TRAVAUX DE LA COMMISSION

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I. Audition, en commun avec la commission des lois, de M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé

(Lundi 10 janvier 2022)

M. François-Noël Buffet , président de la commission des lois . - Monsieur le ministre, avec Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales, nous vous souhaitons la bienvenue au Sénat pour aborder ce texte important sur le passe vaccinal. La commission des affaires sociales et la commission des lois se réuniront à l'issue de votre audition, et l'examen en séance publique aura lieu demain à partir de 14 h 30.

Nous formons le voeu que le débat au sein de cette institution sénatoriale soit, comme de coutume, respectueux des positions des uns et des autres, apaisé et sérieux.

Je vais tout de suite vous donner la parole ; Mme Chantal Deseyne, rapporteur de la commission des affaires sociales, et M. Philippe Bas, rapporteur de la commission des lois, vous poseront ensuite leurs questions. Enfin, tous les sénateurs qui le souhaitent pourront intervenir. Le délai maximum pour cette audition est fixé à une heure trente.

Mme Catherine Deroche , présidente de la commission des affaires sociales . - Je n'allongerai pas nos débats par un propos liminaire. Je salue tous nos collègues qui participent à nos travaux en visioconférence. Après votre intervention, monsieur le ministre, je vous interrogerai sur les tests.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé . - Permettez-moi tout d'abord de vous souhaiter une excellente année 2022 !

Les débats qui s'invitent maintenant au Sénat, après nous avoir beaucoup occupés la semaine dernière à l'Assemblée nationale, portent sur le douzième projet de loi qui a trait à la réforme sanitaire, reflet de la vitalité de notre système démocratique et particularité française au sein de l'Union européenne. Nous l'assumons, car en deux ans, il a fallu plusieurs fois remettre sur le métier notre ouvrage. Les virus peuvent effectivement muter à tout moment, n'importe où ; tantôt, on croit avoir trouvé la martingale pour les freiner ou les faire disparaître, tantôt ils se rappellent à notre mauvais souvenir à travers des délétions sur le patrimoine génétique viral qui le rendent plus contagieux, plus dangereux, ou les deux à la fois, voire plus contagieux et moins dangereux comme c'est le cas du variant omicron.

Mais il est une constante : la coordination aux niveaux international et européen en vue d'adopter des mesures appartenant à un même arsenal. Partout autour de nous, ce sont désormais les règles du passe sanitaire, du passe vaccinal, ou des deux, qui sont en vigueur. Certains États voisins ont pris des mesures de freinage et de fermeture ayant un retentissement plus ou moins important sur le quotidien de leurs concitoyens. En France, nous avons fait le choix, hormis le télétravail qui est indispensable, de ne pas fermer plus tôt les bars, les restaurants et les établissements recevant du public, sous réserve des contraintes posées pour les grands rassemblements afin d'éviter le phénomène de « super-contamination ».

Quelle est la situation épidémique ? Nous faisons face à deux variants distincts. Le variant delta a progressé en France à la faveur de la fin de l'été, impactant chaque jour de plus en plus nos services de réanimation, qui comptent désormais 2 800 patients. Le nombre de contaminations n'a pas diminué ensuite, créant un plateau qui nous a mis en difficulté durant plusieurs semaines. En effet, le variant delta est particulièrement invasif et provoque des infections pulmonaires basses avec des syndromes de détresse respiratoire. Je le redis, les patients qui se trouvent en réanimation sont pour la plupart des personnes non vaccinées ou immunodéprimées dont le système immunitaire est devenu inopérant en raison d'une greffe ou d'une maladie très grave - lymphome, leucémie, etc . Je suis très prudent eu égard au nombre de tests réalisés au cours des derniers jours - 11 millions, sans compter les autotests -, et des remontées parfois difficiles en raison des jours fériés. Mais il semble manifeste que le variant delta ait désormais amorcé une diminution - elle était attendue -, peut-être par un phénomène de compétition avec le variant omicron plus contagieux, ou plus certainement du fait des mesures de télétravail que nous avons mises en place. Si elle est confortée, cette nouvelle serait évidemment rassurante et aurait des répercussions sur nos services de réanimation dans une dizaine de jours.

Le deuxième variant, omicron, est extrêmement contagieux, car on peut l'attraper même en étant vacciné et on peut le transmettre, mais deux fois moins que les non-vaccinés selon les scientifiques. Ce variant donne des formes pulmonaires plutôt hautes avec moins de détresse respiratoire ; il envoie donc moins les patients en réanimation. En revanche, il peut causer des syndromes fébriles et grippaux assez forts, entraînant une augmentation importante des hospitalisations, mais de plus courte durée. Les patients peuvent être jeunes - les hôpitaux comptent beaucoup de trentenaires -, non vaccinés, et avoir besoin d'oxygène durant trois ou quatre jours avant de pouvoir sortir. C'est pourquoi nous avons décidé de déployer massivement un relais de l'hôpital à domicile comme nous l'avons effectué lors d'une vague précédente, en lien avec le médecin traitant et les infirmiers, de manière à réduire la pression sur nos hôpitaux.

