M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cela ne vous surprendra pas, la commission a émis un avis défavorable sur cette demande de rapport.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1039 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 3 quater A demeure supprimé.

Article 3 quater A (supprimé)
Dossier législatif : projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques
Article 3 quater (début)

Article 3 quater B

(Supprimé)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, sur l'article.

Mme Évelyne Didier. J’interviens en lieu et place de mon ami Paul Vergès, qui ne peut pas être présent aujourd’hui. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) Vous vous en doutez, le propos portera sur La Réunion.

La question des transports est au cœur de la lutte contre les dérèglements climatiques. Mais quels sont les moyens réellement consacrés à ce secteur, qui représente à lui seul plus du tiers des émissions de gaz à effet de serre en France et un cinquième en Europe ? La question est posée, d’autant que la conférence internationale sur le climat, la COP 21, se tiendra au mois de décembre prochain à Paris.

Nous le savons tous, des moyens de transports moins polluants et moins énergivores que les transports par route existent : le tramway, le train ou le métro émettent moins de gaz à effet de serre.

Il serait donc cohérent, si l’on veut réellement s’engager contre les émissions de gaz à effet de serre, de miser sur le ferroviaire, qu’il s’agisse de le maintenir et de le développer en France métropolitaine ou de le créer dans les outre-mer, notamment à La Réunion.

Le Gouvernement avait même déclaré au mois de juillet 2014 que le projet loi de réforme ferroviaire permettrait de « renforcer le service public et de réaffirmer la place de l’État stratège dans le système ferroviaire français ».

La question porte sur la définition du terme « stratège ». Prenons l’exemple de La Réunion. L’île s’était dotée d’un chemin de fer à la fin du XIXe siècle, ce qui a longtemps été considéré comme une prouesse technique. Mais, pour des raisons syndicales et économiques, les conseillers généraux d’alors, majoritairement de droite, ont décidé de le supprimer. Motif avancé, dans la France des Trente Glorieuses, sous le règne de l’automobile, La Réunion ne devait pas rester en dehors de la « modernité », alors assimilée à la voiture individuelle…

À la place du chemin de fer, on a construit une route au pied de la falaise ! Aujourd’hui, elle doit braver les effets de la houle et les risques d’éboulements, comme nous l’avons vu récemment. Cela devient vraiment problématique pour nos amis réunionnais.

Conséquence d’un tel choix, l’île a connu une augmentation exponentielle de son parc de véhicules individuels, la saturation de son réseau routier et l’apparition d’un monopole sur le carburant. Aujourd’hui, elle se dirige vers la thrombose circulatoire. Rappelons d’ailleurs que son principal poste d’importation est le carburant.

Ces deux facteurs ont des conséquences économiques graves pour les entreprises comme pour les particuliers, mais aussi pour les collectivités. Et il y a des répercussions écologiques : rappelons que le routier émet 94 % des gaz à effet de serre dans le secteur des transports, contre moins de 1 % pour le fluvial et seulement 0,4 % pour le ferroviaire.

C’est dans ce contexte que Paul Vergès, alors président du conseil régional de La Réunion, a décidé de mettre en place un tram-train, corollaire d’un autre objectif stratégique : l’autonomie énergétique de l’île.

Les deux objectifs sont salués par l’ensemble des décideurs politiques nationaux. Tous partagent le même constat : si l’on veut offrir un réseau routier à la mesure du nombre de véhicules en circulation, la bataille est, tout simplement, perdue d’avance.

Il convient donc d’en revenir au ferroviaire à La Réunion. Le projet de tram-train était soutenu par le candidat François Hollande en 2011 et par Ségolène Royal. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Éric Doligé. Dans ce cas…

Mme Catherine Deroche, corapporteur. C’est un label !

Mme Évelyne Didier. En 2011, il y avait donc accord sur le principe ; ne restait qu’une question financière. Et là, comme bien souvent, la situation spécifique de La Réunion et des outre-mer n’a pas été vraiment prise en compte.

