II. PROGRAMME 157 : LA POURSUITE DES EFFORTS EN FAVEUR DES PERSONNES HANDICAPÉES

Doté de 9,1 milliards d'euros , le programme « Handicap et dépendance » recouvre près des trois-quarts des dépenses de la mission et se décompose en six actions :

- l'action « Ressources d'existence », avec 6,5 milliards, représente plus de 70 % des crédits du programme et permet de financer l'allocation aux adultes handicapés (6,23 milliards) et l'allocation supplémentaire d'invalidité (290 millions) ;

- l'action « Evaluation et orientation personnalisée des personnes handicapées » correspond à la contribution de l'Etat au financement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH), qui s'élève, pour 2010, à 21,7 millions ;

- l'action « Incitation à l'activité professionnelle » contribue au financement de l'activité des établissements et services d'aide par le travail (2,53 milliards) ;

- l'action « Compensation des conséquences du handicap », dotée d'une enveloppe d'environ 17,1 millions, qui comprend pour l'essentiel, les subventions versées aux instituts nationaux pour enfants et adolescents déficients sensoriels (15,4 millions) et une dotation résiduelle pour financer les services d'auxiliaires de vie (1,7 million) pour les personnes ne bénéficiant pas encore d'un financement équivalent par le biais de la PCH ;

- l'action « Personnes âgées » (2 millions) permet le versement de subventions à des associations nationales (0,5 million environ) et le financement du plan de lutte contre la maltraitance (un peu plus de 1,5 million) ;

- enfin, 5,8 millions sont affectés au « Pilotage du programme », au travers de subventions versées aux associations nationales représentant les personnes handicapées (1,7 million), aux centres régionaux d'aide à l'enfance et à l'adolescence inadaptée (2 millions) et aux centres d'information pour la surdité (0,43 million) ainsi que d'une participation (1,5 million) au financement de l'agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (Anesm).

A cette enveloppe, en hausse de 5,5 % par rapport à 2009, s'ajoutent plus de 11 milliards de dépenses fiscales prises en charge par l'Etat sur des impôts locaux ou d'Etat.

Conformément aux engagements pris par le Président de la République lors de la conférence nationale du handicap du 10 juin 2008, le projet de loi de finances pour 2010 poursuit, pour la troisième année consécutive, la mise en oeuvre de :

- la revalorisation de 25 %, d'ici à 2012, de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ;

- la création, sur cinq ans, de 50 000 places nouvelles en établissements spécialisés pour l'accueil des personnes handicapées 29 ( * ) ;

- la priorité donnée à l'insertion professionnelle des personnes handicapées, grâce à la réforme des conditions d'attribution de l'AAH et des modalités de cumul de cette allocation avec les revenus d'activité ainsi que la mise en place d'un dispositif d'orientation et d'accompagnement des personnes handicapées vers l'emploi.

A. POURSUIVRE LA REVALORISATION DES REVENUS D'EXISTENCE

Les ressources d'existence visent à assurer aux personnes handicapées un revenu minimum garanti leur permettant de mener une vie autonome et digne. Elles recouvrent essentiellement l'AAH et ses compléments qui représentent plus de 68 % des dépenses de ce programme, mais aussi l'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI), qui est versée sur les ressources du fonds spécial d'invalidité (FSI).

Si l'AAH et ses compléments bénéficient depuis 2008 d'une revalorisation annuelle substantielle, tel n'est pas le cas de l'ASI, dont le montant est seulement indexé sur l'évolution des pensions vieillesse.

1. L'allocation aux adultes handicapés : une dépense particulièrement dynamique en 2009 et 2010

L'AAH est un minimum social spécifique, attribué sous conditions de ressources aux personnes âgées de vingt à soixante ans reconnues handicapées 30 ( * ) par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Elle est versée de façon subsidiaire par rapport aux prestations vieillesse ou invalidité et se cumule, le cas échéant, avec des revenus d'activité dans la limite d'un plafond annuel d'environ 8 180 euros pour une personne seule.

Peuvent s'y adjoindre : l'ancien complément d'AAH 31 ( * ) ou le complément de ressources et la majoration pour la vie autonome (MVA), créés par la loi du 11 février 2005.


