Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Nos collègues proposent de supprimer l’article 8, qui doit permettre aux forces de l’ordre de recourir de nouveau à des caméras aéroportées – essentiellement sur drones – en matière de police administrative.

La commission considère que nous devons donner aux forces de l’ordre les moyens d’utiliser les nouvelles technologies dans un cadre adapté et proportionné, garantissant le respect des libertés publiques et de la vie privée. C’est dans cette visée qu’a été écrit l’article 8, que la commission souhaite conserver.

Notre avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. D’un point de vue opérationnel, au regard de l’intérêt public qui s’attache aux finalités visées, notamment la sécurité publique, l’utilité du recours à cette technologie ne nous semble pas contestable, leur utilisation répondant à un réel besoin.

La question principale qui se pose est donc celle de la proportionnalité. Or, comme votre rapporteur vient de le rappeler, le dispositif comporte de nombreuses garanties : autorisation préalable limitée dans le temps, finalité strictement délimitée, durée de conservation limitée, garantie ayant trait à la nécessité de l’usage des drones, double contingentement permettant de limiter le nombre de dispositifs. D’ailleurs, dans son avis sur ce texte, le Conseil d’État a considéré ce dispositif proportionné.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 51 et 68.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, il reste vingt-cinq amendements à examiner aujourd’hui, l’examen des autres étant réservé. Si nous sommes raisonnables, sans manquer de respect aux droits du Parlement ni abréger notre débat, nous pouvons finir notre séance avant le dîner et éviter de siéger ce soir.

L’amendement n° 84, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 242-2. – Les images captées peuvent être transmises au poste de commandement du service concerné et aux personnels impliqués dans la conduite et l’exécution de l’intervention, qui peuvent les visionner en temps réel ou différé pendant la durée strictement nécessaire à l’intervention.

II. – Alinéa 7, première phrase

Supprimer cette phrase.

III. – Alinéa 14

Remplacer les mots :

Hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, les

par le mot :

Les

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Marc Fesneau, ministre délégué. L’objet de cet amendement est de permettre la transmission des images captées au centre de commandement et aux agents impliqués dans l’intervention, ainsi que le visionnage différé de ces images par les agents amenés à intervenir en salle de commandement ou sur le terrain.

Le visionnage des images captées par voie de dispositif aéroporté pendant une intervention, par les agents impliqués dans la captation ou par ceux qui ont vocation à intervenir, représente un besoin opérationnel majeur. Ces agents peuvent avoir besoin soit d’un visionnage en direct, soit d’une nouvelle visualisation des images en différé afin de renforcer leur compréhension de la scène en cours et d’améliorer la réponse opérationnelle.

Le présent amendement tend donc à réécrire l’article L. 242-2 nouveau du code de sécurité intérieure afin de permettre un tel usage, en prévoyant explicitement la possibilité pour les agents impliqués de visionner les images non seulement en direct, mais aussi en différé, afin de mieux comprendre certains éléments de l’intervention.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Nous avons sur ce point une divergence avec le Gouvernement. Vous proposez, monsieur le ministre, de modifier le régime de consultation des images afin que ces images puissent être consultées en temps différé non seulement par les agents opérant la caméra aéroportée, mais aussi par le poste de commandement du service concerné et le personnel impliqué dans la conduite et l’exécution de l’intervention. C’est très large !

Nous préférons nous en tenir à la version de la commission, c’est-à-dire à une consultation des images par le personnel chargé du maniement de la caméra.

Quant à la faculté de conserver les images pour une procédure administrative ou disciplinaire, il s’agit d’une possibilité existant dans l’ensemble des régimes de vidéoprotection.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 84.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 79, présenté par MM. Richard, Mohamed Soilihi, Haye, Patriat, Bargeton et Buis, Mme Cazebonne, M. Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud et Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Alinéa 7, seconde phrase

Après le mot :

garantir

insérer les mots :

, jusqu’à leur effacement,

La parole est à M. Alain Richard.

