C. LA POURSUITE DE LA BAISSE RÉGULIÈRE DES EFFECTIFS DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DES ENTREPRISES, EXIGEANT DE TROUVER DE NOUVELLES FORMES D'ORGANISATION

La direction générale des entreprises (DGE), dont la mission première est l'amélioration de la compétitivité des entreprises, devrait connaître en 2018 une nouvelle baisse de son plafond d'emplois, à hauteur de 23 emplois, dans la continuité des années précédentes, sur un effectif global de 1 514 emplois en administration centrale et dans les services déconcentrés. Sur la période 2012-2017, la diminution a été de 220 emplois environ.

Les crédits de paiement alloués aux actions n os 2 et 3 du programme, regroupant notamment les moyens d'action de la DGE, devraient diminuer respectivement de 1,70 % et de 7,56 %, là encore dans la continuité des années précédentes.

En 2017, la Cour des comptes a publié un référé dressant le bilan de la réorganisation administrative ayant conduit à la création de la DGE 27 ( * ) . Ce référé considère que cette réforme était pertinente, mais encore inaboutie, s'agissant en particulier de l'ancrage territorial des services déconcentrés.

Selon les magistrats de la Cour, entendus par votre rapporteur, cette réforme a largement permis de faire de la DGE une direction « stratège », qui suit de façon transversale tous les types d'entreprises et tous les facteurs de compétitivité et veille à l'amélioration de l'environnement des entreprises, dans la plupart des secteurs d'activité.

La réforme est encore inachevée selon la Cour des comptes, en raison d'une expertise sectorielle jugée inégale - en particulier sur la connexion entre industrie et services - et du fait aussi que d'autres ministères sont en charge de certains secteurs industriels, notamment le ministère de la transition écologique et solidaire pour le secteur de l'énergie, autrefois rattaché au ministère de l'économie. Dans ce contexte, le poids interministériel de la DGE resterait insuffisant. Dans la durée, les crédits d'intervention de la DGE ont été très largement amputés, parallèlement au développement de la concurrence d'autres acteurs, y compris au niveau local, et d'autres dispositifs mobilisant les fonds publics , évolution ayant largement dépossédé la DGE de ses responsabilités en matière de politique économique (Bpifrance, commissariat général à l'investissement 28 ( * ) , régions...). Pourtant en baisse constante, les effectifs de la DGE en administration centrale sont encore jugés trop élevés par la Cour, en raison de ceux consacrés à des tâches de gestion de certains corps ne relevant pas de son rôle stratégique 29 ( * ) . Des rationalisations de l'organigramme de la DGE sont encore à faire, notamment pour renforcer la transversalité. De plus, le partage des rôles entre DGE et direction générale du Trésor vis-à-vis des entreprises reste flou selon la Cour.

S'agissant des liens de la DGE avec les territoires, sujet d'étude de votre rapporteur, la Cour considère que la DGE est « insuffisamment ancrée dans les territoires », alors même qu'elle dispose de services déconcentrés avec les pôles 3 E des DIRECCTE. Les effectifs de la DGE au sein des DIRECCTE, structures non stabilisées de simple juxtaposition de missions et d'équipes selon la Cour, sont très minoritaires, notamment par rapport aux effectifs du ministère du travail, de sorte que les enjeux de la DGE sont moins bien pris en compte. De plus, les pôles 3 E ont représenté les deux tiers des réductions d'effectifs dans les DIRECCTE depuis 2010, selon la Cour, qui estime que la DGE a nettement privilégié ses effectifs en administration centrale dans le cadre des suppressions d'emplois qu'elle a connues année après année. Les crédits d'intervention délégués par la DGE au niveau déconcentré ont disparu, pesant sur la légitimité de ses agents vis-à-vis de leurs interlocuteurs. Les relations de la DGE avec les DIRECCTE sont jugées insuffisantes, alors même que celles-ci ont pour triple mission de décliner et faire connaître localement les politiques nationales, de permettre à la DGE de mieux connaître le tissu économique local en allant à la rencontre des entreprises 30 ( * ) et d'accompagner les entreprises en difficulté ou, au contraire, en croissance 31 ( * ) . La Cour souligne les « incertitudes » résultant pour la DGE de l'évolution de la répartition des compétences entre les régions, dont le niveau d'expertise s'accroît, et l'État en matière de développement économique. La DGE souscrit à la nécessité de renforcer ses liens et ses échanges avec les DIRECCTE, dont les agents étaient autrefois plus autonomes, en raison des crédits d'intervention qu'ils pouvaient gérer localement.