La poussée de ce variant omicron a été fulgurante partout, du Burundi au Canada, en passant par les pays européens - l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, etc . -, y compris ceux qui avaient été épargnés par delta. Cette flambée se poursuit quelles que soient les mesures de gestion ou de freinage mises en place. En France, 300 000 cas ont été diagnostiqués, chiffres hors de proportion par rapport à tout ce qu'on a connu depuis le début de la pandémie.

Heureusement, nous sommes très vaccinés, et ce variant omicron est moins dangereux. Quand va-t-il arrêter sa course folle ? Le modèle que nous suivons tous avec attention est l'Angleterre. Dans la région londonienne, là où ce variant a frappé en premier, il a commencé à baisser de manière assez rapide, comme en Afrique du Sud. Je me garderai d'établir un pronostic chez nous : d'une part, le nombre exponentiel des tests peut modifier les critères de comparaison d'une semaine sur l'autre ; d'autre part, les remontées comprennent les jours fériés. Nous verrons dans les prochains jours si nous atteignons un pic et si la baisse s'amorce ou si, comme avec le variant delta, nous sommes confrontés à un plateau, ce qui ne serait pas une heureuse nouvelle. La charge hospitalière s'élève à 21 000 malades ; nous travaillons pour que les patients puissent sortir plus tôt de l'hôpital.

Concernant la vaccination, vous le savez, 53 millions de Français ont reçu au moins une injection. Nous avons d'ailleurs battu la semaine dernière le record de primo-injections, avec 230 000 nouveaux vaccinés, et de prises de rendez-vous en vue d'une primo-injection. Je le redis à nos concitoyens : les centres de vaccination vous accueilleront sans rendez-vous pour une première injection ! Nous continuons aussi les rappels, qui font l'objet de très nombreux rendez-vous. Il n'y a pas d'inquiétude à avoir, car vendredi soir, près de 3 millions de rendez-vous étaient disponibles partout en France.

Sur les tests, je répondrai avec plaisir lorsque Mme la présidente m'aura interrogé. Je ne peux passer outre ce que vivent certains Français. Nous avons choisi de ne pas fermer les écoles, sinon le moins possible. Cela va de pair avec la réalisation de tests réguliers chez les enfants lorsqu'ils sont cas contacts, et ce pour éviter leur éviction. Nous travaillons en temps réel avec le Conseil scientifique et la communauté enseignante. Jean-Michel Blanquer est totalement mobilisé afin d'adapter la situation ou de simplifier la vie des Français.

Le projet de loi concerne essentiellement la transformation du passe sanitaire en passe vaccinal. Un consensus, à l'unanimité moins deux voix, a été trouvé à l'Assemblée nationale afin de n'appliquer le passe vaccinal qu'aux jeunes âgés de 16 et 17 ans, et de maintenir le passe sanitaire pour les mineurs de 12 à 15 ans, pour les activités périscolaires et extrascolaires.

Des discussions serrées ont porté sur le contrôle d'identité. Nous y reviendrons en séance, car il est important de permettre aux dirigeants des établissements recevant du public de vérifier la concordance entre l'identité du passe et celle qui figure sur un document officiel. Je rappelle que le passe vaccinal ne s'appliquera pas pour les établissements sanitaires et médico-sociaux. Les proches de personnes fragiles, malades ou en fin de vie, pourront bien sûr les visiter, sous réserve du respect des règles sanitaires pour que les visiteurs ne transmettent pas le virus.

Nous renforçons les mesures de lutte contre les fraudes. Je l'ai dit à l'Assemblée nationale, le faux passe sanitaire tue, car un certain pourcentage de patients hospitalisés disposent d'un faux passe. Or le fait de laisser croire qu'ils sont vaccinés entraîne des conséquences sur les soins futurs de ces patients, car le pronostic et les critères de surveillance, d'intubation et de mise en coma sont différents. L'aggravation peut être subite, parfois en quelques minutes, en cas de non-vaccination.

Le projet de loi aborde l'isolement et la contention des malades en psychiatrie. Nous voulons renforcer le rôle du juge des libertés et de la détention conformément à la demande du Conseil constitutionnel.

Enfin, la situation sanitaire préoccupante à La Réunion et en Martinique justifie à nos yeux le maintien des mesures de freinage renforcées.

Mme Catherine Deroche , présidente . - Pouvez-vous clarifier la stratégie du Gouvernement en matière de tests ? Le nombre de tests explose - vous l'avez dit. La plupart sont remboursés à 100 %. Quel est le coût actuel de cette politique ? Les pharmacies sont saturées, le système d'information SI-DEP a du mal à suivre, avec 300 000 cas positifs par jour. Le contact tracing n'est plus qu'un lointain souvenir, et les familles sont mises à rude épreuve quand il faut tester les enfants trois fois par semaine dans ces conditions. À part empiler les records et illustrer les ravages d'une autoprescription remboursée à 100 %, quelle est la place du testing dans la stratégie de lutte contre l'épidémie ? Les tests doivent être suivis de mesures cohérentes. Est-ce le cas lorsque des soignants testés positifs sont autorisés à continuer leur activité lorsqu'ils sont asymptomatiques ?