M. Alain Richard. Il s’agit d’une mesure de détail.

Parmi les garanties qui doivent entourer l’utilisation des captations d’images, il doit y avoir la certitude que ces images ne seront pas modifiées par la suite et notamment qu’elles ne feront pas l’objet de coupures. Le texte prévoit déjà que l’intégrité de ces images doit être garantie ; nous voulons simplement préciser que cette obligation doit subsister jusqu’à l’effacement des images, survenant soit à l’expiration du délai, soit à l’issue de l’utilisation des enregistrements par une autorité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Au travers de cet amendement, M. Richard souhaite préciser que la garantie de l’intégrité des enregistrements s’étend jusqu’à l’effacement de ceux-ci, conformément à une réserve d’interprétation du Conseil constitutionnel sur le régime des caméras individuelles.

C’est une précision utile, à laquelle la commission est favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Avis de sagesse !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 20, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Jacquin et Antiste, Mme Conconne et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 16, au début

Ajouter les mots :

À titre expérimental,

II. – Après l’alinéa 41

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« … – L’expérimentation prévue au I s’applique pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure. Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de sa mise en œuvre. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à reprendre une recommandation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, que M. le rapporteur connaît très bien.

La CNIL propose de conditionner l’utilisation des drones à une expérimentation préalable, dont la durée serait limitée à trois ans, afin de s’assurer que ces dispositifs sont nécessaires et toujours proportionnés au regard des finalités déterminées. Eu égard à leur mobilité et à la hauteur qu’ils peuvent atteindre, les drones porteurs de caméras évoluant dans l’espace public sont particulièrement intrusifs, car ces appareils sont susceptibles de capter des images en tout lieu, sans que leur présence soit détectée ; ces caméras peuvent ainsi enregistrer un nombre important de personnes et suivre leurs déplacements dans un périmètre très large.

Le recours aux drones à des fins répressives n’est donc pas sans conséquence au regard du droit au respect de la vie privée et de la liberté d’aller et venir. Il affecte en outre le droit des rassemblements de personnes à manifester, comme on le verra à l’occasion de l’examen d’un prochain amendement.

Le projet de loi apporte plusieurs garanties supplémentaires par rapport au texte censuré par le Conseil constitutionnel. Néanmoins, à ce stade, l’encadrement ne paraît pas suffisant à la CNIL, dans la mesure où il n’apporte pas toutes les assurances requises sur l’information des personnes filmées, sur les captations d’images possibles en dehors du périmètre autorisé et sur la réelle nécessité du dispositif au regard des finalités retenues, ce qui conduira à banaliser le recours à cette technologie, censée être non permanente et subsidiaire.

Dans ce contexte, nous jugeons raisonnable de procéder préalablement à une expérimentation, en adoptant la démarche de prudence préconisée par la CNIL.

Voyez là, monsieur le ministre, une nouvelle preuve de notre sollicitude à votre égard : nous souhaitons éviter au Gouvernement de voir l’un de ses textes être frappé d’inconstitutionnalité pour la deuxième fois !

M. Alain Richard. Touchant !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Une expérimentation sert normalement à juger de l’utilité d’une nouvelle technologie ou à évaluer son bon fonctionnement.

Or, dans le cas des caméras aéroportées employées par les forces de sécurité intérieure, cette phase a déjà eu lieu, puisque ces appareils ont déjà été utilisés jusqu’en 2020. En outre, la majorité de la commission est convaincue de l’utilité des drones, sous réserve du respect de toutes les garanties que le législateur apportera à ce dispositif après la précédente décision du Conseil constitutionnel.

Notre avis sur cet amendement est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Monsieur le sénateur, vous proposiez précédemment un moratoire ; ici, vous proposez une expérimentation sur trois ans.

M. Jean-Pierre Sueur. C’est un autre sujet !

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Certes, mais comme votre rapporteur l’a très bien dit, il y a déjà eu un certain nombre d’expérimentations sur ce sujet. On connaît à peu près l’utilité de ces dispositifs. La seule question concerne les modalités de l’encadrement ; c’est ce que prévoit cet article.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 20.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 91, présenté par M. L. Hervé et Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Après les mots :

gendarmerie nationale

insérer les mots :

ainsi que les militaires des armées déployés sur le territoire national dans le cadre des réquisitions prévues à l’article L. 1321-1 du code de la défense

La parole est à M. le rapporteur.

