Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.

M. Jean-Jacques Lozach. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par féliciter nos collègues du groupe CRCE d’être à l’origine de ce débat auquel la conjoncture actuelle apporte un écho démultiplié. Ne nous berçons pas d’illusions, le sport sortira sérieusement affaibli de la crise sanitaire : le nombre de licenciés aura régressé dans des proportions inquiétantes ; des bénévoles resteront à la maison ; des clubs amateurs disparaîtront ; des structures professionnelles connaîtront une adaptation difficile ; certains événements auront du mal à renaître.

Les loisirs sportifs marchands enregistrent d’ores et déjà des pertes financières considérables. Par exemple, l’Union Sport & Cycle annonce une perte de 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires cette saison pour les commerces et fournisseurs d’équipements de ski.

Bref, tout l’écosystème sportif se trouve affecté par une crise inédite. Dans ce contexte, je salue les efforts déployés par Mme la ministre et ses services, ainsi que par les fédérations, notamment afin de proposer des protocoles sanitaires adaptés à chaque situation.

Rendre l’activité physique accessible au plus grand nombre justifie l’existence d’un service public du sport, qui est un bien collectif à partager. En d’autres termes, la promotion d’un authentique sport pour tous nécessite une politique publique affirmée et globale, en phase avec les évolutions contemporaines. Pour donner de la respiration financière aux clubs sportifs, au moins trois mesures exceptionnelles doivent être envisagées jusqu’à l’été 2024 : d’abord, rehausser de 60 % à 80 % le plafond de réduction fiscale des dons aux associations sportives pour encourager le mécénat ; ensuite, transformer une partie du coût des adhésions et licences en dons donnant lieu à crédit d’impôt pour réduire l’hémorragie du nombre d’adhérents ; enfin, relever le plafond des taxes affectées au financement de l’Agence nationale du sport.

Toutefois, le premier rendez-vous à ne pas manquer, dès le mois de juin prochain, est celui du Pass’Sport, afin d’aider à la reprise d’activité pour les plus jeunes générations. Je formule le souhait que celui-ci devienne d’ailleurs l’outil privilégié d’une orientation structurelle de notre politique sportive. Une enquête réalisée par l’Association européenne des professeurs d’éducation physique et sportive montre que 40 % des élèves présentent une augmentation de leur masse graisseuse et une diminution de 16 % de leurs capacités aérobies. Les tests réalisés à l’issue du premier confinement indiquent une perte de capacité physique des élèves de CE2 de l’ordre de 20 %.

La proposition de loi débattue la semaine dernière à l’Assemblée nationale aurait pu être l’occasion de redonner ses lettres de noblesse à l’éducation physique et sportive. Le rapprochement ministériel entre l’éducation nationale et le sport restera de l’ordre du symbole tant que ne sera pas augmenté le nombre d’heures d’EPS de la maternelle à l’université et qu’un continuum sport éducatif-sport fédéral ne sera pas effectif.

Si le retour à une vie normale s’accompagnera probablement d’une soif d’expression corporelle sous toutes ses formes, mais particulièrement au travers des activités physiques de pleine nature, un soutien public se révélera nécessaire notamment par l’intermédiaire de l’ANS. Il est urgent de doter les politiques sportives d’un financement durable reposant équitablement sur le rendement financier produit par l’activité sportive elle-même, d’où le slogan : « Le sport doit financer le sport ! »

Si l’engagement de l’État doit être consolidé, il faut encourager d’autres sources de financement : mécénat, financement participatif, obligations à impact social des investisseurs privés, etc.

Lever les freins à la pratique des activités physiques et sportives (APS) en renforçant l’accompagnement du public spécifique et en assurant l’égalité d’accès aux pratiques est un enjeu majeur. Des efforts doivent ainsi être conduits pour promouvoir la mixité dans l’éducation sportive et pour lutter plus efficacement contre le sexisme et l’exclusion dont font l’objet les jeunes filles et les femmes dans l’exercice d’activités, dont l’offre n’est pas toujours adaptée et suffisamment diversifiée. Une plus grande inclusion et une meilleure accessibilité des personnes en situation de handicap constituent également un objectif vers lequel nous devons tendre en modernisant les équipements et en développant des politiques plus ambitieuses de promotion du handisport.