Le code général des collectivités territoriales a confié aux régions d’outre-mer la compétence pour créer ou exploiter des infrastructures ferroviaires, mais celles-ci n’ont pas bénéficié des concours financiers de l’État. Les départements et collectivités d’outre-mer se retrouvent dans une situation paradoxale : ils sont incités à réaliser des transports en commun ferroviaires, mais ils doivent le faire sur leurs fonds propres ou à travers les financements européens.

Aussi, pour assumer pleinement cette compétence ferroviaire, les régions d’outre-mer doivent pouvoir bénéficier des concours financiers de l’État, à travers un abondement de la dotation globale de fonctionnement, ou DGF. Elles ne peuvent prétendre à aucun financement prévu au titre des conventions relatives à l’exploitation des trains d’équilibre du territoire.

On peut aussi imaginer que La Réunion bénéficie d’une quote-part des financements de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF. Certes, on sait ce qu’ils sont…

Enfin, en outremer, le système de financement des transports est différent : il n’existe pas de taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers. En revanche, il y a une taxe spéciale de consommation sur les carburants, ou TSC, qui est utilisée pour alimenter le fonds d’investissement routier et des transports et qui permet de financer aussi bien le fonctionnement que les investissements dans de nouveaux projets ou des travaux de rénovation. Elle est partagée entre la région, le département, les établissements publics de coopération intercommunale et les communes.

Il n’est pas utopique de penser que l’on peut parvenir à un autre partage des recettes de la TSC, par exemple avec une réelle répartition équilibrée.

Voilà pourquoi M. Vergès souhaite interpeller le Gouvernement sur les financements de l’État.

M. le président. La parole est à Michel Vergoz, sur l'article.

M. Michel Vergoz. Je ne peux pas demeurer silencieux sur La Réunion. La question du transport collectif, notamment du tram-train, revient comme un serpent de mer depuis l’arrêt du projet.

Ma chère collègue, je ne trouve rien à redire au tableau historique du chemin de fer tel que vous l’avez dressé. Cette erreur stratégique monumentale a été commise voilà plus de soixante ans ; à l’époque, j’étais encore au berceau. (Sourires.)

Vous parlez de thrombose circulatoire à propos de La Réunion. Comme je parlais moi-même de « coma circulatoire » dans cet hémicycle hier soir, nous sommes sur la même longueur d’onde.

En revanche, ma chère collègue, même si votre parole est libre, vous ne pouvez pas imputer à tel ou tel gouvernement la responsabilité d’avoir mis fin au projet du tram-train ; les faits sont historiques, et vous ne pouvez pas les falsifier ou les rectifier. Dans un arrêt rendu en 2011, la cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé que le projet de tram-train à La Réunion n’était pas financé et qu’il manquerait annuellement – excusez du peu ! – 80 millions d’euros pendant trente ans pour le réaliser. On peut tout de même s’interroger sur les raisons pour lesquelles un tel projet a pu être mis sur les rails sans que son financement ait été intégralement bouclé. La vraie question est là.

Les problèmes de circulation à La Réunion, c’est un autre débat. Si cela vous intéresse, je vous propose de venir vous en rendre compte sur place. Vous serez alors mon invitée privilégiée. (Exclamations amusées.)

M. Roger Karoutchi. Vous n’avez pas tout perdu, ma chère collègue ! (Mêmes mouvements.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 360 rectifié est présenté par MM. Vaspart, Commeinhes, Calvet et Charon, Mme Deseyne, M. Doligé, Mmes Deromedi et Duchêne et MM. Mouiller, Laménie, Pierre, Revet, de Nicolaÿ, César, Gremillet et Vasselle.

L'amendement n° 1038 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Dans un délai d'un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur l'évolution de l'offre ferroviaire et sur les moyens de remédier à l'érosion du trafic, tant en matière d'investissement que de politique tarifaire, de taux de remplissage des liaisons, d'information du public et d'adaptation de l'offre de service public aux besoins des usagers.

La parole est à M. Michel Vaspart, pour présenter l’amendement n° 360 rectifié.

M. Michel Vaspart. Certes, c’est à juste titre que la commission spéciale a décidé de supprimer les demandes de rapport au Parlement introduites lors du passage du texte à l'Assemblée nationale. Toutefois, l’une de ces demandes de rapport doit retenir notre attention.

