INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Qu'il soit permis à votre rapporteur pour avis de rendre hommage à son prédécesseur, M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des Lois, dont chacun sait l'attention qu'il porte aux collectivités d'outre-mer et reconnaît le travail qu'il a accompli en leur faveur.

Près de deux ans après l'adoption de la loi constitutionnelle n° 2003-273 du 28 mars 2003 relative à l'organisation décentralisée de la République, qui a rationalisé le cadre constitutionnel consacré à l'outre-mer, l'examen du projet de loi de finances permet à votre commission des Lois d'observer les résultats des réformes statutaires et de mettre en perspective les évolutions à venir.

L'article 74 de la Constitution rassemble désormais dans la catégorie des « collectivités d'outre-mer » la Polynésie française, Wallis-et-Futuna, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. La Nouvelle-Calédonie est régie par le titre XIII de la Constitution et les Terres australes et antarctiques françaises, dernier « territoire d'outre-mer », forment une catégorie sui generis , dont l'organisation particulière est définie par la loi du 6 août 1955.

L'article 74 prévoit la définition par une loi organique, pour chaque collectivité d'outre-mer, d'un statut tenant compte de ses intérêts propres au sein de la République. Ce statut fixe les conditions d'application des lois et règlements dans la collectivité, ses compétences, l'organisation de ses institutions et les conditions dans lesquelles celles-ci doivent être consultées. Il peut également déterminer des dispositions particulières concernant les collectivités d'outre-mer dotées de l'autonomie.

La loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française a doté cette collectivité du premier statut pris dans les formes prévues par l'article 74. Conformément à cet article, la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complète ce statut en définissant les autres modalités d'organisation particulière de la Polynésie française.

Mme Brigitte Girardin a par ailleurs annoncé devant votre commission la préparation de deux projets de loi organique et ordinaire afin de donner à la loi constitutionnelle du 28 mars 2003 sa pleine application.

Ces projets de loi annoncés devraient assurer l'harmonisation des statuts de Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna avec les dispositions du nouvel article 74 de la Constitution.

Ils devraient également permettre la création des collectivités d'outre-mer de Saint-Barthélémy et Saint-Martin, dont les populations, consultées le 7 décembre 2003 dans les conditions prévues par les articles 72-4 et 73 de la Constitution, se sont prononcées pour la création de telles collectivités.

Le présent avis est consacré, pour la deuxième année consécutive, aux collectivités d'outre-mer. Les îles de Saint-Martin et Saint-Barthélémy faisant encore partie du département de la Guadeloupe n'y figurent donc pas. Ainsi, c'est le rapport pour avis de notre collègue José Balarello sur le budget des départements d'outre-mer qui comporte un développement relatif à l'évolution statutaire de ces îles, où une mission d'information de votre commission des Lois doit se rendre du 9 au 14 décembre prochain.

Après avoir retracé les grandes lignes de l'effort budgétaire consacré par l'Etat aux collectivités d'outre-mer dans le projet de loi de finances pour 2005, votre rapporteur examinera la situation de chacune d'entre elles en se concentrant particulièrement sur leur vie institutionnelle et l'activité judiciaire.

I. LES CRÉDITS CONSACRÉS AUX COLLECTIVITÉS D'OUTRE-MER, À LA NOUVELLE-CALÉDONIE ET AUX TERRES AUSTRALES ET ANTARCTIQUES FRANÇAISES DANS LE PROJET DE BUDGET POUR 2005

A. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS

Les crédits destinés aux collectivités d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux TAAF au sein du projet de loi de finances pour 2005, selon les indications du « jaune » qui leur est consacré, s'élèvent à un peu plus de 2,474 milliards d'euros au titre des dépenses ordinaires et des crédits de paiement (y compris les crédits non répartis) contre un peu plus de 2,387 milliards d'euros en 2004, hors reports et hors fonds de concours, soit une progression de 3,65 %.

