Mme le président. L’amendement n° 315, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

des conditions mentionnées au I du présent article

par les mots :

que le résidu n’aura pas d’incidences globales nocives pour l’environnement ou la santé humaine

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Roland Lescure, ministre délégué. Si vous me le permettez, madame la présidente, avant de présenter cet amendement, j’aimerais dire quelques mots sur l’article 4.

J’ai eu l’occasion de le dire lors de discussion générale, pour développer l’industrie verte, il faut s’atteler à une filière du réemploi et du recyclage industriel. Or la France a surtransposé une directive européenne en retenant une définition explicite des déchets en réemploi dans l’industrie, là où la plupart des autres pays européens ont choisi une définition implicite.

En pratique, cela signifie que pour recycler un tee-shirt en chiffon, ou pour réutiliser des déchets de fibre de carbone – j’ai rencontré ce matin, au salon du Bourget, une entreprise dont c’est la spécialité – afin de fabriquer une nouvelle fibre de carbone, la procédure dure un an pour sortir ces matériaux du statut de déchet.

L’adoption de l’article 4 est donc, selon nous, essentielle, notamment afin de tenir compte des zones dans lesquelles des industriels peuvent s’organiser entre eux pour utiliser de manière optimale les déchets des uns et des autres.

Notre réglementation est bien trop complexe. Cet article prévoit une simplification bienvenue qui permettra à l’économie circulaire de changer de dimension. Et dès lors qu’on libéralise l’utilisation des déchets, dans une logique nationale de réutilisation, il nous semble également important de renforcer les sanctions administratives en cas de transfert illicite.

J’en viens à l’amendement n° 315 du Gouvernement, qui vise à simplifier la disposition relative aux résidus de production au sein des plateformes industrielles.

La rédaction adoptée en commission a simplifié l’approche prévue à l’article 4. Parmi les conditions à remplir pour qu’un résidu puisse être réutilisé, le Conseil d’État avait estimé que seule était nécessaire celle qui est relative à l’absence d’incidence globale nocive. Cet amendement permet d’opérer ce recentrage en revenant à une rédaction très proche de la rédaction initiale.

Je vous invite donc, monsieur le rapporteur, à soutenir pleinement cet amendement.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Le dispositif relatif aux résidus de production du projet de loi initial posait problème au regard du droit de l’Union européenne. La directive-cadre sur les déchets prévoit en effet que les résidus de production ont soit un statut de déchet, soit un statut de sous-produit, à condition de respecter les conditions fixées par le droit européen et le code de l’environnement.

Ces deux qualifications sont exclusives l’une de l’autre, et il n’est pas possible pour un État membre de prévoir de qualification alternative. C’est pourtant ce que prévoit le dispositif proposé par le Gouvernement, qui crée une présomption de non-application du statut de déchet pour des résidus de production issus d’une plateforme industrielle, sans pour autant faire référence à la notion de sous-produit.

La commission a donc corrigé ce point afin de mieux articuler la proposition formulée par le Gouvernement avec la notion de sous-produit cadrée par la directive européenne.

Je constate que le Gouvernement s’inscrit dans cette logique en amendant notre proposition, mais il le fait, à notre sens, imparfaitement puisqu’il ne retient pas l’ensemble des conditions prévues par le droit européen pour encadrer la notion de sous-produit. De fait, cet amendement vise à créer en quelque sorte une catégorie nouvelle de « sous-sous-produit », ce qui me semble problématique vis-à-vis du droit européen.

Au regard de cette analyse développée par la commission, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 315.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 95 rectifié bis, présenté par MM. Gold et Artano, Mmes Pantel et N. Delattre, MM. Guiol, Fialaire, Requier, Bilhac et Cabanel et Mme Guillotin, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° Après le IV du même article L. 541-4-3, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« … – Dans le cadre de leurs transferts entre États membres, les substances ou objets ayant cessé d’être des déchets dans un État membre de l’Union européenne, conformément aux dispositions de l’article 6 de la directive 2008/98/Conseil d’État du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives, prévu par la directive 2006/112/CE, en faveur des assujettis qui ne sont pas établis dans l’État membre du remboursement, mais dans un autre État membre, conservent leur statut de produit lors de leur entrée sur le territoire français.

