M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Parmi ces ateliers de maintenance travaillant pour la SNCF figurent deux ateliers spécialisés dans la sellerie en cuir de haute qualité qui peuvent aussi travailler pour les secteurs de la mode et de l’automobile de luxe. Voilà un savoir-faire précieux pour l’excellence française. Que vont devenir ces ateliers ?

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Je comprends tout à fait ce qui a motivé le dépôt de ces amendements d’appel. Le sujet des ateliers de maintenance est important.

Les régions ont beaucoup investi dans de nouveaux matériels TER, en particulier du constructeur Bombardier, faisant largement appel à des technologies pointues, notamment électroniques. Ces matériels nécessitent moins de maintenance que ceux qu’ils ont remplacés. Que vont devenir les personnels qui travaillent dans ces ateliers, que la SNCF a modernisés au prix d’importants investissements ? Il faut également se soucier de l’emploi dans l’industrie ferroviaire française, dont le niveau technologique est élevé.

Tout en partageant les préoccupations des auteurs de ces amendements, je suivrai l’avis du rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.

M. Olivier Jacquin. Cette question des ateliers de maintenance, plus encore que celle des matériels roulants, met en évidence toute la complexité du sujet.

Il y a un équilibre à trouver : l’ouverture à la concurrence ne doit pas signifier que les nouveaux entrants pourront prendre ce qui est le plus intéressant dans le supermarché SNCF et laisser le reste ; à l’inverse, on ne peut pas faire porter à ces nouveaux entrants la charge de dispositifs trop complexes et obsolètes. À cet égard, je comprends l’avis de sagesse émis par Mme la ministre.

Comme l’a dit Claude Bérit-Débat, les nouveaux trains nécessitent beaucoup moins d’entretien, le principe étant de faire de la prévention. La question des effectifs des ateliers de maintenance spécialisés se pose donc dans la perspective de leur transfert éventuel. Comment allons-nous la traiter sans imposer une trop lourde charge à l’opérateur historique ou aux nouveaux entrants ?

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 20 et 54.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 10.

(Larticle 10 est adopté.)

Article 10
Dossier législatif : proposition de loi relative à l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs
Article 12

Article 11

I. – Le chapitre Ier du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code des transports est complété par une section 3 ainsi rédigée :

« Section 3

« Gares et Connexions

« Sous-section 1

« Statut

« Art. L. 2111-27. – La direction autonome de SNCF Mobilités en charge de la gestion des gares de voyageurs est transformée en société anonyme dénommée “Gares et Connexions”. Le capital de la société est détenu en majorité par l’État.

« Les statuts de la société Gares et Connexions sont fixés par décret en Conseil d’État. À la date de publication de ses statuts initiaux, le capital de Gares et Connexions est détenu intégralement par l’État.

« L’ensemble des biens, droits et obligations de toute nature de la direction autonome de SNCF Mobilités en charge de la gestion des gares de voyageurs, en France et hors de France, sont de plein droit et sans formalité ceux de la société anonyme Gares et Connexions à compter de la date de la transformation. Cette transformation n’a aucune incidence sur ces biens, droits et obligations et n’entraîne, en particulier, pas de modification des contrats et des conventions en cours conclus par Gares et Connexions ou les sociétés qui lui sont liées au sens des articles L. 233-1 à L. 233-4 du code de commerce, ni leur résiliation ni, le cas échéant, le remboursement anticipé des dettes qui en sont l’objet. L’ensemble des opérations résultant de la transformation de Gares et Connexions en société anonyme sont réalisées à titre gratuit et ne donnent lieu au paiement d’aucun impôt, rémunération, salaire ou honoraire au profit de l’État, de ses agents ou de toute autre personne publique.

« La transformation de Gares et Connexions en société anonyme n’emporte aucune conséquence sur le régime juridique auquel sont soumis les personnels, qu’il s’agisse des salariés régis par le statut mentionné à l’article L. 2101-2 du présent code ou des salariés non régis par ce statut.

« Sauf dispositions législatives contraires, Gares et Connexions est soumise aux lois applicables aux sociétés anonymes.