Conséquence d’un sous-investissement chronique et persistant, l’état de notre parc d’équipements sportifs, y compris scolaire, doit faire l’objet d’un plan global de modernisation. Le problème se pose, en particulier, pour les piscines, qui n’ont pas fait l’objet de financement d’envergure depuis le grand plan d’équipement lancé en 1971. Depuis de nombreuses années, lors de chaque débat budgétaire est rappelée l’urgence de lancer un ambitieux plan de rénovation-construction d’installations et équipements, avec une recherche de mixité des usages, pour que puissent y cohabiter des sportifs pratiquant dans un cadre institutionnel, mais aussi des personnes venues pratiquer une activité de loisir.

La montée en puissance des exigences environnementales et territoriales est à intégrer, au-delà de la prise en compte impérative des zones dites carencées, notamment les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les zones de revitalisation rurale (ZRR).

La problématique d’une pratique sportive populaire et accessible à tous pose la question du droit au sport. Depuis les années 1980, nous connaissons une croissance des activités autonomes dans l’espace public, des pratiques libres ou encadrées dans des structures commerciales.

S’il reste élevé, le nombre de licences sportives, près de 19 millions selon Les Chiffres clés du sport 2020 – 16,4 millions de licences et 2 millions d’autres titres de participation –, tend à stagner, voire à diminuer depuis quarante ans dans de nombreuses fédérations. Les inégalités territoriales, socioculturelles, économiques, genrées demeurent élevées. À l’aune de la réduction de ces inégalités, la gestion de l’après-covid représentera une période test pour la nouvelle gouvernance du sport français, pour le rôle de l’ANS et de ses déclinaisons territoriales.

En effet, les conférences régionales du sport et les conférences des financeurs, qui se mettent progressivement en place sur le terrain, ont pour mission d’associer plus étroitement l’ensemble des acteurs susceptibles de contribuer au développement de l’offre d’activités physiques et sportives : parcours sportif des enfants, pratique des populations adultes dans leur diversité, etc.

L’intitulé de notre débat de ce soir rappelle l’importance du sport de masse ou du sport pour tous. Il sous-entend que l’accès au sport doit être considéré comme un droit, à l’instar de l’accès à la santé, à l’éducation ou à la sécurité, ce qui suppose d’envisager l’activité physique et sportive comme un élément de la citoyenneté. Cela implique des exigences éminemment concrètes : assurer un accès pour tous aux équipements, favoriser un développement équilibré des pratiques sur l’ensemble du territoire national et tout au long de la vie, diversifier les métiers de l’accompagnement sportif. Sur ce dernier point, les chiffres de Parcoursup parlent d’eux-mêmes : aucun autre secteur de recrutement ne connaît une telle saturation en matière d’orientation.

Aussi le moment est-il sans doute venu de conduire une réflexion sur une nouvelle diversification des métiers du sport. En matière d’encadrement, le recul de 80 % en trois ans des emplois aidés du secteur associatif est fortement préjudiciable à son dynamisme. Le rebond de la pratique passe par une relance de l’emploi sportif qualifié dans les clubs, lesquels demeurent la cellule de base institutionnelle dans un univers de pratiques différenciées. Ces structures doivent se penser comme étant au centre d’une articulation de tout un ensemble de pratiques publiques : sport et éducation, sport et santé, sport et entreprise, sport et développement économique, sport et aménagement du territoire, sport et environnement, sport et tourisme, sport et réinsertion sociale, etc. Au cœur de cette transversalité se distingue une mission : proposer des services à la population et à un territoire comme illustration de l’utilité sociale du sport.

Ainsi le sport d’après-covid devra-t-il intégrer davantage la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) dans le fonctionnement des acteurs concernés, qu’ils soient une composante de l’économie sociale et solidaire ou une entreprise marchande.

Au-delà des mesures d’urgence, le sport français a besoin d’un nouveau cadre et d’objectifs réactualisés. La proposition de loi visant à démocratiser le sport en France a commencé à tracer des perspectives. Les réactions qui ont suivi son adoption sont révélatrices de manques qu’il reste à combler. Un quotidien du soir titrait hier : « La proposition de loi sur le sport provoque frustration et regrets. » Puisse l’examen prochain de ce texte au Sénat contribuer à donner contenu et rayonnement au titre ambitieux qui est le sien.

