M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, vous soulevez une question difficile sur laquelle le Gouvernement, et notamment le ministère des outre-mer, s’est déjà penché.

Le suicide est toujours un drame individuel difficile à analyser. Dans la région du fleuve, nous avons malheureusement également déploré le suicide d’enseignants métropolitains. Ce sujet grave ne concerne donc pas uniquement les communautés amérindiennes.

Néanmoins, ce type de problème survient plus fréquemment dans ces régions, ce qui sollicite notre responsabilité. Ces territoires, qui sont d’ailleurs magnifiques, accueillent des hommes et des femmes dont la culture, le vécu et les traditions sont différents de ceux de la majorité des Français.

Nous devons faire entrer ces populations dans la modernité, pour leur permettre d’appréhender un certain nombre d’exigences de la vie moderne, tout en respectant leur mode de vie.

Chaque citoyen de notre pays a le droit d’avoir une place correspondant à ses attentes ; aujourd’hui, nous constatons que les Amérindiens s’inscrivent aussi dans une démarche de modernité.

À cet égard, je me réjouis que, pour la première fois, une femme amérindienne, Mme Cornélie Sellali Bois-Blanc, ait été élue maire à Iracoubo et que des bureaux de vote aient ouvert dans les villages amérindiens du Haut-Maroni et de Taluen.

Il est vrai que nous devons faire face à une forme de désarroi de la population amérindienne, ce qui nous amène à agir dans divers domaines.

Dans le domaine de l’éducation, qui m’est familier en raison de mes attributions antérieures, la question est de savoir comment rendre l’éducation accessible à tous, notamment aux jeunes qui vivent dans des villages particulièrement éloignés et qui ont des racines culturelles différentes.

Vous le savez, nous avons créé des écoles de proximité de façon à éviter que de très jeunes enfants n’aient à faire de longs trajets en pirogue pour rejoindre un établissement scolaire. Nous espérons que, de la sorte, ils seront moins dépaysés pour aborder les apprentissages, à tout le moins au niveau de l’école maternelle.

Nous avons aussi des intervenants en langue maternelle pour accueillir les enfants, lesquels ne parlent le plus souvent pas du tout le français, pour les familiariser à l’école dans leur langue maternelle et leur environnement avant de commencer l’apprentissage de la langue française. Ainsi, l’accès à l’école sera moins traumatisant pour eux.

Nous avons aussi reconnu, dans la loi du 8 juillet 2013, la place des langues vernaculaires, notamment amérindiennes ou créoles, dans l’enseignement. C’est également une manière de rendre moins traumatisant pour un enfant le passage de la vie dans son village à la vie à l’école.

Par ailleurs, un ensemble de dispositions ont été prises pour lutter contre le mal-être des populations amérindiennes. Vous avez évoqué le plan préfectoral de lutte contre le suicide du 21 janvier 2011, qui porte notamment sur les questions de santé et d’addiction.

Le secteur associatif est également très mobilisé. Vous avez évoqué l’ADER, qui travaille sur un programme global de prévention communautaire du suicide dans le Haut-Maroni. Nous avons aussi essayé de prendre en compte les problèmes d’addiction, notamment à l’alcool, qui fragilisent ces populations.

Sur la question de l’isolement, de nombreux efforts sont faits pour aider notamment les jeunes Amérindiens qui sont pris entre deux mondes – leur monde traditionnel et celui de l’école.

Il convient enfin de garantir la continuité territoriale. Sur ce point, de nombreuses mesures ont été prises.

Enfin, vous avez évoqué, madame la sénatrice, la question de la convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux. Cette question soulève une difficulté à laquelle nous nous heurtons également dans de nombreux autres domaines. La Constitution garantit l’égalité et l’unicité du peuple français. Par conséquent, il est très difficile de donner des droits spécifiques à une partie de ce peuple, notamment aux peuples autochtones. Pour autant, cela ne nous dispense pas d’essayer de faire en sorte que les pratiques et les savoirs locaux de ces populations qui vivent sur le fleuve puissent être pris en compte.

Madame la sénatrice, la tâche est difficile, mais je suis certaine que nous vous trouverons à nos côtés pour essayer d’avancer dans l’intérêt des peuples autochtones.

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Madame la ministre, je vous remercie d’avoir répondu de façon précise aux questions que je vous ai posées.

En effet, le sujet est grave et difficile, comme vous l’avez reconnu. Je suis tout à fait disposée à voir avec vous comment travailler ensemble pour avancer.

