Mme Christine Bonfanti-Dossat. Madame la secrétaire d’État, j’entends bien ce que vous dites. Pour autant, je suis intimement convaincue que le Gouvernement a la responsabilité de répondre au souhait de 95 % des Français, qui désirent vivre le plus longtemps chez eux, à domicile. Ne pas les entendre serait ne pas entendre une évolution majeure de notre société.

baisse de candidats dans les sessions de formation d’aides-soignants

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Constant, en remplacement de M. Bernard Buis, auteur de la question n° 883, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Constant. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je vais vous lire la question que souhaitait poser mon collègue Bernard Buis à Mme la ministre des solidarités et de la santé :

« Madame la ministre, nous vous alertons régulièrement sur les carences en matière de professionnels de santé dans différents secteurs. On pense évidemment aux déserts médicaux dus au manque de renouvellement des médecins généralistes tant en secteur rural qu’en ville ou dans les services d’urgence des hôpitaux. On pense aussi à la difficulté d’avoir un rendez-vous avec un médecin spécialiste ou de trouver un médecin traitant.

« Je souhaite aujourd’hui vous alerter et attirer votre attention sur le déficit constaté partout en France de candidats aux sessions de formation d’aide-soignant, métier de santé pourtant indispensable dans le dispositif de prise en charge des malades.

« En effet, si je me réfère à l’exemple de mon département, il y avait encore récemment en Drôme deux sessions de formation, avec chacune 60 stagiaires qui se dirigeaient ensuite vers le métier d’aide-soignant. Il n’y a eu cette année qu’une seule session, qui n’a même pas fait le plein de stagiaires.

« La situation est identique dans de nombreux départements et on peut légitimement craindre une pénurie dans le cadre du renouvellement des postes d’aides-soignants.

C’est pourquoi je me permets de vous interpeller, madame la ministre, sur cette problématique. Quelles mesures envisagez-vous pour enrayer la pénurie et rendre plus attractif le métier d’aide-soignant, en particulier pour ce qui concerne la rémunération ? »

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, je vous remercie pour votre question. Le Gouvernement partage le constat global que vous dressez au sujet de la perte d’attractivité de cette formation.

En effet, les données publiées par la Drees (direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) révèlent une diminution du nombre des inscrits à la formation d’aide-soignant pour la deuxième année consécutive – la baisse est de 6 % entre 2016 et 2018 –, ainsi qu’une forte baisse du nombre de candidats au concours d’entrée, qui est de l’ordre de 40 % depuis 2014. Toutefois, l’évolution du nombre des diplômés est restée quasi stable : il était de 22 800 en 2018.

Afin de favoriser l’accès à cette formation et de mieux reconnaître les compétences des aides-soignants dans leur pratique professionnelle, plusieurs actions ont été engagées depuis 2018. Leur mise en œuvre se poursuit, notamment dans le cadre des plans Ma santé 2022 et Investir pour l’hôpital.

La valorisation de la formation et, par là même, de la profession d’aide-soignant est au cœur des mesures portées par le ministère.

Un groupe de travail associant tous les acteurs concernés s’est constitué en avril 2019. Il a engagé une refonte des référentiels métier et formation, qui est en cours de finalisation en vue d’une mise en place à la rentrée de septembre 2020. La réforme est aussi l’opportunité de mettre en place des passerelles avec d’autres professions et, donc, de décloisonner l’exercice de la profession d’aide-soignant.

Les travaux du groupe s’articulent autour des préconisations de la mission conduite par Myriam El Khomri. Dans son rapport remis à l’automne 2019, elle recommande une simplification des modalités d’accès à la formation, qui garantisse malgré tout une diversité des profils, indispensable. Mme El Khomri envisage aussi la mise en place de critères de sélection nationaux pour suivre la formation. Les arbitrages devraient être rendus publics prochainement.

La mobilisation continue au niveau des agences régionales de santé (ARS) pour valoriser le métier et desserrer le calendrier des concours existants, qui était trop étalé dans le temps. J’en veux pour preuve qu’il fallait attendre près d’un an entre son inscription au concours et l’entrée dans la formation, ce qui ne permettait pas aux jeunes intéressés par le métier d’aide-soignant de se projeter aussi loin.