« En cas de non-conformité aux dispositions de la directive-cadre, l’autorité administrative compétente peut remettre en cause la sortie du statut de déchet de la substance ou objet sur le territoire français. »

La parole est à M. Henri Cabanel.

M. Henri Cabanel. L’intégration dans nos produits manufacturés de matériaux secondaires est un enjeu écologique, mais également un levier d’indépendance et un facteur clef de relocalisation industrielle.

La sortie du statut de déchet autorise l’incorporation des déchets dans le processus de production industrielle ; son principe est donc au cœur d’une industrie circulaire.

L’absence de reconnaissance en droit français du statut de produits pour les objets exclus du statut de déchet dans les autres États de l’Union européenne pénalise notre tissu industriel. Nous sommes en effet dépendants de l’importation de nombreuses matières premières nécessaires à l’élaboration de produits manufacturés : matières premières fossiles ou minérales, mais aussi certaines matières végétales et renouvelables, introuvables en France du fait notamment de paramètres climatiques.

Cet amendement vise à maintenir sur le territoire français le statut de produits pour les substances ou objets ayant fait l’objet d’une sortie du statut de déchet dans un pays de l’Union européenne.

Mme le président. L’amendement n° 133 rectifié ter, présenté par Mme M. Mercier, MM. Bacci et Belin, Mmes Bellurot et Billon, MM. Bouchet, Brisson, Burgoa et Cambon, Mmes Di Folco et Dumont, M. Folliot, Mmes F. Gerbaud et Gosselin, MM. Gremillet et Henno, Mmes Imbert et Joseph, MM. Levi et Moga, Mme Perrot et MM. Piednoir, Sautarel, Savary et Sido, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 11

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…° Après le IV du même article L. 541-4-3, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

«…. – Dans le cadre de leurs transferts entre États membres, les substances ou objets ayant cessé d’être des déchets dans un État membre de l’Union européenne, conformément aux dispositions et conditions de l’article 6 de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives, conservent leur statut de produit lors de leur entrée sur le territoire français.

« L’autorité administrative compétente peut, le cas échéant, vérifier la conformité de la sortie du statut déchet aux dispositions de l’article 6 de la directive cadre européenne sur les déchets. En cas de non-conformité auxdites dispositions, l’autorité administrative compétente peut remettre en cause la sortie du statut de déchet de la substance ou objet sur le territoire français. » ;

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. Cet amendement, quasi identique au précédent, a été excellemment défendu. Il soulève le problème de distorsion qui se pose au sein de l’Union européenne.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Notre collègue Gremillet évoque un problème de distorsion : c’est précisément sur le fondement de cet élément que j’émettrai un avis défavorable.

Je rappelle que, hormis les critères pouvant être fixés à l’échelle européenne, il revient aux États membres de définir les modalités de la sortie du statut de déchet.

Ces amendements visent à revenir sur ce principe en prévoyant une reconnaissance automatique par la France de la sortie du statut de déchet dans un autre pays de l’Union européenne. Cela reviendrait à renoncer à notre souveraineté réglementaire en la matière. Nous devrions alors adopter les mêmes normes que des pays tiers de l’Union européenne, sans que la réciproque soit assurée.

Une telle disposition inciterait les industries à s’installer dans les pays où les règles sont les moins protectrices de l’environnement, ce qui est contraire à l’objectif recherché au travers du projet de loi.

J’émets donc, pour ces raisons, un avis défavorable. Ce sujet étant néanmoins très prégnant pour un certain nombre d’industriels, j’avancerai quelques pistes de réflexion sur lesquelles j’aimerais connaître l’avis du Gouvernement.