« Sous-section 2

« Objet et missions

« Art. L. 2111-28. – Gares et Connexions a pour objet de gérer, de façon transparente et non discriminatoire, les gares de voyageurs qui lui sont confiées par l’État ou par d’autres personnes publiques.

« Gares et Connexions fournit aux entreprises ferroviaires les services et prestations en gare mentionnés à l’article L. 2123-1 pour lesquels elle perçoit des redevances.

« Art. L. 2111-29. – Gares et Connexions conclut avec l’État un contrat d’une durée de dix ans, actualisé tous les trois ans pour une durée de dix ans. Ce contrat détermine en particulier les objectifs assignés au gestionnaire de gares en matière de qualité de service, de trajectoire financière, d’accès des entreprises ferroviaires aux gares, de rénovation des gares, de sécurité des gares et de développement équilibré des territoires.

« Le projet de contrat et les projets d’actualisation sont soumis pour avis à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières.

« Le projet de contrat et les projets d’actualisation ainsi que l’avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières sont transmis au Parlement.

« Gares et Connexions rend compte chaque année, dans son rapport d’activité, de la mise en œuvre du contrat mentionné au premier alinéa. Ce rapport est adressé au Parlement, à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières et au Haut Comité du système de transport ferroviaire.

« Sous-section 3

« Organisation

« Art. L. 2111-30. – Gares et Connexions est doté d’un conseil d’administration qui, par dérogation à l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, comprend :

« 1° Des représentants de l’État ainsi que des personnalités choisies par l’État en raison de leurs compétences juridiques, techniques ou financières, soit en raison de leur connaissance des aspects territoriaux des activités en cause, soit en raison de leur connaissance des activités assurées par l’établissement, nommés par décret ;

« 2° Des représentants de la SNCF, dont le président délégué de son directoire, nommés par décret sur proposition du conseil de surveillance de la SNCF ;

« 3° Des représentants des salariés, élus dans les conditions prévues au chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

« Parmi les membres désignés en application du 1° du présent article, au moins deux sont des représentants des autorités organisatrices régionales de transport ferroviaire et du Syndicat des transports d’Ile-de-France, au moins un est un représentant du Groupement des autorités responsables de transport et au moins un est choisi parmi les représentants des consommateurs ou des usagers.

« Le nombre de représentants nommés en application du même 1° est égal à la moitié du nombre de membres du conseil d’administration.

« Le nombre de représentants nommés en application du 3° est égal au tiers du nombre de membres du conseil d’administration.

« Un membre du conseil d’administration de Gares et Connexions ne peut être simultanément membre du conseil de surveillance, membre du conseil d’administration ou dirigeant d’une entreprise exerçant, directement ou par l’intermédiaire d’une de ses filiales, une activité d’entreprise ferroviaire ou d’une entreprise filiale d’une entreprise exerçant une activité d’entreprise ferroviaire.

« Les modalités de nomination ou d’élection des membres du conseil d’administration de Gares et Connexions sont fixées dans les statuts de la société mentionnés à l’article L. 2111-27 du présent code.

« Art. L. 2111-31. – Le président du conseil d’administration de Gares et Connexions est nommé par décret, sur proposition du conseil de surveillance de la SNCF et après avis de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières. Il assure la direction générale de Gares et Connexions.

« Avant de transmettre à l’autorité investie du pouvoir de nomination toute proposition de nomination ou de renouvellement en qualité de président du conseil d’administration de Gares et Connexions, le conseil de surveillance de la SNCF fait connaître à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières l’identité de la personne ainsi que les conditions, notamment financières, qui régissent son mandat.

« Avant de transmettre à l’autorité investie du pouvoir de révocation toute proposition de révocation du président du conseil d’administration de Gares et Connexions, le conseil de surveillance de la SNCF fait connaître à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières les motifs de sa proposition.

« L’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières peut, dans un délai et des conditions fixés par voie réglementaire, s’opposer à la nomination ou au renouvellement du président du conseil d’administration de Gares et Connexions si elle estime que l’indépendance de la personne proposée à l’égard des intérêts d’une entreprise exerçant une activité d’entreprise ferroviaire est insuffisamment garantie, ou s’opposer à sa révocation si elle estime que cette révocation est motivée par l’indépendance dont la personne concernée a fait preuve à l’égard des intérêts d’une entreprise exerçant une activité d’entreprise ferroviaire.