M. Philippe Bas , rapporteur de la commission des lois . - Monsieur le ministre, je relève un paradoxe dans les débats de ces derniers jours : on parle exclusivement d'un passe vaccinal, qui est en réalité déjà entré très majoritairement dans les moeurs au travers du passe sanitaire. Par ailleurs, face à une flambée sans précédent de l'épidémie, et compte tenu des délais entre les différentes injections et de la date de promulgation de la loi, le passe vaccinal ne produira ses premiers effets qu'à partir de la fin du mois de février. Je ne fais ni excès d'indignité ni excès d'honneur au texte dont nous débattons. Il porte sur un sujet important, et nous sommes nombreux à penser que la vaccination est essentielle pour sortir de l'épidémie.

Mais ce projet de loi est-il pour autant un instrument susceptible de répondre à cette urgence sanitaire ? Ma réponse est plutôt non : il n'est en aucun cas l'alpha et l'oméga de la politique sanitaire face à l'irruption de cette nouvelle menace ; mais peut-être pourrez-vous me démentir.

Le Conseil scientifique vous a alerté sur le risque de désorganisation sociétale dont nous voyons les effets à l'école, à l'hôpital, lors des longues files d'attente pour réaliser les tests exigés des élèves et pour en obtenir le résultat. Je citerai aussi la saturation des plateformes de l'Assurance-maladie pour indiquer la conduite à tenir aux cas contacts, ou encore les craintes à propos de la disponibilité des services hospitaliers, mis à l'épreuve par l'afflux de malades et dont 20 % seraient actuellement fermés faute de personnel. D'un point de vue économique, le développement du télétravail a aussi ses limites. À l'école, un protocole est décrété la veille pour le lendemain et amendé au bout d'une semaine, et la diffusion de capteurs de CO 2 est beaucoup trop lente.

En ce qui concerne l'hôpital, a-t-on déjà prévu la mobilisation d'une réserve sanitaire ? Comment s'organiser pour faire face à l'afflux de malades ? Les informations que vous nous avez transmises sont corroborées par la majorité des médecins, mais le variant omicron a beau être moins grave, il affecte davantage de personnes.

Ce qui est en cause, c'est l'ensemble de la politique sanitaire face à l'épidémie et non simplement la transformation d'un passe sanitaire en un passe vaccinal.

Mme Chantal Deseyne , rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales . - Mon propos sera dans la suite logique de l'intervention de M. le rapporteur Philippe Bas. Au préalable, je rappelle que la commission des affaires sociales du Sénat a toujours pris ses responsabilités. Elle a toujours estimé, lorsque les circonstances l'exigeaient, que nous devions faire front commun aux côtés des scientifiques et des médecins. Si le passe vaccinal est jugé efficace pour réduire l'épidémie et ses conséquences, nous le soutiendrons.

Cependant, cette stratégie ne peut réussir que si la campagne vaccinale atteint réellement toute la population cible. Ma première question est simple : comment résorber les inégalités territoriales et sociales encore visibles en matière de vaccination en France ? Comment atteindre les non-vaccinés qui doutent et sont en marge des systèmes de soins ? Je pense, en particulier, au plus précaires de nos concitoyens, car le passe sanitaire ne s'applique pas au sein des différentes associations caritatives... Où est le fameux « aller vers » tant promu ? Quelle est votre action spécifique à destination des outre-mer où le faible taux de vaccination est mis en avant pour justifier le retour à l'état d'urgence ?

Le port du masque en extérieur a été suspendu courant 2021, au motif d'une faible efficacité scientifiquement constatée. Quelles données scientifiques justifient-elles aujourd'hui le retour du port du masque en extérieur ?

Dans le cas de la dérogation vaccinale après une contamination, quelle durée et quel niveau de protection les autorités sanitaires reconnaissent-elles ?

Concernant les immunodéprimés, la seule possibilité relève souvent malheureusement du traitement. Où en est la recherche ? De nouveaux traitements pourraient-ils être autorisés en accès précoce ?

Un mot, enfin, de l'article 1 er bis A visant à créer un régime de sanctions administratives applicables aux employeurs qui ne prendraient pas les mesures de prévention nécessaires pour limiter l'exposition à la covid. J suis assez réservée, car les entreprises ont été très actives, notamment en matière de télétravail. Sur quels critères se baserait l'inspection du travail pour prononcer les sanctions prévues ? Comment seraient appréciées les recommandations du Gouvernement sur le télétravail, qui ne sont pas des obligations ?

M. Olivier Véran, ministre . - Mme Catherine Deroche m'a interrogé sur notre stratégie en matière de tests. Nous avons un double objectif : ne pas paralyser le pays et ne pas laisser flamber l'épidémie. Et nous avons un impératif : répondre à la demande des Français en matière de test.