Les crédits consacrés aux collectivités d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux TAAF dans le seul budget du ministère de l'outre-mer s'élèvent à près de 355 millions d'euros, soit une progression de 18,06 % par rapport à l'année précédente alors que ce budget augmente globalement de 52 %, en raison du transfert des crédits destinés à la compensation des exonérations de cotisations sociales dans les départements d'outre-mer (678 millions d'euros), autrefois inscrits sur le budget du ministère de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale. Les crédits destinés aux collectivités d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux TAAF représentent par conséquent 20,8 % du montant global du budget 2005 du ministère, qui s'élève à 1,71 milliard d'euros.

Cette part des crédits du ministère de l'outre-mer bénéficiant aux collectivités d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux TAAF ne représente qu'une fraction de l'effort global consenti par le budget de l'Etat à ces collectivités, fraction évaluée à 14,3 %. Trois autres ministères contribuent en effet fortement à cet effort : le ministère de l'éducation nationale (37,2 %), le ministère de la défense (11,6 %) et le ministère de l'intérieur (4 %). La part du ministère de la justice s'élève quant à elle à 2,3 %, soit une augmentation de 37,5 % des crédits de ce ministère consacrés aux collectivités d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie.

Affectation des crédits du ministère de l'outre-mer
(hors crédits non répartis et coût de gestion des services métropolitains)

(en millions d'euros)

Collectivité

2004

2005

Évolution en %

Nouvelle-Calédonie

169,732

167,158

- 1,51

Polynésie française

40,958

45,535

+ 11,17

Wallis-et-Futuna

10,508

12,353

+ 17,55

Mayotte

49,974

67,144

+ 34,35

Saint-Pierre-et-Miquelon

7,427

4,703

- 36,67

TAAF

7,145

7,463

+ 4,45

TOTAL

285,744

304,356

+ 6,51

Ventilation par collectivité de l'effort budgétaire global consacré
aux collectivités d'outre-mer, à la Nouvelle-Calédonie et aux TAAF
(hors crédits non répartis et coût de gestion des services métropolitains)

(en millions d'euros)

Collectivité

2004

2005

Évolution
en %

Nouvelle-Calédonie

899,015

910,112

+ 1,23

Polynésie française

1 043,713

1 073,497

+ 2,84

Wallis-et-Futuna

79,023

79,761

+ 0,93

Mayotte

237,889

258,964

+ 8,60

Saint-Pierre-et-Miquelon

65,067

52,106

- 19,92

TAAF

34,628

34,407

- 0,64

TOTAL

2 359,335

2 408,797

+ 2,10

Le budget du ministère de l'outre-mer pour 2005 intègre le financement du fonds intercommunal de péréquation de la Polynésie française (8,19 millions d'euros). Il consent en outre un effort particulier pour assurer la desserte des collectivités d'outre-mer les plus isolées, Mme Brigitte Girardin ayant indiqué à votre commission qu'une dotation de 500.000 euros serait destinée à augmenter la fréquence des vols entre les îles Wallis et Futuna. Une somme identique permettra d'améliorer la desserte maritime de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il convient en effet de ne pas oublier la distance qui sépare les collectivités d'outre-mer de la métropole et la nécessité pour l'Etat d'assurer les moyens d'une réelle continuité territoriale , également assurée par le passeport mobilité dont bénéficient les étudiants d'outre-mer poursuivant des études en métropole.

Les crédits consacrés à la coopération régionale entre les collectivités d'outre-mer et les pays périphériques devraient par ailleurs augmenter de 18 % par rapport à 2004, facilitant le lancement de nouveaux programmes.

Le service militaire adapté , dont bénéficient près de 700 volontaires en Nouvelle-calédonie, en Polynésie française et à Mayotte, apporte des résultats très intéressants pour la formation et l'insertion professionnelle des jeunes. L'Etat poursuit son effort en la matière, Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer, ayant indiqué que cette formule pourrait même être développée en métropole.

Enfin, si les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) ne font pas partie de l'Union européenne, ils y sont associés. A cet égard, une décision a été approuvée le 27 novembre 2001 et s'appliquera jusqu'en 2011, qui prévoit une aide renforcée pour les PTOM les moins avancés. Cette aide, fondée sur une répartition du IXème Fonds européen de développement prenant largement en compte le PIB par habitant et la population, devrait se traduire par une augmentation sensible de la dotation consacrée à Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna.

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