La perspective de l’ouverture de lignes d'autocar, sur laquelle il faut compter pour désenclaver des territoires mal desservis par les transports publics, peut susciter des inquiétudes dès lors que cela viendrait concurrencer les transports publics.

Je pense notamment aux lignes ferroviaires, qui ont besoin d'être entretenues, voire, dans certains cas, rénovées ; il serait même parfois nécessaire d’en créer. C’est impératif pour l’aménagement de notre territoire, qui relève de la compétence de l'État. Il serait dommage que la concurrence des autocars mette en cause l'existence de lignes ferroviaires, même si nous avons entendu des propos rassurants hier.

Un tel rapport permettra de préciser dans quelle mesure il y aura complémentarité, et non concurrence entre l'autocar et le train.

Nous avons abandonné les infrastructures ferroviaires qui maillaient notre territoire. Nous n’avons plus cette toile d’araignée, dont nous avons parlé hier à propos du réseau suisse. Si nous ne voulons pas voir disparaître d’une manière pernicieuse le réseau secondaire qui existe encore, nous devons, en tant que parlementaires, pouvoir en dresser régulièrement un état des lieux dans cet hémicycle.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 1038 rectifié.

Mme Annie David. Cet amendement vise à réintroduire une demande de rapport qui figurait dans le texte voté par les députés et qui a été supprimée par la commission spéciale. Je le rappelle, cette demande avait alors reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement à l’Assemblée nationale.

Contrairement à ce qui a pu être affirmé, il ne s’agit pas pour nous de faire de l’obstruction ou de tenter de gagner du temps. Nous voulons seulement juger sur les actes.

Le rapport que nous demandons aura pour objectif d’analyser l’évolution de l’offre ferroviaire et les moyens de remédier à l’érosion du trafic.

Vous le savez, nous assistons depuis un certain temps à un recul du ferroviaire, non seulement dans le fret, mais également dans le transport de voyageurs, qu’il s’agisse des trains d’équilibre du territoire, les TET, dont il a beaucoup été question hier, des TGV et même des trains express régionaux, les TER.

Il y a quelques jours encore, nous avons eu l’occasion d’alerter sur une hypothèse de travail de la SNCF, qui prévoirait un retrait massif des trains Intercités en supprimant plusieurs lignes et en réduisant le trafic sur d’autres. Nous tenons une carte à la disposition de celles et ceux que cela intéresse. (Mme Laurence Cohen brandit une carte de France sur laquelle sont reproduits des tracés de lignes ferroviaires.)

Cela est évidemment dû à l’absence de volonté de la part du Gouvernement de s’attaquer au problème de la dette de la SNCF, qui plombe tout le système ferroviaire. Nous regrettons d’ailleurs que notre amendement visant à ce que l’État s’engage à reprendre la dette de SNCF Réseau ait été rejeté. Rappelons que l’Allemagne, « modèle » cité à toutes les occasions, avait fait le choix de reprendre en grande partie la dette de l’opérateur historique.

Le texte que vous proposez risque d’aggraver considérablement la situation, notamment en mettant le ferroviaire en concurrence avec le transport routier.

Notre amendement vise donc à donner au Parlement une vision précise et chiffrée de l’évolution de l’offre ferroviaire et à pouvoir évaluer véritablement les effets des politiques sur notre service public du transport ferroviaire.

M. le président. L'amendement n° 1040, présenté par M. Vergès, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

I. - L’article L. 1613–1 du code général des collectivités territoriales est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« À compter de 2016, cette somme est majorée de 100 millions d’euros, destinés à l’exercice de la compétence d’autorité organisatrice de transport des régions d’outre-mer.

« Ce montant est révisé chaque année par référence à l’évolution de la formation brute de capital fixe du secteur marchand, prévu en annexe de la loi de finances de l’année. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. En métropole, les infrastructures ferroviaires sont financées par l’État. Aux termes des articles 124 et 126 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, les régions métropolitaines sont compétentes en matière d’organisation des services ferroviaires régionaux de transport des voyageurs sur le réseau ferré national.