La première priorité d’une politique sportive nationale doit être de développer le nombre de pratiquants, ce qui suppose une forte capacité d’action de la part de l’État, avec un ministère doté de moyens financiers supplémentaires, à un moment où le sport français est en danger.

Par ailleurs, n’oublions pas qu’il peut fortement contribuer à renforcer la cohésion sociale et éviter les dérives populistes menaçant notre société. L’héritage olympique était censé amener une augmentation de 10 % du nombre de pratiquants en 2024, un objectif exprimé par le Président de la République. Ayons le courage de dire que cette ambition est devenue caduque.

Notre intention de court terme est plutôt de retrouver la situation d’avant-covid. Depuis un an, nous n’avons jamais autant entendu parler de facteurs de comorbidité, mais également de l’apport de l’activité physique pour faire face à ces facteurs, dans le domaine tant préventif que curatif. Cette réalité doit nous encourager à poursuivre collectivement ce combat pour le développement de la pratique sportive.

Je termine sur ce message d’espoir, qui doit susciter une meilleure prise en compte du sport dans notre société et, plus largement, du corps dans notre vie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Savin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Michel Savin. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je remercie à mon tour le groupe CRCE d’avoir pris l’initiative de ce débat.

Depuis plus d’un an, une crise sanitaire sans précédent s’est abattue sur notre pays. Depuis plus d’un an, nos espaces de vie sociale sont profondément modifiés : nombre d’activités sont à l’arrêt, l’activité physique et sportive ne faisant malheureusement pas figure d’exception.

Durant le premier confinement, 38 % des Français ont diminué leur pratique sportive. Ce chiffre est loin d’être négligeable, même si, sur l’année 2020, la part de pratiquants reste relativement stable, puisque 65 % des Français ont pratiqué au moins une activité sportive dans l’année écoulée, contre 66 % en 2018.

Il convient également de souligner que, durant ce premier confinement, contrairement aux idées reçues, quasiment aucun non-pratiquant ne s’est mis à la pratique sportive.

Le secteur du sport amateur en club et association a lui aussi connu un coup d’arrêt brutal. Après la stupeur des premiers instants, les acteurs ont tout fait pour organiser une reprise dans les meilleures conditions. Las, depuis un an, la pratique en club n’a été autorisée que durant quelques semaines entre les mois de juin et d’octobre derniers.

Les inquiétudes quant à la reprise de ces activités sont aujourd’hui nombreuses. En effet, les clubs, mais également les fédérations, font face à des difficultés logistiques, humaines et financières sans précédent.

Certes, ces structures ont pu accéder aux dispositifs de droit commun, mais il est regrettable qu’aucun véritable plan ambitieux pour le sport n’ait été présenté à ce jour pour bien préparer la reprise.

Les pertes financières sont là et elles seront très difficiles à surmonter.

Du point de vue humain, de nombreux clubs craignent aussi de souffrir d’un désengagement des bénévoles, qui sont pourtant la ressource clé de la majorité de ces structures.

Il est un autre sujet d’inquiétude. Les clubs retrouveront-ils tous leurs licenciés lorsque la situation redeviendra normale ? Une baisse drastique du nombre de licenciés est à craindre pour plusieurs fédérations. Pour certaines, selon les derniers chiffres, cela peut aller de 10 % à 25 %.

Afin d’assurer une reprise de la pratique sportive populaire et accessible à tous, le Président de la République a annoncé, au mois de novembre dernier, la création d’un Pass’Sport, à hauteur de 100 millions d’euros. Si nous pouvons saluer cette idée, de nombreuses questions restent malheureusement en suspens, et j’espère que nous pourrons avoir des réponses ce soir.

Tout d’abord, comment ce Pass’Sport sera-t-il financé ? Nous avons proposé une solution de financement dans le projet de loi de finances pour 2021, mais vous l’avez refusée, madame la ministre. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Qui pourra en bénéficier ? Sous quelle forme et pour quel montant ?

Il est également regrettable que ce Pass’Sport ne soit pas universel, à l’instar du Pass’Culture. Encore une fois, cela souligne malheureusement la différence de traitement entre le sport et la culture.