Quant à la ratification de la convention n° 169, il faut se pencher de plus près sur la question pour essayer de trouver une solution positive.

durée de validité de la carte d'identité et profession de photographe

M. le président. La parole est à M. Michel Houel, auteur de la question n° 695, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

M. Michel Houel. .Ma question, qui s’adressait à M. Bernard Cazeneuve – et je vous remercie par avance, madame la ministre, de répondre à la place de votre collègue ministre de l’intérieur – porte sur les conséquences sur la profession de photographe du décret du 18 décembre 2013 relatif à la durée de validité de la carte nationale d’identité.

Le 1er janvier 2014, la durée de validité de la carte nationale d’identité est passée de dix à quinze ans. Cette mesure participe, certes, à la baisse des dépenses publiques, mais entraîne des effets catastrophiques pour les professionnels de la photographie.

L’Association pour la promotion de l’image, l’API, estime le nombre de cartes nationales d’identité concernées à 5,8 millions, soit autant de photographies qui ne seront pas réalisées et, en conséquence, une perte de chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 40 millions d’euros.

Ainsi, Photomaton va perdre plus de 20 % de son chiffre d’affaires. Cela signifie la fermeture d’unités en France, avec des effets induits importants sur toute la filière d’exploitation des cabines, qu’il s’agisse des entreprises de logistique, de réparation, voire de tôlerie.

Au total, ce sont 9 000 emplois et 4 000 magasins de photographes qui sont condamnés par cette décision. Cela représente autant de commerces qui disparaîtront dans nos communes.

Je vous demande donc d’engager rapidement un dialogue constructif avec les professionnels pour trouver une solution acceptable pour tous. Le but est de soutenir une économie photographique, lourdement pénalisée, qui pourrait disparaître, et de tenter de sauver des emplois.

C’est un maire d’une commune de 5 000 habitants qui a encore la chance d’avoir un photographe qui vous parle ! Je m’étais d’ailleurs déjà battu ici même contre la décision de faire réaliser les photographies des passeports par nos collectivités, alors qu’il y a des professionnels dont c'est le métier. Aujourd'hui, ma question s’inscrit dans la continuité de cette précédente intervention.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur, vous attirez l’attention de Bernard Cazeneuve sur une conséquence inattendue de la modification législative qui a étendu de dix ans à quinze ans la durée de validité des cartes nationales d’identité.

Dans un premier temps, nous étions surtout attentifs au fait que cette mesure devait simplifier la vie des citoyens.

À titre personnel, j’avais trouvé un inconvénient à la modification : les règles à respecter – ne pas sourire, ne pas porter de bijoux voyants – ne rendent en effet pas les photographies destinées aux papiers d’identité très avantageuses !

Mais, monsieur le sénateur, vous avez évoqué une question beaucoup plus difficile : l’incidence sur l’activité de la filière photographique de l’allongement de la durée de validité des cartes d’identité.

Il faudra regarder cela de plus près, car cette décision a sans aucun doute des conséquences sur l’activité des photographes et de la société Photomaton.

Permettez-moi toutefois de faire remarquer que la situation des professionnels de la photographie a déjà été prise en considération dans la gestion de la délivrance des passeports, puisque, à ma connaissance, les appareils photographiques intégrés au dispositif de recueil ont été désactivés. Cette mesure a permis aux photographes de continuer leur activité.

Pour l’instant, il n’est pas prévu de suspendre la décision relative aux cartes d’identité. Cette mesure constitue une simplification pour les usagers, et la situation de ces derniers doit être prise en compte. Il y aura lieu de travailler avec les filières sur les évolutions nécessaires de la profession. Cette dernière supporte également, me semble-t-il, l’incidence du développement des téléphones portables, qui permettent de prendre des photos à tout moment.

Monsieur le sénateur, je suis désolée de ne pas pouvoir vous apporter une réponse plus satisfaisante à vos yeux. Le dialogue entre les professionnels et les ministres responsables du social et de l’industrie doit à mon avis s’imposer.

M. le président. La parole est à M. Michel Houel.

M. Michel Houel. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Bien sûr, elle ne me satisfait pas complètement, mais je la comprends parfaitement.

En quinze ans, le visage change. Regarder la photographie de sa carte d’identité sera une façon comme une autre de ne pas vieillir ! (Sourires.)

