compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Gaudin

vice-président

Secrétaires :

Mme Frédérique Espagnac,

M. Jackie Pierre.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

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Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 2 juin 2016 a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

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Dépôt d’un rapport

M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur la mise en application de la loi n° 2015–588 du 2 juin 2015 relative au renforcement de la protection des installations civiles abritant des matières nucléaires.

Acte est donné du dépôt de ce rapport.

Il a été transmis à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées et à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.

3

Communications du Conseil constitutionnel

M. le président. Le Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du 3 juin 2016, deux décisions relatives, respectivement, à une question prioritaire de constitutionnalité et à la répartition des compétences entre l’État et les collectivités d’outre-mer, portant sur :

- les règles de formation, de composition et de délibération de la cour d’assises de Mayotte (n° 2016–544 QPC) ;

- diverses dispositions de la loi n° 2004–575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (n° 2016–10 LOM).

Acte est donné de ces communications.

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Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

garantie individuelle du pouvoir d'achat

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1360, adressée à Mme la ministre de la fonction publique.

M. Bruno Sido. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question concerne la garantie individuelle du pouvoir d’achat, mieux connue sous le sigle GIPA.

Il s’agit d’une rémunération complémentaire, ou plus simplement d’une prime, créée en 2008 pour les fonctionnaires et agents publics. Elle prenait tout son sens avec le gel du point d’indice depuis juillet 2010.

En effet, l’idée consistait à compenser l’augmentation du coût de la vie pour les seuls agents dont la hausse de rémunération était restée inférieure à l’inflation sur les quatre dernières années, dans la transparence et l’équité. Au sens littéral, il s’agissait donc bien, pour le gouvernement de l’époque, de créer un mécanisme de garantie du pouvoir d’achat des agents publics.

Je note que les salariés du secteur privés sont, eux, totalement exclus d’un tel dispositif, de manière injustifiée d’ailleurs. En effet, en quoi le secteur privé serait-il moins « méritant » aux yeux de l’État que le secteur public ? C’est quand même grâce au travail de tous nos concitoyens que le paiement de l’impôt permet le fonctionnement de « l’État-providence » auquel nous sommes tous si attachés.

Au-delà de la justification de cette prime, son mode de calcul pose question. Elle est versée tous les ans, pour la période des quatre années précédentes, sans tenir compte des GIPA déjà reçues, et ce en application d’une formule de calcul obligatoire, notamment pour les collectivités locales.

La différence est donc comptée quatre fois de suite pour les mêmes années. En définitive, la somme payée tous les ans équivaut à ce qui était prévu tous les quatre ans. Madame la ministre, je tiens à votre disposition les chiffres des conseils départementaux.

Ils sont évocateurs. Si les informations dont je dispose sont exactes, le coût de cette prime atteindrait 130 millions d’euros par an. Je vous remercie, madame la ministre, de bien vouloir confirmer ou corriger ce chiffre, et de m’indiquer les mesures que le Gouvernement compte prendre pour compenser cette charge nouvelle auprès des collectivités locales et pour rendre cette rémunération complémentaire plus conforme à son objet initial.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Monsieur Bruno Sido, je vous remercie de votre question, qui me permet de faire publiquement le point sur ce sujet qui inquiète de nombreux fonctionnaires de catégorie C ou de plus de cinquante ans que je rencontre sur le terrain.

C’est suite à la découverte, en 2007, d’une perte de pouvoir d’achat portant sur le traitement indiciaire pour bon nombre de ces agents de catégorie C ou de plus de cinquante ans que fut créée, en 2008, la garantie individuelle du pouvoir d’achat, ou GIPA. Celle-ci est calculée par comparaison sur une période de quatre ans, vous l’avez dit, entre l’évolution du traitement indiciaire de l’agent et l’indice des prix à la consommation. Si l’évolution du traitement a été inférieure à celle de l’inflation, l’agent perçoit une indemnité d’un montant brut équivalant à la perte de pouvoir d’achat ainsi constatée.

Alors que la GIPA devait initialement être versée tous les quatre ans, le dispositif a été renouvelé chaque année depuis 2008. Il le sera également en 2016, avec pour période de référence les années 2012 à 2015.

