M. Jean Bizet. Permettez-moi d’ajouter deux précisions aux propos de nos collègues Gérard Bailly et Yvon Collin.

Tout d’abord, depuis que nous avons abordé l’examen de ce projet de loi, j’ai entendu prononcer des mots qui me conviennent tout à fait : compétitivité, productivité, recherche, innovation, simplification. Eh bien, chiche ! Voilà l’occasion de confirmer ces déclarations.

En France, nous souffrons d’une sorte de péché originel – M. le ministre qui a été député européen pendant un certain nombre d’années le sait mieux que quiconque – : à l’inverse des Anglo-saxons, nous ne savons pas faire un travail de lobbying avant l’éclosion des directives, au moment de la rédaction des livres verts et des livres blancs. Nous ne savons pas travailler en amont de la sortie d’une directive et, une fois que celle-ci est publiée, la France tombe dans un travers classique consistant à vouloir en rajouter. Dans le cas présent, la situation est très claire : appliquons ce que nous demande l’Europe, mais n’en faisons pas plus !

Ensuite, comme l’a souligné notre collègue Gérard Bailly, la France connaît des difficultés dans le secteur de la transformation de viande blanche – on les constate actuellement en Bretagne, mais elles risquent de gagner l’ensemble du territoire national. Dans certaines filières, nous ne produisons donc plus suffisamment de matière première pour faire tourner nos outils de transformation. On nous parle de réindustrialiser la France : il est par conséquent très important de recréer des outils de production dans des domaines bien particuliers, beaucoup moins polluants que l’on ne peut l’imaginer, à savoir les veaux de boucherie, les bovins à l’engraissement et les vaches allaitantes. Tel est l’objet de cet amendement.

Voilà quelques instants, un de nos collègues a évoqué l’administration. Nous avons l’administration la plus pertinente du monde (M. André Reichardt est dubitatif.), la plus performante du monde, mais ce n’est pas une raison pour qu’elle en fasse trop. (M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.) Qui doit commander dans ce pays, que le gouvernement soit de droite ou de gauche ? Ce n’est pas à l’administration, c’est aux parlementaires et aux membres du Gouvernement de le faire. Sans vouloir stigmatiser qui que ce soit – et surtout pas des gens excessivement compétents et à l’écoute –, je me permets de rappeler qu’il convient de ne pas en faire trop.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lasserre, pour présenter l’amendement n° 522 rectifié.

M. Jean-Jacques Lasserre. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Didier Guillaume, rapporteur. Nous partageons de nombreuses préoccupations, M. Bizet vient de le dire : l’innovation, la recherche, l’économie, la simplification. Ce qui nous oppose peut-être, mon cher collègue, c’est que nous sommes favorables à la simplification, alors que vous êtes pour la dérégulation. Cette différence entre nous est assez fondamentale.

Cette question ne date pas d’hier : les règlements ICPE concernant les élevages de bovins de viande ne sont pas dus à ce gouvernement, ni même au précédent. La question se pose depuis des années !

M. Jean Bizet. Eh bien, osez !

M. Didier Guillaume, rapporteur. Je vais vous répondre.

Nous ne devons pas déréguler, mais simplifier. Si on estime que l’administration en fait trop et qu’il suffit de supprimer une réglementation – l’idée peut paraître séduisante –, a-t-on réfléchi aux conséquences éventuelles ? La vérité d’aujourd’hui n’est pas nécessairement celle de demain.

Aujourd’hui, le code de l’environnement prévoit, pour le régime d’ICPE, une autorisation, un enregistrement et une déclaration. Si on supprime tout, on pourra créer des fermes de mille vaches où l’on voudra, sans aucune déclaration. (Mme Maryvonne Blondin opine.) Voilà le sujet.

Je me vois donc contraint d’émettre un avis défavorable sur ces quatre amendements identiques. On ne peut pas totalement déréglementer et déréguler.

Je pense que nous devons affirmer, parce que nous sommes parlementaires, notre soutien à l’administration française, car nous avons besoin d’elle sur nos territoires. En revanche, là aussi il faut distinguer entre le soutien à l’administration et la défense d’une bureaucratie parfois un peu pesante…

Mme Françoise Férat. Cela revient au même !

