B. DES RÉPONSES STRUCTURELLES AUX BESOINS DE FINANCEMENT DES PME

1. Diriger l'épargne des ménages vers les PME : le dispositif TEPA-ISF

Le dispositif TEPA-ISF, issu de la loi travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat d'août 2007, ouvre droit à une réduction d'ISF pouvant atteindre 75 % des versements effectués (directement ou via certaines holdings) au titre de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de PME européennes, dans la limite de 50 000 euros de réduction d'ISF chaque année. Ce taux est réduit à 50 % et le plafond de réduction, à 20 000 euros pour les prises de participation réalisées via certains fonds de placement 16 ( * ) .

En 2008, cette mesure a permis de drainer plus d'1,1 milliard d'euros vers le financement des PME (500 millions d'euros en investissements directs ; 130 millions d'euros dans les holdings ; 359 millions d'euros dans les fonds d'investissement de proximité (FIP) ; 167 millions d'euros dans les fonds commun de placement dans l'innovation (FCPI) ; 7 millions d'euros dans les fonds commun de placement à risque (FCPR). Plus de 73 000 contribuables, soit près de 13 % des foyers redevables de l'ISF, ont bénéficié de la réduction de cet impôt au titre de la souscription au capital de PME. Cela représente une dépense fiscale de l'ordre de 670 millions par an.

Votre rapporteur pour avis se réjouit de ce succès, mais il souhaiterait que le dispositif TEPA-ISF soit évalué de manière à être certain que les capitaux se dirigent prioritairement vers les PME de forte croissance . En effet, ce qui justifie l'importante dépense publique que représente ce dispositif, c'est avant tout son effet de levier sur le PIB et sur l'emploi, levier qui est évidemment maximum quand l'investissement se porte sur les PME de croissance et d'innovation. C'est également le fait que les projets les plus dynamiques sont souvent aussi des projets innovants présentant un niveau de risque élevé. C'est pourquoi il est utile de leur donner « un coup de pouce ». Pour optimiser le dispositif TEPA-ISF, il faut donc le centrer sur les PME les plus dynamiques.

2. Développer une stratégie d'investissement public dans les PME

Comme les ménages, l'Etat doit être présent aux côtés des PME. Deux outils puissants viennent récemment de renforcer son rôle de co-investisseur.

a) Le fonds stratégique d'investissement (FSI)

Le Président de la République a annoncé la création du FSI le 20 novembre 2008 et le premier collectif budgétaire pour 2009 lui a ensuite donné corps. Le FSI est une société anonyme dont le capital est détenu à 51 % par la Caisse des dépôts et consignations et à 49 % par l'Etat. Initialement doté de 20 milliards d'euros de capital (6 milliards en numéraire, apportés à parité par l'Etat et la CDC, et 14 milliards d'actifs transférés par les deux actionnaires), il constitue une sorte de fonds souverain qui prend des participations minoritaires avec le double objectif de soutenir le développement des entreprises petites et moyennes à fort potentiel et de sécuriser le capital d'entreprises détentrices de compétences stratégiques pour la Nation .

Votre rapporteur pour avis remarque que le bilan du FSI est d'ores et déjà très significatif :

- prises de participation directes au capital de dix sociétés pour un montant total de près de 450 millions d'euros 17 ( * ) ;

- participation, à hauteur de 200 millions d'euros, au fonds de modernisation des équipementiers automobiles (FMEA), doté de 600 millions d'euros (Etat et constructeurs), qui a déjà annoncé des investissements dans plusieurs sociétés 18 ( * ) ;

- développement d'une stratégie d'investissement sectoriel (notamment fin octobre 2009, entrée dans InnoBio, un nouveau fonds d'investissement dans les biotechnologies) ;

- lancement du programme FSI-PME, qui consacrera 1 milliard d'euros au renforcement des fonds propres des PME de croissance 19 ( * ) , ainsi que des entreprises ayant saisi le médiateur du crédit et devant améliorer leur haut de bilan pour bénéficier d'un refinancement bancaire ;

- participation au programme France-Investissement : ce programme mis en place en novembre 2006 sous la forme d'un partenariat entre la Caisse des Dépôts et des investisseurs institutionnels privés, vise à stimuler le développement du capital-investissement en France sur tous les segments de ce marché (capital risque, capital-développement et capital-transmission) et a pour objectif d'injecter, entre 2006 et 2012, trois milliards d'euros au capital des PME dynamiques.