Il y a deux ans, on nous disait : vous ne testez pas assez. Aujourd'hui, commence à monter la petite musique selon laquelle nous testerions trop... Ce n'est pas parce que l'on trouve beaucoup que l'on teste trop, c'est parce que l'on trouve beaucoup que l'on teste beaucoup !

Notre politique en matière de tests est donc la plus ambitieuse possible afin que les Français puissent connaître les résultats de leur test dans les plus brefs délais, qu'ils puissent se faire tester gratuitement - sauf pour les non-vaccinés sans ordonnance - et partout. Je remercie, à cet égard, les personnels de santé qui réalisent les tests. Nous allons amplifier notre capacité de réponse à la demande en prenant plusieurs dispositions complémentaires.

Tout d'abord, nous permettrons aux pharmaciens d'installer plusieurs tentes devant leurs officines, voire de véritables barnums de dépistage. De la même manière, j'ai signé un arrêté permettant aux étudiants en biologie de troisième et de quatrième année de participer à la campagne de dépistage. Nous travaillons également tous azimuts pour qu'un maximum de pharmacies sur le territoire puissent tester et distribuer des boîtes d'autotests. Nos concitoyens, en particulier les parents d'élèves, ont des difficultés à trouver des autotests. Deux tiers des pharmacies en distribuent déjà. Notre objectif est que la totalité des pharmacies puissent bientôt en avoir à disposition.

Vendredi dernier, 6 millions d'autotests étaient en stock dans les officines, contre 3 millions la semaine précédente. Les pharmacies en ont commandé 11 millions pour le début de cette semaine afin de pouvoir répondre à la demande. Nous continuons à renforcer nos capacités de dépistage.

Vu le nombre de contaminations quotidiennes et le nombre de cas contacts hors norme enregistrés, il n'est pas étonnant que le nombre de tests réalisés soit extrêmement important. Néanmoins, si nous suivons la même trajectoire que le Royaume-Uni ou l'Afrique du Sud, nous devrions commencer à enregistrer une diminution des contaminations. Nous redescendrions alors à des niveaux de dépistage plus ordinaires.

Monsieur le rapporteur Philippe Bas, le passe vaccinal s'intègre-t-il dans l'urgence sanitaire ? Nous avons décidé d'emprunter la voie législative pour mettre en place de façon urgente les outils nécessaires plutôt que d'avoir recours aux arrêtés prévus par l'article L. 3131-1 du code de la santé publique, à l'exception notable des pouvoirs que vous nous avez conférés, à notre demande, dans la période dite « de risque sanitaire » pour pouvoir à tout moment prendre certaines dispositions. Je pense à la limitation des grands rassemblements, par exemple, ou au télétravail désormais obligatoire trois ou quatre jours par semaine. Pour le reste, nous avons décidé d'en référer au Parlement, ce qui prend un peu plus de temps...

M. Philippe Bas , rapporteur . - Comme la vaccination !

M. Olivier Véran, ministre . - Je l'ai dit en préambule, monsieur le rapporteur, avant même que le passe vaccinal ne soit adopté, ses effets sont visibles. Sa simple évocation n'a-t-elle pas fait bondir de 230 000 le nombre de primo-vaccinations dans notre pays, essentiellement des adultes ? À ce rythme, nous pourrions parvenir rapidement à une couverture vaccinale plus importante. De la même manière, il a suffi que le Président de la République évoque au mois de juillet dernier l'instauration d'un passe sanitaire pour que les rendez-vous enregistrent un bond. C'est d'ailleurs grâce à la création du passe sanitaire que nous sommes dans une situation moins inconfortable pour face à une vague de cette ampleur.

Le passe vaccinal n'est ni l'alpha ni l'oméga, mais c'est une mesure supplémentaire en cas de nouvelle vague. Quoi qu'il en soit, je le redis : nous nous passerons avec beaucoup de plaisir de tous ces outils le jour où nous ne serons plus sous la menace permanente d'un nouveau variant !

Je conteste formellement le chiffre de 20 % de lits fermés à l'hôpital. En revanche, oui, le secteur hospitalier enregistre tension et fatigue, notamment parce que les personnels n'ont pas récupéré les heures supplémentaires et que ceux qui souhaitaient démissionner avaient repoussé leur décision. Les soignants sont extrêmement courageux : 21 000 malades sont pris en charge dans les hôpitaux et 3 800 patients sont en réanimation à cause de la covid-19. Le nombre des déprogrammations a de lourdes conséquences sur la santé des Français. C'est pourquoi nous poussons à la vaccination.

Pour éviter le risque de désorganisation, nous avons mis en place des plans de continuité. J'ai évoqué tout à l'heure les prises en charge pré-hospitalières ou post-hospitalières. Nous sommes désormais capables de prendre en charge jusqu'à 15 000 patients avec de l'oxygène à domicile, contre 10 000 patients lors des vagues précédentes. Nous avons réactivé ce réseau pour pouvoir libérer des lits hospitaliers.

