M. Rachid Temal. Ici, cela n’existe pas !

M. Sébastien Lecornu, ministre. … soit clarifié le positionnement de ces quatre formations politiques sur ces questions.

Cela m’a compliqué la tâche, en tant que ministre chargé de défendre ce projet de loi, de me retrouver devant ces députés qui avaient chacun un avis différent…

M. Rachid Temal. Comme au groupe LR !

M. Sébastien Lecornu, ministre. … sur le porte-avions, la dissuasion, les coopérations européennes, ou encore l’Otan.

Le débat avec la Nation est important, et je souhaite que l’on parle davantage de défense nationale lors des élections législatives ou présidentielle.

La technique du Livre blanc telle qu’on l’a connue est sans doute, malheureusement, à réinventer. Peut-être, dans le cadre de la commission mixte paritaire, pourra-t-on imaginer une rédaction qui permette d’associer à la préparation de ces textes le Parlement, mais aussi les élus locaux, les correspondants défense dans les collectivités locales, ou encore, puisqu’on parle de dualité, les entreprises qui, même si elles n’appartiennent pas à la BITD, peuvent être sollicitées dans un schéma de résilience. En la matière, je conviens volontiers avec vous de l’importance d’inclure la Nation dans cette démarche. Mais j’estime qu’il faut le faire de manière imaginative, sans quoi on passera à côté de la cible.

Quoi qu’il en soit, l’analyse stratégique a été faite, une copie en est ressortie. Monsieur Temal, nous reviendrons sur les questions relatives à la France et à l’Otan, car les interpellations que vous nous avez adressées sont très importantes pour comprendre une partie de la structuration de cette copie.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 242.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 76 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme le président. L’amendement n° 234 rectifié, présenté par MM. Gontard, Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

Avant la fin de la présente loi, un débat parlementaire sur la dissuasion nucléaire est organisé. Il inclut l’audition des principales ONG spécialisées en la matière.

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement a pour objet l’organisation d’un débat parlementaire sur la dissuasion nucléaire avant la fin de la période couverte par ce projet de loi de programmation militaire.

Il s’agit d’un amendement d’appel, dont l’objet fait écho aux propos que vient de tenir M. le ministre : moi aussi, j’estime nécessaire d’avoir une réflexion et un débat sur la défense, notamment sur la question de la dissuasion. On parle de celle-ci comme d’un fait accompli, mais je pense que l’on a besoin d’ouvrir largement le débat, de l’ouvrir à l’ensemble de nos concitoyens.

Vous avez affirmé, monsieur le ministre, que les écologistes étaient opposés à la dissuasion ; je ne crois pas avoir tenu de tels propos, a fortiori au cours de mon intervention dans la discussion générale. J’ai simplement rappelé que nous nous posions des questions à cet égard, et j’estime que nous avons raison de le faire.

La dissuasion, selon vos propres estimations, représente entre 13 % et 15 % des crédits prévus dans ce texte. On a aussi besoin de se projeter dans l’avenir, au vu de l’évolution du contexte géopolitique, mais aussi technologique. Cette réflexion est à l’évidence nécessaire.

Quand on parle de dissuasion, il n’est pas question uniquement de la dissuasion nucléaire ; d’autres types de dissuasion existent aussi.

Tous ces éléments doivent être intégrés dans la réflexion que l’on doit avoir. L’ouverture de ce débat, au Parlement, mais aussi avec l’ensemble de nos concitoyens, est nécessaire parce que la dissuasion n’est pas parfaitement comprise et intégrée, dans son fonctionnement et ses projections, par la population. Nous avons réellement besoin d’avoir ce débat !

Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Cambon, rapporteur. Je note avec intérêt que le groupe que préside M. Gontard n’est pas totalement hostile à la dissuasion, du moins grâce à la distinction subtile qu’il opère entre dissuasion nucléaire et dissuasion en général.

Pour notre part, quand nous parlons de dissuasion, nous savons à peu près à quoi nous pensons. Bien évidemment, la commission, ses membres et ses rapporteurs ne cessent de travailler sur cette question au travers de leurs auditions, et nous poursuivrons ce travail.