Un autre moyen de soutenir la reprise sportive serait de permettre aux licenciés et adhérents des salles de sport de voir leur adhésion considérée comme un don ouvrant droit à une défiscalisation. Cette proposition aurait le mérite de bénéficier à un public différent de celui qui sera concerné par le Pass’Sport, étant donné que celui-ci serait soumis à des conditions de ressources. Madame la ministre, que pensez-vous d’une telle initiative ?

Je tiens à rappeler que de nombreux pratiquants en club comme dans les salles de sport privées ont pris leur licence ou leur adhésion lors de la rentrée 2020. Depuis, la plupart d’entre eux n’ont quasiment jamais pu pratiquer dans ce cadre et beaucoup se posent la question de la rentrée prochaine.

Si certaines fédérations ont d’ores et déjà annoncé vouloir renoncer à leur part, toutes ne peuvent pas se le permettre et l’État doit prendre ses responsabilités pour accompagner et aider les acteurs.

La reprise de la pratique sera difficile, nous le savons tous, mais cette crise sanitaire a également fait émerger une pratique libre ou digitale renforcée. À une époque où les individus sont demandeurs d’une pratique plus simple et sans contrainte, le développement de ce type d’activité, qui passe notamment par la digitalisation des organisations sportives, est un enjeu déterminant. Si certaines fédérations ont d’ores et déjà entamé un véritable travail sur le sujet, il est indispensable de renforcer le soutien de l’État à ces évolutions rapides. Or l’effort annoncé par le plan de relance n’est pas à la hauteur.

Aussi, madame la ministre, que comptez-vous faire concrètement pour soutenir les clubs et associations lors de la reprise de la pratique ? Avez-vous pour eux un réel plan ambitieux, financé, concret et prêt à l’emploi ? (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled.

M. Dany Wattebled. Madame la ministre, la pratique sportive est fortement fragilisée par la crise sanitaire. Le financement du sport professionnel par la vente de billets et le sponsoring est en chute libre, tandis que le sport amateur connaît une forte diminution du nombre de ses adhérents et, surtout, de ses bénévoles. Pourtant, le sport est plus que jamais indispensable pour améliorer la santé physique et mentale des Français.

Nos habitudes sont bouleversées par les confinements et couvre-feux successifs. La sédentarité s’installe dans nos vies avec le télétravail. Dans un tel contexte, à trois ans des jeux Olympiques, ce débat sur l’activité et la popularité de la pratique sportive arrive à point nommé.

Il s’agit d’une question essentielle, tant la pratique sportive est un facteur déterminant de santé publique, d’intégration et de cohésion sociale.

Le premier objectif de la politique publique du sport, pilotée par l’État dans le cadre de la nouvelle Agence nationale du sport, devrait être l’accessibilité des lieux sportifs pour tous et la promotion du sport au quotidien.

La situation actuelle est préoccupante : notre pays arrive en 119e position pour ce qui est du respect des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur la pratique physique régulière des jeunes. D’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), une grande partie des adolescents français seraient en surpoids.

Pour lutter contre la sédentarisation, il nous faut nécessairement renforcer la pratique sportive à l’école, d’autant plus que l’exercice physique améliore sensiblement les résultats scolaires.

Or, sur les trois heures hebdomadaires de sport dispensées dans les écoles, la Cour des comptes observe que seule la moitié est effectivement consacrée à la pratique sportive. Et que dire de l’apprentissage de la natation, qui souffre d’un manque de structures ?

Des initiatives intéressantes sont menées à l’étranger, notamment en Finlande. Favorisons les initiatives locales pour diffuser une culture du sport dès le plus jeune âge, dans le cadre scolaire ou périscolaire, et gardons à l’esprit que les temps extrascolaires sont la plupart du temps consacrés à des activités sédentaires. La lutte contre les dispenses de complaisance d’éducation physique et sportive ou les disparités d’accès aux pratiques sportives entre les hommes et les femmes sont aussi des points importants. Nous en débattrons prochainement en séance.

Par ailleurs, la pratique sportive est un facteur essentiel de la santé au travail. Nous pourrions utilement l’intégrer dans notre politique de prévention des affections et maladies professionnelles. Il me semble que les prochains débats sur la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail seront bénéfiques à ce sujet.