Sur la question des écoles, je ne m'exprimerai pas à la place du ministre de l'éducation nationale, même si je travaille main dans la main avec lui. Lors des vagues précédentes, avec un tel niveau de circulation du virus, la question de la fermeture des écoles aurait été posée. Mais le Président de la République a souhaité sanctuariser l'école et préserver l'éducation des enfants. Actons-le, les classes ont vocation à rester ouverte : seul un dépistage intensif, mais simplifié, nous permettra de tenir cet objectif.

Mme Chantal Deseyne m'a demandé comment résorber les inégalités sociales et territoriales en matière de vaccination. Tous les acteurs - élus locaux, associations, médecins, pharmaciens, kinés, sages-femmes, infirmiers - sont mobilisés dans les territoires pour convaincre les personnes non vaccinées de se faire vacciner. Peu d'entre elles, à présent, sont loin de tout ou marginalisées. La grande majorité des non-vaccinés sont informés, voire désinformés. D'autres n'ont pas confiance. Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai rencontré une personne qui aurait accepté un vaccin en comprimé ou en spray nasal, même à ARN messager, mais qui refuse de recevoir une injection. C'est pourtant exactement la même chose ! Sans parler de tous ceux qui, dans une sorte de délire collectif à l'échelle planétaire, considèrent que nous sommes des menteurs patentés...

En réponse à la question des masques en extérieur, je dirai que ce n'est ni la même vague ni la même contagiosité. Le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) avait d'ailleurs considéré en son temps que le port du masque en extérieur en cas de risque élevé s'avérait encore utile. Or, avec omicron, le risque est élevé partout.

Vous m'avez posé la question des traitements. Plusieurs médicaments ont vu leurs autorisations retirées ou très réduites, notamment l'Eli Lilly et le Regeneron, car ils ne sont pas efficaces sur le nouveau variant. Il y a dix jours, dans une tribune du Journal du dimanche, six présidents d'association appelaient le Président de la République à tout faire pour que les personnes immunodéprimées puissent avoir accès à l'Evusheld, commercialisé par AstraZeneca. J'ai été très sensible à cette tribune. Je rappelle que la France a été le premier pays européen à proposer ce traitement aux patients concernés. Plus de 2 500 personnes sont actuellement traitées par ce médicament grâce au dispositif d'accès précoce, mis en place par le Président de la République. Par ailleurs, 1 200 patients sont en cours d'inclusion.

La France ne dispose plus, à ce jour, d'alternative curative efficace face au variant omicron, mais nous attendons deux déploiements d'ici à la fin du mois, pour lesquels nous sommes très bien positionnés : le Paxlovid de Pfizer, qui est un traitement par voie orale, et le Sotrovimab, de GSK, qui sera administré à l'hôpital. D'autres traitements sont en cours de développement.

Vous m'avez interrogé sur l'inspection du travail. Même si Élisabeth Borne vous répondrait bien mieux que moi, il importe de ne pas avoir une grille d'analyse différente de l'échelle des sanctions. Nous sommes aujourd'hui dans un régime pénal, nous passerons à un régime administratif pour rendre la mesure plus opérante, ce qui n'en change pas l'esprit.

M. Bernard Jomier . - Lorsque nous vous avons auditionné au mois de novembre dernier, les chiffres que vous avez cités concernant la forte augmentation des primo-vaccinés n'étaient pas exacts. Cette fois, vos chiffres sont bons : la différence, c'est que vous parlez enfin d'obligation, mais sous forme déguisée, ce que je regrette. Oui, la parole du chef de l'État entraîne des changements d'attitude chez les Français. Ne regrettez-vous pas ce temps perdu ? Ne serait-il pas utile d'être francs et directs, et de poser le principe de l'obligation vaccinale ?

Les patients vaccinés en réanimation sont très largement des personnes immunodéprimées. Or elles ne bénéficient pas de la prise en charge des masques FFP2. Les patients atteints d'une affection de longue durée (ALD) peuvent, eux, se faire rembourser les masques chirurgicaux. Comptez-vous proposer à ces patients particulièrement fragiles des masques FFP2 ?

Un membre du conseil scientifique a affirmé ce matin que ce serait une erreur fondamentale de laisser circuler le virus sans contrôle. C'est pourtant ce que vous faites dans les écoles. Au mois de novembre, alors que le nombre de classes fermées augmentait, le ministre de l'éducation a même allégé le protocole. Quand appliquerez-vous une stratégie claire de réduction de la circulation du virus dans les écoles au lieu du chaos qui y règne actuellement ?

Mme Éliane Assassi . - Lutter contre l'épidémie suppose de prendre des mesures, notamment pour inciter nos compatriotes à la vaccination. Vous avez évoqué le cas d'une personne qui, sans être antivax, aurait préféré un vaccin par voie orale. Il y a donc encore matière à faire de la pédagogie et à convaincre !