J’entends donc bien votre appel, mon cher collègue. En revanche, un point de votre amendement n’est pas acceptable : le débat parlementaire que vous proposez inclurait l’audition d’ONG dans notre hémicycle, en séance publique. Ce n’est pas souhaitable.

Dès lors, dans la mesure où votre appel a bien été entendu et où nous continuerons, au sein de la commission, à travailler sur ces sujets, je vous invite à retirer cet amendement.

Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je suis absolument opposé, non pas à un tel débat, mais à la proposition de l’organiser plus tard ! Nous discutons d’un projet de loi de programmation militaire : c’est donc bien maintenant qu’il faut avoir ce débat. (M. Guillaume Gontard acquiesce.)

Je vois souvent débarquer la cavalerie : on reproche au Gouvernement une insuffisance de préparation, qu’il s’agisse de ce texte, de la revue nationale stratégique, ou de je ne sais quoi encore… Eh bien, nous sommes là ! Si vous avez des questions sur la dissuasion, monsieur Gontard, posez-les-moi ! Et s’il faut prendre toute cette semaine et la suivante encore pour avoir un débat sur ces questions, soit !

Je veux bien entendre la passion de votre assemblée pour les marges frictionnelles et les reports de charge, mais ce sujet-ci est central, comme je l’ai dit dans la discussion générale. Dès lors, si des parlementaires de différentes sensibilités politiques ont des questions à poser sur la dissuasion nucléaire, c’est dès maintenant qu’il convient de les poser, avant le vote de ce texte.

Je me suis prêté à l’exercice à l’Assemblée nationale ; vous le savez, vous avez suivi la nuit de débat que j’ai eu, essentiellement avec les députés écologistes et ceux de La France insoumise, sur le sujet de la dissuasion. Je n’ai pas voulu éluder les sujets en me contentant de répondre « Défavorable » à chacun de leurs amendements. Je leur ai dit : « Posez-moi toutes vos questions ! » et nous avons eu un débat de bonne tenue, de grande qualité, sur la dissuasion nucléaire. D’ailleurs, non que je veuille distribuer des bons et des mauvais points, je me suis permis de saluer le député Fabien Roussel, qui a pris du temps pour expliquer, de manière fort intéressante, la position historique du parti communiste sur cette question.

L’avis du Gouvernement sur cet amendement sera donc défavorable, monsieur Gontard, à moins que vous ne vouliez bien le retirer.

Si vous souhaitez poser des questions sur la dissuasion, faites-le dès à présent. Je ne voudrais pas m’entendre dire dans trois mois ou dans un an que l’examen de ce texte n’aura pas permis d’évoquer toutes les questions et qu’il aurait fallu faire un Livre blanc.

Mme le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je remercie M. le ministre de m’autoriser à lui poser des questions… C’est en tout cas la preuve de l’intérêt de cet amendement. Oui, la question de la dissuasion est importante : on ne peut pas se contenter de la présenter comme un fait accompli.

Aujourd’hui nous disposons d’un système de dissuasion nucléaire. Je ne suis pas fou, je sais bien que nous n’allons pas l’arrêter du jour au lendemain. En revanche, il convient de réfléchir à sa nature, aux objectifs qu’on lui assigne et à l’orientation qu’on lui donne.

Faut-il toujours plus de dissuasion ? La France s’oriente-t-elle vers une dénucléarisation, en donnant l’exemple ou, en tout cas, en y réfléchissant avec l’ensemble de ses partenaires ? Voilà des questions qu’il convient de poser.

Un débat et une réflexion doivent donc se tenir sur ce sujet. Je vous ai déjà interrogé, monsieur le ministre, au sujet des 13 % à 15 % des crédits qui iraient à la dissuasion. Je vous demandais ce que cela comprenait – le simple remplacement d’armes, ou bien leur évolution – et si, dans ce dernier cas, cette évolution irait vers plus de puissance. Vous avez en réponse invoqué le secret-défense. Je veux bien, mais nous avons besoin de connaître ces orientations.

Ce débat ne me semble pas inutile ; il ne convient pas non plus de le prendre à la légère, en distribuant des bons et des mauvais points. Tout le monde se pose des questions, au sein de notre population, et a le droit de recevoir des réponses ; ce serait en tout cas une erreur que de ne pas y réfléchir.

