement professionnel continu – DPC – des professionnels médicaux et paramédicaux.

Les seuls financements prévus pour le DPC sont exclusivement réservés aux médecins et aux professionnels libéraux. Jusqu’à présent, les professionnels médicaux ou paramédicaux salariés pouvaient réaliser leur obligation de DPC en mobilisant les droits acquis au titre du DIF. La suppression de celui-ci entraîne une impossibilité pour le professionnel de santé de mobiliser les heures de son « compteur » du compte personnel de formation pour remplir son obligation annuelle de DPC. Cet amendement a pour objet de pallier cette impossibilité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Il s’agit là toujours du même débat et je me retrouve pleinement dans les propos que Mme Cohen a tenus à l’instant.

Il est question, dans cet amendement, de l’éligibilité au CPF des formations liées au développement professionnel continu des professionnels médicaux et paramédicaux salariés.

Le champ du CPF, tel qu’il a été défini par les partenaires sociaux, est bien la formation qualifiante. Il convient de ne pas perdre de vue cet enjeu, car l’accès limité à des formations qualifiantes est l’une des principales lacunes de l’actuel système français de formation professionnelle. C’est la raison pour laquelle, en commission, j’ai indiqué qu’il ne me semblait pas opportun de l’élargir au DPC. Toujours est-il que celle-ci s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Les raisons qu’a avancées M. le rapporteur, avant de devoir émettre un avis de sagesse, me permettent de donner, au nom du Gouvernement, qui n’est pas confronté à un problème d’égalité de votes, un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 111 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 196, présenté par Mmes Cohen et David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 35

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Les formations mentionnées aux 3° et 4° qui ne sont pas enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles doivent être conformes à des normes de qualité définies par décret. Elles font l’objet d’une évaluation triennale réalisée selon des modalités fixées par décret.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement s’inscrit dans la continuité de notre amendement précédent.

En effet, l’article L. 6323-6 du code du travail, tel qu’il résultera sans doute de l’adoption de ce projet de loi, précise les formations qui sont éligibles au compte personnel de formation et qui, par voie de conséquence, pourront être financées par la mobilisation des heures accumulées sur ce compte.

Si les certifications enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles ne nous inquiètent pas quant à leur qualité, nous avons quelques craintes s’agissant des formations mentionnées au 3° et 4° de ce même article, à savoir les diplômes et titres à finalité professionnelle délivrés au nom de l’État et créés après avis d’une instance consultative paritaire, qui y figurent de droit, ainsi que certains certificats de qualification professionnelle.

En effet, bien que certaines d’entre elles soient soumises à un avis de la Commission nationale de la certification professionnelle, l’exigence de qualité que nous souhaitons accorder à ces formations, dans l’intérêt des salariés, nous conduit à proposer qu’elles répondent à des normes de qualité arrêtées par décret.

Afin de ne pas figer la situation, et pour que les formations puissent évoluer dans le temps, de manière à assurer aux stagiaires en formation professionnelle des formations toujours plus utiles et actualisées, nous proposons que ces normes, comme les formations, fassent l’objet d’une évaluation triennale.

M. le président. L'amendement n° 239 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Hue, Mazars, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 36

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 6323-6-1. – Les formations mentionnées aux 3° et 4° du II de l’article L. 6323-6 qui ne sont pas enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles doivent être conformes à des normes de qualité définies par décret. Elles font l’objet d’une évaluation triennale réalisée selon des modalités fixées par décret.

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. Nous le savons bien, si la plupart des formateurs accomplissent leur tâche avec honnêteté, la profession compte aussi des brebis galeuses. Les témoignages de salariés ou d’entreprises qui ont fait appel à des formateurs totalement incompétents – pour ne pas dire plus – sont malheureusement encore trop nombreux.

Aussi cet amendement vise-t-il à garantir la qualité et le sérieux des formations qui ne sont pas inscrites au répertoire national des certifications professionnelles, notamment leur caractère qualifiant, et à prévoir un processus d’évaluation.