« Art. L. 2111-32. – Sont considérés comme dirigeants de Gares et Connexions pour l’application du présent article le président du conseil d’administration et les responsables de la direction générale. La liste des emplois de dirigeant est arrêtée par le conseil d’administration et communiquée à l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, dans des conditions fixées par voie réglementaire.

« Pendant leur mandat, les dirigeants de Gares et Connexions ne peuvent exercer d’activités, ni avoir de responsabilités professionnelles dans une entreprise exerçant, directement ou par l’intermédiaire d’une de ses filiales, une activité d’entreprise ferroviaire, ou dans une entreprise filiale d’une entreprise exerçant une activité d’entreprise ferroviaire, ni recevoir, directement ou indirectement, aucun avantage financier de la part de telles entreprises. L’évaluation de leur activité et leur intéressement ne peuvent être déterminés que par des indicateurs, notamment de résultats, propres à Gares et Connexions.

« Art. L. 2111-33. – La commission de déontologie du système de transport ferroviaire mentionnée à l’article L. 2111-16-2 est consultée dans les conditions prévues au même article L. 2111-16-2 lorsque le président du conseil d’administration de Gares et Connexions ou un dirigeant de Gares et Connexions chargé des missions mentionnées au second alinéa de l’article L. 2111-28 souhaite exercer, avant l’expiration d’un délai de trois ans après la cessation de ses fonctions, des activités pour le compte d’une entreprise exerçant, directement ou par l’intermédiaire d’une de ses filiales, une activité d’entreprise ferroviaire, ou pour le compte d’une entreprise filiale d’une entreprise exerçant une activité d’entreprise ferroviaire.

« Art. L. 2111-34. – Gares et Connexions prend des mesures d’organisation interne pour prévenir les risques de pratiques discriminatoires entre entreprises ferroviaires et pour assurer le respect des obligations découlant des règles d’impartialité énoncées à la présente section.

« Elle établit, à destination de son personnel, un plan de gestion des informations confidentielles qui précise la liste des informations d’ordre économique, commercial, financier ou technique détenues par les services du gestionnaire des gares responsables des conditions d’accès à ces infrastructures et de tarification dont la divulgation est de nature à porter atteinte aux règles d’une concurrence libre et loyale et de non-discrimination imposées par la loi. Ce plan précise les conditions d’utilisation et de communication de ces informations. Il est pris sur avis conforme de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières.

« Sous-section 4

« Gestion domaniale

« Art. L. 2111-35. – I. – Les biens immobiliers de la direction autonome Gares et Connexions relevant de son domaine public sont déclassés à la date de sa transformation en société anonyme. Ils sont attribués à cette même date en pleine propriété à la société Gares et Connexions. Ils peuvent être librement gérés et aliénés dans les conditions du droit commun.

« Lorsque les conditions de la cession ou de l’apport d’un bien compromettent la bonne exécution par Gares et Connexions et ses filiales de leurs obligations législatives et réglementaires ou des engagements pris dans le cadre du contrat mentionné à l’article L. 2111-29, l’État s’oppose à la cession ou à l’apport ou subordonne leur réalisation à la condition qu’ils ne portent pas préjudice à la bonne exécution desdites obligations. À cette fin, Gares et Connexions et ses filiales transmettent à l’État toutes informations utiles et, notamment, le projet de convention avec le cessionnaire ou le destinataire de l’apport.

« En cas de non-respect des conditions prévues au deuxième alinéa du présent article par Gares et Connexions ou par l’une de ses filiales, la nullité de la cession ou de l’apport peut être demandée par l’État dès lors que le prix de cession des biens immobiliers concernés dépasse un seuil fixé par arrêté du ministre chargé des transports.

« Les conditions et modalités de l’opposition mentionnée au même deuxième alinéa sont fixées par décret en Conseil d’État. »

II. – Gares et Connexions et SNCF Mobilités concluent un accord relatif au transfert des personnels de SNCF Mobilités assurant des services et prestations en gare mentionnés à l’article L. 2123-1 à Gares et Connexions. À défaut d’un tel accord dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur du I, les modalités de ce transfert sont déterminées par voie réglementaire.

III. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2020.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, sur l’article.

M. Gérard Cornu. L’article 11 traite du devenir de Gares & Connexions.

Chacun comprend bien que, dans la perspective de l’ouverture à la concurrence, Gares & Connexions ne peut plus être une filiale de SNCF Mobilités. Elle deviendra soit une société anonyme à capitaux publics indépendante, comme le propose le rapporteur, soit une filiale de SNCF Réseau. Cette seconde option a pour l’heure ma préférence, car elle a le mérite d’une plus grande simplicité. Par comparaison, dans le secteur aérien, Aéroports de Paris gère à la fois les aérogares, le tarmac et les pistes. On n’imagine pas que le tarmac et les pistes relèvent d’une société, et les aérogares d’une autre !

Il vaut donc mieux, à mon avis, faire de Gares & Connexions une filiale de SNCF Réseau. Néanmoins, je comprends la position du rapporteur : SNCF Réseau étant très endettée, il craint que Gares & Connexions n’en subisse les conséquences si elle devient une filiale de cet opérateur, alors qu’elle fonctionne bien actuellement, ce qui a permis la rénovation d’un certain nombre de gares. La question est dès lors de savoir si l’État reprendra la dette de SNCF Réseau.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l’article.

M. Yves Daudigny. La transformation de Gares & Connexions en société anonyme va selon moi à l’encontre de toute logique. En revanche, transférer Gares & Connexions à SNCF Réseau, avec tous les moyens adéquats, sous la forme d’un service doté d’autonomie comptable, s’inscrirait dans la continuité naturelle qui existe entre les activités de gestion du réseau et de gestion des gares.

Le métier d’accès au réseau découle en effet directement du rôle central, dans le système ferroviaire, de l’infrastructure, interface commune et indispensable aux différents opérateurs ferroviaires.

De même, l’accès aux gares est, pour les différents utilisateurs du système ferroviaire, une interface nécessaire entre la ville et l’accès à la mobilité ferroviaire dans sa dimension de service ouvert au public. Il existe donc une continuité naturelle entre les activités de gestion du réseau et de gestion des gares.

Techniquement, la gestion de l’affectation des voies aux trains, la gestion des quais et le pilotage de l’information des voyageurs plaident également en faveur du maintien de cette continuité.

Par souci de cohérence, je voterai les amendements de suppression de l’article.

M. le président. La parole est à M. Sébastien Meurant, sur l’article.

M. Sébastien Meurant. Les gares, situées en général en centre-ville, sont un atout indéniable de cette galaxie qu’est la SNCF. Certaines d’entre elles ont été transformées pour le meilleur ces dernières années. Ainsi, en région parisienne, la gare Saint-Lazare a changé radicalement en dix ans ; espérons que la gare du Nord et d’autres gares d’importance connaîtront la même évolution. Faire des gares des lieux de vie et valoriser le foncier alentour est un moyen pour la SNCF de dégager de nouvelles ressources et de changer son image.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Hervé Maurey, président de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. J’ai écouté avec beaucoup d’attention les collègues qui se sont exprimés sur cette question importante du devenir de Gares & Connexions.

Nous sommes tous d’accord, me semble-t-il, sur un point : Gares & Connexions ne peut pas rester une filiale de SNCF Mobilités dès lors que cet opérateur sera soumis à la concurrence et ne sera plus en situation de monopole.

MM. Cornu et Daudigny ont souligné qu’il y avait une vraie logique à ce que Gares & Connexions relève de SNCF Réseau. Louis Nègre et moi-même avions d’ailleurs d’abord retenu cette option. Les quais relevant de SNCF Réseau, il apparaît logique que les gares lui soient rattachées.

Cependant, après avoir procédé aux auditions et réfléchi, nous avons constaté que nous nous heurtions à deux difficultés.

La première, qu’a notamment soulignée Gérard Cornu, tient à la dette de SNCF Réseau, qui s’élève à 50 milliards d’euros et augmente chaque année de 3 milliards d’euros, tendance qui devrait se poursuivre pendant encore au moins dix ans, d’après les trajectoires financières. Notre crainte est que Gares & Connexions, dont l’activité est rentable, se trouve « plombée », si je puis m’exprimer ainsi, par le poids de la dette de SNCF Réseau.