En revanche, nous ne sommes pas favorables à la contrainte. Certes, le passe sanitaire a convaincu des milliers de nos citoyens de se faire vacciner, mais force est de constater que cela n'a pas empêché la propagation du virus, même si le variant omicron est moins dangereux que le variant delta. Nous nous interrogeons sur votre choix de transformer le passe sanitaire en un passe vaccinal, ce qui entravera les libertés.

Avez-vous un bilan précis de l'usage du passe sanitaire ? Nous sommes confrontés à une pandémie. Or seulement 50 % de la population mondiale est vaccinée. Ne serait-il pas temps que tous les États puissent avoir accès aux brevets ?

Mme Christine Bonfanti-Dossat . - L'année 2022 s'annonce aussi compliquée que 2021 : nous ne verrons probablement pas le bout de la crise sanitaire. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'interroge sérieusement sur la stratégie qui consiste à accélérer la vaccination dans les pays riches alors qu'il faudrait prioriser les pays pauvres où une très grande majorité de la population n'a pas reçu de première dose. D'après l'Organisation mondiale de la santé, si l'on veut reprendre le contrôle de cette pandémie, il faudrait que 70 % de la population de chaque pays soit vaccinée dans les six mois. Alors que le Président de la République règle ses comptes à « O.K. Covid » avec les non-vaccinés, alors que le Premier ministre évoque déjà la possibilité d'une quatrième dose, de plus en plus de doutes d'élèvent sur l'efficacité sanitaire du passe vaccinal. Ne pensez-vous pas que le plus urgent aujourd'hui, au lieu de vouloir accélérer la vaccination, comme vous le faites, serait de tout mettre en oeuvre pour vacciner le monde entier ?

M. Loïc Hervé . - J'aurais aimé vous interroger sur le protocole applicable dans les écoles et la désorganisation massive que nous connaissons ces jours-ci dans l'éducation nationale, ainsi que sur les conséquences économiques des modifications des règles du passe sanitaire en France sur le tourisme à l'égard de la clientèle étrangère dans la perspective des vacances de février, mais j'y reviendrai en séance.

Omicron déferle sur la France. Chaque jour, des centaines de milliers de Français, vaccinés ou non, sont contaminés. Triplement vacciné, j'en ai moi-même fait l'expérience la semaine dernière. Nous sommes tous témoins de ce qui se passe dans notre pays. À elle seule, cette réalité aurait dû nous démontrer l'inutilité sanitaire d'une grande partie des mesures privatives de liberté, au premier rang desquelles le passe sanitaire. Or, tel un mantra, vous continuez de répéter que l'objectif du passe, aujourd'hui sanitaire, demain vaccinal, est de créer des lieux sans contagiosité.

Devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, vous avez déclaré : « On va continuer de resserrer les mailles pour pouvoir garantir que les endroits recevant du public sont indemnes de gens potentiellement contagieux. » À mes yeux, le moment est venu de lever la plupart des restrictions aux libertés publiques et non de les renforcer. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement à l'article 1 er , qui visera non seulement à renoncer au passe vaccinal, mais aussi à supprimer le passe sanitaire.

Monsieur le ministre, pouvez-vous devant la commission des lois, composée de gens sérieux et rationnels, revenir sur cette affirmation selon laquelle le passe protégerait de la contamination ? À défaut de les transmettre à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui vous les a demandés à de nombreuses reprises, pouvez-vous communiquer au Parlement les éléments objectifs et chiffrés étayant vos affirmations ?

Mme Florence Lassarade . - Je relayerai l'inquiétude et l'épuisement des soignants libéraux, car il n'y a pas que le secteur hospitalier qui est en tension. Les infirmiers réalisent les autotests. Or le prix du matériel a quadruplé en deux ans, notamment les gants. Avez-vous l'intention d'accorder des aides au secteur ?

Je ne reviendrai pas la désorganisation en matière de test, en particulier en cas de contradiction entre les autotests, les tests PCR et les tests antigéniques. Quid de l'anticipation par la détection dans les stations d'épuration et les égouts ? Le réseau Obépine n'a-t-il pas permis de détecter quinze jours à l'avance les vagues précédentes ? Où en sommes-nous sur ce plan ?

On a beaucoup évoqué les capteurs de CO 2 et des purificateurs d'air, en particulier pour les endroits où la ventilation serait difficile. Certains pays les utilisent massivement. Pourquoi ne pas en équiper les écoles ?

Mme Esther Benbassa . - Est-il urgent de passer du passe sanitaire au passe vaccinal ? Nous ne disposons d'aucune donnée. Le Conseil constitutionnel devrait pouvoir être saisi de cette question. Je m'interroge également sur l'instrumentalisation de la parole médicale, qui crée de la panique et conduit indirectement à des restrictions de liberté.

Cette instrumentalisation est étonnante : le manque de personnel dans les hôpitaux ne date pas d'hier. Il convient de prendre d'autres mesures, notamment d'arrêter les tests pour les personnes sans symptômes. Il importe également de ne pas stigmatiser la partie de la population qui ne veut pas se vacciner. Tout cela aurait pu être réglé si le vaccin avait été rendu obligatoire. Nous sommes dans une sorte de crise dont on ne guérit pas. Une personne sur quatre est contaminée parmi les triples vaccinés. Il serait opportun d'envisager d'autres solutions pour renforcer les barrières et convaincre davantage, surtout en zones rurales. Mettons un terme à toutes ces mesures qui n'ont d'autre sens que d'éviter d'en arriver à une obligation vaccinale.