Mme le président. La parole est à M. le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je vous rejoins dans la conclusion de votre propos, monsieur le sénateur : il faut avoir ce débat, car il y va aussi de l’acceptabilité par la société de la dissuasion nucléaire. Je m’adresse également, en disant cela, aux parlementaires les plus favorables à cette dissuasion. Dire « C’est ainsi que cela fonctionne, circulez, il n’y a rien à voir ! » n’est pas une bonne manière de défendre la dissuasion nucléaire.

C’est pourquoi j’encourage ce débat – je n’ai certes pas à vous autoriser à me poser des questions, c’est votre droit en tant que parlementaire –, parce que je ne veux pas que l’on passe à côté de cette discussion pour mieux se plaindre ensuite qu’elle n’ait pas eu lieu. Cela ne serait pas raisonnable, cela n’aurait pas de sens : si l’on n’en débat pas au Sénat, qui en débattra à notre place ?

Vous m’avez posé une question précise : 13 %, qu’est-ce que cela recouvre ? Elle amène de ma part plusieurs commentaires.

Tout d’abord, toutes les puissances nucléaires déclarées ne sont pas des démocraties. Il convient, par définition, de comparer les trois démocraties nucléaires déclarées : les États-Unis d’Amérique, le Royaume-Uni et la France, trois pays membres de l’Otan, même si la France ne participe pas à la planification nucléaire de cette organisation, ce qui est l’un des éléments clés de notre héritage gaullien.

Parmi ces trois démocraties nucléaires – sans parler de la Chine ou de la Russie –, quel pays a la doctrine la plus lisible et la plus publique ? Il se trouve que c’est la France. C’est une permanence depuis le général de Gaulle. J’aime l’histoire dans sa réalité ; j’ai donc apprécié que M. Temal rappelle également les engagements des présidents Mitterrand et Hollande, qui témoignent d’une grande constance française.

M. Jérôme Bascher. Et le président Chirac ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il n’était pas de gauche… (Exclamations amusées sur les travées du groupe SER.)

M. Rachid Temal. Cela dépend à quelle période… (Sourires.)

M. Sébastien Lecornu, ministre. Que Jacques Chirac se soit montré fidèle aux choix du général de Gaulle ne me semble pas surprenant ; je le dis sous le contrôle de celui parmi vous qui fut son secrétaire général, M. Philippe Bas.

Je veux souligner par là que les présidents Mitterrand et Hollande s’inscrivaient, eux aussi, dans cette continuité, comme l’a rappelé M. Temal.

Or que dit cette doctrine ? Elle affirme que la dissuasion, par définition, sert à défendre nos intérêts vitaux contre une menace venant d’un État. Cela crée une voûte et permet d’en pointer les éléments de contournement potentiel – je l’ai indiqué lors de la discussion générale. Cette doctrine est aussi strictement défensive et suffisante.

Si votre question sous-jacente porte sur une éventuelle remise en cause, du fait de ces 13 %, du caractère défensif et suffisant de notre dissuasion nucléaire, la réponse est non ! Il s’agit de crédits de renouvellement.

Ce renouvellement devra s’opérer dans des conditions opérationnelles qui changent. Les différentes menaces de l’adversaire nous obligent à faire attention à certaines choses. Je donnerai ainsi l’exemple, plein de bon sens et disponible dans des sources ouvertes, de l’acoustique des sous-marins. Les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de troisième génération auront évidemment une signature acoustique plus discrète que ceux de la deuxième génération. Or, par définition, un tel saut technologique coûte de l’argent. D’autres exemples pourraient être donnés sur d’autres types d’armement.

Je ne m’étendrai pas davantage sur ces questions, mais je voudrais redire que le secret-défense, s’il existe, ne doit pas servir à évacuer le débat sur le fond. Nous avons eu notamment une bonne discussion avec les représentants du parti communiste français à l’Assemblée nationale au sujet du traité sur l’interdiction des armes nucléaires (Tian) et du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).

La France est engagée dans la non-prolifération. Ce n’est pas tout à fait la même chose que la logique d’interdiction, que nous combattons parce que l’interdiction est un désarmement censé être multilatéral, mais qui, de fait, est toujours unilatéral. Nous nous sommes affrontés sur cette question, mais Fabien Roussel a eu des propos intéressants, par lesquels il défendait une approche échelonnée.