La seconde difficulté, dont on n’a pas parlé jusqu’à présent, c’est que la gestion de SNCF Réseau, qui est aujourd’hui un EPIC, un établissement public industriel et commercial, est très contrôlée par sa tutelle, à savoir le ministère. D’après ce qu’on m’en dit, ce contrôle s’exerce très en amont et porte jusque sur des points de détail de la gestion de l’entreprise. Je ne voudrais pas que le dynamisme de Gares & Connexions, qui réalise d’importants investissements non seulement en France, mais aussi à l’étranger – elle construit des gares dans des pays comme la Chine ou l’Inde –, soit gêné par des lourdeurs et des contraintes. Gares & Connexions a besoin de lever de la dette pour investir, éventuellement de travailler avec des partenaires extérieurs. Or, en l’état actuel des choses, son activité se trouverait entravée si elle devenait une filiale de SNCF Réseau.

Nous avons besoin des lumières du Gouvernement, qui ne peut pas se borner à s’en remettre à la sagesse de notre assemblée. Si demain SNCF Réseau est transformée en société anonyme et délestée de sa dette, je serai le premier à dire qu’il n’est pas nécessaire de créer une nouvelle structure pour les gares.

Le dispositif que nous avons inscrit dans notre proposition de loi et qu’a bien voulu retenir le rapporteur représente en quelque sorte une solution d’attente, eu égard à la situation actuelle de SNCF Réseau. Si demain se produit une évolution dans le sens que je viens d’indiquer, nous pourrons nous tourner vers la solution que suggère à juste titre Gérard Cornu.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 21 est présenté par Mme Assassi, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 55 est présenté par MM. Jacquin, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy et Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 21.

M. Guillaume Gontard. C’est effectivement une solution d’attente qui nous est proposée au travers de l’article 11, mais elle nous fait peur.

Cet article a pour objet de transformer la branche Gares & Connexions de la SNCF en société anonyme filialisée. La mise en œuvre de cette disposition purement idéologique aura pour conséquence la sortie des gares et des infrastructures du domaine public. L’Union européenne ne nous oblige ni ne nous invite à emprunter cette voie ultralibérale.

Les gares sont des outils d’aménagement du territoire et n’ont pas vocation à être exploitées selon une logique comptable pour réaliser des bénéfices. Il nous semble évident que le projet de filialisation de Gares & Connexions a pour finalité de permettre à terme la vente de gares, ce qui aura immanquablement pour effet d’entraîner la disparition progressive de nombreuses dessertes jugées non rentables et un affaiblissement dramatique du maillage du territoire.

Pour des raisons tant sociales qu’écologiques, l’adoption d’une telle disposition serait catastrophique. Il est inconcevable d’aggraver encore la fracture territoriale et de remettre des cars sur nos routes !

Nous vous invitions donc, mes chers collègues, à voter cet amendement de suppression de l’article 11.

M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour présenter l’amendement identique n° 55.

M. Olivier Jacquin. Je partage l’avis d’Hervé Maurey : Gares & Connexions ne peut rester au sein de SNCF Mobilités. Ce point avait été soulevé lors de la discussion de la loi de 2014 portant réforme ferroviaire ; des questionnements et des hésitations s’étaient alors fait jour, différentes solutions avaient été envisagées, sans que l’on puisse aboutir.

Comme l’a dit M. le président de la commission, en l’absence de perspective de reprise de la dette de SNCF Réseau par l’État, il est très difficile d’envisager de rattacher les fonctions supports, les facilités essentielles, à cet opérateur.

Quant à la proposition de transformer Gares & Connexions en société anonyme rattachée à l’EPIC de tête SNCF, elle nous inquiète. La comparaison avec Aéroports de Paris établie par M. Cornu me fait d’ailleurs craindre la liquidation d’un autre monopole naturel…

Le changement de statut de l’EPIC de tête est également évoqué dans le rapport de M. Spinetta, qui souligne les inconvénients de la solution retenue dans la proposition de loi, notamment le fait que sa mise en œuvre « nécessiterait un contrôle accru du régulateur sur les flux entre Gares & Connexions et le reste de l’EPIC concerné » et qu’elle « ne lèverait pas totalement la suspicion quant à l’indépendance de Gares & Connexions, le président de l’EPIC SNCF étant aussi celui de SNCF Mobilités ».