M. Loïc Hervé, rapporteur. Le présent amendement vise à octroyer aux militaires déployés sur le territoire national, dans le cadre d’une réquisition légale, le droit de procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras aéroportées. Je précise que nous visons des militaires qui n’appartiennent pas à la gendarmerie nationale.

Même si, à la différence des policiers et des gendarmes, les militaires ne font pas partie des forces de sécurité intérieure, ils peuvent, dans le cadre de réquisitions qui leur sont adressées par l’autorité civile, participer à des missions de protection de l’ordre public ou de la sécurité des personnes et des biens.

Dès lors, il paraît nécessaire de leur conférer une capacité de captation, d’enregistrement et de transmission d’images, sous le contrôle de l’autorité civile qui a émis l’ordre de réquisition, aux seules fins de remplir la mission qui leur a été assignée et dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues pour les forces de sécurité intérieure.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. M. le rapporteur a très bien présenté cet amendement, dont le dispositif est extrêmement clair.

L’avis du Gouvernement est favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 91.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 22, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Jacquin et Antiste, Mme Conconne et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Après la dernière occurrence du mot :

public

insérer les mots :

et dans le respect du droit de manifester

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Les alinéas 17 à 22 du présent article énumèrent les six circonstances permettant d’autoriser les captations d’images par des caméras aéroportées. L’une de ces six catégories est sensible : quand il s’agit d’assurer la « sécurité des rassemblements de personnes sur la voie publique lorsque ces rassemblements sont susceptibles d’entraîner des troubles graves à l’ordre public », bref, en cas de manifestations.

Comment garantit-on un équilibre acceptable entre la prévention de troubles éventuellement graves à l’ordre public et la liberté de manifester ? Là encore, c’est un sujet de droit constitutionnel.

Nous souhaitons donc que soient insérés, au sein de l’alinéa considéré, les mots : « et dans le respect du droit de manifester ». Vous nous répliquerez peut-être que ce n’est pas nécessaire, que ce droit sera évidemment respecté. Néanmoins, si vous refusez cette mention, il y aura toujours la possibilité d’utiliser ces caméras aéroportées dans n’importe quelles circonstances, y compris lorsqu’il n’y a pas de risque de troubles à l’ordre public.

Je suis élue de Paris, donc je suis quelque peu sensible à ce sujet,…

M. Loïc Hervé, rapporteur. Certes !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. … car on a vu l’enthousiasme avec lequel la préfecture de police a parfois pu considérer qu’il y avait lieu de réprimer des troubles à l’ordre public qui n’existaient pas.

Il faut donc réaffirmer ce principe, d’où cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Notre collègue Marie-Pierre de La Gontrie propose que nous inscrivions dans le texte que le recours aux caméras aéroportées aux fins d’assurer la sécurité des rassemblements de personnes sur la voie publique ne pourra se faire que dans le respect du droit de manifester.

C’est déjà le cas, puisque l’usage des caméras aéroportées dans ce cas précis est strictement limité au maintien ou au rétablissement de l’ordre public, lorsque ces rassemblements sont susceptibles d’entraîner des troubles graves à l’ordre public.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Les dispositifs prévus sont équilibrés et ils permettent d’encadrer fortement l’utilisation de ces dispositifs. En outre, si vous me permettez de le rappeler, madame la sénatrice, le droit de manifester est, comme vous l’avez justement indiqué, un droit constitutionnel. Est-il besoin de rappeler, dans la loi, un droit constitutionnel qui sera, en tout état de cause, invoqué par le juge ? Par ailleurs, le Conseil d’État n’a pas estimé dans son avis sur ce texte que cette mesure était de nature à faire peser un risque sur l’exercice du droit de manifester.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 22.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 23, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Jacquin et Antiste, Mme Conconne et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 23

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Il ne peut être permanent.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cela m’intéresse beaucoup d’apprendre que M. le ministre se réfère à l’avis du Conseil d’État lorsque cela l’arrange, mais je m’en réjouis…

Le présent amendement tend à préciser que l’usage de ces caméras ne saurait être permanent. Lorsqu’on lit les catégories énumérées, on voit mal, pour certaines d’entre elles, comment cette idée de non-permanence s’appliquera et comment la présence d’un risque particulier et ponctuel sera démontrée.