À plus long terme, la réflexion se poursuit avec le ministère de l’enseignement supérieur, afin de rendre la formation d’aide-soignant beaucoup plus visible et lisible aux yeux des lycéens, notamment sur la plateforme Parcoursup.

Concernant les professionnels en activité, une revalorisation indemnitaire est prévue dès le début de cette année dans les conditions prévues par le plan Investir pour l’hôpital.

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Constant, pour la réplique.

Mme Agnès Constant. Je vous remercie de ces éléments, madame la secrétaire d’État. Faire passer les aides-soignants de la catégorie C à la catégorie B serait une bonne chose pour la reconnaissance et l’attractivité du métier.

fermeture du service d’urgence de nuit de l’hôpital de sisteron

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 888, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

M. Jean-Yves Roux. Madame la secrétaire d’État, en juillet 2019, à la suite du congé maladie d’un médecin et des départs en vacances, les urgences de l’hôpital de Sisteron ont fermé la nuit. Cette situation devait être temporaire, ce qui a obligé le service à bricoler un peu et à s’en remettre à la très bonne volonté de chacun, notamment du SAMU (service d’aide médicale urgente), du SMUR (service mobile d’urgence et de réanimation) et des élus de Sisteron.

Or, depuis cet été, les urgences de Sisteron n’ont jamais rouvert la nuit. Or le bricolage comme la bonne volonté ne sont pas des politiques acceptables, surtout quand la sécurité des patients mais aussi la nécessaire accessibilité aux services publics sur tout le territoire et dans les mêmes conditions sont en jeu.

Élu des Alpes-de-Haute-Provence, je ne peux pas accepter d’être le sénateur d’un département où le service public de la santé n’existe que le jour. Je ne peux accepter non plus que, à terme, ce service public de nuit soit assuré dans d’autres départements, ce qui contraindrait les patients à des déplacements encore plus longs, dans des conditions parfois plus difficiles – nous nous situons dans un territoire de montagne –, qui seraient inadaptées à la gravité de certaines pathologies.

Des discussions ont eu lieu avec l’ARS (agence régionale de santé) pour trouver des solutions. Or, dans leur rapport sur les urgences hospitalières remis le 19 décembre dernier à Mme la ministre des solidarités et de la santé, le docteur Thomas Mesnier, député de Charente, et le professeur Pierre Carli, patron du SAMU de Paris, suggèrent d’ores et déjà d’autoriser la fermeture des urgences la nuit dans certains hôpitaux.

Madame la secrétaire d’État, la publication de ce rapport laisse entendre à tous les acteurs de la santé du département que l’hôpital de Sisteron ou d’autres services d’urgence du département, eux aussi fragilisés, pourraient être les premiers concernés par ces fermetures permanentes la nuit.

Pourtant, des solutions existent, à titre expérimental s’il le faut, pour que nos habitants bénéficient d’un réel accès aux soins les plus vitaux à proximité de leur domicile.

Concernant les difficultés de recrutement des médecins, puisque le salaire des médecins intérimaires doit être plafonné, le salaire des nouveaux médecins concourant à la permanence des soins dans ces structures pourrait bénéficier d’une surprime permanente en cas de travail de nuit.

On peut également envisager l’ouverture de maisons médicales de garde sans condition d’un nombre moyen de passages aux urgences, ou encore l’aménagement du temps partagé de médecins salariés dans des centres de santé à l’hôpital.

En outre, on pourrait prévoir l’implantation systématique de plateaux techniques, radiologiques et biologiques dans tous les déserts hospitaliers la nuit.

Enfin, des urgences gérontologiques pourraient elles aussi être expérimentées dans notre département, avec une nouvelle approche de la dépendance.

Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous me confirmer que l’hôpital de Sisteron et les autres hôpitaux du département auront bien des urgences de nuit ? Allez-vous soutenir la mise en place d’un nouveau modèle pour les urgences hospitalières de nuit dans nos territoires ruraux, fondé sur la proximité et adapté aux réalités géographiques et humaines de notre pays ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, le service d’accueil des urgences du centre hospitalier intercommunal des Alpes du Sud à Sisteron (Chicas) est en effet fermé de 20 heures à 8 heures du matin depuis le début de l’été. Cette fermeture est due à une absence médicale qui n’a pu être compensée.

De fait, l’établissement est confronté à des difficultés de recrutement dans un contexte national et départemental de raréfaction des ressources médicales, notamment urgentistes.

Seul le service d’accueil des urgences est fermé la nuit. Le SMUR de l’établissement ainsi que l’unité d’hospitalisation post-urgences continuent de fonctionner. La prise en charge urgente des patients sur le territoire est assurée.

Le Chicas, dont dépend l’établissement de Sisteron, prévoit la mutualisation des postes d’urgentistes entre sites : une clause obligatoire a été ajoutée dans les contrats de recrutement des nouveaux praticiens intégrant l’établissement. Environ 20 % du temps de travail des urgentistes venant travailler à Gap devra être effectué sur le site de Sisteron.

Par ailleurs, un projet de mutualisation des centres d’appel 15, du SAMU 04 et du SAMU 05 a vocation à apporter une réponse rapide à ce manque de ressources médicales. Dans cette hypothèse, la régulation médicale s’effectuerait en alternance dans les locaux du SAMU de l’un ou l’autre des départements. Cette organisation, vous en conviendrez, permettra de libérer du temps médical dans les services des urgences.

Ces mesures au niveau local viennent s’ajouter aux dispositions structurelles qui ont été annoncées dans le cadre du pacte de refondation des urgences. Parmi les douze mesures annoncées, la simplification des procédures de recrutement médical et l’encadrement de l’intérim médical viennent conforter le travail engagé localement par la direction du Chicas et l’ARS PACA (Provence-Alpes-Côte d’Azur), afin de favoriser le recrutement d’urgentistes.

Par ailleurs, le service d’accès aux soins déployé dès l’été 2020 doit garantir une réponse médicale de qualité en tous points du territoire.

Soyez assuré, monsieur le sénateur, que nous sommes pleinement mobilisés pour apporter à nos concitoyens les résultats qu’ils attendent légitimement. Les services de l’ARS PACA suivent avec une attention très particulière la situation des urgences de Sisteron.

(Mme Catherine Troendlé remplace Mme Hélène Conway-Mouret au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE Mme Catherine Troendlé

vice-présidente

nouveau modèle tarifaire des allocations de solidarité départementales

Mme la présidente. La parole est à M. Hugues Saury, auteur de la question n° 1032, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

M. Hugues Saury. Madame la secrétaire d’État, ma question porte sur le nouveau modèle tarifaire des allocations de solidarité.

À la suite de la réunion du comité de pilotage de l’aide à domicile le 11 février 2019, et après concertation avec les dix fédérations nationales et les départements, le principe d’un nouveau modèle tarifaire a été arrêté.

Ce dernier repose sur un tarif de référence national plancher pour l’APA (allocation personnalisée d’autonomie) et la PCH (prestation de compensation du handicap), ainsi qu’un complément de financement sur objectif, appelé modulation positive, dans le cadre d’un CPOM (contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens).

Dans l’attente de cette réforme globale, vous avez annoncé une enveloppe de 50 millions d’euros, qui permettrait aux conseils départementaux volontaires de commencer à mettre en œuvre cette modulation positive à titre expérimental.

Le décret n° 2019-457 du 15 mai 2019 est venu fixer le cadre de cette démarche. Après avoir postulé auprès de la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie), mon département, le Loiret, a engagé une concertation avec les sept fédérations présentes sur son territoire pour définir un cahier des charges conjoint, puis lancer un appel à candidatures. Une enveloppe de 664 140 euros a depuis été notifiée par la CNSA.

Jusque-là, tout va bien, sauf que le préfet du département, saisi dans le cadre du pacte de Cahors – et c’est bien là ma question –, a indiqué qu’il n’était « pas prévu de retraiter les dépenses exposées par les départements dans le cadre de la réforme de financement des services d’aide et d’accompagnement à domicile qui ne correspondent ni à un transfert de compétences ni à un élément exceptionnel ».