Peut-être pourrait-on permettre aux industriels de justifier, au cas par cas, auprès de l’administration française qu’une sortie du statut de déchet s’est faite à l’étranger dans les règles de l’art, ce qui permettrait une application du statut de produit aux objets ou substances concernés. Ou alors pourrait-on envisager une extension des critères communautaires de sortie du statut de déchet pour que les mêmes règles s’appliquent sur l’ensemble du territoire de l’Union européenne.

Quel regard portez-vous, monsieur le ministre, sur ces propositions, sachant que nous sommes défavorables aux amendements ? (Mme Sophie Primas manifeste sa déception.)

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. Ces amendements soulèvent un véritable défi en matière de concurrence. Ils conduiraient, d’une certaine manière, à favoriser les déchets produits à l’étranger par rapport aux déchets français, qui, de ce fait, pourraient sembler trop coûteux et finir par être sous-utilisés. On les retrouverait dans nos chères décharges, ce qui ne me semble pas être l’objectif.

J’entends ce qui a été dit : le recyclage est insuffisant en France, il faut aller chercher les déchets ailleurs. Il faudra développer des tonnes et des tonnes de biomasse pour fournir à nos industriels la chaleur nécessaire à la production des carburants durables qui nous permettront de décarboner l’industrie. Mais la spécification actuelle des déchets ouvre trop largement la porte à des abus.

J’en viens à vos recommandations, monsieur le rapporteur.

En ce qui concerne votre première proposition, un industriel peut d’ores et déjà demander en France la sortie de ce statut d’un déchet importé.

Sur la deuxième proposition, vous avez raison. L’idéal serait d’harmoniser les statuts de déchet en Europe. Nous sommes prêts à porter ce combat, mais il sera long et douloureux…

En attendant, je souhaiterais que les amendements soient retirés ou qu’ils ne soient pas adoptés. Nous allons continuer à travailler sur une vision européenne du déchet recyclable, car c’est l’avenir de l’industrie. Les déchets ne sont plus des déchets : ils sont en train de devenir des matières premières, mais il faut qu’ils le soient conformément aux normes de sécurité françaises.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 95 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. Daniel Gremillet. Je retire l’amendement n° 133 rectifié ter !

Mme le président. L’amendement n° 133 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 120 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

a) Le I de l’article L. 541-3 est ainsi rédigé :

« I. - Lorsque des produits usagés ou déchets sont abandonnés, déposés ou gérés contrairement aux dispositions des sous-sections 2 et 3 de la section 2 du présent chapitre ou aux prescriptions du présent chapitre, et des règlements pris pour leur application, à l’exception des prescriptions prévues au I de l’article L. 541-21-2-3, l’autorité titulaire du pouvoir de police compétente avise le producteur ou détenteur de déchets des faits qui lui sont reprochés ainsi que des sanctions qu’il encourt et, après l’avoir informé de la possibilité de présenter ses observations, écrites ou orales, dans un délai de dix jours, le cas échéant assisté par un conseil ou représenté par un mandataire de son choix, peut lui ordonner le paiement d’une amende au plus égale à 15 000 euros et le mettre en demeure d’effectuer les opérations nécessaires au respect de cette réglementation dans un délai déterminé. » ;

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Le renforcement des sanctions applicables au démantèlement des filières illégales que le projet de loi tend à accentuer traduit la nécessité de lutter contre ces filières.

Pour intensifier cette lutte, l’amendement que nous vous proposons vise à s’assurer que les sanctions sont appliquées, que les équipements collectés sont considérés comme des produits usagés ou comme des déchets. Les sanctions doivent en effet permettre de punir les acteurs qui alimentent les filières illégales en sortant du cadre réglementaire sécurisé, lequel garantit la conformité de traitement de ces équipements dans le respect de la hiérarchie des modes de traitement.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Je ne reviendrai pas sur l’article L. 541-3 du code de l’environnement. L’amendement vise à le modifier pour que les sanctions prévues par cet article puissent s’appliquer aux déchets et aux produits usagés, ce qui me semble être une source de confusion.