M. le président. L'amendement n° 277 rectifié, présenté par M. Patriat et Mme D. Gillot, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 36

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 6323-6-1. – Les formations mentionnées aux 3° et 5° du II de l’article L. 6323-6 qui ne sont pas enregistrées au répertoire national des certifications professionnelles doivent être conformes à des normes de qualité définies par décret. Elles font l’objet d’une évaluation quinquennale réalisée selon des modalités fixées par décret.

La parole est à M. François Patriat.

M. François Patriat. Cet amendement étant quasi identique à celui que vient de défendre Mme Laborde, je considère qu’il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Ces amendements ont pour objet d’introduire un critère de qualité obligatoire pour les formations éligibles au CPF et qui ne sont pas inscrites au RNCP.

Ce n’est pas parce que des formations ne sont pas inscrites à ce registre qu’elles ne font l’objet d’aucun contrôle. Je rappelle – et nous y reviendrons plus tard – que les régions exercent un contrôle sur les formations figurant au plan régional de formation. Il en va de même pour Pôle emploi et les services du ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Je pense d’ailleurs que M. le ministre pourra apporter aux auteurs de ces amendements toutes assurances sur la réalité et l’effectivité de ces contrôles, sans qu’il soit nécessaire d’y ajouter une obligation spécifique.

Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Nous sommes un peu dans la ligne de la discussion que nous avons eue avec Mme Jouanno sur l’amendement n°157, dont l’adoption aura pour effet de renforcer les contrôles par le biais d’un agrément portant sur toutes les formations, et pas seulement sur celles qui seront comptabilisées dans le compte personnel de formation.

C’est la même préoccupation qui s’exprime à travers ces trois amendements : celle de la qualité des formations et de la capacité à en vérifier la conformité à des normes définies par décret. Je pense que l’amendement que je présenterai après l’article 3 permettra de répondre à cette préoccupation.

Oui, madame Laborde, il existe effectivement des formateurs de piètre qualité, qui dispensent de pseudo-formations s’avérant totalement inutiles, bien qu’elles puissent être très onéreuses pour l’entreprise. C’est pourquoi il serait bon que l’entreprise ait, de son côté, un peu conscience de la nécessité de ne pas dépenser en vain son argent.

Du reste, la suppression de l’obligation de dépenser, qui aboutissait parfois à un gâchis épouvantable, incitera les entreprises à se préoccuper de la qualité de la formation.

Le défaut des trois amendements proposés, et dont l’origine est de caractère universitaire, puisque les formations délivrées par les universités sont toutes obligatoirement inscrites au RNCP, est de préjuger que l’enregistrement d’une formation au RNCP est un gage de qualité, ce qui jette le soupçon sur les formations qui n’y figurent pas.

Je ne pense pas que ce soit la bonne réponse aux préoccupations sur la qualité des formations. Il faut des mécanismes de contrôle renforcés, et ce sera l’objet de l’amendement que je vous proposerai.

Au bénéfice de ces explications, j’invite les auteurs de ces amendements à bien vouloir les retirer, faute de quoi l’avis du Gouvernement sera défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 196.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 239 rectifié.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 277 rectifié n’a plus d’objet.

L'amendement n° 238 rectifié, présenté par Mme Laborde et MM. Mézard, Alfonsi, Baylet, C. Bourquin, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin, Hue, Mazars, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 36

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« ... – Les formations des marins délivrées en application de la convention internationale de 1978 sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille sont également éligibles au compte personnel de formation, dans des conditions fixées par décret.

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. L’article 1er pose les principes généraux du compte personnel de formation au titre duquel les nouveaux droits acquis sont attachés et ouverts à la personne du salarié dès son entrée dans la vie professionnelle et jusqu’à sa retraite.

Cet amendement a pour objet de compléter l’article relatif aux formations éligibles au compte personnel de formation pour que les marins puissent conserver leur employabilité tout au long de leur carrière.