Il faut donc préciser que cet usage ne peut pas être permanent ; tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Selon les auteurs de cet amendement, l’article 8 ne serait pas assez clair et pourrait laisser croire, en fonction des finalités considérées, que l’enregistrement peut être permanent.

Ce n’est pas le cas. D’une part, l’alinéa 37 du présent article définit une durée maximale de l’autorisation de recourir aux caméras aéroportées ; d’autre part, dans le registre prévu à l’alinéa 39, les différents acteurs doivent faire apparaître le détail de chaque intervention réalisée dans le cadre de l’autorisation.

La volonté de M. Sueur et ses collègues semble donc satisfaite. C’est pourquoi la commission en sollicite le retrait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. En tout état de cause, madame de La Gontrie, il est toujours bon d’écouter l’avis du Conseil d’État. La question n’est pas de savoir qui il arrange et qui il n’arrange pas : il y a eu lieu, pour chacun, d’essayer de s’y conformer.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je ne vous le fais pas dire…

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Permettez-moi de citer le texte, en écho à ce que vient de dire M. le rapporteur : « La mise en œuvre des traitements prévus aux articles L. 242-5, L. 242-6 et L. 242-7 doit être strictement nécessaire à l’exercice des missions concernées. Elle est adaptée au regard des circonstances de chaque intervention. Elle ne peut être permanente. »

Nous demandons donc le retrait de cet amendement, qui nous paraît satisfait. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

Mme la présidente. Madame de La Gontrie, l’amendement n° 23 est-il maintenu ?

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Oui, je le maintiens, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 23.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 53, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 27

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …° L’origine du matériel utilisé ;

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. L’encadrement juridique de l’usage de drones, qui pourra toujours être assoupli, est loin d’être rassurant. C’est la raison pour laquelle nous demandons à connaître précisément le matériel utilisé pour réaliser ce genre de surveillance technologique.

Par cet amendement, nous voulons simplement éviter la confusion consistant à se fournir en drones auprès de fabricants d’armes et de munitions vendues aux chasseurs, que ces drones soient fabriqués par une entreprise française ou chinoise, si vous voyez ce à quoi je fais allusion…

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Je comprends qu’il s’agit d’un amendement d’appel, déposé afin que le ministre présent aujourd’hui au banc, ou son collègue de l’intérieur, nous donne davantage de précisions sur l’origine des drones utilisés par les forces de l’ordre.

La question est très intéressante ; elle relève de la souveraineté nationale. Ces matériels sont, pour l’essentiel, fabriqués en Asie du Sud-Est. Nombre d’entre eux – c’est d’ailleurs le cas des caméras-piétons – ont connu des difficultés matérielles dès leur déploiement. Pour notre pays et le continent européen dans son ensemble, des enjeux de souveraineté industrielle majeurs sont suscités par ces appareils – drones ou caméras-piétons – qui équipent de plus en plus les forces de sécurité intérieure, mais aussi les pompiers et d’autres intervenants.

Pour autant, il ne me semble pas utile en droit de préciser, dans chacune des demandes d’autorisation, l’origine du matériel utilisé. Il s’agira de marchés nationaux et l’origine des caméras aéroportées sera donc toujours la même.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Madame Assassi, je n’avais pas perçu votre amendement seulement comme un amendement d’appel, (Mme Marie-Pierre de La Gontrie sourit.)

Mme Éliane Assassi. Vous avez raison !

M. Marc Fesneau, ministre délégué. … en tout cas pour ce qui concerne l’origine des produits ! En effet, pour être tout à fait honnête, vous me verriez en peine, en cet instant, de répondre à une question précise concernant le type de matériel commandé. En revanche, je m’engage auprès de vous à transmettre cette demande au ministre de l’intérieur, si telle est votre question, ou l’une de vos questions.

Par ailleurs, le dispositif de cet amendement me paraît trop imprécis. En effet, il n’y est pas explicité ce que recouvre le terme « origine ». S’agit-il du pays de production, des caractéristiques techniques, ou des fonctionnalités ?