M. le président. Mes chers collègues, dans l’attente de l’arrivée de M. Cuvillier, secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures dix, est reprise à dix heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

fermeture du centre météo-france de pau

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, auteur de la question n° 724, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le ministre, en 2013, le département des Pyrénées-Atlantiques a connu 4 jours de vigilance rouge pour avalanches et inondations, 20 jours de vigilance orange pour inondations, avalanches, fortes pluies, vents, orages et neige et 228 jours de vigilance jaune pour les mêmes phénomènes.

Nous savons que les objectifs de réduction des dépenses publiques et de modernisation de l’action publique que s’est fixés le Gouvernement sont courageux, mais toute vision globale manque de substrat sans une approche plus précise des cas particuliers qui la constituent.

Alors que la révision générale des politiques publiques engagée par l’ancienne majorité a prévu, de 2012 à 2017, la fermeture de 55 des 108 centres de Météo-France qui existent sur le territoire français, celui de Pau-Uzein semble condamné à l’horizon 2016.

Monsieur le ministre, ce cas particulier me semble devoir être observé avec davantage d’attention. Je vais m’en expliquer.

Tout d’abord, l’aéroport international de Pau-Pyrénées, qui a accueilli 600 000 voyageurs en 2012, est équipé pour l’atterrissage tout temps. Sa fiabilité est évidemment renforcée par la présence du centre météorologique.

En outre, comme vous le savez, il existe une forte activité militaire sur la plate-forme aéroportuaire paloise. Les unités militaires, notamment celles du 5e régiment d’hélicoptères de combat et de l’école des troupes aéroportées, ont besoin d’informations météorologiques précises, que seul le centre de météo de Pau peut leur délivrer.

Par ailleurs, le maintien du centre météorologique est une nécessité compte tenu des prévisions précises dont a besoin le site SEVESO de Lacq, site industriel très important que vous connaissez.

Le centre météorologique de Pau-Uzein trouve également son utilité en raison du caractère agricole du département, qui exige une bonne anticipation des évolutions du temps.

Enfin, dans notre département en partie montagneux, le centre départemental de météorologie est un maillon indispensable pour les secours en montagne et pour l’évaluation des risques d’avalanche, qui sont nombreux. Il l’est aussi pour les routes internationales, lesquelles desservent notamment l’usine Toyal Europe, située en haute montagne, ainsi que le territoire d’Aragon, en Espagne.

Monsieur le ministre, à Pau, Météo-France commença à enregistrer et à conserver ses premières données dès 1921, et le centre de Pau-Uzein fut créé en 1945. Autrement dit, Météo-France a plus de cent ans d’histoire commune avec le département !

Aujourd’hui, le centre est composé de sept agents, qui remplissent un grand nombre de missions, toutes plus importantes les unes que les autres, parmi lesquelles on trouve, en premier lieu, celle, bien connue, de l’observation du temps. Pour cela, il bénéficie d’un réseau climatologique local basé sur dix stations automatiques et quarante observateurs bénévoles.

La deuxième mission fondamentale du centre est le service public de la sauvegarde des personnes et des biens. Lors d’épisodes météorologiques importants, Météo-France met ses compétences au service de la préfecture et de la protection civile quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Le centre participe également aux rapports d’expertise pour les déclarations de catastrophe naturelle, ce qui demande une connaissance de la géographie locale extrêmement poussée, ainsi qu’à la confection des bulletins d’appui pour les écobuages, qui constituent une spécificité du département.

Enfin, il collecte et exploite les données permettant une meilleure connaissance du climat local.

Face à l’étendue de ces missions, remplies par des agents opérationnels tous les jours, de six heures à vingt et une heures, des questions évidentes se posent.

La première question tient à l’efficience de la réorganisation territoriale de Météo-France dans le cas où le centre de Pau-Uzein viendrait à disparaître. En effet, il semblerait que la répartition des missions entre les centres de Biarritz et de Bordeaux ne soit pas encore tout à fait établie. Il serait même question de transmettre la partie relative à la montagne au centre de Tarbes, dans les Hautes-Pyrénées.

Au regard de ces quelques éléments, on comprend bien les inquiétudes qui montent, ici ou là, dans cette partie du département des Pyrénées-Atlantiques, quant à la qualité des services. Nous entendons parfaitement que les outils utilisés sont de plus en plus performants. Il n’empêche, nous avons des doutes sur l’efficacité du service rendu aux utilisateurs et aux collectivités locales : il est difficile de croire que des outils, aussi performants soient-ils, puissent produire un rendu aussi précis et efficace qu’une équipe de sept agents, tous béarnais ou pyrénéens, travaillant sur ce territoire de façon continue depuis des années et ayant une connaissance poussée du terrain.