Or il semblerait que cette position diverge d’un département à l’autre.

Je souhaite donc savoir, madame la secrétaire d’État, si les dépenses engagées par le département du Loiret et qui correspondent à l’enveloppe allouée relèvent du plafond défini par l’article 29 de la loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, ou si elles en sont exclues

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, je vous remercie pour votre question, qui me donne l’occasion de compléter ma précédente réponse et de rappeler que le Gouvernement est pleinement mobilisé sur les enjeux liés au vieillissement de la population.

L’aide à domicile constitue l’un des piliers de la réforme Grand âge et autonomie à venir. Elle vise à répondre à la préférence exprimée par nos concitoyens de pouvoir continuer à vivre chez eux.

Je profite de cette réponse pour remercier les professionnels de l’aide à domicile, qui font un métier indispensable, très gratifiant, mais difficile, comme l’a encore montré cet automne Myriam El Khomri dans son rapport.

Nous avons souhaité que, dès 2019, une enveloppe de 50 millions d’euros soit allouée aux services d’aide et d’accompagnement à domicile, afin de préfigurer la mise en place d’un nouveau modèle de financement visant à améliorer la qualité du soutien à domicile, tant pour les personnes accompagnées que pour les professionnels.

Cette enveloppe a été versée aux départements volontaires qui, comme vous le savez, sont chefs de file des politiques sociales, et dont nous voulons faire des acteurs de premier plan du maintien à domicile. Agnès Buzyn a récemment eu l’occasion d’évoquer ce sujet devant eux lors d’un séminaire organisé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.

Le département du Loiret s’est engagé dans cette voie de l’amélioration des services à domicile, initiative qu’il faut saluer. Je précise que ces crédits, qui financent des dépenses de fonctionnement, relèvent bien du plafond défini par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Désormais, nous souhaitons construire un partenariat renouvelé et renforcé avec les conseils départementaux. La réforme à venir pour le grand âge et l’autonomie doit nous permettre de renforcer les coopérations dans les territoires, pour garantir la qualité de l’accompagnement de nos aînés et de leurs aidants.

Mme la présidente. La parole est à M. Hugues Saury, pour la réplique.

M. Hugues Saury. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie pour votre réponse mais, vous vous en doutez, celle-ci ne me convient pas, non plus qu’aux départements ou probablement aux associations.

En réalité, le Gouvernement engage une politique, la finance, la délègue aux départements, qui sont prêts à l’appliquer dans les territoires mais, en définitive, il reprend d’une main ce qu’il avait donné de l’autre. Les départements sont lésés, les associations leurrées, et ce sont les usagers qui pâtissent de la situation. J’espère que le bon sens permettra de revenir à un dispositif plus approprié.

extension des effets du fonds de garantie aux accidents médicaux

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Bonnecarrère, auteur de la question n° 1041, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

M. Philippe Bonnecarrère. Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais que vous vous penchiez sur la situation des victimes d’accidents médicaux, mais aussi sur celle des médecins qui peuvent être les auteurs de tels accidents au cours de vies professionnelles, par ailleurs, parfaitement honorables.

Ma question porte sur l’extension du fonds de garantie des dommages consécutifs à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins dispensés par des professionnels de santé exerçant à titre libéral, et aux accidents médicaux faisant l’objet d’une réclamation au sens de l’article L. 251-2 du code des assurances, afin que celui-ci s’applique à compter du 1er janvier 2011, en lieu et place du 1er janvier 2012.

Madame la secrétaire d’État, il s’agit de combler une espèce de « trou » législatif, qui a subsisté malgré deux dispositions légales datant de 2002, et une disposition votée en 2011.

À l’époque, des discussions affreusement compliquées ont eu lieu entre le Gouvernement, le Parlement et les compagnies d’assurance pour essayer de trouver une solution à l’insuffisance des garanties données par les contrats d’assurance qui avaient pu être souscrits à l’étranger. Pour faire bref, il s’agissait de trouver une solution à un problème de défaut partiel d’assurance.