En effet, nous l’avons vu il y a quelques instants, le droit de l’environnement reconnaît deux catégories : le déchet et le produit. Si les produits usagés visés dans l’amendement sont considérés comme des déchets, alors ce dernier est satisfait ; s’ils sont considérés comme des produits, l’amendement conduira à appliquer le régime de sanctions de l’article L. 541-3, une nouvelle catégorie mal définie, ce qui est une source d’insécurité juridique.

C’est la raison pour laquelle l’avis est défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. J’ajouterai que l’amendement tel qu’il est rédigé, en supprimant l’alinéa 14 de l’article, fragilise le dispositif de l’article 4 sur les sanctions, que vous avez renforcé en commission en cas de transfert illicite vers l’étranger.

Je suggère le retrait de l’amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme le président. Madame Paoli-Gagin, l’amendement n° 120 rectifié est-il maintenu ?

Mme Vanina Paoli-Gagin. Non, je le retire, madame le président.

Mme le président. L’amendement n° 120 rectifié est retiré.

L’amendement n° 379 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet, Rietmann et Perrin, Mme Berthet, M. Brisson, Mmes Jacques, Thomas, Dumont, Malet et Gosselin et M. Sido, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 14

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après l’article L. 541-4-4, il est inséré un article L. 541-4-… ainsi rédigé :

« Art. L. 541-4-. – Un résidu de production, s’il est utilisé dans un processus de production, n’a pas le statut de déchet quand ce résidu de production est similaire à une substance ou un matériau qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets. L’exploitant de l’installation de production s’assure du respect des conditions mentionnées aux points a) à d) du I de l’article 6 de la directive 2008/98/CE. » ;

La parole est à M. Daniel Gremillet.

M. Daniel Gremillet. L’industrie verte repose sur deux piliers : la décarbonation et l’économie circulaire. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, après les propos que vous venez de tenir sur la nécessité d’avoir une véritable politique offensive en matière d’économie circulaire, cet amendement devrait vous satisfaire.

Il vise simplement à ce que ne soit pas conféré à un résidu de production le statut de déchet s’il est utilisé dans un processus de production, quand ce résidu de production est similaire à une substance ou à un matériau qui aurait été produit sans avoir recours à des déchets.

Cet enjeu est vraiment important pour notre économie, comme je l’ai dit lors de la discussion générale. Car, derrière cela, il s’agit d’innovation, de création et surtout de la capacité des industriels à trouver une nouvelle orientation industrielle, une nouvelle valorisation, à des résidus de fabrication de matériaux qui sont parfois rares dans nos territoires. C’est aussi un moyen de garder dans l’Hexagone une capacité de production industrielle circulaire, au lieu d’en laisser le bénéfice aux autres pays de l’Union européenne, comme on le constate, hélas, trop souvent.

Mme le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire ?

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis. Je comprends bien vos arguments, mon cher collègue, mais au-delà du souhait que vous exprimez, il faut tout de même examiner les conséquences qu’aurait votre amendement dans le cadre réglementaire actuel.

Si l’on vous suivait, nous serions en contradiction avec la directive-cadre européenne relative aux déchets, qui prévoit – je vous le rappelle – que les résidus de production visés par l’amendement ont un statut soit de déchet, soit de sous-produit, à condition de respecter les conditions fixées par le droit européen et le code de l’environnement pour le statut de sous-produit. Il n’est pas possible d’inventer une troisième catégorie.

Si l’on accepte l’idée qu’il n’est pas possible de créer une nouvelle catégorie et que les résidus sont dans l’une ou l’autre des deux catégories, examinons alors les différentes hypothèses.

Si les résidus de production visés par l’amendement sont des sous-produits, au sens où ils répondent à la définition de ces derniers, alors l’amendement est satisfait. En effet, par définition, les résidus de production ne seraient alors pas des déchets.

En revanche, si ce sont des déchets, alors l’amendement pourrait conduire à desserrer très largement les exigences environnementales. En effet, il permettrait de faciliter le contournement des critères applicables à la sortie du statut de déchet. En somme, les producteurs et détenteurs de déchets pourraient réaliser des sorties de ce statut sans démarche particulière, sinon celle de justifier du respect des conditions légales en cas de contrôle.