Comme vous le savez certainement, monsieur le sénateur, le gel du point d’indice de la fonction publique entre 2010 et 2016 a permis de réaliser une économie de 7 milliards d’euros sur le budget de la France. On peut donc dire que les fonctionnaires ont largement contribué au redressement des comptes publics. Les sommes de la GIPA représentent bien peu en comparaison de cette économie. Permettez-moi de vous communiquer quelques chiffres.

En 2015, la GIPA a été attribuée à 149 453 agents de la fonction publique d’État, pour un coût total de 109,7 millions d’euros.

Les éléments statistiques les plus récents concernant la fonction publique territoriale sont issus d’une enquête complémentaire aux bilans sociaux menée en 2013. En 2012, 159 000 agents auraient ainsi bénéficié de la GIPA, pour un montant de 75,8 millions d’euros.

S’agissant de la fonction publique hospitalière, les données connues les plus récentes estiment à 36,2 millions d’euros le montant total de GIPA versé en 2013.

Ces éléments n’étant pas entièrement satisfaisants, j’ai demandé qu’un bilan beaucoup plus fin soit réalisé afin de pouvoir évaluer ce dispositif dès cette année.

Je veux toutefois redire que ces sommes sont bien modestes eu égard à la véritable fonction sociale remplie par la GIPA. Celle-ci a en effet permis d’éviter à des milliers d’agents publics le décrochage de leur traitement indiciaire par rapport à l’inflation.

De plus, depuis 2012 le Gouvernement mène une action s’articulant notamment autour du soutien apporté aux catégories C en 2014 et en 2015, de la mise en place du protocole pour la revalorisation des carrières et des rémunérations, le PPCR – parcours professionnels, carrières et rémunérations –, dont les agents vont connaître le bénéfice entre 2016 et 2020, ou encore du dégel du point d’indice que j’ai décidé en mars dernier. Combinée à la faible inflation que nous connaissons, cette action permettra de faire baisser le montant de la GIPA dès 2017. Nous pouvons tous nous en féliciter, puisque cela signifiera que les conditions financières des fonctionnaires se sont améliorées.

M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.

M. Bruno Sido. Je souhaite uniquement faire remarquer à Mme la ministre qu’il y avait deux points dans ma question, le premier portant sur le montant versé par les collectivités locales et, surtout, le second sur le mode de calcul de la GIPA. Madame la ministre, comme vous l’avez noté, je vous faisais remarquer à ce sujet qu’alors que la GIPA visait initialement au rattrapage de la perte de pouvoir d’achat constatée, les agents concernés perçoivent quatre fois la perte de pouvoir d’achat tous les ans.

Je demande donc au Gouvernement de revoir le mode de calcul de la GIPA et la formule imposée aux collectivités locales.

recul de la vaccination en france

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, auteur de la question n° 1378, adressée à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

M. Didier Guillaume. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, à deux jours de l’ouverture de l’Euro, au milieu de manifestations et à quelques semaines de l’éventuelle sortie du Royaume-Uni de l’Europe, ma question peut paraître déconnectée de la réalité et de l’actualité. Portant sur la vaccination, cette question adressée à Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, préoccupe pourtant l’ensemble de nos concitoyens.

Il y a déjà plusieurs mois, j’ai été alerté par des concitoyens nombreux, notamment parmi les représentants des professions médicales, sur le net recul qu’accusent les chiffres de la vaccination en France.

La vaccination a constitué, nous le savons tous, une grande avancée dans l’histoire de notre pays en matière de santé publique ; elle a permis le recul, voire la disparition de certaines maladies qui ont sévi jusqu’au milieu du siècle dernier : la tuberculose, le tétanos, la polio, la méningite bactérienne, et cette liste n’est pas exhaustive.

Or malgré les progrès incessants de la médecine dans notre pays, on constate curieusement une recrudescence de certaines pathologies, par exemple de rougeole, qui avaient disparu. Et l’on constate en parallèle que les vaccinations contre l’hépatite B, le vaccin dit ROR contre la rubéole, les oreillons et la rougeole, ou la vaccination contre la méningite sont en net recul.