En tout cas, il s’agit d’un débat clé. On peut toujours le renvoyer aux calendes grecques, ou à un débat spécifique, mais il vaut bien mieux l’avoir maintenant, à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de programmation militaire.

Il s’agit vraiment du cœur de ce texte, et ce débat permet aussi de voir ce que la dissuasion ne couvre pas. C’est pourquoi je me montre parfois un peu dur et engagé en évoquant les nouvelles menaces : par définition, les vulnérabilités d’une puissance dotée de l’arme nucléaire se trouvent dans des espaces beaucoup plus hybrides, sournois et pernicieux ; on ne les affronte pas de face, mais sur les côtés. Cela nous renvoie évidemment aux questions du cyber et du spatial que j’évoquais précédemment.

Mme le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.

M. Pierre Laurent. Il s’agit en effet d’un débat très important, auquel nous reviendrons à l’occasion de l’examen d’autres amendements, plusieurs ayant été déposés par notre groupe. On pourra alors aborder d’autres aspects du sujet, tels que la non-prolifération et le Tian.

Le présent échange a le mérite de nous permettre de convenir de la nécessité d’un débat avec la Nation sur ces questions très importantes, comme la situation internationale nous y invite.

Vous le dites vous-même, monsieur le ministre, d’une certaine manière. Je vous mets d’ailleurs au défi de vous en tenir à la première réponse que vous nous avez faite, en vous abritant derrière le secret-défense, si vous vous trouviez devant une salle de cinq cents Français vous interrogeant sur ce sujet : vous seriez obligé d’entrer plus dans le détail ! Je ne vois pas pourquoi nous, parlementaires, devrions nous contenter d’une réponse se limitant à l’invocation du secret-défense, alors que nous débattons de ces questions avec beaucoup de nos concitoyens.

Par ailleurs, les composantes de la dissuasion française ont connu des évolutions significatives depuis ses débuts. Son format n’a pas toujours été le même ; il a évolué.

M. Rachid Temal. Bien sûr !

M. Pierre Laurent. Nous pouvons donc nous poser des questions sur le format de la dissuasion, en tout cas avoir des débats sur ces questions, sans être assimilés à des irresponsables. Ces évolutions ont pris place sous la direction de gouvernements que, j’imagine, vous souteniez ardemment. Les questions que nous voulons vous poser sont donc sérieuses.

Au-delà de la dissuasion et de ses composantes, on pourrait avoir des débats qui, bien qu’annexes, lui sont liés, comme celui relatif au porte-avions.

Plus on avance dans les discussions sur le porte-avions, plus l’argument de la continuité de la filière nucléaire devient majeur…

Mme le président. La parole est à M. le ministre, pour une courte réponse. (Sourires.)

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je veux bien faire court, madame la présidente, mais on fait trop souvent au Gouvernement le reproche d’un manque de débat et d’explications ; on prétend que la réflexion stratégique précédant la présentation de ce texte aurait été bâclée… C’est pourquoi, s’il le faut, je serai présent jusqu’au bout dans cet hémicycle pour défendre ce texte. Si je fais ces remarques, c’est pour essayer de présenter de manière cohérente ce que j’ai pu entendre depuis six mois sur la manière dont ce projet de loi a été élaboré.

Monsieur Laurent, le secret-défense est assez simple : il y a des choses qui sont classifiées et d’autres qui ne le sont pas. Vous pouvez me poser toutes les questions que vous voudrez ; c’est à moi de faire le tri entre ce que la loi votée par le Parlement m’autorise à dire – ce qui est classifié ou non n’est pas à ma discrétion, tout cela a une base légale – et ce que je n’ai pas le droit de dire. D’ailleurs, objectivement, on peut tout de même dire beaucoup de choses !

Au-delà, et j’en prends l’engagement devant le président de votre commission, une audition devant celle-ci qui ne serait pas retransmise me permettrait, non pas de dévoiler des secrets défense, mais d’être encore plus à l’aise pour évoquer un certain nombre de situations ou de cas pratiques sur lesquels, pour le dire très clairement, je n’ai pas forcément envie de susciter une réaction de telle ou telle ambassade de l’un de nos partenaires.

