INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de finances pour 2010 est structuré autour de trois axes principaux.

En premier lieu, dans la continuité de la loi de finances rectificative du 4 février 2009, il fait des collectivités territoriales, qui réalisent près des trois quarts de l'investissement civil public, les principales actrices de la sortie de crise.

Deuxièmement, il pose les jalons d'une refonte globale de la fiscalité locale, la suppression de la taxe professionnelle n'étant que la première étape de ce mouvement d'ensemble.

Enfin, s'inscrivant dans la perspective pluriannuelle 2009-2012, il maintient l'association des collectivités territoriales, déjà peu dépensières et bien gérées par leurs élus, à l'effort d'assainissement des finances publiques en reconduisant le dispositif d'« enveloppe normée » mis en oeuvre depuis 2008.

Cet environnement impose à l'Etat de collaborer, de manière toujours plus étroite, avec les collectivités territoriales pour l'élaboration des réformes qu'il entend mener. Prôné par votre rapporteur dans son dernier avis budgétaire, le renforcement de cette collaboration doit passer par des « enceintes de dialogue » ouvertes et transparentes, qui permettent aux représentants des collectivités territoriales d'être non seulement consultés et informés, mais aussi écoutés et entendus par le pouvoir exécutif.

Ce n'est qu'à cette condition que les vives inquiétudes des associations d'élus locaux, qui se sont notamment exprimées à l'occasion des réflexions sur la suppression de la taxe professionnelle, pourront être effectivement prises en compte, et que les nouvelles responsabilités conférées aux collectivités territoriales dans la maîtrise des dépenses publiques pourront apparaître dans leur pleine légitimité.

Dans cette période de changements profonds, il incombe en outre aux Assemblées de faire en sorte que les principes de libre administration des collectivités territoriales, d'autonomie financière et de péréquation soient sans cesse rendus plus effectifs. La mission constitutionnelle du Sénat, représentant des collectivités territoriales de la République, l'appelle à être particulièrement attentif à ces éléments.

Ce contexte doit également pousser le Parlement à garantir qu'il n'y ait pas de déconnexion entre le présent projet de loi de finances, qui constitue le fondement de la modernisation des finances locales, et les projets de loi relatifs à la réforme des collectivités territoriales, dont la commission des lois est saisie et dont le Sénat aura prochainement à connaître. Ces deux aspects ne sauraient être séparés, sous peine de mettre à mal la cohérence, l'unité et la solidité de notre organisation territoriale.

I. UNE MISSION QUI RETRACE IMPARFAITEMENT L'EFFORT FINANCIER DE L'ÉTAT EN FAVEUR DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représente que très partiellement l'effort de l'Etat en faveur des collectivités territoriales. Ce manque de lisibilité et d'exhaustivité, dû aux lacunes de la nomenclature prévue par la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF), a été continûment souligné par votre rapporteur dans ses précédents avis budgétaires.

En effet, les concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales sont d'une extrême diversité et sont, en conséquence, éclatés entre plusieurs missions : il convient de distinguer les crédits budgétaires, concentrés pour la plupart au sein de la présente mission et dont le poids reste marginal, des autres sources de financement étatique de l'action locale.

On assiste ainsi à une marginalisation des crédits budgétaires, et donc de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » , au profit des prélèvements sur recettes, des avances et des transferts de fiscalité.

A. LA MARGINALITÉ QUANTITATIVE DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES

1. Les dotations budgétaires inscrites au sein de la mission « Relations avec les collectivités territoriales »

(a) Une mission limitée en volume

La mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne comprend que les seules dotations budgétaires inscrites au budget du ministère de l'Intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales ; celles-ci sont relativement limitées en volume, notamment lorsqu'elles sont mises en regard avec l'effort global de l'Etat en faveur des collectivités. Ainsi, le projet de loi de finances (PLF) pour 2010 fixe leur montant total à 2,541 milliards d'euros, ce qui représente moins de 3% des concours de l'Etat aux collectivités territoriales , hors dégrèvements et hors fiscalité transférée.

Ces dotations sont réparties en quatre programmes : les trois premiers répondent à une logique organique et détaillent les concours financiers versés à chaque catégorie de collectivité territoriale ; le quatrième, quant à lui, rassemble les concours spécifiques versés à certaines collectivités et les coûts de fonctionnement courant, d'informatique et d'immobilier de la direction générale des collectivités locales (DGCL).

- Les crédits du programme 119 , consacré aux « concours financiers aux communes et groupements de communes » , représentent 822,6 millions d'euros en autorisations d'engagement et 775, 9 millions d'euros en crédits de paiement. Ces crédits financent deux types de dotations, distribuées entre les deux actions du programme.

La première action, intitulée « Soutien aux projets des communes et groupements de communes », vise principalement à favoriser l'investissement local via l'attribution de subventions par l'Etat ; elle regroupe la dotation globale d'équipement (DGE), la dotation de développement rural et la dotation de développement urbain.

Cette action permet en outre aux maires d'exercer pleinement les compétences qui leur sont déléguées en vertu de leur statut d'agents de l'Etat : une dotation vient ainsi compenser, de manière forfaitaire et pour les seuls citoyens résidant hors du territoire de la commune concernée, les coûts engendrés par la délivrance de titres sécurisés dans les 2 000 mairies volontaires.