Les compléments de l'AAH

La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a instauré deux nouveaux compléments à l'AAH, non cumulables : une majoration pour la vie autonome ainsi qu'un complément de ressources, qui s'ajoute à l'AAH pour garantir aux personnes handicapées dans l'incapacité de travailler un niveau de ressources minimal, la garantie de ressources des personnes handicapées.

La majoration pour la vie autonome , qui se substitue à l'ancien complément d'AAH, est destinée aux personnes ayant un taux d'incapacité d'au moins 80 %, qui disposent d'un logement indépendant, perçoivent une aide au logement et bénéficient d'une AAH versée à taux plein ou en complément d'une pension vieillesse, d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail.

Le complément de ressources s'adresse aux personnes âgées de moins de soixante ans, ayant un taux d'incapacité d'au moins 80 %, qui bénéficient d'une AAH versée à taux plein ou en complément d'une pension vieillesse, d'invalidité ou d'une rente d'accident du travail, qui disposent d'un logement indépendant, qui n'ont pas perçu de revenus professionnels depuis au moins un an et dont la capacité de travail est inférieure à 5 %.

L'ancien complément d'AAH est en voie d'extinction progressive. Afin d'éviter toute perte de droits, les personnes bénéficiaires ne remplissant pas les conditions d'accès à ces nouveaux compléments sont autorisées à le percevoir, dans les mêmes conditions, jusqu'au renouvellement de leur AAH.

Principales allocations versées aux personnes handicapées

(en euros)

Montant mensuel

Plafond de ressources annuelles

AAH

681,63

-

Personne seule

8 179,56

Couple

16 359,12

Par enfant à charge

+ 4 089,78

Complément de ressources

179,31

Garantie de ressources

890,94

Majoration pour la vie autonome

104,77

Ancien complément d'AAH (transitoire)

100,50

Montant minimal en cas d'hospitalisation,
d'hébergement ou de détention

204,49

Source : Liaisons sociales - Montants actualisés au 1 er septembre 2009

a) L'AAH sera revalorisée en 2010 pour la troisième année consécutive

Pour 2010, la prévision de dépenses au titre de l'AAH s'élève à 6,23 milliards d'euros, soit une augmentation de 7,4 % par rapport à 2009 , qui résulte à la fois :

- du dépassement de dépenses constaté en 2009 au titre de l'AAH, qui a conduit le Gouvernement à relever le plafond fixé par la loi de programmation des finances publiques de 260 millions d'euros ;

- des taux de progression du nombre de bénéficiaires de l'AAH et du complément de ressources, estimés, pour 2010, respectivement à 0,8 % et 0,1 % ;

- de la poursuite du plan de revalorisation de l'AAH engagé en 2008, qui se traduira, pour 2010, par deux hausses successives de l'allocation de 2,2 % chacune, au 1 er avril et au 1 er septembre, permettant ainsi d'en porter le montant à 711,95 euros à la fin de l'année .

Augmentation prévisionnelle du montant de l'AAH d'ici à 2012

Echéances

Revalorisation
(en %)

Montant AAH
(en euros)

Progression depuis 2007

en %

en euros

Au 31 décembre 2007

0

621,27

1 er janvier 2008

1,1

628,10

1,1

6,83

1 er septembre 2008

3,9

652,60

5,0

31,33

1 er avril 2009

2,2

666,96

7,4

45,69

1 er septembre 2009

2,2

681,63

9,7

60,36

1er avril 2010

2,2

696,63

12,1

75,36

1er septembre 2010

2,2

711,95

14,6

90,68

1 er avril 2011

2,2

727,61

17,1

106,34

1 er septembre 2011

2,2

743,62

19,7

122,35

1 er avril 2012

2,2

759,98

22,3

138,71

1 er septembre 2012

2,2

776,59

25,0

155,32

Source : ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité

- des économies attendues (125 millions d'euros) des actions menées en faveur d'une meilleure gestion de la prestation, des modifications des conditions d'attribution ainsi que de la mise en place d'un système d'accompagnement personnalisé vers l'emploi.