M. Didier Guillaume, rapporteur. Pas du tout ! C’est peut-être là que nos conceptions se séparent.

Je constate une véritable schizophrénie dans notre pays, et peut-être même dans cet hémicycle : on veut moins de normes, moins de régulation, moins de fonctionnaires, parce que tout cela a un coût, mais on veut plus de policiers, de gendarmes, de juges, d’enseignants. Sur le terrain, on nous supplie de ne pas fermer les sous-préfectures existantes, mais on nous dit à longueur d’année qu’elles ne servent à rien ! On reproche à l’administration de tout bloquer, mais on en veut encore plus. On dénonce les contraintes, mais on est bien content quand la DGCCRF vient faire des contrôles, sinon on assisterait à n’importe quoi. Nous sommes donc un peu schizophrènes, c’est ainsi !

Bien sûr, nous exprimons aussi des positions politiques : certains défendent un peu plus l’administration et la fonction publiques, d’autres un peu moins ; certains sont partisans d’un État régulateur et de fonctions régaliennes fortes et d’autres sont plus libéraux, voire ultra-libéraux ou sociaux-libéraux. Peu importe, c’est le débat politique et heureusement que cette confrontation est possible !

En revanche, nous ne pouvons pas accepter que l’on introduise dans cette loi une quantité d’amendements visant à déréguler sans en connaître les conséquences concrètes.

Concentrons-nous sur l’essentiel. Nous passons du temps sur ces sujets qui sont importants, mais de nombreux autres sujets le sont encore plus pour l’avenir de l’agriculture. Ces amendements, s’ils sont adoptés, ne vont pas améliorer notre compétitivité, ni créer de revenus pour les agriculteurs, ni changer nos pratiques culturales. Ils ne nous amèneront pas à réfléchir à la formation des agriculteurs, ni à faciliter l’installation des jeunes.

J’aimerais que nous arrivions le plus vite possible à discuter de l’installation, du foncier, du renouvellement des générations, de la formation, des baux environnementaux – sur lesquels nous avons pu trouver une solution équilibrée. Voilà les sujets importants de cette loi d’avenir de l’agriculture, qui doit tracer des pistes, donner des perspectives. Vous pouvez critiquer certaines de ses orientations, c’est l’objet du débat démocratique.

Au Sénat, peut-être plus qu’ailleurs, nous sommes tous des défenseurs et des promoteurs de l’agriculture et des agriculteurs. Ne croyez pas que je veuille vous donner des leçons. Évitons cependant de nous opposer sur des sujets qui n’en valent pas la peine, évitons de nous opposer, par exemple, sur le fonctionnement de l’administration française. Surtout, évitons d’opposer ceux qui connaîtraient le terrain à ceux qui le connaîtraient moins, parce que nous défendons tous la même conception, me semble-t-il. Certains d’entre nous sont agriculteurs, d’autres ne le sont pas, mais on peut s’intéresser à l’agriculture sans être agriculteur et les agriculteurs eux-mêmes peuvent avoir des visions différentes.

Essayons de partager une vision commune, une même passion pour l’agriculture, pour son développement harmonieux sur tous les territoires, sans en laisser aucun au bord du chemin. Faisons en sorte d’appréhender l’environnement et les problèmes de pollution et évitons que la dérégulation ne devienne la règle.

Nous nous plaignons souvent, les uns et les autres, du nombre des directives européennes – que l’on transpose sans doute un peu trop vite et un peu trop loin en France, monsieur le ministre. L’Europe, parce qu’elle a été conçue ainsi, nous invite souvent à déréguler, mais nos concitoyens ne sont pas favorables à cette conception – nous le constaterons peut-être malheureusement à l’occasion des prochaines élections au Parlement européen. Au contraire, ils veulent des règles justes, républicaines et équitables.

C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ce que les exploitations de bovins viande ne soient plus soumises au régime des ICPE, parce que ce serait une dérégulation. Nous ne créons pas une contrainte supplémentaire, puisqu’elle existe déjà – comme dans le cas des amendements précédents.

Examinons bien les textes sur le fond et disons-nous que la dérégulation pourrait avoir des conséquences imprévues, au détriment de l’agriculture et des agriculteurs. (Mme Maryvonne Blondin applaudit.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Stéphane Le Foll, ministre. J’émets le même avis que M. le rapporteur, pour trois raisons.

Tout d’abord, il est vrai que la directive sur les établissements classés ne comporte pas de précisions pour les élevages de veaux de boucherie, de bovins à l’engraissement et de vaches allaitantes. Cependant, une autre directive européenne impose une étude d’impact pour les élevages intensifs. On ne peut donc pas imaginer que les projets d’élevages de ce type ne fassent pas l’objet d’une étude d’impact.