M. Olivier Véran, ministre . - J'ai parlé d'obligation vaccinale déguisée dans une interview. Je ne sais pas s'il s'agit d'une obligation vaccinale déguisée, mais c'est une formule qui me paraît plus efficace. En effet, qui dit obligation dit contrôle, et qui dit contrôle dit sanction. Or je ne connais aucun niveau de sanction capable de convaincre une personne qui considère que le vaccin est un poison. N'oublions pas, en effet, que les antivax ne sont pas une minorité parmi les gens que l'on cherche maintenant à atteindre.

Il existe une recommandation très claire en faveur des masques FFP2 pour les personnes souffrant d'immunodépression ; ils donnent lieu à un remboursement dans un certain nombre de situations. Je veillerai à ce que personne n'en soit privé pour des questions de coût.

En ce qui concerne les écoles, je le redis, notre objectif est de réduire la circulation du virus et de maintenir les écoles ouvertes. Il faut donc trouver le dispositif le plus à même de garder un oeil actif sur l'évolution de l'épidémie chez les enfants sans rendre les choses trop compliquées pour les parents. Un certain nombre d'entre se sont trouvés en difficulté en apprenant la veille au soir qu'un enfant de la classe était contaminé : comment trouver à J-0 un test antigénique ou PCR, surtout dans une période de vaste circulation de virus ?

Sans faire ici d'annonce, car il s'agit d'un travail interministériel, nous pourrions envisager de faciliter l'accès aux autotests dès le premier test. En tout état de cause, à chaque fois qu'un protocole doit être réajusté pour devenir encore plus opérationnel et vivable pour les Français, nous le faisons.

À la demande du Président de la République, la France est l'un des premiers pays contributeurs au monde pour les dons de doses aux pays pauvres. Les dons vers les pays les plus en difficulté ont été organisés très tôt. Tous les États n'ont en effet pas la chance de faire partie de l'Union européenne et d'avoir accès à des commandes massives auprès des laboratoires. Chaque Français a déjà donné au moins une dose à un pays pauvre. Nous atteindrons bientôt le chiffre de deux doses par Français. Il n'est pas incompatible de vacciner la France et de vacciner le monde. C'est une nécessité que de continuer de renforcer la politique vaccinale, notamment à destination des pays les plus pauvres. C'est une protection pour eux, mais c'est aussi protection pour nous : plus vite la planète sera vaccinée, plus nous aurons de chances de ne pas voir apparaître de nouveaux variants dangereux.

Le sénateur Loïc Hervé se situe dans l'opposition, aussi bien en ce qui concerne le passe sanitaire que le passe vaccinal. Le Conseil d'État a validé le passe sanitaire et maintenant le passe vaccinal, tout comme le Conseil scientifique. Certains pays ont fait le choix d'aller plus loin, notamment en Allemagne où a été mis en place un passe « 2G+ » nécessitant la présentation d'un test négatif en plus d'un schéma vaccinal complet. Monsieur le sénateur, vous souhaitez présenter un amendement pour supprimer le passe sanitaire : vous proposez donc, alors que nous sommes à 300 000 contaminations par jour, que les Français puissent aller au restaurant et dans les bars, se rassembler en milieu clos, manger, chanter, rire, danser en n'étant ni vaccinés ni testés... Advienne que pourra ! Très peu de pays au monde ont testé une telle solution : ceux qui s'y sont risqués ont généralement changé de cap assez vite quand ils se sont rendu compte que les vagues étaient trop hautes et que l'impact sanitaire était trop important sur leur population...

En ce qui concerne la détection du virus dans les eaux usées, nous continuons à travailler avec le réseau Obépine. Les données sont généralement conformes aux prévisions ; parfois elles sont à conforter d'un point de vue scientifique : par exemple, l'hiver dernier, on a constaté que la montée des eaux due aux pluies ou à la fonte des neiges diluait les traces du virus dans les eaux usées de manière plus importante que prévu, et qu'il devenait alors difficile de déterminer avec certitude le niveau de circulation de l'épidémie. Nous continuons à surveiller toutefois les traces de virus dans les eaux usées, notamment dans les périodes où il circule moins pour détecter des signes précoces de réémergence.

Madame Benbassa, vous dites qu'on instrumentalise la parole médicale, mais vous affirmez qu'il faut arrêter de tester les gens sans symptômes au motif que cela ne servirait à rien. Mais nul ne sait ! Je suis même convaincu du contraire ! Une personne peut ne pas avoir de symptômes et être contagieuse. Si on ne détecte pas les cas contacts, qui sont susceptibles de porter le virus sans le savoir et d'être contagieux, on risque d'accroître la diffusion du virus. Plus on teste, plus on découvre de cas et plus on protège les Français ! Réjouissons-nous donc plutôt d'être un pays qui teste beaucoup. Certes des personnes vaccinées peuvent attraper le virus, mais le vaccin c'est comme un double airbag : il n'empêche pas les accidents, mais sauve des vies s'ils se produisent. Si vous roulez à 170 kilomètres-heure, vous aurez quand même un accident...