Ainsi, en 2010, les crédits inscrits en loi de finances devraient permettre de verser l'AAH à 856 600 personnes à raison d'un montant moyen mensuel de 606 euros.

Evolution des crédits de paiement alloués à l'AAH

AAH

2005

2006

2007

2008

2009 (1)

2010 (1)

Nombre moyen de bénéficiaires

793 886
1,9 %

802 200
1,0 %

809 000
0,9 %

831 700 2,8 %

849 800
2,2%

856 600
0,8 %

Montant mensuel moyen en euros

523
2,1 %

542
3,6 %

554
2,2 %

565
2,0 %

593
5,0 %

606
2,2 %

Crédits de paiement LFI
(en millions d'euros)

4 847
4,0 %

5 187
7,0 %

5 304
2,2 %

5 410
2,0 %

5 811
7,5 %

6 234
7,4 %

Crédits consommés
(en millions d'euros)

4 924
3,4 %

5 229
6,2 %

5 373
2,8 %

5 646
5,1 %

6 047
7,1 %

ns

Transfert de crédits LFR
(en millions d'euros)

77

42

69

236

236

ns

(1) Prévisions.

Source : d'après le projet annuel de performances - 2008

b) Le risque d'un dérapage des dépenses en 2009 et en 2010

Ces prévisions semblent excessivement optimistes au regard des évolutions constatées au cours des années précédentes et en particulier du dérapage observé au cours de l'année 2009 :

- la progression du nombre de bénéficiaires risque d'être une nouvelle fois sous-estimée, comme en 2009, où elle a tout d'abord été évaluée à 0,9 % alors qu'elle devrait finalement être au minimum de 2,2 %. Selon les données transmises par la Cnaf, l'augmentation s'élevait déjà à 3,3 % en glissement annuel 32 ( * ) au mois de septembre, et pourrait même atteindre 4,6 % à la fin de l'année ;

- de la même façon, l'hypothèse d'évolution du montant mensuel moyen (2,2 %) est excessivement modérée au regard de la tendance observée en 2009 (5 %). Cette évolution résulte de l'effet conjugué de la revalorisation de la prestation et de l'absence de révision de la « base ressources » en 2009. Or, l'AAH étant une prestation différentielle, son montant se réduit d'autant dès lors que les autres sources de revenus de la personne handicapée augmentent ;

- enfin, les mesures prises en loi de finances pour 2009 relatives à la réforme de l'AAH n'ayant été que partiellement mises en oeuvre, les économies qui devaient en résulter n'ont pu être réalisées.

Pour ces trois raisons, on devrait observer en 2009 un dépassement des crédits inscrits en loi de finances initiale (5,81 milliards d'euros) d'au moins 236 millions . En réalité, au vu des informations qu'il a recueillies auprès de la Cnaf, votre rapporteur craint que l'exercice 2009 ne s'achève avec un besoin de financement de l'ordre de 500 millions.

La réalisation des hypothèses retenues pour 2010 supposerait donc une nette inflexion des tendances observées sur les trois premiers trimestres de 2009, ce qui n'est malheureusement guère probable.

Dans ce contexte, votre commission approuve le relèvement du plafond des crédits pour 2010 de 260 millions d'euros, même si cet effort risque de ne pas être suffisant au regard de la dynamique des dépenses d'AAH observée sur les trois premiers trimestres de 2009.

Aussi votre commission demande-t-elle au Gouvernement de préciser les mesures qu'il entend prendre en loi de finances rectificative pour remédier à cette situation qui, à défaut, se traduira inévitablement par la reconstitution d'une dette de l'Etat vis-à-vis de la sécurité sociale.

2. L'allocation supplémentaire d'invalidité : une dotation en forte baisse faute de revalorisation

L'allocation supplémentaire d'invalidité (ASI), plus communément appelée « minimum invalidité », est une prestation différentielle non contributive servie, en complément d'un avantage d'assurance invalidité ou d'assurance vieillesse, aux personnes atteintes d'une invalidité réduisant leur capacité de travail d'au moins deux tiers. Elle est versée lorsque le montant cumulé de la pension d'invalidité et des autres ressources de la personne concernée est inférieur à un plafond annuel égal, au 1 er septembre 2009, à 7 859,08 euros 33 ( * ) pour une personne seule et 13 765,73 euros pour un couple. Le montant maximal de l'ASI est de 4 520,24 euros pour un célibataire et de 7 459,07 euros pour un couple.