Oui, le format de la dissuasion a évolué dans le temps. Il en est ainsi de l’apparition, puis de la disparition, de ce que l’on a appelé abusivement le nucléaire tactique – je veux parler du missile Pluton employé par l’armée de terre. Je pense aussi à la fermeture du site du plateau d’Albion, dans les années 1990 ; cette décision a été prise à la suite de la dissolution du pacte de Varsovie, comme d’ailleurs la professionnalisation des armées, en particulier de l’armée de terre.

En revanche, le présent projet de loi de programmation militaire ne comprend pas de modification en tant que telle du format de la dissuasion, qui comprend toujours une composante aérienne – les forces aériennes stratégiques (FAS) –, une composante maritime – la force océanique stratégique (Fost), avec des modifications de matériel, mais une cible inchangée de quatre SNLE – et une demi-composante, comme on le dit de manière assez peu élégante : la force aéronavale nucléaire (Fanu), qui peut être embarquée sur le porte-avions.

Il n’y a donc pas de modification de la doctrine en tant que telle. Celle-ci a été réaffirmée par le Président de la République dans son discours à l’École de guerre. C’est un peu une tradition : au cours de chaque mandat, le chef de l’État, quel qu’il soit, précise ses conceptions en la matière. Simplement, au regard des circonstances, le Président a été amené à évoquer ce sujet plus longuement qu’à l’accoutumée.

Il convenait aussi de répondre aux questions que nous avons évoquées voilà un instant sur la nécessaire compréhension de cette politique par la population. On se rappelle sa phrase : « Les intérêts vitaux de la France ont une dimension européenne. » C’est le cas depuis quinze ans, et c’est affiché très clairement dans la doctrine française – nous l’avons répété à de nombreuses reprises ces derniers temps – ; je réponds ainsi aux interrogations de M. Temal.

Beaucoup de sujets relatifs à la dissuasion sont tout à fait en sources ouvertes ; ils sont enseignés à l’École de guerre, au Centre des hautes études militaires (Chem), ou encore à l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN), où plusieurs parlementaires ont été auditeurs…

M. Loïc Hervé. Très bonne école !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Vous avez raison, monsieur le sénateur ! Il n’y a en tout cas pas de raison que l’on en dise moins dans cet hémicycle. C’est pourquoi je veux redire ma disponibilité pour en débattre ici et maintenant : je ne veux pas que cela soit renvoyé à plus tard, auquel cas je sais d’expérience que l’on regrettera ensuite de ne pas avoir eu ce débat dès à présent.

Mme le président. Je mets aux voix l’amendement n° 234 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme le président. Je mets aux voix l’article 7, modifié.

(Larticle 7 est adopté.)

Mme le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Valérie Létard.)

PRÉSIDENCE DE Mme Valérie Létard

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre Ier, à l’article 8.

Chapitre II

Dispositions relatives au contrôle parlementaire de l’exécution de la loi de programmation

Article 7
Dossier législatif : projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense
Article 9

Article 8

Avant le 1er octobre 2023, le Gouvernement remet aux commissions permanentes compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat un bilan de l’exécution de la loi de programmation militaire pour la période 2019-2023.

Avant le 30 avril de chaque année, le Gouvernement remet aux commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de la défense et des finances un rapport sur le bilan de l’exécution de la programmation militaire. Ce rapport comprend :

1° Un bilan détaillé de l’ensemble des ressources mentionnées à l’article 3 de la présente loi effectivement perçues et de l’exécution des crédits programmés pour la mission « Défense ». Ce bilan d’exécution présente un taux défini par le ratio suivant :

a) Au numérateur, l’effort national de défense, calculé à partir des crédits de la mission « Défense » exécutés et retracés dans la loi de règlement des comptes de l’année écoulée ;

b) Au dénominateur, le produit intérieur brut de l’année écoulée ;

1° bis (nouveau) Un bilan détaillé de l’impact de l’inflation sur les crédits de la mission « Défense » pour l’année écoulée et, le cas échéant, de l’application de l’article 5 de la présente loi ;