On peut certainement attribuer ce constat à une perte de confiance d’une catégorie de la population dans la vaccination, ce sujet ayant suscité de nombreux articles, ou simplement à l’évolution de notre société, la prévention ayant tellement progressé que certains de nos concitoyens pensent qu’ils ne craignent plus rien.

Il me semble donc utile de rappeler quelques éléments objectifs et scientifiques de nature à rassurer la population. C’est la raison pour laquelle je souhaite interroger Mme la ministre de la santé sur les mesures que le Gouvernement a envisagées, envisage ou envisagera de prendre en vue de la réhabilitation, urgente dans notre pays, de la politique vaccinale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le président Didier Guillaume, nous partageons votre constat. Effectivement, seules 47 % des personnes ciblées par la campagne de vaccination contre la grippe ont été vaccinées cette année. Nous sommes loin, très loin, de l’objectif de 75 % fixé par l’Organisation mondiale de la santé. Le taux de vaccination des jeunes filles contre le papillomavirus est seulement de 17 % en France, quand il est de près de 80 % au Royaume-Uni, en Belgique et au Danemark.

Pourtant, il faut rappeler, comme vous venez de le faire, que la vaccination est l’un des grands succès des politiques de prévention, et qu’il ne faut ni oublier ni banaliser les fléaux ainsi éradiqués ou amoindris dans nos pays. Ce geste a permis de sauver des millions de vies.

Le 12 janvier 2016, à la suite de la remise du rapport sur la politique vaccinale de Mme Sandrine Hurel, le Gouvernement a annoncé un plan pour la rénovation de la politique vaccinale.

Celui-ci vise tout d’abord à mieux informer les professionnels et le grand public par le biais de bulletins d’information trimestriels. Cette démarche s’accompagne également de la mise en ligne d’un site dédié à la vaccination par l’Agence nationale de santé publique. Depuis la fin du mois d’avril, le site vaccination-info-service.fr est ainsi consultable par tous.

Ce plan a aussi pour objectif de sécuriser l’approvisionnement des vaccins pour faire face aux tensions que nous connaissons actuellement, et ce en responsabilisant les industriels et en engageant des réformes telles que la mise en place de plans de gestion des pénuries. Dans les prochaines semaines, Marisol Touraine rencontrera de nouveau les industriels producteurs et distributeurs de vaccins en France afin qu’ils lui présentent leurs travaux pour mettre fin aux tensions d’approvisionnement qui sont encore ponctuellement constatées sur le territoire pour certains vaccins.

Enfin, ce plan vise à débattre avec tous nos concitoyens de l’intérêt de la vaccination. Nous nous efforcerons de démontrer cet intérêt, et votre intervention nous y aide, monsieur Guillaume. Afin d’alimenter ces débats qui se dérouleront tout au long de l’année, l’organisation d’une grande concertation citoyenne a été confiée au professeur Alain Fischer. Chacun pourra s’exprimer et suivre les débats, et les conclusions de ces échanges seront remises à la ministre des affaires sociales et de la santé dès la fin de cette année.

M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume.

M. Didier Guillaume. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir répondu à cette question au nom du Gouvernement et de Marisol Touraine. Celle-ci ne visait qu’à alerter sur ce sujet qui me semble important, et la réponse qui m’a été apportée à l’instant me satisfait.

Le recul de la vaccination dans notre pays doit en effet être stoppé, sinon il pourra en résulter des problèmes en ville comme dans les zones rurales. J’attends donc avec impatience les mesures que vous avez annoncées, monsieur le ministre, et je salue la volonté de ce gouvernement d’aller dans le sens d’une meilleure prévention et de plus de vaccination. Il faut vraiment que nos concitoyens comprennent que la vaccination est quelque chose de positif pour la santé publique.

sort des communes associées en cas de regroupement sous le statut de commune nouvelle

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, auteur de la question n° 1369, adressée à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Philippe Mouiller. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le sort des communes associées suite à une fusion-association en application de la loi n° 71–88 du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes, dite loi Marcellin, lorsqu’elles souhaitent se regrouper sous le statut de commune nouvelle.

En effet, cette question ne semblait pas avoir été spécifiquement traitée dans la loi n° 2015–292 du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes.