Votre rapporteur pour avis se félicite de la création du FSI qui s'inscrit dans le cadre d'une politique industrielle rénovée, adaptée au contexte économique et juridique d'aujourd'hui . La France doit en effet se doter d'une stratégie et d'outils qui lui permettent de retenir sur son territoire les compétences en matière de conception, mais aussi de fabrication industrielle, qui sont le socle de la croissance et de la prospérité. Si les anciens modes d'intervention étatiques ont montré les limites de leur efficacité dans un environnement complexe et ouvert, les années récentes ont également rappelé l'utilité du rôle économique de l'Etat et montré que des spécialisations économiques abandonnées au seul jeu du marché pouvaient conduire à la désindustrialisation, à la perte de compétences nationales clé et, à terme, à une insertion plus fragile et moins dynamique dans l'économie mondiale. Un outil comme le FSI permet à l'Etat d'appuyer le développement de ses PME les plus dynamiques, de se conduire en actionnaire socialement et écologiquement responsable, tout en laissant à l'initiative privée et à la concurrence l'espace nécessaire pour s'exprimer.

Votre rapporteur pour avis observe enfin que se dessine un partage des rôles entre OSEO et le FSI en matière de financement public des PME : le FSI semble en effet appelé à devenir le guichet unique des interventions en fonds propres dans les PME, tandis qu'OSEO se spécialise dans le rôle du co-financement bancaire. Il y a donc là deux outils puissants et complémentaires au service du financement public des PME.

LA DOCTRINE D'INVESTISSEMENT DU FSI

I. Le FSI a pour objectif d'accompagner :

1. le développement des petites et moyennes entreprises de croissance pour lesquelles il participe au financement en fonds propres via le Programme France Investissement (valeur d'entreprise inférieure à 100 millions d'euros) ;

2. des entreprises de taille moyenne (valeur d'entreprise comprise entre 100 millions et 2 milliards d'euros) qui disposent d'un potentiel de création de valeur, notamment parce qu'elles maîtrisent des technologies innovantes ou peuvent bâtir des positions de leader, pour lesquelles il joue un rôle de catalyseur de développement et d'innovation ;

3. des entreprises de taille moyenne présentes sur des secteurs en phase de mutation qui, parce que leurs fondamentaux (notamment techniques, humains ou produits) sont sains, peuvent émerger comme acteur de référence de leur segment ; par son intervention en fonds propres, le FSI joue alors le rôle d'accélérateur des redéploiements industriels ;

4. des grandes et moyennes entreprises qui jouent un rôle important dans leur secteur et dont la stabilisation du capital rend possible la réalisation d'un projet industriel créateur de valeur, et donc de richesses en termes de compétences, de technologies et d'emplois.

Le FSI a vocation à investir dans des entreprises existantes. Il n'a pas vocation à participer au financement de projets de création d'entreprises ou d'infrastructures, dans le cadre notamment de partenariats public-privé ; il n'a pas vocation à investir dans les services financiers, la distribution et l'immobilier ou les activités non concurrentielles.

II. le FSI intervient avec les principes suivants :

1. Il investit dans des projets rentables

2. Il est un investisseur de long terme

3. Il a vocation à prendre des participations minoritaires

4. Afin d'exercer un fort effet d'entraînement, le FSI a pour principe de recourir au co-investissement, en recherchant l'implication d'autres investisseurs, qu'ils soient privés ou publics, français ou étrangers. Le FSI veillera à articuler ses investissements avec les dispositifs de soutien à la recherche-développement

5. Il investit dans des durées limitées dans le temps et fait évoluer son portefeuille de participations

6. Le FSI s'implique a priori dans la gouvernance des entreprises dont il détient une participation

7. Le FSI a pour vocation d'investir de manière privilégiée dans des entreprises stratégiques au regard de la compétitivité de l'économie, c'est-à-dire celles qui ont des compétences, des technologies et des emplois irremplaçables pour le territoire national et européen.

b) Un rôle accru pour OSEO

Le Président de la République a annoncé, en octobre 2009, le développement par OSEO de ses financements en quasi-fonds propres via un contrat de développement participatif destiné aux PME qui ne souhaitent pas ouvrir leur capital et voir se diluer le contrôle de l'entreprise. Ce dispositif permettra à OSEO d'abonder les financements apportés par d'autres acteurs financiers dans des conditions qui assimilent les fonds apportés à des fonds propres (durée de remboursement longue, de 5 à 7 ans ; différé d'amortissement de 2 ans ; rémunération du capital apporté partiellement indexée sur les performances de l'entreprise). Ces prêts participatifs ont vocation à apporter jusqu'à 1 milliard d'euros de quasi fonds propres aux PME.

