IV. L'ENCADREMENT DES TECHNIQUES DE REPRODUCTION ASSISTÉE ET DES RECHERCHES SUR L'EMBRYON ET SES ÉLÉMENTS DE FORMATION AU DANEMARK ET EN ESPAGNE

Les techniques de reproduction assistée sont encadrées de façon similaire au Danemark (4.1) et en Espagne (4.2), dans un texte de loi régulant aussi la recherche liée à l'embryon et à ses éléments de formation.

1. L'encadrement de la recherche ayant comme objet des éléments pré-embryonnaires au Danemark

Le premier texte encadrant la procréation médicalement assistée au Danemark a été voté en 1997 130 ( * ) . Dans sa version actuelle, la loi danoise sur la reproduction assistée en relation avec le traitement, le diagnostic et la recherche 131 ( * ) est entrée en vigueur le 19 janvier 2015.

Le législateur a fait le choix de traiter au sein d'un même texte des questions de procréation médicalement assistée et de bioéthique liées aux traitements médicaux, au diagnostic et à la recherche liée aux cellules souches. Il a pris le parti de définir les notions d'homme et de femme dans l'article 1 er , à savoir :

- Femme : personne dotée d'un utérus ou d'un ovaire ;

- Homme : personne dotée d'au moins un testicule.

Il est à noter que le texte danois est nettement plus restrictif en la matière que son équivalent espagnol.

Du point de vue rédactionnel, la syntaxe employée reflète le souci de prévenir le plus possible les détournements éventuels du texte :

- il ne doit pas y avoir de reproduction assistée, à l'exception du cas où il s'agit de féconder des gamètes non modifiés génétiquement (art. 2) ;

- la gestation pour autrui est interdite (art. 13) de même que la transplantation d'ovaire visant à combattre l'infertilité (art. 11).

D'après l'article 6, une femme de plus de 45 ans ne peut prétendre à l'utilisation d'une technique de PMA. D'ailleurs, le recours à celle-ci n'est autorisé qu'aux femmes seules et aux couples sans enfants. Un second recours à la PMA peut être uniquement autorisé dans le cas où il reste des gamètes congelés issus d'un premier recours.

Si la fécondation ne peut se réaliser qu'avec des gamètes non modifiés génétiquement, dans la même optique, le législateur a aussi bloqué l'emploi de gamètes qui seraient trop proches génétiquement ou issus de personnes d'une même lignée familiale.

Un amendement entré en vigueur le 26 décembre 2017 132 ( * ) , a élargi les conditions d'accès au don de gamètes dans le cadre de la PMA, anciennement borné à un seul des deux gamètes. Il est désormais autorisé, sous réserve de nécessité médicale, de recourir à deux gamètes non issus des « parents », sous réserve que les dons aient été effectués de manière non anonymisée et d'accords écrits de la part des donateurs.

Concernant la conservation des gamètes, il est prévu que les ovocytes fécondés ou non fécondés peuvent être conservés 5 ans avant leur destruction (art. 15). Cette période peut être étendue jusqu'à ce que la femme atteigne 45 ans, dans le cas où l'un des deux conjoints viendrait à souffrir d'une maladie grave. En cas de mort de la femme, de séparation du couple, de divorce ou de cessation de vie commune, les ovocytes, fécondés ou non, doivent être détruits.

Afin de prévenir toute dérive potentielle à caractère eugéniste, l'utilisation de gamètes sélectionnés sur la base de critères génétiques est interdite (art. 18). L'utilisation de gamètes à des fins de recherche est circonscrite aux seules fins d'amélioration de la fécondation in-vitro ou de techniques similaires de procréation ou des techniques d'analyses génétiques dans le but de détecter chez un embryon des risques de tares génétiques ou de maladies graves et de traitement des pathologies chez l'Homme. Tout autre type de recherche employant des gamètes est expressément interdit (art. 25).

La vente et le trafic d'ovocytes sont interdits à l'article 12.

