compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

Mme Esther Benbassa,

M. Pierre Cuypers.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J’invite chacun à respecter, au cours de nos échanges, l’expression des uns et des autres, ainsi que son temps de parole.

mesures d’aide à la suite du passage de cyclones à la réunion

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Jean-Louis Lagourgue. Monsieur le ministre, en l’espace d’un mois, La Réunion aura connu deux épisodes cycloniques particulièrement intenses, avec, comme conséquence principale, de sérieux dommages pour les infrastructures agricoles du territoire.

Alors que l’île connaît un contexte économique très contraint, en raison notamment de la persistance de la crise sanitaire, le passage des cyclones Batsirai, voilà quelques semaines, et Emnati, le week-end dernier, a plongé le monde agricole de La Réunion dans une nouvelle situation inquiétante.

Les pertes se chiffrent aujourd’hui à plus de 47 millions d’euros. À l’échelle de l’île, près de 1 000 hectares ont été ravagés par la violence de ces cyclones. Derrière ces chiffres se cachent des pertes de revenus et de trésorerie pour des exploitants dont les finances sont déjà très tendues.

Face à cette situation, l’État a répondu présent – cela mérite d’être souligné – par l’intermédiaire du ministre des outre-mer, qui a rapidement déclenché la procédure de reconnaissance de catastrophe naturelle. Je salue cette réactivité du Gouvernement, en espérant que l’ensemble du territoire, soit vingt-quatre communes, bénéficie de la reconnaissance de l’état de calamité agricole.

Néanmoins, il est à mon sens indispensable que l’État aille plus loin dans la démarche, en mettant en place des mesures complémentaires d’aide permettant au monde agricole de panser ses plaies et de relever rapidement la tête.

Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, si une suite favorable sera accordée à la demande des agriculteurs réunionnais de bénéficier d’une prolongation des mesures liées à la covid, comme le dispositif des prêts garantis par l’État (PGE), ou de la mise en place d’un fonds d’aide exceptionnelle d’urgence. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Nassimah Dindar et M. Martin Lévrier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.

M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur Lagourgue, j’étais à La Réunion il y a quelques jours à la suite du passage du cyclone Batsirai ; malheureusement, un deuxième cyclone a frappé l’île et cette partie de l’océan Indien.

Fort heureusement – il faut commencer par cela –, il n’y a pas eu de victimes parmi nos concitoyens. Toutefois, les dégâts matériels sont importants et, vous l’avez souligné, ce sont les agriculteurs qui paient le tribut le plus important à ces catastrophes climatiques.

Votre question était directe ; j’y répondrai de la même manière. Pour les agriculteurs, nous allons mettre en œuvre quatre actions.

En premier lieu, nous allons réduire tous les délais d’instruction. Pour instruire les différents dossiers, les délais classiques sont d’un an ; nous allons les ramener à cinq mois, délai minimal que peuvent garantir les services de l’État, en lien avec la chambre d’agriculture de votre territoire.

En deuxième lieu, je viens de valider le déclenchement du fonds de secours pour l’outre-mer (FSOM) pour vingt communes de La Réunion. La situation des autres communes va être étudiée prochainement.

Cela nous permettra, en troisième lieu, de déclencher la procédure de reconnaissance de l’état de calamité agricole dès le mois de mars prochain, donc dans un délai particulièrement réduit.

En quatrième lieu, enfin, en réaction aux problèmes de trésorerie que vous évoquiez, Julien Denormandie, Olivier Dussopt et moi-même allons transmettre aux différents organismes collecteurs la consigne de faire preuve de bienveillance pour ce qui concerne les différentes échéances fiscales ou sociales, afin de permettre aux exploitations de passer ce cap.

J’ajoute que, effectivement, nous allons maintenir les prêts garantis par l’État pour les agriculteurs de La Réunion, afin de permettre à ceux-ci de passer ce cap de trésorerie, qui sera difficile.

La solidarité nationale est là ; nous le devons à l’ensemble des Réunionnais, en particulier aux agriculteurs.

situation internationale

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. Monsieur le Premier ministre, n’avez-vous pas le sentiment qu’il faut redéfinir la politique étrangère de la France ?