Ensuite, la définition des élevages concernés relève plutôt du domaine réglementaire que du domaine législatif.

Enfin, depuis que je suis ministre, j’ai engagé des évolutions concernant les procédures applicables aux établissements classés : nous avons notamment mis en place une procédure d’enregistrement pour les élevages porcins. Dans le cadre des états généraux de l’agriculture, nous avons prévu d’étendre cette procédure aux élevages de volailles et, à terme, aux autres productions animales. Cette procédure d’enregistrement simplifie les démarches et permet, en fonction de certains seuils conformes à la réglementation européenne, d’assurer le respect des normes sans perdre le temps qui a été parfois perdu avec la réalisation d’études longues. Quant à l’étude d’impact, c’est le préfet qui décide si elle est nécessaire ou non.

La précédente majorité n’avait pas réussi à adapter les procédures relatives aux établissements classés, or nous l’avons fait. Faites-nous donc confiance, même si vous pensez que nous pourrions être plus rapides : ce que nous avons fait pour le porc, nous allons l’étendre aux autres productions animales, pour simplifier les procédures sans remettre en cause les règles environnementales. Il me semble important de le rappeler.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote.

M. Jean Bizet. Ce sujet est loin d’être classé…

Monsieur le ministre, vous venez de nous dire que cette question relevait du domaine réglementaire, dont acte ! En tant que ministre, vous pouvez quand même donner quelques orientations à votre administration…

M. Didier Guillaume, rapporteur. Il va le faire !

M. Jean Bizet. … et je suis persuadé qu’elle pourra vous écouter, voire vous obéir.

Monsieur le rapporteur, vous avez dit que l’adoption de nos amendements ne créerait pas de revenus supplémentaires pour les agriculteurs et ne contribuerait pas à de nouvelles installations. Pardonnez-moi de vous contredire : quand un agriculteur, soit sous forme sociétaire, soit directement, soit en « double actif », souhaite créer ce que l’on appelle un atelier hors sol, c’est bien pour obtenir un complément de revenu ! L’assouplissement des procédures « réglementaires » contribue également à réduire les coûts. Je ne peux donc pas accepter cet argument.

Vous nous reprochez par ailleurs de chercher à déréguler. On peut être sensible à cette argumentation. En effet, si on va trop loin dans la dérégulation, on risque de tomber dans l’anarchie. En France, nous n’aimons pas l’anarchie – nous les premiers !

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous avez rappelé que cette problématique ne date pas d’aujourd’hui, ni d’hier, voire d’avant-hier ! Nous sommes tout à fait d’accord.

Chaque époque a sa vérité, mais on en fait toujours un peu plus. En tout cas, faute d’adopter ces amendements, vous allez amener sur un plateau des parts de marché supplémentaires à nos voisins allemands !

M. Jean Bizet. Nous manquons de 60 000 places d’engraissement dans ce pays.

Je pense que les sénateurs bretons devraient m’entendre cinq sur cinq ! Au cours de la discussion générale, notre collègue Dominique de Legge a évoqué la filière porcine, qui n’est pas concernée par nos amendements parce que c’est une production tout à fait à part compte tenu de la nature de ses effluents. Il y a un quart de siècle, la France produisait 24 millions de têtes de porcs. Aujourd’hui nous n’en produisons qu’un million de plus. Le résultat, c’est que nous avons maintenant à peu près 15 % d’outils de transformation et d’abattage en trop.

Je le sais malheureusement trop bien puisque je crains que dans certains départements de Basse-Normandie nous n’ayons quelques soucis faute de matière première pour faire travailler les outils de transformation.

Je souhaiterais véritablement qu’on dépasse les clivages droite-gauche. Vous nous avez beaucoup parlé des groupements d’intérêt économique et environnemental, les GIEE, en appelant à laisser respirer les agriculteurs, à laisser s’exprimer l’innovation, les projets… Nous avons là un cas de figure qui nous donne l’occasion de le faire. Et si nous n’y parvenons pas, nous illustrerons un propos que j’aime assez, monsieur le rapporteur, et qui fut celui d’Edgar Faure : « l’immobilisme avance, et rien ne pourra l’arrêter » (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly, pour explication de vote.