La limite de la durée de conservation des ovocytes fécondés hors de l'utérus est fixée à 14 jours (art. 26). Cette limite est également retenue par le législateur espagnol. Toutefois, les raisons de ce choix ne sont avancées par aucun des deux législateurs.

Finalement, sont proscrites formellement (art. 26) les recherches visant à :

- permettre la création d'êtres humains au patrimoine génétique identique ;

- permettre la création d'êtres humains par fusion d'embryons génétiquement distincts ou de parties d'embryons, avant l'implantation en milieu utérin ;

- la création d'êtres humains hybrides, c'est-à-dire dont une partie du patrimoine génétique provient d'autres espèces (chimères) ;

- rendre possible le développement d'un être humain au sein d'un utérus artificiel, ce qui vient compléter l'article 9 prévoyant que le développement d'un ovocyte fécondé ne peut se faire hors de l'utérus d'une femme.

2. L'encadrement de la recherche ayant comme objet des éléments pré-embryonnaires en Espagne

Cette question est réglée actuellement par la loi espagnole 14/2006 sur les techniques de reproduction assistée. À ce titre, elle indique dans son article 1 er qu'elle a pour objet de réguler :

- l'application des techniques de procréation médicalement assistée ;

- l'application des techniques de PMA dans la prévention et le traitement de malades d'origine générique ;

- les cas et les conditions où il est possible d'utiliser les gamètes et les pré-embryons humains cryoconservés.

Le recours aux techniques de PMA - ouvert à toute femme majeure sans distinction de son état civil ou de son orientation sexuelle - est encadré par cette loi qui impose certaines conditions dans son article 3. Ainsi, le recours à ces techniques n'est possible que dès lors qu'il y a des possibilités raisonnables de succès du traitement. En outre, elles ne doivent pas présenter de risque grave pour la santé physique ou mentale de la femme ou de l'enfant conçu. Dans tous les cas, le consentement de la femme est indispensable - sans quoi il s'agirait d'un délit - et il doit être éclairé quant aux possibilités de succès, aux risques encourus et aux conditions d'application des techniques de reproduction.

Bien qu'autorisée, l'utilisation de pré-embryons à des fins de recherche est encadrée par la loi qui fixe 4 conditions impératives (art. 15) :

- le consentement par écrit du couple ou le cas échéant de la femme. Une explication préalable et compréhensible des objectifs poursuivis par la recherche est nécessaire pour le recueillement du consentement ;

- le développement in vitro du pré-embryon ne peut pas être supérieur à 14 jours ;

- la recherche doit se réaliser dans des centres autorisés ;

- la recherche doit être conforme à un projet dûment présenté et autorisé par la Commission nationale de reproduction humaine assistée ( Comisión Nacional de Reproducción Humana Asistida ).

La loi espagnole 14/2007 de recherche biomédicale interdit explicitement, quant à elle, la création de pré-embryons et d'embryons humains uniquement à des fins d'expérimentation reprenant à cet égard la jurisprudence constitutionnelle antérieure 133 ( * ) . Ce nonobstant, la loi autorise l'utilisation de cellules souches humaines à des fins thérapeutiques ou de recherche pourvu qu'aucun pré-embryon ne soit créé (art. 33). Pour ce faire, le même article autorise expressément l'activation d'ovocytes par un transfert de noyau ( activación de ovocitos mediante transferencia nuclear ). Toutes ces pratiques sont soumises au consentement, qui peut être révoqué à tout moment, des personnes dont résulte la provenance des ovocytes et des pré-embryons (art. 32).


* 130 Lov n° 460 om kunstig befrugtning, du 10 juin 1997.

* 131 Bekendtgørelse af lov om assisteret reproduktion i forbindelse med behandling, diagnostik og forskning m.v.

* 132 Lov nr 1688 af 26/12/2017 .

* 133 Décisions du Tribunal constitutionnel espagnol STC 53/1985, STC 212/1996 et STC 116/1999.

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