De plus, des divergences d’interprétation étaient apparues quant au sort de ces communes associées dans l’hypothèse où elles s’engageraient dans une telle démarche.

Des communes associées n’envisagent de s’engager dans la création d’une commune nouvelle avec d’autres communes qu’à condition de conserver leur statut de commune déléguée. Si la création d’une commune nouvelle a pour conséquence la disparition des communes associées, beaucoup d’entre elles ne se lanceront pas dans cette démarche.

Une proposition de loi déposée sur le bureau du Sénat à l’initiative de notre collègue Bruno Sido ici présent est venue depuis compléter le dispositif proposé par la loi du 16 mars 2015, précisant le devenir des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle. Ce texte prévoit le maintien des communes associées en tant que communes déléguées dans le cadre d’une commune nouvelle.

Adoptée par le Sénat le 8 mars dernier, cette proposition de loi a été votée par l’Assemblée nationale la semaine dernière, le 2 juin. Cette proposition de loi doit maintenant faire l’objet d’une seconde lecture dans les deux chambres, et un certain nombre d’ajustements devront être trouvés.

Les maires des communes associées sont dans l’attente de l’adoption définitive de ce texte avant de s’engager plus avant dans un processus de création d’une commune nouvelle. Je pense à un exemple précis dans le département des Deux-Sèvres, où les maires attendent de connaître les évolutions des textes législatifs pour délibérer.

Monsieur le ministre, compte tenu de l’attente suscitée par ces dispositions auprès des maires concernés, pourriez-vous m’indiquer si le Gouvernement est disposé à soutenir une adoption rapide de cette proposition de loi, et dans quels délais ? Je vous remercie des éléments que vous serez en mesure de nous apporter.

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Philippe Mouiller, vous souhaitez que soit précisée la situation, dans les communes nouvelles, des communes associées issues de la loi déjà ancienne du 16 juillet 1971, dite loi Marcellin.

La loi Marcellin, bien qu’elle n’ait pas connu un grand succès et qu’elle ait été ô combien contestée et critiquée, a institué un régime juridique permettant la fusion de communes.

Dans ce cadre, les anciennes communes n’accueillant pas le chef-lieu de la commune fusionnée ont la possibilité de demander la création d’une commune associée reprenant le périmètre de l’ancienne commune ainsi que son nom. Depuis la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, qui crée le régime juridique des communes nouvelles, les communes fusionnées sous le régime de la loi Marcellin demeuraient régies par ces dispositions.

Par ailleurs, l’article L. 2113–10 du code général des collectivités territoriales prévoit le maintien des communes déléguées des communes nouvelles en cas d’extension à une ou plusieurs autres communes, mais pas celui des communes associées fusionnées sous le régime de la loi Marcellin. Aussi, la création d’une commune nouvelle entraîne la disparition de plein droit des communes associées instituées sous le régime de la loi Marcellin, sans qu’il soit besoin de prononcer leur dissolution.

Au 1er janvier 2016, trois cent dix-sept communes nouvelles avaient été créées depuis l’entrée en vigueur de la loi du 16 mars 2015, dont dix-huit comprennent parmi leurs communes fondatrices des communes issues d’une fusion-association « loi Marcellin », entraînant la disparition de trente-deux communes associées.

Vous l’avez évoqué, monsieur le sénateur, une proposition de loi, présentée par votre collègue Bruno Sido, que je salue ici, tendant à permettre le maintien des communes associées en cas de création d’une commune nouvelle, a été adoptée, en première lecture, par le Sénat au mois de mars de cette année et par l’Assemblée nationale le 1er juin dernier. Cette proposition de loi, à laquelle le Gouvernement est favorable – je vous le confirme, monsieur Sido – et sur laquelle j’avais d’ailleurs émis un avis de sagesse, apporte la modification législative que vous souhaitez. Après un examen en deuxième lecture, elle pourra être définitivement adoptée, et le problème que vous soulevez aujourd'hui sera alors réglé. Aussi, vous pouvez rassurer vos collègues quant à l’évolution législative de ce texte.