M. Gérard Bailly La réponse du rapporteur et du ministre sur ce sujet m’a assez étonné.

Aujourd’hui, je crois l’avoir dit tout à l’heure, nous constatons tous une diminution assez importante de nos élevages. Il s’ensuit une baisse de régime de nos outils de transformation, voire des licenciements et du chômage dans les secteurs qui étaient très agricoles, je pense à la Bretagne, en particulier.

Vous nous dites que nous voulons déréguler. Non, nous rappelons qu’il y a une réglementation européenne et nous demandons pourquoi on en rajouterait plutôt que de l’appliquer. Je ne vois vraiment pas en quoi on dérégule !

Nous vous demandons aussi une simplification. Je le dis au président de la commission des affaires économiques, j’aimerais bien que, dans les mois qui viennent, on se demande pourquoi ces productions augmentent en Allemagne alors qu’elles baissent en France. C’est bien qu’il y a un problème ! Et on ne va pas continuer à se faire sans arrêt, dans toutes nos productions agricoles, prendre des parts de marché par l’Allemagne, ce qui vide nos campagnes !

Je pense aussi que les difficultés et la longueur dans le traitement des dossiers dissuadent les gens d’aller plus loin. M. Bizet l’a dit voilà quelques instants, la simplification que nous proposons peut apporter des plus à des agriculteurs qui mettent en place un atelier complémentaire.

Monsieur le ministre, vous avez beaucoup parlé de la méthanisation. Je ne suis pas intervenu sur le dossier de l’azote. Si l’on veut remplacer les engrais importés, je crois qu’il faudrait essayer d’augmenter la production de nos élevages. On le sait bien, la méthanisation ne se prête pas aux toutes petites unités. Elle ne pourra avoir lieu demain que dans des unités de taille assez significative.

Pour que l’agriculture joue demain pleinement son rôle en termes énergétiques, il faudra assurer la présence sur nos territoires d’unités permettant une certaine rentabilité. C’est la raison pour laquelle je pensais que ces amendements allaient recueillir un consensus. Je suis vraiment déçu des avis défavorables de M. le rapporteur avec lequel je partageais un grand nombre de points de vue tant en commission qu’hier en séance. Je suis profondément en désaccord avec les propos qu’il a tenus voilà quelques instants ; nous aurons l’occasion d’en reparler.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.

M. Dominique de Legge. Je veux simplement dire à M. le rapporteur que notre objectif, ce n’est pas la déréglementation. Ce que nous voulons éviter, c’est une surréglementation. Ne nous dites pas que nous refusons la réglementation ! Nous demandons une réglementation juste et équilibrée.

M. Jean Bizet. L’ordre juste ! (Sourires.)

M. Dominique de Legge. Monsieur le ministre, on a beaucoup parlé de la Bretagne tout à l’heure. Je voudrais y revenir pour vous dire mon sentiment dans cette affaire. Je vous crois de profonde bonne volonté,…

M. Dominique de Legge. … j’en suis intimement convaincu.

M. Gérard César. Bien sûr !

M. André Reichardt. C’est déjà ça !

M. Dominique de Legge. Ce gouvernement, comme ceux qui l’ont précédé, n’a pas cessé de nous présenter des mesures destinées à régler les problèmes auxquels sont confrontés les agriculteurs et toute la filière. Force m’est pourtant de constater qu’elles n’ont eu pour effet que de complexifier un peu plus la vie quotidienne des agriculteurs et des entreprises qui participent du débouché agricole.

Par conséquent, le cœur du débat, c’est qu’il se pose un problème de confiance. Et plus vous en rajoutez, plus on se demande ce que vont donner en pratique les idées de ce ministre – qui sont certainement bonnes –, la crainte étant de voir les contrôles se renforcer, ce qui accroîtrait encore la défiance.

Tous les amendements que nous avons défendus depuis ce matin ne vont pas dans le sens d’une déréglementation, monsieur le rapporteur. Ils vont simplement dans le sens d’une plus grande confiance entre les acteurs de la vie économique agricole et les administrations qui doivent les accompagner.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Ce que vous me demandez, ce n’est pas une nouvelle réglementation, c’est moins et, grosso modo, pas d’étude d’impact sur les veaux de boucherie, les bovins à l’engraissement et les vaches allaitantes.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Savez-vous que certains ateliers en jeunes bovins peuvent passer la barre des 500, voire des 1 000 têtes ? D’ailleurs, dans le débat avec les États-Unis, les feed lots, c’est ce qui existe,…