Les marins sont soumis à des obligations spécifiques en matière de formation déterminées par la convention internationale de 1978 sur les normes de formation des gens de mer, de délivrance des brevets et de veille. Cette convention impose notamment d’importantes obligations en matière de revalidation quinquennale des titres, brevets et certificats dont doivent être titulaires les marins pour pouvoir exercer leur métier et qui peuvent varier selon le type de navigation.

Nous souhaitons que les exigences de formation imposées aux marins par la convention internationale de 1978 puissent être éligibles au compte personnel de formation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Madame Laborde, vous proposez de rendre la formation des marins éligible au compte personnel de formation.

Le compte personnel de formation, que le salarié peut mobiliser à son initiative, ainsi que nous l’avons maintes fois souligné, n’a pas vocation à permettre de suivre les formations nécessaires à l’adaptation au poste de travail, car il ne s’agit pas alors d’un processus qualifiant. Il ne me paraît pas justifié de faire une exception pour les marins, quelle que soit l’estime que nous leur portons.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 238 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 197, présenté par Mmes Cohen et David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 37

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette durée complémentaire n’est pas prise en compte pour le calcul du plafond mentionné à l’article L. 6323-10.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. En l’état actuel du projet de loi, le compte personnel de formation est soumis à un plafond au-dessus duquel le salarié ne peut plus accumuler aucun droit.

Ce plafond, qui a été fixé à 150 heures, nous paraît insuffisant pour garantir aux salariés – notamment les plus éloignés de leur formation initiale ou ayant une formation initiale limitée – l’accès à des formations qui soient réellement qualifiantes.

Tenant compte de cette réalité, le projet de loi intègre le CPF dans le droit à la formation initiale différée, reconnu par l’article L. 122-2 du code de l’éducation. Ainsi, tout jeune sorti du système éducatif sans diplôme pourra bénéficier d’une durée complémentaire de formation qualifiante qui sera mentionnée dans le CPF.

Or, à la différence de ce qu’il en est pour certains droits également mentionnés dans le CPF, le projet de loi ne précise à aucun moment si cette durée complémentaire est ou non prise en compte dans la détermination du plafond de 150 heures.

Partant de ce constat et considérant que tout doit être mis en œuvre pour accroître les droits à la formation de celles et ceux qui en ont le plus besoin – préoccupation, qui, je le crois, est partagée sur toutes les travées –, nous demandons que la loi précise clairement que cette durée complémentaire, qui est une chance pour les jeunes salariés en manque de formation initiale, ne doit pas être prise en compte dans la détermination du plafond d’heures pouvant être cumulées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cette précision me paraît très utile, car elle lève tout malentendu. L’avis de la commission est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. C’est en effet une précision tout à fait bienvenue : avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 197.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 294, présenté par M. Jeannerot, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 38, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et sur les abondements complémentaires susceptibles d'être sollicités

La parole est à M. le rapporteur.

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Cet amendement vise à améliorer l’information des titulaires d’un compte personnel de formation en prévoyant que le service dématérialisé géré par la Caisse des dépôts devra pouvoir les renseigner sur les abondements complémentaires – de l’État, de la région, de l’OPCA, de Pôle emploi, etc. – auxquels ils pourront faire appel, selon leur situation professionnelle, s’ils souhaitent financer une formation dépassant 150 heures.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 294.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 198, présenté par Mmes Cohen et David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 40

Après les mots :

et de compétences,

insérer les mots :

consultable exclusivement par le bénéficiaire,

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Les alinéas 39 et 40 de l’article 1er prévoient la création d’un « système d’information du compte personnel de formation » qui permet au titulaire de « disposer d’un passeport d’orientation, de formation et de compétences, qui recense les formations et les qualifications suivies » ainsi que « les acquis de l’expérience professionnelle ».