M. Bruno Sido. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller.

M. Philippe Mouiller. Je tiens simplement à remercier M. le ministre de ces précisions et à souligner l’importance de cette décision.

schémas départementaux de coopération intercommunale et organisation scolaire

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier, auteur de la question n° 1344, transmise à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Bernard Fournier. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention et celle du Gouvernement sur les impacts de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », concernant l’organisation scolaire.

La réorganisation territoriale s’articule autour d’un document déterminant, le schéma départemental de coopération intercommunale, le SDCI, ayant vocation à réunir les différentes fusions qui auront cours dans chaque département, à modifier les périmètres ou encore à supprimer des syndicats.

Malheureusement, certains projets de SDCI préfectoraux incitent fortement à la suppression de syndicats scolaires et, en parallèle, au transfert de la compétence scolaire des communes aux intercommunalités. Cette pression est d’autant plus intolérable que la compétence scolaire ne figure pas au rang des compétences obligatoires des communautés de communes.

La refonte intercommunale, qui relève d’un autre ministère que celui de l’éducation nationale, a ainsi des conséquences sur le niveau de gestion de cette compétence et sur l’organisation du territoire scolaire, selon une politique qui ne prend pas en compte les spécificités des écoles rurales.

Les préfets disposent d’une marge d’appréciation sur la survie ou non des syndicats intercommunaux à vocation scolaire au sein desquels – faut-il le rappeler ? – les élus gèrent de façon consensuelle et efficace la compétence scolaire. Le climat de menace qui pèse sur certains regroupements pédagogiques est particulièrement déstabilisant et il est de nature à perturber l’organisation scolaire locale.

Les maires ruraux comptent sur la mise en œuvre d’une politique éducative ambitieuse qui réponde tant aux enjeux d’un aménagement du territoire juste et équilibré qu’à l’impératif d’égal accès des citoyens à l’école de la République.

La question scolaire doit être partie intégrante du projet de territoire et ne doit pas faire l’objet d’arbitrages liés à des contraintes autres que l’intérêt de l’enfant.

Par conséquent, que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour pérenniser les syndicats scolaires, qui remplissent parfaitement leurs missions ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur Bernard Fournier, vous appelez mon attention sur l’impact de la refonte actuelle de la carte intercommunale sur les syndicats à vocation scolaire, notamment en milieu rural.

Tout d’abord, il convient de rappeler que la compétence scolaire, relevant des communes, est une compétence sécable entre la charge des bâtiments scolaires – investissement et fonctionnement – et ce que l’on appelle le « service des écoles », c’est-à-dire l’acquisition du mobilier et des fournitures, ainsi que le recrutement et la gestion des personnels de service.

Une communauté de communes peut donc se voir transférer les deux volets de la compétence scolaire conjointement ou bien seulement l’un ou l’autre, sans, toutefois, qu’il soit possible de scinder au sein de la charge des bâtiments scolaires entre le fonctionnement et l’investissement, cette interdiction découlant des principes régissant le droit de propriété.

Parce qu’il s’agit d’une compétence historique des communes, la volonté ancienne de se regrouper pour mutualiser les moyens en matière scolaire a précédé l’élaboration institutionnelle de la carte intercommunale.

Il est vrai que, avec la loi NOTRe, le Gouvernement a voulu favoriser l’émergence d’intercommunalités aux moyens renforcés, mieux à même de répondre aux attentes de nos concitoyens. Mais vous savez tout cela, nous en avons souvent débattu ici même.

Il convient toutefois de rappeler que, dans le cadre des fusions d’EPCI, le choix du bon échelon en matière de gestion de la compétence scolaire revient aux élus, et à eux seuls : une compétence optionnelle des EPCI préexistant à la fusion est exercée à titre transitoire par le nouvel EPCI pendant trois mois – ce délai est porté à un an par l’article 35 de la loi NOTRe dans le cadre des SDCI – selon les modalités de gestion préexistantes à la fusion.

En outre, aux termes de l’article 4 de la loi du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, dite loi « Pélissard-Sueur », la compétence scolaire bénéficie d’un aménagement de procédure : dans le cadre d’une fusion, extension ou création d’un nouvel EPCI à fiscalité propre, il est toujours possible de créer des syndicats pour les compétences scolaire, petite enfance et action sociale, si la compétence n’est pas reprise par l’EPCI.

