C. PATRIMOINE MONUMENTAL : DES MOYENS PRÉSERVÉS

1. Des crédits stables

L'action n° 1 « Patrimoine monumental », qui représente 45,4 % des moyens destinés au programme 175 , bénéficie d'une très légère hausse de ses crédits en CP. Ils s'élèvent à 345 millions d'euros en AE en 2014 (contre 348,6 en 2013) et à 332,1 millions d'euros en CP (contre 329,3 millions en 2013). Cette évolution doit toutefois être analysée en tenant compte de la budgétisation de la fraction de taxe sur les jeux en ligne affectée au CMN, à hauteur de 5 millions d'euros, évoquée en introduction. Une fois cette hausse retranchée, c'est une très légère baisse des crédits qui est observée. On peut donc davantage parler de stabilisation des crédits de l'action , ce dont les acteurs auditionnés se sont félicités.

Le tableau ci-après montre que le taux de déconcentration des crédits notifiés en faveur des monuments historiques a progressé ces dernières années dans les projets de loi de finances successifs. En revanche, ce taux a diminué au sein des crédits consommés.

Atteignant le seuil de 70 % depuis 2012, ces crédits déconcentrés ont permis de financer de nombreux projets en régions , comme l'indique le ministère de la culture et de la communication dans l'encadré ci-dessous.

Les chantiers en régions (2012-2013)

Dans la région Centre, un plan d'envergure de réfection des cathédrales a été mis en place sur plusieurs années. 2012 et 2013 ont vu se poursuivre les chantiers de rénovation des cathédrales de Tours, de Chartres et d'Orléans (pour un montant total de plus de 3 millions d'euros chaque année), projets qui vont se prolonger jusqu'en 2014.

En Picardie, les dernières tranches de restauration du transept nord, des trois travées correspondantes et des courettes sud de la cathédrale d'Amiens ont pu s'achever. Après des études en 2012 sur l'accessibilité et la mise à niveau des installations électriques de l'édifice, les travaux ont débuté et se poursuivront en 2014. À la cathédrale de Soissons, les travaux sur la sacristie, la mise en valeur du trésor et l'accessibilité de l'édifice ont pu commencer en 2013.

En Champagne-Ardenne, les très importants travaux de l'étage de la rose de la cathédrale de Reims ont débuté, pour un montant total de travaux de 3,9 millions d'euros dont 1,5 million d'euros de mécénat. Ils doivent se poursuivre en 2014. De même, les crédits ont pu être mobilisés à hauteur de 1 million d'euros pour les toitures de la cathédrale de Langres.

En Aquitaine, la restauration du portail royal de la cathédrale de Bordeaux pourra être inaugurée en septembre prochain.

Les crédits sur le patrimoine de l'État sont aussi mobilisés sur du patrimoine non religieux comme sur le phare de Cordouan où d'importants travaux en partenariat avec le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie vont pouvoir commencer dès la rentrée sous la maîtrise d'ouvrage de la DRAC.

En Bretagne, 800 000 euros ont été affectés à une première tranche de travaux pour l'accessibilité du château de Kerjean.

Les crédits affectés en régions aux monuments historiques permettent aussi de subventionner propriétaires privés et collectivités. En Bourgogne, l'État a maintenu un fort engagement auprès de collectivités comme la commune de la Charité-sur-Loire pour la restauration du Prieuré ou le conseil général de l'Yonne pour la restauration du château de Maulnes.

En Languedoc-Roussillon, des opérations comme la cristallisation des ruines du site archéologique de Lattes (800 000 euros), la restauration générale du pont de Céret en situation de péril (488 000 euros) ou la restauration de l'amphithéâtre de Nîmes inscrit au contrat de projet État-Région - CPER - (1,3 million d'euros) commencées en 2013, pourront se poursuivre en 2014.

Source : Ministère de la culture et de la communication
Réponse au questionnaire budgétaire

a) Développer la « culture de l'entretien »

Votre rapporteur pour avis est attentif aux crédits destinés aux monuments historiques (MH) qu'il convient de distinguer selon leur objet. Ainsi, comme l'indique le tableau ci-avant, si le montant global des crédits de paiement affectés aux MH augmente, les crédits d'entretien passent de 55,3 millions d'euros en 2013 à 47,9 millions d'euros en 2014. Les crédits de restauration s'accroissent (234,5 millions en 2013 et 239,6 millions d'euros pour 2014).

Les représentants des associations de défense du patrimoine regroupées sous le nom de « G8 » s'inquiètent tout particulièrement de la politique d'entretien du patrimoine monumental. Les crédits d'entretien représentent 15,3 % du total des crédits destinés aux monuments historiques. Leur demande est souvent adossée à des projets de restauration considérés comme prioritaires. Les associations demandent que la France développe une « culture de l'entretien » des monuments historiques, comme c'est le cas par exemple en Belgique afin que la restauration ne soit pas considérée comme la seule politique légitime pour formuler une demande de subventions et que les propriétaires prennent conscience des enjeux liés à l'entretien de leur patrimoine.