Aussi votre rapporteur estime-t-il que la contrainte de la baisse des effectifs déconcentrés de la DGE, dans un contexte de montée en puissance des régions sur le champ économique et de dynamisme des autres acteurs, conduira inéluctablement la DGE à une profonde réorganisation de ses services en région, conduisant votre rapporteur à s'interroger sur leur maintien même. Prolongeant la réflexion de la Cour, il juge nécessaire de renoncer aux missions décentralisées, plutôt que d'entretenir des doublons entre les DIRECCTE, en repli, et les autres acteurs, plus dynamiques et disposant de crédits.

Les magistrats de la Cour entendus par votre rapporteur ont indiqué qu'un suivi des recommandations formulées dans ce référé devrait être assuré en 2018.

Enfin, le 20 novembre 2017, le Premier ministre a présenté la stratégie industrielle du Gouvernement . Celle-ci comporte notamment la création d'un nouveau fonds pour l'innovation et l'industrie, destiné à soutenir l'émergence et le développement d'innovations de rupture. Cet outil s'ajouterait à ceux déjà existants en matière de soutien à l'innovation (subventions, prêts et garanties gérés par Bpifrance, dispositifs fiscaux et notamment crédits d'impôt, dispositif de la jeune entreprise innovante, bourse « French Tech » gérée par Bpifrance, outils régionaux divers, appels à projets, prêts divers, fonds...). La création d'une mission d'évaluation sur les aides à l'innovation a d'ailleurs également été annoncée. Votre rapporteur ne peut que souscrire à l'idée de rationaliser le foisonnement des dispositifs existants. Ont également été annoncées la refonte du conseil national de l'industrie 32 ( * ) , pour renforcer son rôle stratégique, et la redéfinition de la cartographie des filières industrielles spécialement soutenues par l'État au niveau national, au travers aujourd'hui de 14 comités stratégiques de filières sous la responsabilité du conseil national.

Ainsi, les trois chantiers à venir de la DGE, tels que son directeur les a présentés en audition à votre rapporteur, sont la redynamisation de la politique de filières, les nouvelles initiatives en matière d'investissements (fonds pour l'innovation et l'industrie, grand plan d'investissement intégrant le troisième volet du programme des investissements d'avenir), ainsi que l'élaboration du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE).

En septembre dernier, la DGE a lancé son nouveau plan stratégique « Cap numérique », visant une appropriation complète des enjeux numériques dans tous les secteurs et une dématérialisation de toutes ses procédures et ses outils de travail et de communication.


* 27 Ce référé est consultable à l'adresse suivante :

https://www.ccomptes.fr/fr/publications/la-direction-generale-des-entreprises

* 28 Service du Premier ministre, le commissariat général à l'investissement est chargé de la mise en oeuvre du programme d'investissements d'avenir (PIA).

* 29 Gestion des corps de fonctionnaires de La Poste et de France Télécom et gestion des corps techniques du ministère de l'industrie, dont les ingénieurs des mines. Si la première pourrait être transférée à une autre administration, la conservation de la seconde est jugée stratégique par la DGE.

* 30 L'objectif fixé par la DGE à ses services déconcentrés est de rencontrer 7 200 entreprises par an.

* 31 Rôle notamment des commissaires au redressement productif, pour les premières, et des référents uniques à l'investissement, pour les secondes.

* 32 Décret n° 2017-1581 du 17 novembre 2017 modifiant le décret n° 2010-596 du 3 juin 2010 relatif au conseil national de l'industrie.

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