L'ASI est versée par l'assurance maladie pour les ressortissants du régime général et par un organisme spécial géré par la caisse des dépôts et consignations, pour les ressortissants d'autres régimes. Les crédits inscrits en projet de loi de finances visent donc à rembourser ces deux organismes des dépenses qu'ils avancent à ce titre au fonds spécial d'invalidité (FSI) pour le compte de l'Etat.

Conformément aux préconisations de la mission d'audit, menée conjointement en août 2003 par l'inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'inspection générale des finances (IGF), le montant des dépenses prévisionnelles est évalué en faisant varier la dernière dépense connue, à savoir celle de 2008, en fonction des revalorisations de l'allocation intervenues depuis cette date (soit - 0,4 % en 2009 et 1,2 % prévu en 2010) et de l'évolution du nombre de bénéficiaires évaluée à - 1 % en moyenne annuelle pour 2009 et 2010.

Pour 2010, le projet de loi de finances prévoit une dotation de 290 millions d'euros, soit une baisse de 8,8 % par rapport à l'exercice précédent , qui se fonde sur les hypothèses suivantes :

- une dépense arrêtée en 2008 à 289 millions d'euros ;

- un nombre de bénéficiaires en baisse, ramené à 99 970, alors qu'il était estimé à 102 000 en 2008 et à 105 000 en 2009 ;

- une augmentation de la dépense moyenne de 1,3 % en 2009 et de 1,15 % en 2010 qui se base sur une revalorisation de l'allocation qui résulte à la fois d'un taux d'inflation de 0,4 % en 2009 et de 1,2 % en 2010 et des revalorisations décidées en 2008 et 2009 (0,8 % en septembre 2008 et 1 % en avril 2009).

Evolution des dépenses prévisionnelles et constatées du FSI

(en millions d'euros)

Années

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

Crédits ouverts

272

299,6

299,9

300

308

318

290

Dépenses réelles

292

296,7

303,4

302,8

294,9 (1)

289

-

Solde

- 20

2,9

- 3,5

-2,8

13,1

29

-

(1) Comprend 5 millions d'euros au titre du remboursement de la dette à la sécurité sociale

Source : ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité

Votre commission constate avec satisfaction que la dotation au FSI a été correctement calibrée en 2008 et que les dettes accumulées vis-à-vis de la sécurité sociale ont pu être apurées grâce aux excédents dégagés en fin d'exercice. En 2009, les dépenses réelles devraient une nouvelle fois être inférieures aux crédits ouverts en loi de finances initiale, retrouvant ainsi leur niveau de 2004.

Toutefois, cette situation atteste de l'absence de revalorisation (au-delà de l'inflation) de l'ASI depuis cette date, creusant ainsi un écart important avec l'AAH dont le montant doit être augmenté de 25 % entre 2007 et 2012. Votre commission suggère donc qu'au moins une partie des excédents dégagés puissent être mobilisés pour permettre la revalorisation de l'allocation.

* 29 Voir à ce sujet le rapport du Sénat n° 90, projet de loi de financement pour 2010, tome III (2009-2010) de Sylvie Desmarescaux, fait au nom de la commission des affaires sociales, sur le secteur médico-social, novembre 2009.

* 30 Pour être reconnue handicapée, la personne doit présenter un taux d'incapacité permanente d'au moins 80 % (article L. 821-1 du code de la sécurité sociale) ou compris entre 50 % et 80 % et connaître une restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi (article L. 821-2 du même code).

* 31 Maintenu de manière transitoire pour ceux qui en bénéficiaient au 1 er juillet 2005 jusqu'au terme de la période pour laquelle l'AAH ou jusqu'à ce qu'ils bénéficient de la majoration pour la vie autonome ou de la garantie de ressources.

* 32 Entre septembre 2008 et septembre 2009.

* 33 Ce qui permet d'atteindre un revenu mensuel de 654,92 euros.

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