Voilà quelques mois, le Président de la République lance un ultimatum au Liban. Le Hezbollah, tenu par l’Iran, répond non et il ne se passe rien…

Quelque temps plus tard, nous demandons – nous exigeons ! – le retrait des forces azéries et des milices turques d’Arménie. Erdogan dit non et il ne se passe rien…

En Afrique, nos troupes ont lutté courageusement contre les djihadistes. Aujourd’hui, les milices russes du groupe Wagner tiennent le Mali et la Centrafrique et les gouvernements africains nous demandent de quitter les pays en question…

Il y a quelques jours, le Président de la République négocie avec Vladimir Poutine, il pense obtenir une désescalade ; immédiatement, les troupes russes envahissent le Donbass et menacent le reste de l’Ukraine…

Alors, monsieur le Premier ministre, n’avez-vous pas le sentiment que, face à des gens qui, eux, ne respectent pas le droit international, le simple respect de celui-ci nous affaiblit ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes. (Marques de déception sur les travées du groupe Les Républicains)

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur Karoutchi, peut-être pourrions-nous faire preuve sur ce sujet, grave, d’un peu de responsabilité et de hauteur de vue. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Que le monde qui nous entoure soit dangereux et difficile, c’est un fait. Que la France ne puisse en décider autrement, c’est une réalité. Néanmoins, le bilan que vous avez tiré, de manière partiale et partielle, ne reflète pas tout à fait, je crois, la réalité des choses. (Nouvelles protestations.)

À chaque occasion depuis cinq ans, la France, le Président de la République, a pris ses responsabilités.

Quand le président Trump est sorti de l’accord de Paris, c’est la France, avec ses partenaires européens, qui a sauvé cet accord et qui a permis que celui-ci survive jusqu’à la réintégration des États-Unis.

Quand la crise sanitaire a frappé tous les pays du monde, c’est nous qui avons pris l’initiative de faire du vaccin un bien public mondial et de nous protéger par une initiative européenne. (Mêmes mouvements.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. Avec quel résultat !

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat. Quand il y a eu des crises internationales, le Président ne s’est jamais dérobé à ses responsabilités, quel que soit le moment, quel que soit le contexte, électoral ou autre. Il a pris des risques ; c’est ainsi que se fait la politique internationale.

Si l’on vous avait écoutés, notamment si l’on avait écouté votre collègue député, M. Christian Jacob, qui disait il y a quinze jours qu’il fallait dialoguer davantage avec M. Poutine, nous n’aurions rien fait. Le Président de la République a tenté cette chance. Fallait-il faire autrement ? Je ne le crois pas.

Que les choses soient compliquées, nous n’avions aucune naïveté à cet égard, mais considérez ce qui s’est passé de manière plus approfondie. Permettez-moi de prendre l’exemple de l’Europe. La France a été de retour, elle a été efficace. (Les protestations reprennent sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous avons permis que soit adopté un plan de relance européen qui a sauvé notre économie et préservé l’Europe. Nous avons toujours agi en coordination européenne.

Enfin, à l’occasion de la crise qui nous occupe aujourd’hui, ne vous en déplaise, l’unité et la fermeté internationales, nous les avons construites ; c’est la France qui a pris – vous nous l’avez réclamé – les initiatives en la matière ces derniers temps. (Mêmes mouvements.) C’est la France qui a pris ses responsabilités pour essayer d’élaborer une réponse.

On peut dire que le monde n’est pas dans une situation facile, mais il est difficile d’en imputer la responsabilité au Président de la République.

M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas ce que j’ai fait !

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat. Nous avons toujours pris nos responsabilités.

Pour prendre un dernier exemple, qui nous tient à cœur tant à vous qu’à moi, monsieur le sénateur Karoutchi – celui de l’Arménie –, vous pourriez saluer les résultats obtenus ces dernières semaines par l’engagement du Président de la République, notamment lors du sommet du Partenariat oriental en décembre dernier, à savoir la libération d’un certain nombre de prisonniers.

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat. Reconnaissez donc au moins avec honnêteté les avancées quand il y en a. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE et UC. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le secrétaire d’État, je vous parle de problèmes de fond et vous reportez la question sur le Président de la République… Je ne suis pas en campagne électorale, moi ! (Rires et exclamations sur diverses travées, ainsi que parmi les membres du Gouvernement.)

Les membres du Gouvernement ne sont pas censés réagir dans l’hémicycle, monsieur le président ! Vous êtes au Parlement, mesdames, messieurs les ministres, pas dans votre bureau ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. C’est un scandale !