M. Gérard César. Effectivement !

M. Stéphane Le Foll, ministre. … et c’est ce que l’on conteste ici, en France.

Quand vous proposez un tel amendement, prenez la mesure de ses conséquences ! Seriez-vous prêt – et je m’adresse ici à dessein à un sénateur de Normandie – seriez-vous prêt, disais-je, à accepter qu’on installe à côté de chez vous, sans la moindre étude d’impact préalable, un atelier de 500 jeunes bovins ? Vous ne manqueriez pas de venir, en compagnie d’une association, rencontrer le Gouvernement pour lui dire : « C’est lamentable, c’est insensé, on laisse faire n’importe quoi ! »

M. Jean-Jacques Mirassou. Que fait l’administration, dira-t-on !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Chacun doit être raisonnable ! Ce que vous proposez, c’est qu’il n’y ait plus de limites, plus d’études d’impact. Je le répète : je prends à dessein l’exemple de la Basse-Normandie et la proposition d’installation d’un atelier de 500 à 1 000 jeunes bovins.

M. Jean Bizet. Je prends !

M. Jean-Jacques Mirassou. Au propre et au figuré !

M. Stéphane Le Foll, ministre. Oui, vous prenez ? Aujourd’hui ? Comme cela ? Et on verrait après ? En tout cas, c’est ce que vous proposez ! Eh bien, je vous le dis, ce n’est pas possible ! Par rapport à la conception de l’agriculture et au nombre d’agriculteurs, cela poserait quelques questions. Il vous faudrait vous expliquer sur votre projet pour l’agriculture avec un certain nombre de professionnels qui, à juste raison, voudront plutôt des agriculteurs que de gros ateliers. Vous voyez bien qu’on ne peut pas accepter votre amendement !

Ce débat ne porte pas sur la simplification. Il pose des questions extrêmement importantes.

Je l’ai rappelé, la procédure d’enregistrement est en cours. En Bretagne, près de 90 % des projets vont passer de la procédure d’autorisation à la procédure d’enregistrement, dixit le préfet des Côtes-d’Armor. Ce n’est pas rien ! Cela va réduire les durées. (M. Jean-Jacques Mirassou opine.) Nous progressons donc dans la voie de la simplification sans qu’il y ait pour autant absence de réglementation. De toute façon, il y a besoin de réglementation. On ne peut pas se faire de faux débats ou de faux procès sur ce point !

Je vous le dis, il faut réfléchir un instant aux conséquences que pourrait avoir votre proposition : de grands ateliers de feed lots en France se feraient sans étude d’impact. Je ne crois pas que vous-même, vous l’accepteriez !

Donc, restons dans l’objectif : simplifier, réduire les durées, respecter les règles environnementales.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 235 rectifié bis, 368 rectifié bis, 416 rectifié ter et 552 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 163 :

Nombre de votants 344
Nombre de suffrages exprimés 344
Pour l’adoption 169
Contre 175

Le Sénat n'a pas adopté.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures dix.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d'une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° 238 rectifié ter est présenté par MM. Adnot, Détraigne et Deneux.

L’amendement n° 294 rectifié bis est présenté par M. César, Mme Lamure, MM. Pointereau, Sido, Hérisson et Houel, Mme Masson-Maret, MM. Billard, Hyest, Reichardt, Couderc et Milon, Mme Mélot, MM. Savary, Beaumont, Husson, Doligé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

L’amendement n° 353 rectifié est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 7 à 12

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Marcel Deneux, pour présenter l’amendement n° 238 rectifié ter.

M. Marcel Deneux. Je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 238 rectifié ter est retiré.

La parole est à M. Gérard César, pour présenter l’amendement n° 294 rectifié bis.

M. Gérard César. Il s’agit d’un amendement très important.

En l’état actuel du droit, le champ d’application du bail avec clauses environnementales paraît suffisant pour répondre aux enjeux de protection de la biodiversité, en particulier dans les zones sensibles.

Mme la présidente. La parole est à M. Yvon Collin, pour présenter l’amendement n° 353 rectifié.

