COM(2025) 826 final
du 19/06/2025
Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)
Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) n 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit pour ce qui est des exigences relatives aux expositions de titrisation - COM (2025)825
Proposition de règlement du Parlement et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2017/2402 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2017 créant un cadre général pour la titrisation ainsi qu'un cadre spécifique pour les titrisations simples, transparentes et standardisées - COM (2025) 826
Ces deux propositions visent à relancer le marché de la titrisation, qui a été fortement encadré dans l'Union après la crise financière de 2008 et dont le poids s'est amoindri en Europe depuis cette période. Faciliter la titrisation aiderait à une plus grande diversification du système financier et permettrait aux banques européennes de libérer des capacités de prêt supplémentaires. Ces deux propositions s'inscrivent dans la stratégie pour une Union de l'épargne et de l'investissement, présentée en mars 2025 par la Commission européenne.
A. Le contenu des propositions législatives de la Commission
La titrisation consiste à transformer un portefeuille de prêts en titres liquides négociables sur les marchés. La titrisation permet alors à une banque de libérer une partie de ses fonds propres (qui aurait sinon servi à couvrir les risques liés aux prêts qu'elle a vendus) en vue de prêter davantage à l'économie. De plus, la titrisation peut contribuer à la répartition des risques au sein du secteur financier, dans la mesure où les banques en transfèrent une partie à d'autres banques ou à d'autres investisseurs.
La titrisation souffre depuis la crise financière de 2008 d'une image négative. Dans les années 2000, les crédits risqués, qualifiés de « subprimes », ont été massivement titrisés dans des produits financiers complexes, et vendus à des investisseurs internationaux, attirés par leurs rendements élevés.
Après la crise de 2008, le marché européen de la titrisation s'est alors fortement réduit : si en 2010 les encours étaient proches de 2 000 milliards d'euros, ils ne représentaient plus qu'environ 540 milliards d'euros en 2023, soit 1/5ème du marché américain. Par ailleurs, le marché de la titrisation est très concentré : la majorité des encours provient de quelques États membres majeurs comme la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et les Pays-Bas.
L'objectif des deux propositions présentées par la Commission européenne est de réformer le cadre européen de la titrisation, modifié en 2017 et jugé encore excessivement contraignant. La Commission considère que le cadre actuel entraine des charges règlementaires et prudentielles excessives, qui entravent le développement du marché européen de la titrisation. Or, une dynamisation de ce marché permettrait d'alléger le bilan des banques en renforçant leur capacité à accorder des prêts.
Les propositions visent ainsi principalement à simplifier le traitement prudentiel applicable aux titrisations, tout en veillant à garantir la stabilité du système financier.
Des modifications ciblées du règlement de 2017 sur la titrisation doivent permettre de simplifier les règles en matière de devoir de diligence (« due diligence ») et les exigences de transparence. Cela doit permettre aux investisseurs de se conformer plus facilement à leurs obligations en temps utile. Dans le détail, les investisseurs ne devront plus vérifier certaines informations lorsque la partie qui vend est établie dans l'Union européenne (UE ) et y fait l'objet d'une surveillance. Les investisseurs dans des titrisations de pays tiers pourraient également bénéficier d'un certain nombre d'allègements des exigences mais resteraient soumis à un régime plus sévère.
S'agissant des banques, les modifications proposées ajustent les exigences de fonds propres pour qu'elles reflètent plus précisément les risques réellement encourus. Les exigences de fonds propres sont réduites pour les expositions jugées moins risquées, ce qui éviterait aux banques d'avoir à détenir des fonds propres inutilement élevés. Les modifications devraient globalement réduire les exigences de fonds propres, en particulier pour les expositions peu risquées, sûres et résilientes des banques, tout en évitant une sous-capitalisation de leurs expositions plus risquées.
B. Ces propositions sont-elles conformes aux principes de subsidiarité et de proportionnalité ?
Ces deux propositions reposent sur l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), qui donne au Parlement européen et au Conseil la compétence d'arrêter des mesures en ce qui concerne l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur, afin d'éliminer les obstacles à la libre circulation et aux distorsions de concurrence.
Le marché européen des capitaux reste aujourd'hui encore fortement fragmenté. C'est la raison pour laquelle la Commission européenne a lancé un plan pour relancer l'Union des marchés de capitaux, désormais désigné sous l'appellation d'Union de l'épargne et de l'investissement. La relance du marché de la titrisation, aujourd'hui sous-utilisé en Europe et concentré dans un nombre restreint d'États membres, est un des axes de cette stratégie.
L'établissement d'un véritable marché unique du financement de marché en Europe ne peut être atteint par des initiatives nationales. Une révision du cadre régissant le marché de la titrisation nécessite donc des actions au niveau de l'Union européenne. L'Union semble bien légitime à arrêter des mesures dans ce domaine, comme elle l'a déjà fait en 2017-2018. En ce sens, les propositions apparaissent bien conformes au principe de subsidiarité.
Par ailleurs, les différentes mesures envisagées par ces deux propositions visent à garantir un équilibre entre dynamisation du marché de la titrisation et préservation de la stabilité financière. Les propositions contiennent ainsi plusieurs mesures de calibrage, adaptées aux niveaux de risques des titrisations. Les démarches de simplification et d'allègement prudentiel sont combinées avec des garanties en matière de stabilité, d'exigences de transparence et de protection des investisseurs. En ce sens, les propositions apparaissent bien conformes au principe de proportionnalité.
Dès lors, ces deux propositions de la Commission ne semblent pas porter atteinte aux principes de subsidiarité et de proportionnalité.
Compte tenu de ces observations, le groupe de travail sur la subsidiarité a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ces textes au titre de l'article 88-6 de la Constitution.