M. Roger Karoutchi. Je dis simplement que, face à des pays comme l’Iran, la Chine, la Russie ou la Turquie, qui ne respectent pas le droit international ni les règles du multilatéralisme d’après-guerre, vous, nous, tous les Européens, sommes faibles ! Les Kurdes, les Arméniens, les Libanais, les Africains comptent sur une Europe forte, sur une France forte. Changeons de politique en France et en Europe pour être forts ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Anne-Catherine Loisier applaudit également.)

crise ukrainienne et dépendance de l’union européenne au gaz russe

M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. François Bonneau. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse au ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Alors que l’est de l’Europe semble sur le point de s’embraser, je voudrais d’abord avoir une pensée, comme vous tous, mes chers collègues, pour les Ukrainiens, pris, depuis huit ans, dans une spirale de violence, au mépris du droit international.

La France, quant à elle, ne peut penser que ce conflit n’aura aucun impact sur elle. Le risque est particulièrement grand en matière énergétique. Comme les autres pays européens, notre pays est durablement dépendant du gaz russe. Il faut donc se préparer à une rupture d’approvisionnement, que celle-ci soit voulue ou subie.

Cela aura deux conséquences potentielles : premièrement, en cas de rupture totale, un épuisement de nos stocks de gaz ; deuxièmement, en cas de rupture partielle, une répercussion rapide sur le prix de l’électricité en Europe.

En effet, le prix de l’électricité sur le marché européen se fonde principalement sur le prix du gaz. Aussi, si les relations venaient à se distendre encore, ce conflit armé pourrait avoir un effet majeur sur l’économie française et le pouvoir d’achat de nos concitoyens, déjà très entamé par l’inflation récente.

Monsieur le ministre, le Gouvernement a-t-il envisagé l’impact des sanctions qui seraient infligées à la Russie ? Disposez-vous d’une stratégie dans l’hypothèse où ce risque se réaliserait ? À l’échelon européen, peut-on découpler une fois pour toutes le prix du gaz de celui de l’électricité ? Enfin, comment comptez-vous gérer les possibles pénuries de gaz et d’électricité à venir ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe INDEP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Monsieur le sénateur François Bonneau, vous l’avez dit, le président Poutine a pris une décision grave pour l’Ukraine et pour la sécurité du continent européen. La situation à la frontière est très préoccupante.

Le Président de la République mène une action résolue pour faire face à ce danger d’escalade (Quelques exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), mais, quant à la question que vous posez, je veux tout d’abord vous dire que, même si la Russie devait cesser ses exportations – cela n’est pas à l’ordre du jour actuellement –, nous ne courrions pas de risque d’approvisionnement en matière énergétique, qu’il s’agisse de carburant ou de gaz. Nous disposons par exemple d’importants stocks stratégiques de pétrole, qui couvrent près de quatre-vingt-dix jours – soit trois mois – de consommation, pour nous permettre de faire face à des perturbations d’approvisionnement.

Je veux donc être très claire à ce sujet : les Français ne risquent pas de manquer au cours des prochains mois de gaz ou de carburant, en particulier pour se chauffer.

Pour ce qui concerne les prix de l’énergie, le Gouvernement surveille la situation de très près. Nous avons démontré, au cours des derniers mois, notre capacité à agir chaque fois que cela s’est avéré nécessaire pour protéger le pouvoir d’achat des Français. Je citerai simplement l’indemnité inflation exceptionnelle de 100 euros ou encore les boucliers tarifaires en matière de gaz et d’électricité.

Je me suis entretenue hier soir avec la commissaire européenne à l’énergie, Kadri Simson, et nous avons discuté de tous ces points et de la bonne coordination au sein de l’Union européenne sur ces questions. Nous avons également des contacts réguliers avec le gouvernement des États-Unis pour envisager des actions coordonnées, si la situation le justifiait.

Ainsi, le Gouvernement est pleinement mobilisé, il protégera, comme il a su le faire au cours des derniers mois, non seulement notre approvisionnement en énergie, mais encore le pouvoir d’achat des Français.

J’ajoute que, pour ce qui se rapporte à la fixation des prix, nous avons déjà eu, il y a un certain temps, des discussions avec la Commission européenne pour réviser ce que l’on appelle le market design ;…

M. Marc-Philippe Daubresse. Il faut surtout un programme nucléaire !

M. Bruno Retailleau. La langue de la France, c’est le français !

Mme Barbara Pompili, ministre. … je crois que c’est le bon moment pour reprendre ces discussions. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour la réplique.

M. François Bonneau. La dépendance de l’Europe au gaz russe est passée, en dix ans, de 24 % à 40 %. Passer au gaz naturel liquéfié, qui peut représenter une solution de substitution, sera coûteux et long. Il est urgent de mettre en place une politique énergétique qui diminue notre dépendance envers le gaz russe. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Alain Marc applaudit également.)

situation en ukraine (i)

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.)