L’idée de rattacher Gares & Connexions à SNCF Réseau semble en revanche recevoir l’approbation de l’ARAFER. Cette solution, qui aurait plutôt notre préférence, est également prônée par un certain nombre de spécialistes du secteur. Le rapport du Gouvernement de 2014 se prononçait aussi en faveur d’un transfert de Gares & Connexions à SNCF Réseau.

Par ailleurs, l’article 11 prévoit que, à la date de création de la nouvelle société anonyme, le capital soit entièrement détenu par l’État. Mais il prévoit également l’ouverture à terme du capital de Gares & Connexions à d’autres actionnaires : ne faudrait-il pas inscrire dans le texte que le capital restera entièrement public ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Longeot, rapporteur. Ces deux amendements visent à supprimer l’article 11 de la proposition de loi, qui prévoit de transformer Gares & Connexions en une société anonyme à capitaux publics, filiale de l’établissement public de tête SNCF.

Pourtant, séparer le gestionnaire de gares de SNCF Mobilités, opérateur historique de transport, est impératif pour assurer le respect des règles concurrentielles et garantir l’accès de toutes les entreprises ferroviaires aux gares dans des conditions d’équité.

Dans son avis sur la proposition de loi, le Conseil d’État a d’ailleurs indiqué que la solution retenue dans celle-ci permettrait une mise en conformité avec le droit européen.

Pour répondre aux inquiétudes légitimes des auteurs de ces amendements, je rappellerai que l’article 11 prévoit que l’État soit détenteur de 100 % du capital social de Gares & Connexions au moment de sa transformation en société anonyme et qu’il demeure en tout état de cause actionnaire majoritaire. Il n’y a donc pas de privatisation des gares. L’ouverture du capital social à d’autres investisseurs permettra d’investir dans le développement et la modernisation des gares, sans creuser l’endettement du gestionnaire de gares.

La commission est défavorable à ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Nous sommes tous d’accord sur le fait que le rattachement actuel de Gares & Connexions à SNCF Mobilités pose problème dans la perspective de l’ouverture à la concurrence. Il faut donc réfléchir à son positionnement dans ce nouveau contexte.

Je veux insister sur l’importance des gares au regard de la fiabilité et de la régularité du service de transport ferroviaire. À cet égard, les incidents auxquels nous avons été confrontés, notamment à la fin de l’année dernière, découlaient notamment de problèmes de fiabilité des installations. Il s’agit d’un enjeu majeur en termes de transport ferroviaire.

J’en suis convaincue, il faut absolument simplifier la répartition des actifs issus de la réforme de 1997. En effet, aujourd’hui, les responsabilités concernant ces nœuds essentiels que sont les gares sont éclatées. Une entité est propriétaire des quais, une autre des verrières. Quant aux panneaux d’information des voyageurs, leur propriétaire n’est pas le même selon qu’ils se trouvent dans les bâtiments ou à l’extérieur. Ainsi, des installations techniques peuvent être gérées sans vision d’ensemble. Il me semble donc nécessaire de revenir sur la séparation des actifs issue de la réforme de 1997 pour ce qui concerne les gares.

Par ailleurs, il convient de prendre en compte une multiplicité d’enjeux liés aux gares. Je pense à l’inscription des gares dans la ville, bien sûr, au développement des services que les voyageurs peuvent souhaiter trouver sur leur trajet. Je souhaite également insister sur l’importance de l’intermodalité et le rôle que les gares doivent jouer dans une politique visant à offrir des alternatives à la voiture individuelle. Ces questions, qui seront au cœur du projet de loi d’orientation sur les mobilités que je présenterai prochainement, doivent être prises en considération dans la réflexion sur le positionnement de Gares & Connexions.

Les concertations sont en cours sur ces sujets. Dans l’immédiat, je m’en remets à la sagesse de votre assemblée.