L’examen de la proposition de loi visant à démocratiser le sport en France constituera un autre rendez-vous législatif important, en ce qu’il sera l’occasion d’évoquer l’accessibilité des équipements sportifs des établissements scolaires au grand public en dehors des heures de classe. Nous devons également réfléchir à l’accessibilité de ces infrastructures pour les enfants scolarisés en famille.

Le sport étant parfois le meilleur des remèdes, dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous ne pourrons faire l’économie d’une réflexion sur la prise en charge par la solidarité nationale de séances d’activité sportive dans le traitement des affections de longue durée. Une expérimentation pourrait être menée à ce sujet. La pratique sportive aurait aussi toute sa place dans nos politiques de prévention de la perte d’autonomie et dans l’offre d’accompagnement des personnes en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou Ehpad.

Enfin, la pratique sportive peut constituer un premier pas vers l’insertion en milieu carcéral, en lien avec les éducateurs sportifs. Nous devons encourager ces initiatives, tout en renforçant notre vigilance pour prévenir les phénomènes de radicalisation, qui s’étendent bien au-delà de l’univers carcéral et touchent le monde du sport à bien des niveaux.

Les auditions sur la radicalisation en milieu sportif menées par notre collègue Nathalie Delattre au mois de janvier 2020 sont édifiantes. La proximité entre certains clubs, le communautarisme et la radicalisation n’est plus à démontrer.

Pour reprendre les recommandations du Conseil d’État, promouvoir la pratique du sport pour tous nécessite avant tout d’instaurer un cadre sécurisé et d’étendre les contrôles réalisés par les services de l’État aux éducateurs sportifs.

Pour conclure, je souligne que la politique du sport irrigue l’ensemble de l’action publique, de la santé à la cohésion nationale. Les prochaines échéances législatives seront autant d’occasions de renforcer l’accès au sport pour tous dans les meilleures conditions possible.

Avant d’être la recherche de performances et de victoires, le sport est avant tout une école de la volonté, de la confiance et du vivre ensemble.

Pour toutes ces raisons, nous espérons que la reprise des activités sportives en intérieur est imminente, avec des protocoles sanitaires adaptés aux différentes pratiques. Nous serons particulièrement attentifs à leur développement dans le cadre scolaire. Il faut aimer le sport et surtout le faire vivre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je remercie à mon tour le groupe CRCE d’avoir proposé ce débat.

Le monde d’après… Depuis un an, chacun s’y projette : un monde plus solidaire, plus local, plus durable, plus libre, un monde qui revient à l’essentiel.

Dans ce monde, le sport, notamment le sport-loisir, le sport-santé, le sport populaire, doit avoir une place centrale.

Dès le premier confinement, l’activité physique, même extrêmement contrainte, a souvent été le seul moment de liberté. Beaucoup ont enfilé leurs baskets pour s’évader, se libérer, y compris dans le kilomètre autorisé.

Après le premier confinement, le club Vélo et Territoires a constaté une hausse de près de 28 % de la pratique du vélo par rapport à 2019.

Il s’agit là d’une tendance profonde, mais fragile. Besoin de santé, besoin de vivre mieux : selon une étude de l’Université de Glasgow, réalisée en 2017 sur un échantillon de 200 000 individus, les personnes se rendant au travail à vélo voient leurs risques cardio-vasculaires ou de cancer diminuer de 40 % à 50 %. Bien entendu, cette tendance est difficilement mesurable aujourd’hui pour tous les sports.

La pratique sportive en club est en chute libre, et ce pour des raisons faciles à comprendre. Dès le mois de septembre dernier, les reprises de licence étaient extrêmement variables selon les disciplines et les clubs étaient alors déjà très inquiets.

Cette soif de sport reviendra. Notre rôle de parlementaires et le vôtre, madame la ministre, sont d’accompagner ce mouvement. Nous sommes convaincus que c’est un écosystème entier qui doit être préservé et dynamisé.

J’aborderai principalement deux points : le soutien aux milliers de bénévoles qui font vivre le sport et le renforcement de l’aspect éducatif de la pratique sportive.