Cet alinéa ne précise à aucun moment si l’employeur a accès à ce passeport de formation ou si son usage est strictement réservé au titulaire du compte. Ce silence nous paraît être source de difficultés potentielles pour les salariés car, si d’aventure l’employeur y avait accès, il disposerait de moyens de pression sur son personnel. Cela ne nous semble pas acceptable.

Le passeport peut être un outil intelligent au service des salariés pour qu’ils puissent retracer leur parcours professionnel, consulter leur acquis de compétences et disposer de la validation de leurs formations. Ils pourront également y consulter les formations éligibles et se renseigner sur celles-ci.

En revanche, ce passeport ne doit pas pouvoir être un outil permettant aux employeurs de discriminer les salariés, soit dans leur progression professionnelle, soit dans l’accès à de nouvelles formations, ou tout simplement dans l’accès à l’emploi. C’est pourquoi il nous semble important de préciser que seuls les salariés peuvent accéder à ce passeport.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Mon cher collègue, vous proposez que le passeport d’orientation, de formation et de compétences ne soit consultable que par le salarié. C’est une bonne disposition, qui permet en particulier de protéger absolument la vie privée. Pour cette raison précise, la commission émet un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. Une fois encore, le Gouvernement émet un avis favorable sur un amendement du groupe CRC. Les précisions ici proposées sont extrêmement utiles.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 198.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 199, présenté par Mmes Cohen et David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 42

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 6323-8-1. – Tous les ans, à compter du 1er juin 2015, le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle remet au Parlement un rapport évaluant, la mise en œuvre et l’utilisation du compte personnel de formation.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Sur l’initiative de députés, l’Assemblée nationale a adopté un amendement prévoyant que le « Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles assure l’évaluation de la mise en œuvre et de l’utilisation du compte personnel de formation et la rend publique par un rapport présenté au Parlement ».

Cette disposition nous semble particulièrement importante dans la mesure où l’évaluation des politiques publiques en matière de formation professionnelle est de nature à garantir aux publics concernés, c’est-à-dire aux salariés, des dispositifs performants.

Pour autant, la rédaction actuelle ne nous satisfait que partiellement en ce qu’elle ne précise pas le cadre dans lequel ce rapport sera remis. En particulier, elle n’indique pas la date de remise du premier rapport et ne précise pas si celui-ci sera unique, occasionnel ou régulier.

Afin de remédier à ces imprécisions, nous proposons une nouvelle rédaction de cet alinéa, prévoyant que le premier rapport est rendu public à compter du 1er juin 2015, puis est publié tous les ans, afin que la représentation nationale et les partenaires sociaux disposent d’éléments complets et récents sur le nombre de formations proposées et réalisées, leur nature et les conditions d’utilisation du compte personnel de formation.

Nous bénéficierons ainsi d’informations précises et précieuses pour, le cas échéant, faire évoluer le dispositif légal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Claude Jeannerot, rapporteur. Mme Cohen nous propose un rythme annuel pour la présentation de ce rapport. Cela nous semble une précision utile, et l’avis de la commission est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Michel Sapin, ministre. J’ai plaisir à donner aussi un avis favorable sur cet amendement de Mme Cohen.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 199.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 201, présenté par Mmes Cohen et David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 48

Supprimer deux fois les mots :

à temps complet

II. – Alinéa 49

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. L’alinéa 49 de l’article 1er dispose : « Lorsque le salarié n’a pas effectué une durée de travail à temps complet sur l’ensemble de l’année, l’alimentation [de son compte personnel de formation] est calculée à due proportion du temps de travail effectué. » Il prévoit donc une proratisation des heures travaillées prises en compte pour la formation lorsque celles-ci sont effectuées dans le cadre d’un contrat à temps partiel.

En fait, le dispositif qui nous est proposé n’est pas particulièrement innovant, car il reprend une contrainte injuste que la gauche avait, dans son ensemble, dénoncée lors de l’examen du projet de loi relatif à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie en 2009.