M. Yvon Collin. Il a été défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 60 rectifié, présenté par MM. Revet et Trillard et Mmes Sittler et Boog, est ainsi libellé :

Alinéas 7 à 12

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

II. – Les quatre derniers alinéas de l’article L. 411–27 du code rural et de la pêche maritime sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :

« Des clauses visant au respect par le preneur de pratiques culturales mentionnées au deuxième alinéa peuvent être incluses dans les baux, lors de leur conclusion ou de leur renouvellement pour les parcelles situées dans les espaces mentionnés aux articles L. 211–3, L. 211–12, L. 322–1, L. 331–1, L. 331–2, L. 332–1, L. 332–16, L. 333–1, L. 341–4 à L. 341–6, L. 371–1 à L. 371–3, L. 411–2, L. 414–1 et L. 562–1 du code de l'environnement, à l'article L. 1321–2 du code de la santé publique et à l'article L. 114–1 du présent code à condition que ces espaces aient fait l'objet d'un document de gestion officiel et en conformité avec ce document.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article, notamment la nature des clauses qui peuvent être insérées dans les baux. »

La parole est à M. Charles Revet.

M. Charles Revet. L’article L. 411–27 du code rural et de la pêche maritime prévoit la possibilité d’insérer des clauses environnementales dans les baux.

Deux cas de figure sont aujourd’hui possibles.

Soit les parcelles sont détenues par un bailleur personne morale de droit public, une association agréée de protection de l’environnement, une personne morale agréée « entreprise solidaire », une fondation reconnue d’utilité publique ou un fonds de dotation.

Soit les parcelles sont détenues par un bailleur autre que mentionné précédemment, c’est-à-dire un bailleur privé.

Une disposition réglementaire prévoit une liste de clauses environnementales pouvant être insérées dans le bail. Aussi, l’article L. 411–31 du code rural et de la pêche maritime prévoit que le bail peut être résilié si le preneur ne respecte pas les clauses insérées dans le bail.

La possibilité d’insérer des clauses environnementales dans les baux n’est pas neutre de conséquences puisqu’elle permet la résiliation du bail en cas de défaut du preneur. Un éventuel élargissement de cette disposition entraînerait des conséquences mal maîtrisées. Celle-ci doit donc être encadrée.

Par ailleurs, l’un des piliers fondamentaux du statut du fermage est la liberté d’exploitation. Le preneur a le choix de conduire ses pratiques sans l’intervention de son bailleur. Aussi, lorsque les parcelles sont situées dans un zonage, les clauses doivent répondre au document de gestion officiel du bien loué.

L’égalité de traitement entre citoyens devant la loi et les règlements constitue un principe général du droit que les autorités administratives doivent respecter dans les législations et réglementations qu’elles mettent en œuvre.

Il est donc indispensable que les clauses environnementales ne puissent être insérées dans les baux, quel que soit le bailleur, uniquement dans le cas où la parcelle serait située dans un zonage environnemental. Elles devront être en conformité avec le document de gestion du bien loué.

Par ailleurs, je vous ai interrogé hier, monsieur le ministre, avant l’examen de l’article 1er, en évoquant la situation de la pêche, sur les projets de classement, notamment en zones Natura 2000, sur l’ensemble du littoral, depuis Dunkerque jusqu’au Mont-Saint-Michel, ainsi qu’en divers endroits de la vallée de Seine, pour ne parler que du nord-ouest de la France.

Ces projets auront des incidences ; aussi, j’aimerais que vous me disiez si ce schéma sera réalisé.

Pour ce qui concerne l’aquaculture, que je n’ai pas évoquée hier afin de ne pas prolonger mon propos, la production a été diminuée de moitié en dix ans. La France importe aujourd’hui 85 % de ses besoins en poissons et crustacés. C’est dramatique, quand on sait que notre pays dispose de la deuxième zone maritime du monde !

Je vous ai écrit à ce sujet voilà plusieurs mois, monsieur le ministre – à moins que ce ne soit à votre prédécesseur –, car j’avais été interrogé par les propriétaires et les exploitants installés tout au long du littoral et en vallée de Seine, qui voulaient connaître les conséquences d’un tel classement sur la valeur vénale de leurs terrains et parce que, dès lors que des normes très strictes s’appliquent, il y a fatalement des incidences sur les résultats des exploitations. Je n’ai pas reçu de réponse à ce jour.

Je pourrai vous envoyer le double de ce courrier, monsieur le ministre, afin que vous puissiez me répondre.

Cette mesure n’est pas innocente, et elle concerne l’ensemble du littoral ! Et ce qui est vrai pour le nord-ouest de la France l’est aussi pour les autres parties du territoire.

Voilà pourquoi j’ai déposé cet amendement, que je souhaite vous voir prendre en compte.