En ce qui concerne le soutien aux bénévoles, le Gouvernement a déployé plusieurs mesures importantes. Ainsi, pour les clubs employeurs, aux dispositifs généraux de chômage partiel et d’allégement de cotisations viennent s’ajouter des mesures spécifiques pour l’économie sociale et solidaire en général, et pour le sport en particulier. Je pense ainsi aux emplois Fonjep, pour Fonds jeunesse et éducation populaire, supplémentaires ou à l’aide annoncée pour la rénovation des équipements sportifs ; cela va dans le bon sens.

Hélas, madame la ministre, comme dans beaucoup de domaines, dès que votre gouvernement fait un pas en avant dans la bonne direction, celui-ci est quasiment immédiatement remis en cause par un recul majeur.

Dans le projet de loi confortant le respect des principes de la République, que nous examinerons la semaine prochaine, les articles 25 et suivants imposent un grand nombre de nouvelles contraintes et obligations aux associations sportives, ainsi que plusieurs nouvelles restrictions, notamment dans la mise à disposition des équipements.

Dans un contexte de crise sanitaire où les associations sportives sont presque toutes à l’arrêt, où leurs dirigeants se démènent chaque jour pour la survie de leur structure, où les vocations des bénévoles s’amenuisent, alors que la vivacité du secteur sera la clé de la sortie de crise, le Gouvernement préfère ajouter à toutes ces difficultés des obligations aberrantes, jetant ainsi une suspicion détestable sur l’ensemble du monde sportif et associatif.

En ce qui concerne l’éducation, là aussi, beaucoup reste à faire. Je le répète, l’aspiration à un mieux-être physique recouvre de nombreuses réalités, notamment dans le domaine des déplacements.

La pratique du vélo nous semble ainsi particulièrement représentative de cette nouvelle réalité. Il suffit de se promener dans les artères des grandes villes ou sur les véloroutes le week-end pour le constater : jamais autant de vélos n’ont parcouru nos villes et nos campagnes. Il s’agit d’un moyen de transport et d’activité physique en plein boom, qui pourrait bientôt devenir le mode de transport urbain le plus utilisé, comme c’est déjà le cas dans plusieurs pays du nord de l’Europe.

Pour une réelle pratique populaire du vélo, le rôle de l’éducation nationale doit être de préparer les enfants au monde de demain. Il est ainsi logique qu’elle se saisisse de ces sujets.

C’est à ce titre que la loi d’orientation des mobilités de 2019 prévoit un programme d’apprentissage du vélo pour tous, afin de permettre à chaque enfant de maîtriser, à son entrée dans les établissements du second degré, la pratique autonome et sécurisée du vélo dans l’espace public.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2021, nous avons été plusieurs, de tous les bords politiques, à proposer des amendements pour prolonger dans le budget de l’État cette mesure déjà votée par le Parlement. Depuis, rien n’a bougé.

Madame la ministre, à ce stade, nous vous demandons plus que des promesses. Nous demandons simplement que cette mesure soit dotée du budget qu’elle mérite, dès maintenant, d’autant que votre ministère est désormais rattaché à celui de l’éducation nationale.

Pour conclure, mes chers collègues, les Écologistes appellent à une politique globale en faveur du sport pour toutes et tous, une politique qui soutient ces acteurs financièrement et qui ne jette pas une suspicion permanente sur les milliers de bénévoles qui animent le sport populaire pratiqué par des milliers de Françaises et Français.

Redonnons-leur des libertés, des marges de manœuvre. Nous militons en faveur d’une politique inclusive dès le plus jeune âge et dotée d’un budget réel pour accompagner les changements profonds de notre société. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – Mme Anne Ventalon applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie Evrard.

Mme Marie Evrard. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, parce qu’il recouvre une large variété de disciplines, qu’il peut être pratiqué en intérieur ou en extérieur, individuellement ou collectivement, en amateur ou en professionnel, le sport est peut-être le secteur dont on entend le moins parler depuis le 17 mars 2020. Pourtant, le sport traverse la crise la plus importante de son histoire.

Depuis un peu plus d’un an, la pandémie de la covid-19 a bouleversé la vie des sportifs, en particulier celle des amateurs. Habituellement rythmée par l’organisation de plusieurs entraînements en semaine et de compétitions le week-end, la vie sportive ne peut plus se dérouler comme avant.