C’était, d’une certaine manière, l’intention originelle du Gouvernement dans ce projet de loi, mais la commission n’a pas souhaité le suivre dans cette direction. Il ne faut pas, selon nous, ouvrir trop largement les vannes. Je rappelle que le statut de déchet a un objectif essentiel dans le code de l’environnement : celui d’éviter les risques pour l’environnement et la santé publique.

Pour ces raisons factuelles et juridiques, j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre délégué. L’avis est favorable, monsieur Gremillet. Votre amendement vise à permettre aux résidus de production de perdre leur statut de déchet lorsqu’ils sont similaires à une substance ou à un matériau produit sans recours à des déchets. Le mot « similaire » est important : c’est celui qui figure dans la directive européenne. Cet amendement me semble donc parfaitement compatible avec celle-ci.

Il s’agit d’une mesure de bon sens, qui permet d’élargir le cadre du projet de loi en le mettant en cohérence avec la directive européenne, et donc d’éviter une surtransposition. Elle permet à des industriels d’utiliser des déchets qui n’en sont pas vraiment puisqu’ils sont utilisés dans d’autres processus de production.

J’ai cherché un exemple concret, et je dois vous avouer que je n’en ai pas encore trouvé… Toutes les travées bruissent pour m’en donner un ! (Léger brouhaha sur diverses travées.)

Mme Sophie Primas. Oui, on va vous trouver un exemple !

M. Roland Lescure, ministre délégué. Il me semble donc utile que vous adoptiez cet amendement de bon sens.

Mme le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac, pour explication de vote.

Mme Marta de Cidrac. J’entends ce que vous dites, monsieur le ministre, mais il me semble que les explications de notre rapporteur sont très claires. Mon cher collègue Gremillet, on sait bien qu’il n’existe que deux types de statut : déchet ou sous-produit. Par conséquent, on ne peut pas en créer un troisième, comme cela a été très bien rappelé au sein de notre commission. Nous y sommes très vigilants.

Il faut que nous prenions un minimum de précautions pour nous assurer du respect du droit de l’environnement et de la protection de la santé dans le cadre de l’économie circulaire. Ce souci de précaution doit s’appliquer à un certain nombre de produits qui deviennent des déchets. On ne peut pas ouvrir trop largement la boîte de Pandore, car on ne sait pas si l’on pourra la refermer !

Je vous encourage à suivre l’avis de la commission.

Mme le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour explication de vote.

M. Olivier Rietmann. Pour ma part, je suivrai votre avis, monsieur le ministre, et je voterai l’amendement de M. Gremillet. J’ai des exemples concrets, et je vais vous en donner un puisque vous en cherchez.

Avec la présidente de la commission des affaires économiques, Sophie Primas, nous avons visité il y a deux mois une entreprise dans le Jura spécialisée dans la fabrication d’emballages agroalimentaires en plastique, en bois et en carton. Dans l’agroalimentaire, légalement, il n’est pas possible d’utiliser du plastique de recyclage : il faut du plastique neuf, pour préserver la santé de nos concitoyens, qu’a évoquée notre collègue Marta de Cidrac.

En revanche, il arrive qu’il y ait des rebuts de plastique neuf utilisé pour fabriquer des emballages, qui finalement ne correspondent pas aux standards. Ces rebuts n’ont pas servi pour l’agroalimentaire, n’ont été en contact avec aucune substance, ne sont pas sortis de l’usine. Et pourtant, l’entreprise n’a pas le droit de les utiliser pour fabriquer des emballages. Considérés comme des déchets, ils doivent être jetés, et sont souvent réutilisés à l’étranger.

Je le redis, je voterai cet amendement, qui est de bon sens. Il faut libérer les énergies, et par là même nos entreprises. J’invite mes collègues à le voter également, car c’est comme cela qu’on avance ! (M. Pierre Louault applaudit.)