Dès le 1er janvier 2002, l’organisation et le financement des services ferroviaires régionaux de voyageurs ont ainsi relevé de la compétence des conseils régionaux, et l’État a transféré aux régions la gestion de 1,5 milliard d’euros par an de ressources publiques pour ce réseau ferroviaire

Le transfert aux régions s’est accompagné d’une « dotation ferroviaire » pour en assurer le fonctionnement.

Or, comme il n’existait pas de réseau ferré national outre-mer, cette disposition de la loi de 2000 s’est révélée inopérante, ce qui a eu pour conséquence de priver les régions d’outre-mer de toute capacité d’intervenir dans le domaine ferroviaire.

Pour remédier à cette situation, le Parlement a voté dans la loi du 21 juillet 2003 de programme pour l’outremer une disposition autorisant ces régions à créer et à exploiter des infrastructures de transport ferroviaire.

Aux termes de l’article 50 de cette loi, « les régions d’outre-mer, en tant qu’autorités organisatrices des transports collectifs d’intérêt régional, sont compétentes pour créer et exploiter des infrastructures de service ferroviaire ou de transport guidé ».

Ainsi, les régions d’outre-mer ont obtenu la compétence pour créer un réseau ferroviaire, mais aucune ressource ne leur a été affectée à cette fin. En France métropolitaine, rappelons-le, ce réseau a été initialement financé par l’État. C’est là une situation paradoxale.

Cette dotation ferroviaire a depuis lors été supprimée pour être fondue dans la dotation globale de fonctionnement. Mais il n’y a pas eu de prise en compte des outre-mer à cette occasion.

Or, dans les outre-mer, cela a été rappelé, la voiture prend une place de plus en plus importante. Ainsi, à La Réunion, ce sont plus de 25 000 véhicules qui sont importés chaque année, venant engorger un réseau routier déjà saturé.

Il y a donc urgence. Si l’on ne met pas rapidement des solutions autres que le « tout automobile », les conséquences de cette inaction seront importantes : hausse du principal poste d’importation, à savoir le carburant, augmentation des émissions de gaz à effet de serre, coma circulatoire… Tout cela aura des conséquences économiques pour les entreprises, comme pour les particuliers et pour la planète.

Quels financements mobiliser pour les outre-mer ? Ils ne peuvent prétendre à aucun financement prévu au titre des conventions relatives à l’exploitation des trains d’équilibre du territoire. Il n’y a pas d’autoroutes, donc pas de taxe payée par les sociétés concessionnaires. Il n’y a pas non plus d’entreprise ferroviaire, donc il n’est pas possible de mobiliser la taxe sur le résultat de ces grandes entreprises. Il est également impossible de compter sur la taxe sur le chiffre d’affaires des services grande vitesse en l’absence de telles lignes.

Aussi, il semble légitime de prévoir un complément de financement pour les transports ferroviaires d’outre-mer à venir, les outre-mer ayant été évincés de la dotation ferroviaire à la suite de sa refonte.

Par conséquent, mes chers collègues, je vous invite à voter cet amendement de notre groupe, dont notre collègue Paul Vergès est le premier signataire.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission émet évidemment un avis défavorable sur les amendements nos 360 rectifié et 1038 rectifié, qui visent à demander un rapport au Gouvernement.

J’en viens à l’amendement n° 1040. Certes, la compétence transport nécessite des financements. Mais la solution proposée ne nous semble pas adaptée. Si l’on devait majorer la dotation globale de fonctionnement par voie d’amendement chaque fois qu’il faut trouver des financements, cela pourrait nous conduire très loin.

M. Roger Karoutchi. C’est sûr !

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Les débats sur la DGF doivent se tenir dans le cadre beaucoup plus global des lois de finances.

Je vous rappelle, et nous le regrettons tous, que la dotation globale de fonctionnement sera réduite de 11 milliards d’euros au cours des trois prochaines années.

Plusieurs sénateurs du groupe CRC. Nous le savons !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Emmanuel Macron, ministre. Sur les amendements identiques nos 360 rectifié et 1038, il convient de ne pas rouvrir le débat qui a eu lieu lors de l’examen de la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire.

