C. L'INSTAURATION D'UN CLIMAT DE CONFIANCE DANS LA PERSPECTIVE DE L'OUVERTURE À LA CONCURRENCE : UN IMPÉRATIF

1. Un manque de visibilité quant au cadre de l'ouverture à la concurrence

Alors que plusieurs régions ont d'ores et déjà annoncé l'ouverture à la concurrence de leurs services conventionnés et que l'ouverture à la concurrence des services librement organisés (SLO) est prévue le 12 décembre 2020, certains potentiels nouveaux entrants ont été touchés de plein fouet par la crise sanitaire, ce qui devrait retarder leur arrivée. La DGITM estime que les nouveaux opérateurs pour les SLO sont plutôt attendus pour le 2e trimestre 2021. D'après l'Afra, les entreprises ont été contraintes de procéder à des choix dans leurs réponses aux appels d'offres.

Dans ce contexte déjà fragile, le rapporteur regrette que l'examen du PLF 2021 se déroule alors que les négociations relatives à l'actualisation du contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau sont encore en cours . Le contrat 2017-2026 aurait dû, aux termes de l'article L. 2111-10 du code des transports, être actualisé en 2020. En raison du retard pris, le ministre chargé des transports a indiqué qu'il ne serait sans doute publié qu'à l'été 2021 . Or le contrat de performance est un document stratégique dans le contexte de l'ouverture à la concurrence , puisqu'il détermine notamment les objectifs de performance, de qualité et de sécurité fixés à SNCF Réseau, les orientations en matière d'exploitation, d'entretien et de renouvellement du réseau, mais aussi et surtout la trajectoire financière de SNCF Réseau , en particulier les moyens qui lui sont alloués ainsi que les principes qui seront appliqués pour la détermination de la tarification de l'infrastructure et l'évolution prévisionnelle des redevances d'utilisation de l'infrastructure .

Ensuite le cadre social n'est pour l'heure pas achevé. Ni les salariés ni les entreprises n'ont donc de visibilité dans la perspective de l'ouverture à la concurrence. Auditionnés par le rapporteur, plusieurs syndicats ferroviaires ont fait part de leurs inquiétudes sur ce point . D'une part, le décret de décembre 2018 15 ( * ) relatif au transfert des contrats de travail des salariés en cas de changement d'attributaire d'un contrat de service public de transport ferroviaire de voyageurs n'a pas encore été modifié à la suite de l'annulation des II et III de l'article 5 par le Conseil d'État 16 ( * ) . Interrogée, la DGTIM a indiqué que le décret modificatif était en cours d'examen au Conseil d'État. D'autre part, à la suite de l'échec des négociations sur l'accord sur les classifications et les rémunérations, le Gouvernement n'a pas encore publié l'ordonnance prévue à l'article 167 de la LOM 17 ( * ) .

En outre, le cadre réglementaire de l'ouverture à la concurrence n'est toujours pas prêt. Les projets de décrets relatifs au transfert de gestion des petites lignes, d'une part et au transfert de gestion de certaines gares, d'autre part, ont fait l'objet de critiques de la part de l'ART, notamment sur le champ d'application de chacun des dispositifs prévus et sur l'absence d'articulation entre ces derniers.

En définitive, la commission considère que la réussite de l'ouverture à la concurrence repose en grande partie sur la capacité à instaurer un fort climat de confiance entre les différentes parties prenantes (État, régions, salariés, SNCF Réseau et entreprises ferroviaires) . Cette capacité dépend notamment des modalités d'actualisation du contrat de performance, de l'achèvement du cadre de l'ouverture à la concurrence et des garanties supplémentaires qui pourront être apportées quant à l'indépendance du gestionnaire d'infrastructure.

2. Donner à l'ART les moyens d'exercer la plénitude de ses missions

Dans ce contexte d'incertitudes et de mutations, le régulateur joue un rôle déterminant . Pour autant, et alors que le champ des secteurs régulés par l'ART s'est considérablement étendu 18 ( * ) , ses moyens n'ont pas été augmentés à due proportion. La subvention pour charges de service public (SCSP) de l'ART prévue pour 2021, semblable à celle de 2020, s'élève à 11,4 millions d'euros . Les charges de personnel constituent le principal poste de dépense de l'autorité. Le plafond d'emplois de l'autorité, fixé par l'article 40 du PLF, est de 101 ETP , soit 7 ETP supplémentaires par rapport à l'année précédente.

Or, malgré cette augmentation, les moyens humains de l'ART restent insuffisants au regard des besoins considérables de chacun des secteurs régulés . C'est pourquoi la commission, sur proposition du rapporteur, a adopté un amendement n° II-97 visant à augmenter le plafond d'emploi de l'autorité de 6 ETP et un amendement de crédits n° II-98 augmentant la subvention pour charges de service public de l'autorité à due concurrence.


* 15 Décret n° 2018-1242 du 26 décembre 2018 relatif au transfert des contrats de travail des salariés en cas de changement d'attributaire d'un contrat de service public de transport ferroviaire de voyageurs.

* 16 Décision n° 428422 du 28 février 2020 du Conseil d'État statuant au contentieux.

* 17 Cet article prévoyait un délai d'habilitation de 9 mois. L'article 14 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 a prolongé de quatre mois ce délai.

* 18 En 2019, le champ de compétences de l'Autorité s'est élargi à la régulation des redevances aéroportuaires et des activités de gestionnaire d'infrastructure et des activités de sûreté exercées par la RATP en Île-de-France et à l'ouverture des données de mobilité et de billettique.

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