Mme le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Merci, monsieur le ministre ! Je le dis, car il faut mesurer l’importance de ce sujet en termes économiques. Je ne suis pas en train d’inventer une troisième voie. Vous venez de reprendre exactement mon propos.

Je citerai un deuxième exemple : celui des pneumatiques. Aujourd’hui, dans notre pays, une entreprise – Michelin pour ne pas la citer, mais il y en a d’autres – est dans l’incapacité de réutiliser des matières utilisées durant le process. Quel gâchis ! (Mme Marta de Cidrac sexclame.)

Je le dis d’autant plus qu’un objectif de recyclage et de réintégration a été fixé pour 2028. Si l’on ne modifie pas les règles, si cet amendement n’est pas adopté, cet objectif ne pourra pas être tenu.

Je vous invite, mes chers collègues, à voter mon amendement. La navette permettra de sécuriser le dispositif pour répondre aux inquiétudes qui ont été exprimées. J’insiste, nous ne sommes pas en train de créer une troisième voie.

Je suis tout à fait d’accord avec ce qu’a dit Marta de Cidrac, mais il ne faut pas mettre non plus l’économie française en situation d’appauvrissement sur des enjeux aussi importants. Car on donne alors des chances supplémentaires aux autres pays de l’Union européenne d’avoir une compétitivité meilleure que la nôtre.

Derrière cela, il y va, comme je l’ai déjà dit, de l’innovation et de la création d’emplois et de richesses dans nos territoires.

Mme le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. J’interviens pour soutenir l’avis du rapporteur et de notre collègue Marta de Cidrac. Il est normal que les emballages alimentaires soient mis au rebut, car leur qualité n’est pas suffisante pour qu’ils soient réutilisés dans le process de fabrication. (MM. Olivier Rietmann et Laurent Somon lèvent les bras au ciel.) Car il faut avoir le grade alimentaire pour faire ces emballages ; à défaut, ils ne peuvent être utilisés à cette fin. Il faut respecter les processus.

Il existe deux statuts – celui de déchet et celui de sous-produit –, qui sont tout à fait différents. Les entreprises respectent déjà ces deux statuts, qui sont effectifs. Un rebut ou un déchet ne peut pas être réutilisé, car il faut respecter les normes environnementales et sanitaires.

Mme Sophie Primas. Et les pneus ?

Mme le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Fabien Genet, rapporteur pour avis de la commission de laménagement du territoire. Je ne veux pas prolonger les débats, mais le point que nous évoquons est important et je ne voudrais pas laisser accréditer l’idée qu’il y aurait dans cet hémicycle, d’un côté, ceux qui défendraient l’économie et le développement économique et, de l’autre, ceux qui utiliseraient tous les moyens juridiques pour s’y opposer. C’est un procès d’intention qui n’a pas été fait ce soir, et je trouvais intéressant de le rappeler.

Nous sommes tous ici soucieux de faciliter le plus possible la réindustrialisation de notre pays et le développement de l’économie circulaire, comme l’ont dit le ministre et de nombreux collègues.

Une fois cela précisé, un des éléments importants qui nous ont été indiqués par les entrepreneurs au cours des auditions – dont vous relayez ici la voix très légitimement, monsieur Gremillet –, c’est leur volonté de se voir garantir une sécurité juridique. Or les meilleures intentions du monde ne l’assurent pas. Un investisseur veut la garantie qu’il y voie clair sur les règles.

Nous avons beaucoup travaillé au sein de la commission pour comprendre la législation, qui est – je vous l’accorde – un peu complexe, mais pour de bonnes raisons, qui ont été rappelées, de protection de l’environnement et de sécurité sanitaire.

Sans entrer dans des détails trop techniques, il nous semble que, pour répondre aux différentes problématiques que vous avez exposées, il y a tout ce qu’il faut dans les textes, au regard de la lecture que nous en faisons. Les deux catégories existantes sont précisément définies : les déchets et les produits et sous-produits. Des procédures de sortie du statut de déchet sont prévues. Certes, elles sont réglementées, et je peux comprendre que certains ici veuillent faire « sauter » toute la législation…