Le dispositif adopté a permis de renforcer le service public ferroviaire et son pilotage par l’État, de réintégrer le gestionnaire d’infrastructures, Réseau ferré de France, au sein de la SNCF, de restructurer la SNCF en trois établissements publics industriels et commerciaux, d’affecter une partie des résultats de SNCF Mobilités au profit du redressement de SNCF Réseau – il y a donc bien péréquation – et de renforcer la régulation économique, seule garante d’une meilleure efficacité.

Ce texte comportera d’ailleurs des précisions devenues nécessaires à la suite de la réforme ferroviaire s’agissant de l’endettement de la SNCF et de la « règle d’or » ; nous aurons l’occasion d’y revenir dans le débat.

Cette loi est entrée en vigueur le 1er janvier dernier et quarante-deux textes d’application ont d’ores et déjà été pris – les autres devant l’être d’ici au mois de juin 2015.

Elle institue un Haut Comité du système de transport ferroviaire, constitué de l’ensemble des parties prenantes, y compris des parlementaires. Or ce Haut Comité doit remettre au Gouvernement un rapport portant précisément sur les points que vous mentionnez.

Vous avez donc satisfaction, mesdames, messieurs les sénateurs,…

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Eh oui !

M. Emmanuel Macron, ministre. … et les amendements nos 360 rectifié et 1038 rectifié m’étonnent quelque peu.

Par conséquent, je suggère que nous ne doublions pas les contraintes.

Pour ce qui est de l’amendement n° 1040, je le confirme, des efforts en termes de dotations sont demandés par le Gouvernement. J’ai d’ailleurs cru comprendre que, au-delà de la simple majorité gouvernementale, les avis étaient partagés. Peut-être avons-nous des désaccords quand il s’agit de savoir sur quoi doivent porter ces efforts budgétaires, mais je n’ai pas entendu de contre-proposition extraordinairement inventive à cet égard.

Demander aux collectivités locales un effort de cette ampleur me paraît proportionné par rapport à ce qui est demandé s’agissant de l’ensemble de la dépense publique. Néanmoins, des mesures ont été prises pour compenser cet effort, en matière d’investissement et de construction de logements, notamment.

L’amendement n° 1040 tend à ce que les collectivités d’outre-mer puissent bénéficier d’une dotation spécifique de 100 millions d’euros pour encourager le développement des transports en commun, plus particulièrement ferroviaires. Or, rien, dans la rédaction de cet amendement, ne permet de penser que c’est vers ce mode de transport que cette dotation spécifique serait orientée.

Par ailleurs, l’idée qui sous-tend votre amendement est que l’État aurait manqué à ses obligations en ne compensant pas un transfert de compétence. Or, de manière générale, les compensations ont bien été réalisées, conformément à la Constitution. Elles ont été concomitantes et contrôlées s’agissant de leur montant comme de la procédure suivie. Dans le cas particulier de La Réunion, les trains étant inexistants, cette compétence n’était pas exercée et ne pouvait donc pas donner lieu à transfert.

De plus, comme il n’existe pas d’obligation de mettre en place un service de chemin de fer ni d’accroître le périmètre, il n’en est résulté, depuis, aucune extension de compétence.

Ce n’est donc pas au titre d’un transfert de compétence ou de la création d’une nouvelle compétence que l’on doit envisager l’allocation d’une telle dotation spécifique.

Enfin, vous soulignez, avec raison, que nous avons en commun le souci de développer des transports durables. À cet égard, je souscris aux deux propos liminaires qui ont été tenus. Sachez que le Gouvernement est vigilant en la matière, au-delà bien sûr de cette question des dotations. Quelles que soient les majorités, les gouvernements successifs se sont d’ailleurs tous attachés à œuvrer en faveur du développement du transport durable sur le territoire réunionnais.

Je fais référence ici aux nouveaux accords de Matignon, signés le 14 octobre 2010, qui ont notamment permis deux chantiers importants à La Réunion : une nouvelle route du littoral et la création d’un réseau de transports en commun publics à l’échelon régional.

Le Gouvernement continue à travailler sur ces chantiers et, au-delà, a décidé de soutenir des projets de développement des transports en commun. Lors du dernier appel à projets, trois lignes de bus à haut niveau de service ont été retenues, qui obtiendront de la part de l’État des subventions à hauteur de celles sur lesquelles il s’est d’ores et déjà engagé.