La seconde question qui reste en suspens, et qui est sans doute la plus importante, est celle de la situation des agents, lesquels pourraient se voir contraints à une mobilité. Monsieur le ministre, leur situation doit être clarifiée le plus rapidement possible !

Tous ces éléments nous conduisent à nous interroger sur la pertinence de la fermeture du centre de Météo-France de Pau-Uzein, en particulier si l’on considère le contexte actuel du département des Pyrénées-Atlantiques, qui, comme de nombreux départements de la façade atlantique, se relève doucement des épisodes climatiques particulièrement violents de l’été et de l’hiver derniers.

Pouvons-nous être certains que, sans le centre de Pau-Uzein, ces derniers mois, les informations auraient été transmises aux autorités compétentes avec la même rapidité et la même qualité ? En aucun cas ! Je crois même que, ces derniers temps, des vies humaines ont pu être sauvées grâce aux agents de ce centre, ce dont je les remercie.

Aussi, monsieur le ministre, je vous prie de bien vouloir m’indiquer l’état d’avancement réel de cette fermeture et, le cas échéant, les moyens qui seront mis en œuvre en vue du maintien en tous points de la qualité du service.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Ségolène Royal qui, empêchée, m’a demandé de répondre à votre question.

Météo-France joue un rôle-clé dans la prévision des événements climatiques et dans notre politique de prévention des risques. C’est un service public utile aux territoires, à leur économie et à l’ensemble des professions dont l’activité est dépendante des aléas climatiques. Mme Ségolène Royal est très attachée à la qualité de ses missions.

Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie entend l’inquiétude dont vous vous faites le relais : l’inquiétude légitime des personnels quant à leur avenir, la fermeture du centre météorologique de Pau, envisagée à l’horizon 2016, s’inscrivant dans le cadre d’une réorganisation du réseau de l’établissement public.

Toutefois, à la fin de cette même année 2016, l’établissement conservera 55 implantations territoriales et un réseau qui restera le plus dense d’Europe. La précision dans la prévision météorologique sera maintenue, grâce à d’importants progrès techniques en matière de prévision numérique, de systèmes d’observation météorologique et de technologies de communication.

Dans ce contexte, il n’est plus nécessaire de maintenir un centre météorologique dans chaque département : le maintien d’un centre compétent pour deux ou trois départements semble davantage approprié. En effet, un tel périmètre de responsabilité permet une connaissance fine des spécificités locales, tout en donnant aux centres météorologiques une taille pertinente, avec un encadrement renforcé et une expertise de qualité. Comme dans les autres régions, cette nouvelle organisation garantira une réponse rapide des cellules de crise mises en place auprès des préfets.

Au demeurant, les prévisions de Météo-France s’inscrivent, depuis de nombreuses années, dans un système national, piloté à Toulouse, le cadrage établi à partir de divers modèles numériques étant ensuite décliné et affiné progressivement à des échelons interrégional, régional et local.

Les fonctions exercées par le centre départemental de Pau seront reprises par le centre de Bordeaux, qui assure une permanence de service vingt-quatre heures sur vingt-quatre et s’appuiera, par ailleurs, sur le centre météorologique de Biarritz.

L’établissement a prévu, en concertation avec les organisations syndicales représentatives, un accompagnement individuel des agents concernés par une mobilité géographique ou professionnelle à l’occasion de cette réorganisation, pour définir une évolution de carrière correspondant à leurs attentes.

Les missions de service public continueront d’être remplies avec la même exigence qu’aujourd’hui, tout comme les prestations commerciales, au rang desquelles figurent les bulletins d’information que vous avez mentionnés. Le département des Pyrénées-Atlantiques continuera à bénéficier de prévisions météorologiques tenant compte de ses spécificités et des services d’appui et d’expertise nécessaires pour la gestion des événements météorologiques dangereux.

Madame la sénatrice, cette réorganisation met à profit les avancées techniques les plus pointues dans le domaine de la météorologie, pour maintenir un service de qualité en direction des acteurs locaux, tout en contribuant à l’optimisation des ressources que l’État alloue à Météo-France.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le ministre, vous le comprendrez, cette réponse ne peut évidemment pas me satisfaire.