En outre, le « G8 » regrette la disparition, en 2004, de la ligne budgétaire autrefois dédiée au « petit patrimoine rural » non protégé compte tenu des besoins d'entretien de ce dernier. L'aide de la Fondation du patrimoine ne suffisant pas, ces associations s'interrogent sur des solutions telles que la création d'un fonds d'urgence pour le patrimoine non protégé.

b) Accompagner les propriétaires dans le changement

Cet exemple du petit patrimoine montre combien les propriétaires d'un patrimoine monumental ont besoin d'être accompagnés par l'État lors de modifications budgétaires, réglementaires ou législatives.

La question de la maîtrise d'ouvrage , réformée en 2009, est évidemment un axe majeur d'amélioration afin que l'État offre toute l'information et les outils nécessaires pour conseiller et guider au mieux les propriétaires - notamment les collectivités territoriales les plus petites - souvent démunis faute de moyens financiers ou humains suffisants. Cette question est abordée dans le détail en deuxième partie du présent rapport.

Par ailleurs, la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC) a publié, le 25 octobre 2013, un communiqué appelant une réforme des modalités d'application des aides de l'État en faveur du patrimoine rural , visant à moduler ces dernières en fonction de la capacité financière des communes propriétaires.

Enfin, l'article 17 du présent projet de loi de finances supprime le régime fiscal des immeubles non protégés au titre des monuments historiques mais bénéficiant d'un agrément fiscal (tout en conservant fort heureusement les dispositions propres au label délivré par la Fondation du Patrimoine). Cet agrément permettait le « sauvetage » de monuments en finançant des travaux urgents, dans l'attente d'une décision d'inscription au titre des monuments historiques. Si une mesure de simplification telle que la suppression de cette procédure d'agrément s'inscrit en toute logique dans la démarche globale de l'État de modernisation des politiques publiques, elle risque toutefois de créer un « vide » pour les propriétaires qui bénéficiaient d'un tel agrément jusqu'à aujourd'hui, mais n'ont pas encore achevé les travaux de restauration. Pour ces propriétaires, il aurait, par exemple, pu être utile de penser à une procédure accélérée d'étude du dossier de demande d'inscription afin de ne pas les placer dans une situation délicate au milieu d'une phase de travaux.

Ces divers exemples montrent que l'État ne doit pas oublier d'accompagner les propriétaires d'un patrimoine monumental dans le changement, ce qui ne nécessite pas systématiquement d'enveloppe budgétaire spécifique mais simplement la mise en oeuvre de procédures adaptées ou une meilleure information.

Il est, à ce titre, utile de rappeler qu'en février 2013, on comptait 43 196 immeubles protégés, dont 14 101 classés et 29 095 inscrits, ainsi que 260 000 objets mobiliers protégés. 53,6 % des propriétaires des immeubles protégés sont des personnes publiques, principalement des communes (50,2 %). 43,4 % sont donc des propriétaires privés, qui reçoivent selon les années, entre 10 et 20 % des crédits selon les informations transmises sur les dix dernières années. Tous ces propriétaires sont concernés par la double mission de la politique patrimoniale de l'État :

- protéger et conserver le patrimoine monumental ;

- recenser, étudier, mettre en valeur ce patrimoine et le faire connaître et visiter par le public le plus large.

2. Consommation des crédits : quelle évolution ?

Votre rapporteur pour avis analyse avec une attention toute particulière l'évolution de la consommation des crédits destinés au patrimoine monumental.

Les informations fournies par le ministère de la culture et de la communication sont particulièrement détaillées et permettent une analyse fine du taux de consommation des crédits. On peut en tirer plusieurs enseignements :

- de fortes disparités entre régions ;

- des évolutions importantes en fonction des années considérées ;

- une tendance globale à la baisse, puisque le taux de consommation du total des crédits déconcentrés est passé de 120 % en 2008 à 78 % en 2012.

Le ministère de la culture et de la communication a indiqué que le taux de consommation des crédits destinés aux monuments historiques devrait être proche de 100 % pour 2013. Il note qu'une dynamique est observée depuis le début de l'année 2013 puisque les crédits dégelés au titre de l'année 2012 ont pu être consommés au début de l'année 2013, en seulement 2,5 mois.

La direction générale des patrimoines attend toujours les arbitrages relatifs au dégel de 2013, soit 6 % des crédits. Votre rapporteur pour avis rappelle que le gel des crédits s'élèvera, en 2014, à 7 %.

Taux de consommation (%) des crédits de paiement (CP)

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication,
à partir des réponses du ministère de la culture et de la communication

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