Enfin, je vous rappelle que, dans le cadre du comité interministériel aux ruralités, réuni pour la troisième fois en quatorze mois le 20 mai dernier à Privas, le Gouvernement a pris des engagements pour lutter contre les fragilités de l’école rurale. Ainsi, quinze départements ont déjà signé des « conventions ruralités », qui permettent aux territoires volontaires de s’engager sur le regroupement et la mise en réseau d’écoles, en leur donnant une visibilité sur les évolutions des effectifs d’enseignants.

Comme cela a été préconisé par le sénateur Alain Duran dans le rapport qu’il a récemment remis au Premier ministre, le Gouvernement poursuivra cette démarche contractuelle, souple et modulable dans les semaines et les mois à venir. C’est là une très bonne réponse aux problématiques que vous venez de poser, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Bernard Fournier.

M. Bernard Fournier. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour toutes les précisions que vous avez apportées, mais celles-ci ne sont que moyennement satisfaisantes eu égard à la question posée.

C’est une évidence, et même quasiment une lapalissade, ne détruisons pas les structures qui fonctionnent bien et rendent des services très appréciés à nos concitoyens ! La gestion au plus près des réalités du terrain, notamment dans le domaine scolaire, me semble être la sagesse même.

critères applicables dans le calcul de la dotation de solidarité communautaire

M. le président. La parole est à M. Patrick Abate, auteur de la question n° 1400, transmise à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales.

M. Patrick Abate. Monsieur le ministre, la dotation de solidarité communautaire, la DSC, répond à un besoin de péréquation entre les communes. Cette source de revenus est « répartie en tenant compte prioritairement de l’importance de la population et du potentiel fiscal ou financier par habitant, les autres critères étant fixés librement par le conseil communautaire ».

Ces critères prioritaires peuvent cohabiter avec des critères complémentaires, laissés à la discrétion des intercommunalités. Il n’existe aucune nomenclature de ces derniers critères ni de pondération prévue par la loi.

Dans un arrêt en date du 9 octobre 2007, la cour administrative d’appel a simplement établi qu’à 20 % le poids des critères prioritaires était insuffisant.

Ainsi, dans certains territoires, alors que ceux-ci respectent la règle, apparaissent de graves entorses à l’esprit de la DSC, en particulier avec l’intégration de critères complémentaires qui, par nature, ont pour effet de limiter, voire d’annuler, l’impact des critères prioritaires en termes de diminution des inégalités. La DSC ne peut donc remplir sa fonction.

À cet égard, je prendrai l’exemple d’une communauté de communes dans mon département dans laquelle les critères y sont établis comme suit : les critères de population, de potentiel fiscal et d’effort fiscal sont pondérés respectivement à hauteur de 35 %, de 15 % et de 10 %. Jusque-là, tout va bien, ces critères et leurs pondérations répondent aux exigences des textes et à la jurisprudence. Mais la communauté de communes peut décider d’affecter les 40 % restant – et c’est ce qui s’est passé ! – à un critère comme celui de la base de cotisation foncière des entreprises, la CFE, de chaque commune, la DSC étant d’autant plus élevée que la CFE liée à la commune est importante. Ce faisant, dans cette communauté de communes, les communes faiblement peuplées avec un potentiel fiscal très important et un effort fiscal très faible vont tout simplement gagner en DSC grâce à la CFE !

Vous l’aurez compris, monsieur le ministre, cette situation nous ramène à une situation antérieure à la création de la communauté de communes et, vous en conviendrez, la vocation première de la DSC n’était pas celle-là.

Monsieur le ministre, je connais votre attachement à la solidarité entre les territoires. Aussi, vous semblerait-il utile d’ajouter au dispositif un ou deux critères prioritaires tels que le nombre de logements sociaux ou le revenu médian par habitant, qui permettraient de limiter les effets néfastes potentiels ?

Quelles dispositions le Gouvernement pourrait-il mettre en œuvre pour faire prévaloir plus efficacement et plus sûrement le caractère solidaire de la DSC ?