Pour notre part, nous demeurons opposés à toute distinction entre travail à temps complet et travail à temps partiel. Selon la logique qui sous-tend le présent texte, parce qu’un salarié travaillerait moins, il aurait un moindre accès à la formation, son compte personnel de formation étant alimenté au prorata des heures travaillées.

Cette disposition s’avère totalement injuste et inefficace pour mener à bien une réforme visant à la sécurisation de la formation professionnelle pour tous les publics, comme entend s’y employer le Gouvernement. En effet – nous avons déjà eu l’occasion de le signaler –, ce sont les salariés à temps partiel qui souffrent le plus d’un déficit de formation, car ils exercent les emplois les plus précaires et les plus fragilisés.

Par ailleurs, selon les chiffres de l’INSEE de 2012, près de 80 % des contrats à temps partiel sont conclus par des femmes. Proratiser l’alimentation du compte personnel de formation revient donc à complexifier l’accès des femmes non qualifiées à la formation. Or seulement 29 % des salariées peu qualifiées ont accès à la formation, contre 81 % de leurs collègues cadres, d’après les chiffres du Centre d’études et de recherches sur les qualifications. En outre, nombre de ces femmes peu qualifiées travaillent à temps partiel. Contrairement à leurs collègues qualifiées, elles ne disposent pas des moyens financiers suffisants pour déléguer une partie de leur charge familiale, et leurs contraintes personnelles sont un frein au suivi d’une formation. Leur permettre de créditer leur compte personnel de formation dans les mêmes conditions que leurs homologues à temps complet, c’est leur offrir une possibilité réelle d’émancipation par le travail et la qualification.

Nous nous opposons donc à la proratisation et, au travers de cet amendement, proposons de la supprimer, afin de permettre aux salariés exerçant une activité à temps partiel d’accumuler des droits à la formation identiques à ceux des salariés à temps plein et de sécuriser leur parcours professionnel. (M. Jean Desessard applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 200, présenté par Mmes Cohen et David, M. Fischer, Mme Pasquet, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 48

Supprimer les mots :

jusqu’à l’acquisition d’un crédit de cent vingt heures, puis de douze heures par année de travail à temps complet, dans la limite d’un plafond total de cent cinquante heures

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. L’alinéa 48 dispose : « L’alimentation du compte personnel de formation se fait à hauteur de vingt-quatre heures par année de travail à temps complet, jusqu’à l’acquisition d’un crédit de cent vingt heures, puis de douze heures par année de travail à temps complet, dans la limite d’un plafond total de 150 heures. »

Les membres du groupe CRC s’opposent à la limitation des droits à la formation par la fixation d’un plafond d’acquisition des droits, d’autant que, en dépit des modifications et améliorations apportées par l’Assemblée nationale, l’obtention d’un quota raisonnable d’heures de formation prend, vous en conviendrez, beaucoup de temps – il faut à peu près sept ans pour alimenter un compte de 150 heures –, alors que la durée des formations réellement qualifiantes, on le sait, est rarement inférieure à 150 heures.

L’instauration d’un tel plafond compliquerait encore davantage la possibilité de suivre une formation réellement qualifiante sans avoir recours à des abondements extérieurs, lesquels complexifient l’accès à la formation pour tous les publics et entraînent des inégalités de traitement, alors que, précisément, le droit à la formation devrait s’inscrire dans un service public national, garant de l’égalité des droits.

Nous ne pouvons accepter que figurent dans la loi des conditions qui restreignent le droit effectif à la formation pour toutes et tous. Or tel est le cas de cette disposition, qui réduit les possibilités pour les salariés de capitaliser les heures de formation sur leur compte durant de longues années pour enfin, quand ils le souhaitent, avoir accès à une formation longue et qualifiante.

Au même titre que la gestion du contenu du compte personnel de formation est laissée à l’initiative personnelle du salarié, la gestion de la formation continue via ce compte devrait aussi, selon nous, être laissée à son appréciation, et cela dans la durée.

C’est pourquoi nous souhaitons supprimer la mention d’un plafond total de 150 heures.