Après l’adoption des dispositions légales de 2002, il est apparu qu’il restait encore des trous. Il a donc été mis en place un fonds de garantie, financé par la profession, s’agissant en particulier des actes de gynécologie.

Pour des raisons techniques de calcul de prescription, il reste une dernière zone non couverte par le fonds : elle concerne des accidents ayant fait l’objet d’une déclaration, à compter non pas du 1er janvier 2012, mais du 1er janvier 2011. En clair, une douzaine de médecins, essentiellement des gynécologues-obstétriciens, ne seraient aujourd’hui pas couverts.

Seuls les professionnels de santé financent ce fonds. Si cette extension n’est pas accordée, ce sont les caisses primaires d’assurance maladie qui devront couvrir les dommages.

Je ne parviens pas à aborder le nœud du débat puisque, lorsque l’on examine le projet de loi de financement de la sécurité sociale, on me répond qu’il faut aborder le sujet au moment de la loi de finances et que, en loi de finances, on m’oppose l’article 40 de la Constitution.

Le Gouvernement pourrait-il étudier et, de mon point de vue, accepter cette extension de la couverture du fonds de garantie au 1er janvier 2011 ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le sénateur, je vous remercie pour votre question.

Le ministère de la santé a également été informé des difficultés auxquelles sont confrontés plusieurs médecins qui font face à des défauts de couverture assurantielle. Nous sommes sensibles à la situation de ces médecins et de leurs familles.

Néanmoins, une extension de la garantie du fonds ne peut se faire que sous deux conditions : le respect absolu de l’indemnisation des patients et le maintien de l’équilibre financier du fonds. L’assurance fournie à certains praticiens pour des litiges passés ne doit pas nous pousser à prendre le moindre risque pour la viabilité de l’assurance future de leurs confrères et des victimes.

Des travaux sont actuellement en cours pour évaluer les modalités de mise en œuvre de cette extension : il faudrait s’assurer que le fonds puisse couvrir le coût de l’extension de la garantie dans le temps. Cette extension des effets du fonds au 1er janvier 2011, voire même antérieurement si d’autres médecins que ceux qui sont aujourd’hui identifiés étaient concernés, pourrait faire peser un risque d’insolvabilité au fonds si les projections présentées étaient sous-estimées et les ressources mobilisées insuffisantes.

Ce risque ne doit pas être pris. Il est dans l’intérêt des patients qu’un financement complémentaire soit envisagé en cas d’extension des garanties couvertes par le fonds, ce que ne prévoyaient pas les amendements présentés lors de l’examen des textes budgétaires.

situation alarmante du centre hospitalier du rouvray à sotteville-lès-rouen

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, en remplacement de M. Didier Marie, auteur de la question n° 1042, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Avant de commencer, madame la présidente, je me permets de préciser que, si M. Didier Marie est absent, c’est parce qu’il est retenu dans les transports.

Je le remplace donc au débotté pour poser une question à laquelle il est très attaché. Elle porte sur la situation particulièrement préoccupante dans laquelle se trouve le centre hospitalier du Rouvray à Sotteville-lès-Rouen depuis 2018.

Ce centre hospitalier vit effectivement une période de crise durable qui ne cesse de s’aggraver à tous les points de vue.

Tout d’abord, les locaux ne permettent plus d’assurer un accueil digne des personnes. L’occupation des lits dépasse largement la capacité de l’établissement. Ainsi, certains patients se retrouvent à dormir dans la salle de visite des familles ou dans des bureaux ; d’autres sont obligés de cohabiter dans des chambres très exiguës, le nombre de patients étant parfois trois fois plus élevé que l’unité prévue.

Parallèlement, les conditions matérielles d’habitation sont déplorables : absence systématique de lunettes sur les cuvettes des toilettes, pas de sanitaires individuels. Les patients n’ont pas d’intimité : absence de serrure aux portes des chambres, portes avec des fenêtres transparentes, pas de dispositif de fermeture des placards.