L'action n° 2 « Dotation générale de décentralisation » (DGD) reprend, quant à elle, une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des communes et de leurs groupements résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences. Y figurent également les concours particuliers, visant à compenser des charges spécifiques -comme, par exemple, les charges relatives à l'élaboration des documents d'urbanisme.

- Les crédits du programme 120 « Concours financiers aux départements » (493,4 millions d'euros en autorisations d'engagement et 491,2 millions d'euros en crédits de paiement) correspondent à deux dotations : l'action n° 1 « Aides à l'équipement des départements » contient les crédits dédiés à la DGE des départements 1 ( * ) , tandis que l'action n° 2 est spécifiquement consacrée à la DGD.

- Les crédits du programme 121 « Concours financiers aux régions » s'élèvent, dans le PLF 2010, à 892,5 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement. Depuis l'inscription, dans le PLF pour 2008, de la dotation régionale d'équipement scolaire au sein des prélèvements sur recettes afin d'en simplifier et d'en agréger le mode de calcul, ce programme n'est plus composé que d'une action unique , contenant elle-même une seule dotation, la DGD.

- Enfin, le programme 122 « Concours spécifiques et administration » (358,1 millions d'euros en autorisations d'engagement et 349,9 millions d'euros en crédits de paiement) comporte quatre actions fortement diversifiées et hétérogènes.

L'action n° 1 « Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales » reprend les subventions qui visent à soutenir les collectivités territoriales touchées par des évènements exceptionnels. Elle a, depuis le 1 er janvier 2009, été élargie pour inclure les aides versées aux communes concernées par les restructurations de la Défense.

L'action n° 2 « Administration des relations avec les collectivités territoriales », qui ne représente que 0,6% des crédits inscrits dans le présent programme, regroupe les crédits d'investissement et de fonctionnement alloués à la DGCL pour assurer la répartition des dotations et le suivi du cadre réglementaire auquel les collectivités sont soumises.

L'action n° 3 « Dotation générale de décentralisation » regroupe les crédits versés aux différentes catégories de collectivités pour compenser des transferts de charges particulières (crédits du concours particulier de la DGD relatif aux autorités organisatrices des transports urbains ; crédits de concours aux bibliothèques municipales et aux bibliothèques départementales de prêt ; crédits du concours pour les ports maritimes décentralisés ; crédits du concours pour les aérodromes civils).

L'action n° 4 « Outre-mer » regroupe, quant à elle, cinq dotations destinées à la Nouvelle-Calédonie, à Mayotte et à la Polynésie française.

MISSION « Relations avec les collectivités territoriales »

Programme
« Concours financiers
aux communes et
aux groupements
de communes »

Programme
« Concours financiers aux départements »

Programme
« Concours financiers
aux régions »

Programme
« Concours spécifiques
et administration »

Actions :

Actions :

Actions :

Actions :

- Soutien aux projets
des communes et des groupements de communes

- Dotation générale
de décentralisation

- Aides à l'équipement
des départements



- Dotation générale
de décentralisation

- Dotation générale
de décentralisation

- Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales


- Administration
des relations avec les collectivités territoriales

- Dotation générale de décentralisation

- Dotation outre-mer

Entre 2009 et 2010, sous l'effet de diverses mesures de transfert et de changement de périmètre, les crédits de la mission augmentent « optiquement » de 4,9%.

Ce phénomène résulte d'un double mécanisme :

- poursuivant le mouvement engagé par le PLF 2009, le périmètre de la mission a été élargi pour répercuter le recentrage du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, impulsé par la révision générale des politiques publiques. En conséquence, la mission inclut désormais certaines dotations qui figuraient auparavant dans la mission « Outre-mer », comme la compensation des transferts des services de l'inspection du travail en Polynésie française ;

- certaines dotations ont été massivement renforcées : la dotation forfaitaire accordée aux communes pour la délivrance de titres sécurisés augmente de près de 200 % entre 2009 et 2010, tandis que le montant de l'aide versée aux collectivités concernées par le redéploiement territorial des armées est doublé.

Ainsi, à périmètre constant, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » n'augmentent que de 1,5 %.

2. Des crédits budgétaires éparpillés

(a) Le cas particulier de la DGD relative à la formation professionnelle

Au sein des crédits budgétaires contribuant à l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales, il faut également compter la dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle. Celle-ci correspond à la compensation, auprès des régions, des transferts de compétences en matière de formation professionnelle intervenus, de manière progressive, depuis 1983.

Comme en 2009, les crédits relevant de cette dotation sont inscrits au budget du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, au sein de la mission « Travail et emploi » . Leur montant est porté à 1,712 millions d'euros, ce qui correspond, à périmètre constant, à une augmentation alignée sur le taux d'inflation prévisionnel (c'est-à-dire de 1,2 %).

(b) Des subventions ministérielles aux collectivités territoriales éparpillées entre plusieurs missions

Les subventions aux collectivités territoriales des autres ministères sont principalement issues de cinq missions :

- « Ville et logement » ;

- « Culture » ;

- « Outre-mer » ;

- « Écologie, développement et aménagements durables » ;

- « Politique des territoires ».

Leur montant total est évalué à 1,8 milliard d'euros -soit moins de 2% de l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales.

* 1 Pour mémoire, on rappellera que, depuis 2008, la dotation départementale d'équipement des collèges a été transformée en prélèvement sur recettes et n'apparaît donc plus dans le présent programme.

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