Compte tenu de ces éléments de réponse que je souhaitais vous apporter, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 1040.

M. le président. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.

M. Charles Revet. Je ne vous parlerai pas du tram-train (Sourires.), même si, monsieur le ministre, un article dans ce sens aurait été bien utile en permettant de transférer une part de l’activité de la route vers le fer aux endroits les plus sensibles, notamment aux entrées de ville, où les bouchons sont les plus importants. Nous reviendrons peut-être sur cette question.

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Peut-être…

M. Charles Revet. Je suis tout à fait d’accord sur un point : les demandes de rapports sont trop fréquentes. À ce propos, je tiens à féliciter Mme le corapporteur…

M. Charles Revet. … pour son travail,...

M. Roger Karoutchi. Remarquable !

M. Charles Revet. … ainsi que ses deux corapporteurs présents au banc des commissions, aux côtés de M. le président de la commission spéciale,…

M. Roger Karoutchi. Ils ont tous effectué un travail remarquable !

M. Charles Revet. … qui a, lui aussi, effectué un travail remarquable.

M. Roger Karoutchi. Prenez ces éloges, chers collègues, on ne connaît jamais la suite ! (Sourires.)

M. Charles Revet. Cela étant, madame le corapporteur, de temps en temps, un rapport peut se révéler utile. (Rires.)

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. De temps en temps, effectivement.

M. David Assouline. Ils disent tous cela !

M. Charles Revet. Il est vrai, et nous ne sommes pas les derniers à nous en plaindre, que ces rapports, parce qu’ils sont trop nombreux, sont aussi rarement lus.

M. Roger Karoutchi. C’est vrai !

M. Charles Revet. Je peux donc comprendre que vous vouliez aujourd’hui les supprimer. Toutefois, si j’ai cosigné l’amendement n° 360 rectifié, c’est qu’il donne la possibilité d’aller plus au fond dans l’analyse de la situation du ferroviaire, situation qui est plus qu’inquiétante.

Sans reprendre dans le détail la question du fret que j’ai évoquée hier, je constate que nous assistons, aujourd’hui, à une véritable dégradation de notre système ferroviaire, alors qu’il correspondrait beaucoup mieux au développement de l’activité économique. Ce mode de transport nous éviterait ces milliers de conteneurs qui transitent par la route. Il réglerait aussi les problèmes de relations entre les villes.

Monsieur le ministre, même si je comprends bien qu’il y aura un autre rapport, il y a urgence à essayer de comprendre pourquoi, en France, le transport ferroviaire, dont les atouts sont connus et qui a permis un maillage développé du territoire, perd aujourd’hui des parts de marché au profit d’autres modes de transport. Je ne mésestime pas ces derniers, mais je pense que ce rapport aurait permis, grâce à un examen approfondi de la situation, de mieux comprendre les raisons de ce qui est pour moi une anomalie.

Ne pas agir, c’est ne pas prendre nos responsabilités, monsieur le ministre !

Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Si la situation ne tenait qu’à un rapport…

M. le président. La parole est à M. Joël Guerriau, pour explication de vote.

M. Joël Guerriau. Les membres du groupe UDI-UC suivront la commission et le Gouvernement sur ces amendements. Néanmoins, je souhaiterais revenir sur la question de La Réunion, pour laquelle le transport collectif est, vous avez raison, essentiel, d’autant que la population de ce département va augmenter, passant dans les quinze prochaines années de 850 000 à 1 million d’habitants.

Par conséquent, il est important d’agir et de se positionner sur les problématiques des outre-mer, particulièrement s’agissant des immatriculations, qui ne font qu’augmenter, alors que ces territoires ne peuvent pas absorber une telle circulation de véhicules individuels.

Pour autant, je ne souscris pas aux remarques formulées à l’instant au sujet de la taxation, qui se révélerait le seul moyen de régler la question des recettes. C’est oublier les fameux octrois de mer, dont le produit pour La Réunion en 2014 s’est élevé à 398 millions d’euros. Affirmer que les recettes et les moyens dédiés aux problématiques régionales dans les outre-mer font défaut me semble constituer un raccourci, sinon un oubli en la matière, eu égard à l’importance de cette recette pleine et entière pour ce département.