Nous le déplorons tous.

Face à l’impossibilité de se rendre dans leurs lieux de pratique habituels et face à l’arrêt des compétitions, les 18 millions de licenciés sportifs n’ont pas tous renouvelé leur licence lors du changement de saison.

La perte de licenciés est estimée à 25 %, ce qui a pour conséquence la remise en cause de l’équilibre financier des associations sportives, les adhésions représentant une part importante des recettes, mais aussi la mise en danger de la vie associative des clubs, la mobilisation des bénévoles risquant de s’essouffler. Or, sans eux, cette vie sportive locale aussi riche, qui constitue le véritable « poumon » de nos communes, n’existerait pas.

Face à cette situation, ces bénévoles et ces dirigeants sportifs continuent à se mobiliser pour garder le contact avec leurs adhérents grâce aux visioconférences ou aux réseaux sociaux. Ils font aussi preuve d’innovation pour extérioriser leurs activités sportives.

Les collectivités locales ne sont pas en reste pour aider leurs clubs et associations sportives. Le conseil départemental de l’Yonne, où je siège, a ainsi voté jeudi dernier un budget de plus de 2 millions d’euros en faveur du sport.

Alors que notre pays continue à être dans la tempête de la covid-19, il est plus que jamais nécessaire de donner des perspectives de reprise aux sportifs amateurs et à leurs clubs, de réfléchir à la place que nous souhaitons donner au sport de demain dans notre société et à la manière dont nous souhaitons l’ouvrir au plus grand nombre.

Avec la crise de la covid-19 et les confinements, l’activité sportive est apparue comme essentielle.

Ce n’est pas un hasard si, parmi les mesures renforcées annoncées le 18 mars dernier par le Premier ministre pour freiner la troisième vague, figurent la possibilité de se déplacer dans un rayon de 10 kilomètres pour faire du sport, sans limitation de temps, la reprise normale de l’éducation physique et sportive sur le temps scolaire, ainsi que le maintien des activités extrascolaires en plein air pour les mineurs.

Vecteur de lien social, la pratique du sport est bonne pour le physique et le moral. Avec la crise sanitaire et la progression de la sédentarité, la nécessité de rester actif est devenue une évidence pour demeurer en bonne santé.

Pour bâtir le sport de demain, nous devons continuer à faire preuve d’agilité et à innover tout au long de cette crise.

Pour cela, il est nécessaire que les associations sportives puissent continuer à bénéficier du soutien de l’État. Il faut le reconnaître : même si ce n’est jamais assez, le monde sportif en France est soutenu comme nulle part ailleurs dans le monde.

Au-delà du plan de relance, de son volet relatif au sport, doté de 120 millions d’euros, et du déploiement du Pass’Sport en 2021, il faut continuer à lever les freins pour permettre une pratique sportive populaire et accessible à tous, mais aussi faire de la France une véritable nation sportive, comme le Président de la République s’y est engagé dès 2017.

Cet objectif ne pourra pas être atteint sans l’aide des collectivités locales. Je le dis par expérience, en tant qu’ancienne maire adjointe de la ville de Migennes, dans l’Yonne, chargée des sports pendant treize ans.

L’accueil de la Coupe du monde de rugby en 2023, puis des jeux Olympiques et Paralympiques en 2024, constitue de véritables occasions à saisir pour donner un nouveau souffle au monde sportif local. Nos territoires l’ont bien compris. Ces événements permettront de fédérer toutes les énergies locales autour d’actions variées et festives.

Labélisée « Terre de Jeux 2024 » en 2019, l’Yonne a ainsi décidé récemment d’accentuer son engagement pour se positionner en tant que terre de jeux et d’accueil.

Libérer les énergies sportives aura un impact positif pour nos territoires, mais aussi pour la France entière, dans le cadre de la relance.

Aussi, madame la ministre, je souhaite savoir de quelle manière vous comptez encourager et amplifier la mobilisation des collectivités locales et des acteurs locaux dans le domaine du sport, dans la perspective de ces événements sportifs internationaux, et donner ainsi à nos sportifs amateurs de nouvelles perspectives positives et résolument tournées vers un avenir meilleur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)