M. Fabien Gay. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, Vladimir Poutine a décidé unilatéralement, lundi soir, de reconnaître les républiques autoproclamées de Donetsk et de Louhansk.

Cette décision, inacceptable et dangereuse, intervient après la non-application des accords de Minsk. L’atteinte portée à l’intégrité territoriale de l’Ukraine et l’imminence d’un conflit armé constituent un échec collectif de toutes les parties en présence.

Pourtant, l’escalade continue. L’Allemagne a annoncé hier après-midi la suspension de l’autorisation du gazoduc Nord Stream 2 ; les États-Unis et l’Union européenne annoncent de nouvelles sanctions économiques, alors que celles qui ont été prises jusqu’ici contre le régime de Poutine ont été contre-productives, servant ce dernier et renforçant ses élans ultranationalistes.

Plus inquiétant encore, l’OTAN, institution belliciste et obsolète, survivance de la Guerre froide, s’est réunie hier avec les autorités ukrainiennes, alors que plusieurs de ses membres se déclarent prêts à se déployer en Lituanie.

Depuis 2014, les exactions nourrissent les haines et le poison nationaliste, notamment dans le Donbass. Pour susciter l’apaisement dans la région, il faut en finir avec l’esprit de vengeance et de haine. Notre responsabilité, celle de la France, membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, mais aussi celle de tous les dirigeants politiques, en Europe et dans le monde, est de se dresser résolument contre la guerre et de n’avoir à l’esprit que les intérêts des peuples ukrainien, russe et européens. Ces intérêts sont mutuels, ils se résument en un mot : la paix, non pas comme une étape suivant la guerre, mais bien comme un projet politique requérant des efforts considérables, de part et d’autre, pour en créer, par l’action politique et diplomatique, les conditions réelles.

Monsieur le secrétaire d’État, nous vous faisons humblement une proposition : organiser, sous l’égide de l’ONU, une conférence extraordinaire paneuropéenne de coopération et de sécurité collective, incluant la Russie et l’Ukraine. Pour nous, c’est le moment de le faire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE et sur des travées du groupe SER. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

M. Clément Beaune, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, je pense que nous en convenons tous dans cet hémicycle, et c’est la position constante du Gouvernement et du Président de la République, les efforts nécessaires doivent être accomplis sans relâche, encore aujourd’hui, pour préserver la paix.

En revanche, je ne partage pas votre analyse sur le rôle dans cette affaire de l’OTAN, « organisation belliciste », dites-vous. Je vous demande pardon, mais, considérant la situation dans laquelle nous nous trouvons, il faut être très simple et très clair : nous savons où sont nos alliances, elles sont dans l’Union européenne et dans l’OTAN. (Protestations sur les travées du groupe CRCE.)

Ce n’est pas nous – et ce n’est pas non plus l’OTAN, les États-Unis d’Amérique ou l’Europe – qui avons voulu un conflit et violé gravement le droit international. Il faut quand même en revenir aux faits !

Nous avons eu ce débat précédemment, on ne peut pas reprocher à la France d’avoir ménagé ses efforts pour ouvrir la voie à la diplomatie, à une solution politique et à la paix, mais, il faut le constater ensemble, ce sont la Russie et le président Poutine qui, en début de semaine, ont choisi le chemin d’une très grave violation du droit international.

Cela aboutit à une réaction d’unité et de fermeté européennes et occidentales – nous l’assumons – au travers de l’imposition, aujourd’hui même, de sanctions coordonnées avec nos principaux partenaires et décidées à l’échelon européen.

Vous évoquez le fait d’avancer vers une solution dans le cadre des Nations unies. Nous l’avons proposé, puisque le Président de la République a demandé dès lundi dernier une réunion d’urgence du Conseil de sécurité – c’est notre responsabilité en tant que membre permanent. Or force est de constater, là encore, que la Russie n’a pas accepté de prendre ce chemin diplomatique et de paix.

Nous ne sommes certainement pas dans la surenchère ou dans la provocation. Nous sommes dans la réponse, proportionnée, mais extrêmement ferme, à des agressions et à des violations territoriales décidées par le président Poutine et la Russie.

Nous devons le constater, mais, soyez-en sûr, nos efforts diplomatiques se poursuivront et je salue le fait que vous les souteniez. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)

bilan de la politique agricole du gouvernement (i)

M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. François Patriat. Monsieur le Premier ministre, samedi prochain, le Salon international de l’agriculture de Paris ouvrira ses portes et des centaines de milliers de Français s’y rendront.

