COM(2025) 259 FINAL  du 20/05/2025

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Ø Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2025 modifiant le règlement (UE) 2024/1348 concernant la mise en oeuvre du concept de « pays tiers sûr », COM(2025) 259 final

La proposition de règlement COM(2025) 259 final est, tout comme la proposition de règlement COM(2025) 186 final qui vient d'être présentée, un texte de conséquence du pacte européen sur la migration et l'asile, adopté définitivement au printemps 2024.

Partie intégrante de ce pacte, le règlement (UE) 2024/13481(*), dans ses articles 59 et 60, définit le concept de « pays tiers sûr ». En application, de « pays tiers sûrs », la demande d'asile d'un ressortissant de pays tiers peut être rejetée si le demandeur a déjà la possibilité d'obtenir la protection internationale dans l'un de ces pays.

Tout comme les « pays d'origine sûrs », qui ont été évoqués dans le commentaire de la proposition de règlement COM(2025) 186 final, les « pays tiers sûrs » sont des pays tiers où :

- les non-ressortissants n'ont à craindre ni pour leur vie ni pour leur liberté à raison « de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social particulier ou de leurs opinions politiques » ;

- les personnes précitées sont protégées contre les refoulements, conformément aux dispositions de la convention de Genève de 1951 ;

- les personnes précitées peuvent demander et obtenir une protection effective2(*).

Les règles de reconnaissance des « pays tiers sûrs » sont les mêmes que pour les « pays d'origine sûrs » :

- possibilité de liste nationales et d'une liste européenne, les listes nationales devant être compatibles avec la position européenne ;

- des exceptions peuvent être posées pour des parties spécifiques du territoire d'un pays ou pour des catégories de personnes clairement identifiables (en bref, certaines régions d'un pays peuvent être exclues de la qualification de pays tiers sûr) ;

- une évaluation préalable doit permettre de déterminer si un pays tiers peut être désigné comme pays tiers sûr et que cette évaluation doit reposer sur un éventail de sources d'information pertinentes et disponibles, y compris les informations provenant des États membres, de l'Agence pour l'asile, du Service européen pour l'action extérieure, du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, du Conseil de l'Europe et d'autres organisations internationales concernées ;

- par exception, lorsque l'Union européenne et un pays tiers sont parvenus conjointement à un accord selon lequel les migrants admis en vertu dudit accord seront protégés conformément aux normes internationales applicables et dans le plein respect du principe de non-refoulement, les conditions définissant un « pays tiers sûr » peuvent être présumées ;

- la Commission européenne seule, après une évaluation motivée, se voit reconnaître la possibilité de suspendre pour six mois3(*), la reconnaissance d'un pays tiers en tant que « pays tiers sûr » par un acte délégué. En principe, l'adoption de cet acte doit cependant conduire la Commission européenne à présenter une proposition de règlement supprimant la mention du pays tiers concerné parmi les « pays tiers sûrs » reconnus par l'Union européenne.

En pratique, les listes nationales des États membres doivent être communiquées à la Commission européenne avant le 12 juin 2026.

1. Le contenu de la proposition de règlement COM(2025) 259 final

La proposition de règlement COM(2025) 259 final, présentée le 20 mai dernier, répondait à l'obligation imposée à la Commission européenne par le pacte sur la migration et l'asile, de réexaminer le concept de « pays tiers sûr ».

En pratique, la proposition tend à modifier les modalités d'utilisation de ce concept :

- en permettant aux États membres d'appliquer le concept de « pays tiers sûr » à un demandeur d'asile lorsqu'il existe un lien entre cette personne et un pays au sens du droit national de l'État membre concerné ;

- en considérant que le transit d'une personne par un « pays tiers sûr » avant d'atteindre l'Union européenne constitue un lien suffisant pour considérer que ce pays peut assurer une protection effective pour le demandeur ;

- en prévoyant la mise en oeuvre de ce concept au bénéfice d'un « pays tiers sûr » avec lequel un accord ou un arrangement a été signé ;

- en rappelant que « l'intérêt supérieur de l'enfant » doit primer en toutes circonstances et que la reconnaissance d'un « pays tiers sûr » par accord ou arrangement ne s'applique pas aux mineurs non accompagnés (modifications de l'article 59 du règlement (UE) 2024/1348).

En complément, la proposition tend à supprimer l'automaticité de l'effet suspensif des recours contre les décisions de rejet d'une demande d'asile fondées sur le concept de « pays tiers sûr » (modification de l'article 68).

2. Cette proposition législative est-elle nécessaire ? Apporte-t-elle une valeur ajoutée européenne ?

A. La base juridique choisie est-elle correcte ?

Oui. La base juridique du texte semble adaptée. La nouvelle proposition est fondée sur les dispositions de l'article 78, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), qui autorise le Parlement européen et le Conseil à adopter des mesures relatives à un système commun d'asile comportant « un statut uniforme d'asile en faveur de ressortissants de pays tiers, valable dans toute l'Union », « un statut uniforme de protection subsidiaire » et « le partenariat et la coopération avec des pays tiers pour gérer les flux de personnes demandant l'asile ou une protection subsidiaire ou temporaire. »

B. La proposition est-elle conforme aux principes de subsidiarité et de proportionnalité ?

La réponse est également positive. En effet, si les modifications envisagées par la présente proposition de règlement peuvent susciter des débats de fond, ce texte modifie la définition du concept de « pays tiers sûr » et ses modalités d'application, prévues par le règlement (UE) 2024/1348, dans un sens favorable aux États membres. À titre d'exemple, la définition du degré de connexion entre un demandeur d'asile et un « pays tiers sûr » serait confiée au droit national de l'État membre concerné.

Elle ne pose donc aucun problème de subsidiarité.

Compte tenu de ces observations, le groupe de travail sur la subsidiarité a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


* 1 Règlement (UE) 2024/1348 du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2024 instituant une procédure commune en matière de protection internationale dans l'Union et abrogeant la directive 2013/32/UE.

* 2 Selon l'exposé des motifs du règlement (UE) 2024/1348, cette protection signifie un accès à des moyens de subsistance suffisants pour maintenir un niveau de vie adéquat. Il intègre l'accès à la nourriture, à l'habillement, au logement ou à l'hébergement et le droit d'exercer un emploi rémunéré, par exemple par un accès au marché du travail, dans des conditions qui ne sont pas moins favorables que celles pour les non-ressortissants du pays tiers en général dans les mêmes circonstances.

* 3 Cette période de suspension est renouvelable deux fois.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 17/06/2025