3. La dépense fiscale : un levier essentiel pour financer l'innovation et la croissance des PME

Il existe actuellement trois dispositifs d'incitation fiscale principaux de soutien aux PME technologiques et de croissance :

- le crédit d'impôt recherche est un outil généraliste, qui bénéficie à toutes les entreprises, dont spécifiquement aux PME ;

- deux autres dispositifs sont ciblés spécifiquement sur les PME : il s'agit de la réduction d'impôt en faveur des PME de croissance et du dispositif en faveur des jeunes entreprises innovantes.

LA RÉDUCTION D'IMPÔT EN FAVEUR DES PME DE CROISSANCE

Le régime des PME de croissance, également appelées « gazelles », est issu de la loi de finances pour 2007. Il prévoit une réduction d'impôt sur les sociétés en faveur des PME qui emploient au moins 20 salariés au cours de l'exercice pour lequel la réduction d'impôt est sollicitée et dont les dépenses de personnel, à l'exclusion de celles des dirigeants, ont augmenté d'au moins 15 % au cours de chacun des deux exercices précédents.

LE DISPOSITIF EN FAVEUR DES JEUNES ENTREPRISES INNOVANTES

L'aide aux projets des jeunes entreprises innovantes créée par la loi de finances pour 2004, confère aux jeunes PME innovantes un certain nombre d'avantages fiscaux et d'exonération de cotisations sociales. L'entreprise est une jeune entreprise innovante (JEI) si elle remplit cinq conditions (avoir moins de 8 ans, être une PME au sens du droit communautaire 20 ( * ) , être indépendante, ne pas être issue d'une restructuration ou d'une concentration, engager des dépenses de R&D représentant au moins 15 % des charges fiscalement déductibles).

Dans la limite de 200 000 euros par période de 36 mois, les avantages fiscaux consistent en :

- une exonération d'impôt sur les bénéfices sur cinq exercices (exonération totale pendant les trois premiers exercices bénéficiaires puis exonération partielle de 50 % pendant les deux exercices suivants) ;

- une exonération d'imposition forfaitaire annuelle (IFA) pendant la période où l'entreprise remplit les cinq conditions ;

- une exonération de taxe foncière et/ou de taxe professionnelle, sur décision des collectivités locales concernées, pendant sept ans.

L'exonération de cotisations sociales patronales s'applique aux rémunérations versées aux salariés participant à la recherche (chercheurs, techniciens, gestionnaires de projets de R&D, juristes chargés de la protection industrielle, personnels chargés des tests pré-concurrentiels) ainsi qu'aux mandataires sociaux participant à titre principal au projet de recherche) et porte sur les cotisations patronales d'assurance maladie, maternité, invalidité, vieillesse, allocations familiales, accidents du travail et maladies professionnelles.

Le dispositif comporte enfin des avantages pour l'investisseur dans une jeune entreprise innovante : exonération d'imposition sur les plus-values de cession des titres de la jeune entreprise innovante subordonnée à une obligation de conservation des titres pendant trois ans.

Les deux dispositifs ont par ailleurs en commun de faire bénéficier d'un remboursement anticipé de la créance de crédit d'impôt recherche (CIR).

* 16 Fonds d'investissement de proximité (FIP), ainsi que des fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) ou des fonds commun de placement à risques (FCPR).

* 17 Valeo (équipementier automobile), Daher (équipementier aéronautique, nucléaire et de défense), Farinia Group (transformations de matériaux), Led to Lite (systèmes d'éclairage haute luminosité), 3S Photonics (composants optoélectroniques pour réseaux télécoms), Gemalto (sécurité numérique), Nexans (industrie du câble), Meccano (fabrication de jouets), Frey Nouvelles Energies (énergies renouvelables), Technip (solutions techniques pour l'industrie du pétrole et du gaz).

* 18 Trèves (textiles automobiles), Michel Thierry (textile et cuir automobiles), Savoy International (mécatronique et connectique automobile), F.S.D. (emboutissage), Electropoli (traitement de surface), Mécaplast (équipements plastiques pour l'automobile), Sora composites (matériaux composites) et Delfingen (protection des faisceaux électriques et électroniques).

* 19 Grâce à un fonds dédié, le Fonds de consolidation et de développement des entreprises (FCDE).

* 20 Effectif < 250 salariés, chiffre d'affaires <50 millions d'euros ou bilan < 43 millions d'euros.

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