Par ailleurs, la liberté fondamentale d’aller et venir des patients est bafouée. La libre circulation des patients en soins libres dépend de la disponibilité des soignants : ils sont donc très souvent soumis à un enfermement injustifiable. Les patients en soins sans consentement sont privés de leurs droits ipso facto, bien que les textes prévoient que toute restriction individuelle doit être décidée en fonction de l’état clinique du patient, après évaluation médicale.

En outre, les pratiques d’isolement sont complètement illégales. L’isolement doit être une procédure de dernier recours. Or, dans de nombreux cas, la contention est la règle, et la liberté l’exception. Les conditions de rétention de ces patients sont particulièrement avilissantes : sans accès aux sanitaires, vous imaginez comment les choses se passent ! Sans accès aux personnels soignants, ils sont condamnés à se blesser physiquement en frappant à la porte autant de temps que nécessaire.

Les patients sont également dessaisis de leur statut d’hospitalisation et de leurs droits. Ils ne disposent d’aucune information de la part des soignants sur l’offre de soins et les conditions de vie pendant leur séjour.

Enfin, il faut y insister, les droits des enfants sont constamment et consciemment foulés au pied. Cette situation ne peut plus durer. Il est incompréhensible que des enfants de moins de 12 ans soient enfermés dans la même chambre que des adultes. Selon le rapport de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, ces enfants ont pu être violentés, parfois sous l’emprise de stupéfiants, ou encore victimes de sévices sexuels.

Cette situation est inadmissible et injustifiable. Les plaintes et les patients en souffrance ne peuvent plus être ignorés. Il est de la responsabilité du Gouvernement d’agir. Aussi, madame la secrétaire d’État, M. Marie vous demande comment le Gouvernement entend-il restaurer une situation d’accueil des patients digne de ce nom.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire dÉtat auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, cette visite de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté s’est déroulée dix-huit mois après le conflit social intervenu en 2018.

Comme vous le savez, le protocole d’accord signé entre la direction et les syndicats en juin 2018 prévoyait la création en priorité de trente nouveaux postes de soignants, dont le déploiement était prévu sur une année. La création de ces postes a fait l’objet d’un accord de financement intégral avec l’ARS Normandie pour un montant de 1,35 million d’euros.

Conformément au protocole, les crédits correspondant aux vingt premiers postes ont été délégués et les recrutements intégralement effectués entre juin 2018 et juin 2019. L’ARS a délégué les crédits relatifs aux dix derniers postes en octobre 2019. Les professionnels concernés sont en cours de recrutement.

Au-delà de ces moyens supplémentaires, le protocole prévoyait également la mobilisation des équipes médicale et soignante pour formaliser des projets en vue de l’amélioration des prises en charge.

Ainsi, le projet de création d’une unité dédiée à la prise en charge des adolescents a été transmis par l’établissement à l’ARS au début du mois d’octobre 2019. Cette unité devrait voir le jour dans des locaux adaptés et rénovés en novembre 2020, à l’issue des travaux nécessaires à son installation.

Dès la communication des recommandations de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté, une réunion de travail entre le directoire de l’établissement et l’ARS s’est tenue. Elle a permis d’identifier les premières actions à mettre en œuvre en urgence.

Tout d’abord, il faut une accélération du plan de rénovation de l’établissement visant l’humanisation des conditions d’hébergement. Le plan actuel, prévu sur cinq ans, sera adapté pour permettre sa mise en œuvre complète d’ici à douze mois. Les surcoûts liés à la mise en place de ce plan feront l’objet d’un accompagnement budgétaire à hauteur de 1 million d’euros : ces crédits viennent d’être délégués par l’ARS.

Il faut également accélérer le déploiement de nouveaux dispositifs de réhabilitation psychosociale selon un calendrier à définir.

Enfin, il faut une actualisation du projet médical : l’établissement engagera dès le mois de janvier une révision de son projet médical avec l’appui d’un conseil extérieur, dans l’objectif de limiter strictement les restrictions à la libre circulation des patients à la mise en œuvre du traitement requis.

Soyez assurée, madame la sénatrice, que le ministère, comme l’ARS, suit avec beaucoup d’attention la situation de cet établissement et accordera les moyens nécessaires.

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