2° Un bilan de la mise en œuvre de la politique d’équipement des forces. Ce bilan recense les commandes passées et les livraisons reçues depuis la présentation du précédent bilan :

a) Au titre des programmes à effet majeur dont le coût est supérieur à 70 millions d’euros ;

b) Au titre des autres opérations d’armement dont le coût est supérieur à 20 millions d’euros ;

c) Au titre des programmes d’infrastructures dont le coût est supérieur à 15 millions d’euros ;

3° Un état prévisionnel des livraisons prévues dans l’année en cours au titre des opérations et des programmes mentionnés au 2° ;

3° bis (nouveau) Une mise à jour du tableau intitulé « Équipement des forces » figurant dans le rapport annexé à la présente loi. Cette mise à jour présente les parcs d’équipement par segment capacitaire à la fin de l’année écoulée et les modifications anticipées par rapport aux objectifs fixés pour ces parcs à fin 2030 et à horizon 2035 ;

3° ter (nouveau) Un bilan de la préparation et de l’exécution des opérations d’armement dont le coût est supérieur à 70 millions d’euros, fournissant le cas échéant des éléments d’explication des évolutions de leur calendrier de commandes et de livraisons ou du nombre de matériels concernés ;

3° quater (nouveau) Une présentation synthétique des investissements en équipements d’accompagnement et de cohérence réalisés au cours de l’année écoulée ainsi que des prévisions d’investissement dans ces mêmes équipements pour l’année suivante ;

4° Un bilan relatif à la mise en œuvre des objectifs concernant les effectifs et les réserves. Ce bilan recense les actions de l’ensemble des administrations de l’État pour soutenir l’engagement dans les réserves de leurs agents. Il devra notamment rendre compte du développement de l’attractivité de la réserve pour les salariés et les étudiants, et dresser un état d’avancement des conventions de partenariat signées entre les entreprises et le ministère de la défense, ainsi que des conventions de partenariat signées entre les établissements d’enseignement supérieur et le ministère de la défense ;

4° bis (nouveau) Un bilan des actions conduites en matière de sécurisation des approvisionnements et de constitution de stocks de munitions ;

5° Un bilan des grandes orientations de la politique industrielle de défense ainsi que des coopérations européennes en la matière ;

6° Un bilan des actions liées aux partenariats et aux alliances stratégiques ;

7° Un bilan des actions du ministère de la défense en matière environnementale.

Ce rapport fait l’objet d’une présentation au Parlement par le ministre de la défense et d’un débat au sein des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées de la défense.

Mme la présidente. La parole est à Mme Gisèle Jourda, sur l’article. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Gisèle Jourda. Nous avons fait adopter en commission, à l’alinéa 15 de l’article 8, des amendements tendant à préciser le bilan annuel relatif à la mise en œuvre des objectifs concernant les réserves.

Ce bilan devra désormais rendre compte du développement de l’attractivité de la réserve pour les salariés et les étudiants et dresser un état d’avancement des conventions de partenariats signés entre le ministère de la défense et les entreprises, d’une part, et les établissements d’enseignement supérieur, d’autre part,

En janvier 2020, près de 850 employeurs privés ou publics ont signé une convention de soutien à la politique de réserve militaire. La France comptant plus de 3 millions d’entreprises, la marge de manœuvre paraît réelle.

En vérité, le changement à impulser dans ce domaine semble avant tout une affaire de mentalité, et le travail à mener est celui d’une sensibilisation accrue aux enjeux de la réserve militaire. Il importe de faire comprendre aux employeurs que l’activité d’un salarié au sein de la réserve opérationnelle ouvre un processus triplement gagnant : pour les armées, pour le réserviste, mais aussi pour eux-mêmes.

En effet, les qualités, compétences, savoir-faire et acquis que les salariés enrichissent en étant réservistes peuvent directement profiter à l’entreprise. Cette valeur immatérielle des réservistes mérite d’être mieux reconnue.

De plus, nous avons préconisé de rendre la réserve plus attractive pour les étudiants en sensibilisant les chefs d’établissement à la dimension formatrice et au potentiel d’intégration professionnelle que comporte pour un étudiant sa participation à la réserve.

Monsieur le ministre, à l’heure actuelle, combien d’établissements ont signé une telle convention ? Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à souhaiter une intensification des démarches visant à étendre ces partenariats entre le monde de la défense et celui de l’entreprise.