Je tiens à souligner de nouveau l’importance du centre de Météo-France de Pau-Uzein pour l’ensemble du département des Pyrénées-Atlantiques. J’ai bien écouté votre réponse, mais je me dois de relayer, dans cet hémicycle, les inquiétudes qu’y suscite l’annonce de sa fermeture.

Il ne faut pas oublier que, comme toute la façade atlantique, les Pyrénées-Atlantiques se relèvent doucement des intempéries particulièrement violentes que le littoral a connues cet hiver. Monsieur le ministre, vous le savez bien, et je vous remercie d'ailleurs de vous être récemment déplacé à Anglet.

Or, c’est pendant cette convalescence que l’on annonce la fermeture d’un des acteurs majeurs de la protection des personnes lors de ces événements ! Cela soulève des interrogations. Au plus fort des intempéries, le centre de Pau-Uzein faisait un point toutes les deux heures avec la préfecture, le service des crues, les pompiers. À ce moment, croyez-moi, il était précieux d’avoir des femmes et des hommes au plus près du terrain, connaissant le moindre cours d’eau ! Et que dire des écobuages, pratiqués dans le département et si importants pour les terres agricoles ? C’est encore le centre de Météo-France de Pau-Uzein qui établit le bulletin météo d’appui pour la préfecture !

Monsieur le ministre, je vous assure que tout cela a un sens pour la population, et il me semble que le signal que l’on va envoyer, celui du retrait d’un nouveau service public de proximité, n’est pas le bon.

C’est tout de même à cent ans d’histoire commune entre Météo-France et les Pyrénées-Atlantiques que l’on s’apprête à mettre un terme. Ce n’est pas rien !

J’entends que les économies sont absolument nécessaires pour le redressement de notre pays, et vous savez que vous pouvez compter sur le groupe socialiste du Sénat pour vous aider dans cette tâche difficile. Toutefois, il est aussi de notre devoir de parlementaires de vous alerter lorsqu’il est procédé à certaines coupes budgétaires de manière aveugle. Il y va également de la légitimité des parlementaires, notamment des sénateurs, sur ces questions qui ont une incidence directe sur nos départements !

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État. Merci, madame la sénatrice !

avenir des établissements publics territoriaux de bassin interdépartementaux

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Gaouyer, auteur de la question n° 690, adressée à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Mme Marie-Françoise Gaouyer. Monsieur le secrétaire d’État, ma question concerne les établissements publics territoriaux de bassin, les EPTB, reconnus depuis la loi de juillet 2003 comme les acteurs de référence en matière de politique de l’eau à l’échelle d’un bassin versant ou d’un sous-bassin.

Depuis dix ans, ces établissements ont acquis une expérience et un savoir-faire irremplaçables. Au-delà de leur rôle essentiel dans la prévention des inondations, la préservation des zones humides et la gestion équilibrée de la ressource eau, qui constituent leur cœur de compétence, les EPTB ont apporté une contribution décisive à notre connaissance de ces espaces et à leur valorisation auprès du public.

À titre d’exemple, l’EPTB de la Bresle mène des actions aux échelles adaptées, à la demande des collectivités ou même des agriculteurs : engagement des travaux de restauration de la continuité écologique, avec des résultats concluants en termes de remontée des poissons migrateurs ; lancement d’une étude pour lutter contre les érosions et les ruissellements sur un sous-bassin ; animation, avant sa validation, du schéma d’aménagement et de gestion des eaux…

Monsieur le ministre, en intégrant les EPTB aux dispositifs de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, la MAPAM, au titre de la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations, la Gémapi, compétence désormais dévolue aux établissements publics de coopération intercommunale – les EPCI – à fiscalité propre, avec possibilité de délégation vers un EPTB, vous avez reconnu cette expérience ainsi que la pertinence de la gestion par bassin versant, seule à même d’apporter la cohérence indispensable pour des espaces qui ne connaissent pas nos frontières administratives.

Toutefois, le transfert ou la délégation de cette compétence restent volontaires, ce qui fragilise les EPTB actuels. De plus, ceux-ci n’ont été que partiellement intégrés puisque la version actuelle de la loi ne fait référence qu’aux syndicats mixtes, qui ne sont qu’une forme d’organisation administrative de ces établissements. En effet, parmi les trente-six EPTB, dix sont des institutions interdépartementales.