Ce salon est un hymne aux territoires, à la ruralité, à l’agriculture ; c’est un moment d’excellence et de célébration du Made in France, un moment de rencontre entre les villes et les campagnes autour de découvertes et d’échanges. C’est un rendez-vous d’autant plus attendu que l’édition de 2021 a été annulée à cause de la pandémie. C’est un lieu où la profession agricole fait découvrir ses réussites, mais où elle fait aussi remonter ses inquiétudes, parfois ses désespoirs, voire ses colères.

Au cours des dernières années, la profession agricole a dû faire face à des crises – climatique, sanitaire, financière – auxquelles tous ensemble, Gouvernement et Parlement, nous avons apporté des réponses.

Il est temps, monsieur le Premier ministre, de faire un bilan des réformes accomplies, pour lesquelles nous avons su allier une vision claire et ambitieuse à une méthode fondée sur la concertation. Je pense à France Relance et au plan Protéines pour accroître notre souveraineté alimentaire ; je pense également aux lois Égalim en faveur de la rémunération des agriculteurs, au doublement de la surface exploitée en bio, à la protection des sols, au développement des circuits courts, aux retraites agricoles et, plus récemment, à l’assurance récolte et au plan massif lancé à la suite du Varenne agricole de l’eau.

Mes chers collègues, pour la plupart d’entre vous, vous avez voté ces projets et propositions de loi. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous avons su prendre des initiatives correspondant à notre modèle social et économique et répondant à l’urgence climatique.

Monsieur le Premier ministre, en quoi toutes ces réformes, qui ont jalonné les cinq dernières années (M. François Bonhomme sexclame.), permettront-elles à notre agriculture d’être au rendez-vous de la troisième révolution agricole, fondée sur le numérique, la robotique et la génétique ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Il choisit ses interlocuteurs !

M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur François Patriat, je vous remercie de me donner l’occasion… (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est parce que c’est la dernière séance de questions d’actualité au Gouvernement que vous êtes si nostalgiques ? (Rires.)

M. Jean Castex, Premier ministre. Revenons à l’objet de la question.

Je vous remercie de votre question, monsieur Patriat, qui me donne l’occasion, disais-je, de rendre hommage, avec l’ensemble des sénateurs, à nos agriculteurs (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE et UC.), à quelques jours de l’ouverture d’un événement très important pour eux et pour la Nation : le Salon international de l’agriculture.

Pendant la crise sanitaire, nos agriculteurs ont toujours été au rendez-vous. Pas un seul jour, au cours de cette crise, la France n’a manqué de quoi s’alimenter. (Mme Sophie Primas proteste.)

C’est un élu d’un département très rural et natif d’un département encore plus rural qui vous le dit, les agriculteurs sont absolument indispensables à notre Nation, ils luttent courageusement contre des transformations considérables, que vous vivez aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, dans les territoires dont vous êtes élus.

Puisque c’est la dernière séance de questions d’actualité au Gouvernement, vous me permettrez de rendre également hommage à mon ministre de l’agriculture, Julien Denormandie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.) Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’avez vu agir dans vos départements, vous connaissez les relations et la confiance qu’il a su instaurer avec les agriculteurs. (Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.) Vous pouvez protester, mais je vous dis ce que je pense, je suis là pour cela. Vous êtes libres de ne pas être d’accord, mais j’affirme qu’il a su drainer la confiance de cette profession malgré les graves difficultés qu’elle traverse.

Un sénateur du groupe Les Républicains. Denormandie Premier ministre ! (Sourires.)

M. Jean Castex, Premier ministre. Je vais vous dire pourquoi il a réussi à le faire. Parce qu’il est talentueux, bien sûr, mais surtout parce que nous déployons une politique agricole extrêmement ambitieuse. Nous sommes aux côtés des agriculteurs de France. De la même façon que la réindustrialisation de notre pays figure parmi nos priorités, le soutien à l’agriculture nous semble indispensable.

Je ne vous citerai pas toutes les réformes que nous avons conduites… (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Il ne fallait pas m’interroger ! (Rires.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. Ridicule !

M. Jean Castex, Premier ministre. Que cherchons-nous à faire ensemble, puisque nous partageons, je le sais, les mêmes objectifs ? À faire en sorte que les agriculteurs puissent vivre de leur travail ! C’est notre priorité. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE et UC. – Mme Colette Mélot applaudit également.) Et Dieu sait s’ils travaillent !

Je citerai deux réformes. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous en sommes à l’initiative, mais vous les avez votées, alors ne criez pas ! Il y a d’ailleurs un processus intéressant à observer à propos des lois Égalim 1 et 2.

Nous avons reconnu que la loi Égalim 1…