M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Oui !

M. Philippe Dallier. En effet, ce n’est qu’à partir du moment où il y aura le feu que nous interviendrons et que nous reviendrons à la table. Nous prenons un risque et j’espère que nous n’aurons pas à désigner le moment venu quelqu’un pour éteindre l’incendie.

Telle est la réserve que je souhaitais émettre. Je trouve les critiques de nos collègues communistes très sévères.

Mme le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cette réforme est importante, mais elle a d’abord essentiellement valeur de symbole. C’est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, la manière dont elle a été annoncée tue un peu le projet ! Quelle que soit la réalité des mandats qui ont été donnés, dans la mesure où elle a été annoncée par le président Macron et le président Ouattara, elle est perçue de manière assez préoccupante.

Il est vrai que cette réforme est un acte de confiance de la France à l’égard de l’ensemble de cette zone monétaire, puisque, sans dépôt, notre pays continuera à garantir les taux de change.

Il est vrai aussi que, au cours de la dernière période, la garantie de taux de change a largement favorisé la croissance et les échanges et que les dépôts ont souvent été supérieurs aux obligations. C’était aussi l’intérêt des pays concernés.

Reste que la manière dont ce nouveau système a été annoncé est quelque peu problématique et justifie notre abstention.

L’Europe et l’Afrique devraient essayer de tirer le meilleur profit de leurs expériences respectives. L’Afrique de l’Ouest avait, avant l’Europe, une monnaie commune, laquelle n’a pas engendré d’intégration politique. Quand nous sommes passés à l’euro, nous aurions pu regarder ce qui ne s’était pas passé en Afrique de l’Ouest, alors qu’un certain nombre de pays avaient choisi une monnaie commune.

Aujourd’hui, alors que certains pays d’Afrique de l’Ouest et de la Cédéao cherchent à créer une monnaie commune à partir de l’économie du Nigéria, qui est beaucoup plus dominante dans la région que ne l’est l’économie allemande en Europe, ce qui posera problème, il est important qu’ils mesurent les difficultés que nous avons rencontrées dans la construction de l’euro, et ce d’autant qu’ils ont des difficultés propres : l’intégration et les échanges économiques ne sont pas les mêmes, la Cémac est récente et pas tout à fait mise en place. Ils auront à surmonter, avec cette nouvelle monnaie, les difficultés que nous avons eues pour créer l’euro.

Je le répète : l’Union européenne et les pays africains doivent mieux tirer les leçons de leurs expériences respectives : nous avons commis des erreurs et il serait bon qu’ils ne les commettent pas à leur tour. Il faut une perception fine de la démarche commune lorsque l’on se lance dans une intégration régionale.

Mme le président. La parole est à M. Pierre Laurent.

M. Pierre Laurent. Monsieur le ministre, nous n’instrumentalisons pas les Africains !

Faire état des débats qui existent entre les pays africains de la zone est au contraire une marque de respect de notre part, car ce projet les concerne au premier chef.

À vous entendre, monsieur le ministre, dans les pays d’Afrique, une unanimité parfaite se dégage sur ce projet. Ce n’est pas la réalité et vous le savez comme moi ! Des débats ont lieu dans ces pays – il y en a eu sur le franc CFA et sur les projets qui devraient avoir lieu – et ils se poursuivront.

Pour notre part, nous faisons état de ces débats et des questions qui continueront à se poser, car le projet qui est aujourd’hui mis en place ne les résout pas. En effet, il n’ouvre pas l’ère nouvelle dont l’Afrique a besoin.

Cela ne va pas si mal, dites-vous : ces pays ont un taux de croissance de 2 %.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. De 6 % !

M. Pierre Laurent. De quoi parle-t-on sinon de pays pour lesquels l’enjeu est non seulement national, mais aussi mondial ? Quand allons-nous décider de sortir l’Afrique de la pauvreté dans laquelle elle est maintenue depuis des années ? Il ne s’agit pas de maintenir dans ces pays un taux de croissance de 2 %, dont on sait d’ailleurs qu’il ne profite qu’à une toute petite minorité.

Nous aurons l’occasion d’en reparler dans quelques semaines à l’occasion du débat sur le projet Barkhane : il faut changer d’échelle en matière de développement et créer à cet effet des instruments nouveaux. L’accord que l’on nous propose aujourd’hui ne le permettra pas ; voilà ce que nous disons.

Contrairement à ce que vous affirmez, cette réforme n’est pas un changement historique, elle n’est même pas l’avancée que l’on pourrait attendre dans un premier temps. Grosso modo, nous allons continuer avec les mêmes dispositifs, ce qui est loin de permettre de faire face aux énormes enjeux de développement qui sont devant nous tous, les Africains et l’ensemble des peuples du monde. Or l’avenir de l’Afrique est une question mondiale.

Mme le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je vous rappelle que le vote sur l’article unique vaudra vote sur l’ensemble du projet de loi.

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique du projet de loi.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 60 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 263
Pour l’adoption 241
Contre 22

Le Sénat a adopté définitivement.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l'Union monétaire ouest-africaine
 

5

Ordre du jour

Mme le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à mardi 2 février 2021 :

À quatorze heures trente et le soir :

Deuxième lecture du projet de loi, adopté avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, relatif à la bioéthique (texte de la commission n° 281 rectifié, 2020-2021).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quinze.)

Pour la Directrice des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

ÉTIENNE BOULENGER