Cette décision d’écarter un quart des établissements est étonnante et préjudiciable. Tout d’abord, elle crée des ambiguïtés localement : certains EPCI vont devoir prendre en charge la Gémapi, sans expérience et avec peu de moyens, alors même qu’un EPTB interdépartemental assurait jusqu’alors cette compétence avec succès. Or il est impossible pour les EPCI de donner délégation à un tel EPTB pour assurer cette compétence ! Faudra-t-il que l’EPTB disparaisse et que les EPCI reprennent le travail à zéro ? Faudra-t-il que l’EPTB change de forme et devienne un syndicat mixte ?

Cette seconde solution n’est pas intrinsèquement mauvaise, mais elle comporte des risques. Détruire une institution pour recréer un syndicat mixte serait long, juridiquement complexe et politiquement périlleux. En particulier, le désengagement de certains départements, au regard notamment des contraintes budgétaires qu’ils connaissent, est à craindre. Vous le voyez, cette solution, si souhaitable soit-elle, recèle des fragilités à tous les étages !

Monsieur le ministre, quel avenir le ministère du développement durable réserve-t-il aux EPTB interdépartementaux ? L’État est-il prêt à les accompagner activement dans la transition que vous semblez appeler de vos vœux ? Enfin, comment envisagez-vous de renforcer sur tout le territoire national la logique globale de gestion par bassin versant, seule à même d’assurer les solidarités entre collectivités ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, je vais vous faire connaître la réponse de Mme Ségolène Royal.

La politique de gestion des milieux aquatiques et de prévention des risques d’inondations et de submersion nécessite la structuration d'une maîtrise d'ouvrage territoriale en charge de la gestion permanente des ouvrages hydrauliques, la maîtrise de l'urbanisation des zones exposées, la gestion intégrée des cours d'eau et une sensibilisation des élus et de la population.

Ces compétences étaient jusqu'alors facultatives et partagées entre tous les niveaux de collectivités. La loi MAPAM, la loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, a donc attribué aux communes une compétence ciblée et obligatoire relative à la gestion des milieux aquatiques et à la prévention des inondations. Toutefois, ces compétences pourront être exercées, en lieu et place des communes, par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ou être déléguées ou encore être transférées si les communes adhèrent à des groupements de collectivités.

La loi distingue désormais trois échelles cohérentes pour la gestion des milieux aquatiques : le bloc communal, assurant un lien étroit et pérenne entre la politique d'aménagement et les missions relatives à la gestion du milieu aquatique et la prévention des risques d'inondation ; l'établissement public d'aménagement et de gestion de l'eau – l’EPAGE – en charge de la maîtrise d'ouvrage locale et de l'animation territoriale dans le domaine de l'eau à l'échelle du bassin versant de cours d'eau ; l'établissement public territorial de bassin – l’EPTB –, en charge de missions de coordination et de maîtrise d'ouvrage de projets d'intérêt commun à l'échelle du groupement de bassins versants.

Lors du vote de la loi MAPAM, le législateur a décidé que les institutions interdépartementales ne pourraient plus être reconnues comme EPTB. Ces groupements, essentiels pour la mise en œuvre de la politique de l'eau, devront donc évoluer en syndicats mixtes. L'introduction d'une période transitoire pour leur permettre de le faire dans de bonnes conditions pourrait cependant être opportune. Un amendement du Gouvernement a été adopté en ce sens par le Sénat ces derniers jours dans le cadre du projet de loi d'avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

Plus largement, pour encourager le regroupement des collectivités à des échelles cohérentes sur le plan hydrographique, ne pas déstabiliser les structures existantes et garantir la solidarité territoriale, les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux doivent identifier dès 2015 les bassins, les sous-bassins ou les groupements de sous-bassins hydrographiques qui justifient la création ou la modification du périmètre des EPTB et des EPAGE.

Cette réforme entrera en vigueur le 1er janvier 2016. Le Comité national de l'eau et la Commission mixte inondation se sont réunis le 2 avril dernier pour examiner ses modalités de mise en œuvre avec les représentants de tous les partenaires concernés. Une mission d'appui sera constituée dans chaque bassin, sous l'autorité du préfet coordonnateur de bassin, pour accompagner la réforme.

Par ailleurs, les structures assurant des missions de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, à la date de publication de la loi MAPAM, continuent à exercer les compétences qui s'y rattachent jusqu'au transfert de celles-ci aux EPCI à fiscalité propre et, au plus tard, jusqu'au 1er janvier 2018.