En outre, pour ce qui est des dispositifs de captation d’images, le Gouvernement entend mener une politique d’achat qui, d’une part, préserve les intérêts nationaux – vous vous doutez bien de l’importance de ce facteur, en particulier face aux réels risques d’espionnage – et, d’autre part, garantit le respect du droit à la vie privée.

En conséquence, le Gouvernement s’attachera, dans le cadre des marchés publics, à l’acquisition de matériels permettant d’offrir ces garanties.

Enfin, la présentation de l’objet de cet amendement par ses auteurs paraît faire, sinon un amalgame, du moins un lien entre les drones et les armes que produirait une seule et même entreprise. Tel n’est pas le sujet ! Quel que soit leur producteur, les armes et les drones ne sont pas des éléments que l’on peut combiner ou mettre en parallèle.

Je transmettrai évidemment au ministre de l’intérieur vos demandes concernant le matériel et son origine. Au demeurant, rien n’empêchera le Parlement, dans le cadre de ses prérogatives de contrôle, qu’il exerce d’ailleurs régulièrement, de disposer d’éléments d’information plus précis sur les matériels utilisés.

Cela dit, l’avis du Gouvernement est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 53.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par M. Sueur, Mme de La Gontrie, MM. Kanner, Durain et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Jacquin et Antiste, Mme Conconne et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 37

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le représentant de l’État dans le département, ou, à Paris, le préfet de police, peut mettre fin à tout moment à l’autorisation qu’il a délivrée, dès lors qu’il constate que les conditions ayant justifié sa délivrance ne sont plus réunies.

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. En écoutant à l’instant M. le ministre, je me disais qu’il était décidément dommage que ni le ministre de l’intérieur ni sa ministre déléguée ne puissent être présents ici aujourd’hui pour répondre aux questions posées par Mme Assassi.

J’ai cru comprendre que la commission a émis un avis favorable sur cet amendement, ce qui ne peut qu’engendrer une forte émotion au sein de mon groupe ! (Sourires.)

S’agissant des autorisations données à l’usage des caméras aéroportées, monsieur le ministre, on peut lire dans votre étude d’impact – voyez quelles saines lectures nous avons ! –, à la page 97, que « le préfet pourra également révoquer une autorisation ». Toutefois, cette précision n’a hélas pas été inscrite dans le texte.

Cet amendement vise donc à réparer cet oubli, en prévoyant que le préfet pourra mettre un terme à l’autorisation s’il considère que la situation le permet.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Loïc Hervé, rapporteur. Il s’agit d’une proposition de bon sens, à laquelle nous sommes favorables.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Pardonnez-moi, madame la sénatrice, de ne pouvoir émettre un avis de même nature : le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

M. Loïc Hervé, rapporteur. C’est dommage !

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Nous estimons que l’amendement est satisfait.

M. Alain Richard. Bien sûr !

M. Marc Fesneau, ministre délégué. Pour tout acte administratif, le représentant de l’État est saisi initialement par le service utilisateur d’une demande décrivant notamment la finalité, la justification et la nécessité de recourir au dispositif, ce qui lui permet d’apprécier l’opportunité de son usage compte tenu de la finalité poursuivie et de la durée de l’autorisation souhaitée.

Ces informations permettent au préfet d’être, en amont, en mesure d’apprécier le caractère proportionné d’un recours aux caméras aéroportées, au regard de la situation et des objectifs poursuivis.

Au surplus, le préfet est mis à même, en aval, de s’assurer de la légalité du recours aux drones. En effet, il ne vous aura pas échappé qu’aux termes de l’article L. 242-5 nouveau du code de la sécurité intérieure le service utilisateur doit remettre chaque semaine au préfet un registre faisant apparaître le détail de chaque intervention réalisée dans le cadre de l’autorisation, afin que le préfet s’assure de la conformité des interventions réalisées à l’autorisation délivrée.

En conséquence, si le représentant de l’État constatait que les conditions ayant justifié l’usage des caméras n’étaient plus réunies, il pourrait retirer l’autorisation.

Il nous semble donc que cet amendement est satisfait. Nous en demandons par conséquent le retrait ; à défaut, nous nous verrons contraints d’émettre un avis défavorable.