Mme Valérie Boyer . - Je veux tout d'abord exprimer mon émotion face aux propos du Président de la République : nous sommes dans une assemblée sérieuse et nous sommes de manière quasi unanime pour le vaccin. L'obligation, c'est un autre débat. En tout cas, je ne crois pas à la contrainte, et encore moins à la vulgarité : il ne faut pas demander à la représentation nationale d'« emmerder » les Français, mais de chercher l'intérêt général. Il est de votre responsabilité d'expliquer votre stratégie aux Français. Le vaccin protège, certes, mais n'empêche pas la transmission du virus. Les Français voudraient savoir en quoi le passe vaccinal pourrait limiter la propagation du virus. Pourquoi vacciner des personnes qui ont un taux d'anticorps élevé ? Pourquoi aussi avoir continué de fermer des lits de réanimation à l'hôpital ? On évoque 5 700 suppressions de lits. Qu'en est-il ? Pourquoi ne pas avoir ouvert des services de réanimation mobiles ou temporaires ? Est-ce dû au manque de personnel ? Pourquoi autoriser le personnel soignant positif à travailler, mais pas les non-vaccinés ? Même si l'élection présidentielle approche, évitons les insultes et les invectives, contre-productives. Plutôt que de stigmatiser, il vous importe de rassurer les Français. Je vous appelle donc à apaiser et à maintenir la cohésion nationale.

Enfin, s'agissant du suivi des eaux usées, je veux saluer le remarquable travail des marins-pompiers de Marseille qui permet de surveiller l'évolution de l'épidémie.

Mme Laurence Cohen . - Vous avez souligné à juste titre l'engagement des personnels soignants, mais ils sont au bord de l'épuisement et leurs conditions de travail ne cessent de se dégrader. Il y a eu le Ségur de la santé, mais la situation n'est plus tenable. Il faut embaucher et modifier les conditions de travail. Comment comptez-vous rendre plus attractives ces fonctions ? Des revalorisations salariales ne suffiront pas. Quel plan de formation massif comptez-vous mettre en oeuvre ?

À l'article 1 er , vous prolongez les dispositifs d'accompagnement des médecins du secteur privé visant à compenser les déprogrammations d'actes de soins non urgents : pourquoi n'étendez-vous pas cette mesure au secteur public ?

M. Alain Richard . - La communauté scientifique semble partagée sur le niveau de réduction de la transmission du virus liée aux vaccins. Pourriez-vous nous dire quels sont les chiffres ?

Vous avez autorisé la vente d'autotests dans les grandes surfaces, mais il semble qu'il y ait des saturations et des problèmes de livraison.

Enfin, le système Covax est-il utilisé par d'autres pays développés ? Le taux de vaccination augmente-t-il dans les pays en voie de développement ?

M. Olivier Henno . - J'ai voté pour le passe sanitaire et voterai sans doute pour le passe vaccinal, mais j'ai néanmoins des doutes sur son efficacité : en fait, il change la donne pour ceux qui ne sont pas vaccinés et qui préféraient se faire tester à leurs frais. Je me demande donc si ce texte est utile ou s'il constitue un outil de communication ? Les antivax font le procès de la dangerosité du vaccin. On pourrait aussi évoquer sa relative inefficacité. Dans ma famille, tout le monde est vacciné et respecte les gestes barrières, mais tout le monde a été malade...

M. Olivier Véran, ministre . - Mais combien sont allés en réanimation ?

M. Olivier Henno . - Peut-on espérer la mise au point d'un vaccin plus efficace ?

M. Jean-Yves Leconte . - Qu'en est-il des personnes qui ont des contre-indications médicales à la vaccination : seront-elles privées du passe vaccinal ?

Pouvez-vous prendre l'engagement que nos concitoyens qui ont commencé ou eu un parcours vaccinal à l'étranger pourront obtenir un passe vaccinal en France ?

Enfin, l'article 2 prévoit que les services préfectoraux pourront avoir accès aux informations relatives au résultat des tests contenues dans SI-DEP : à quel usage ? S'agit-il de transmettre l'ensemble des informations ou simplement celles permettant de libérer de quarantaine les personnes après un test négatif ?

Mme Laurence Rossignol . - Nous avions adopté un amendement lors de l'examen de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire prévoyant que l'autorisation d'un seul parent suffisait pour vacciner les enfants. Cette mesure sera-t-elle toujours valable pour les enfants de 5 à 11 ans?

Chaque groupe politique a ses priorités. Pour les socialistes, l'enjeu n'est pas tant le passe vaccinal que l'obligation vaccinale. Serez-vous en séance demain pour que nous puissions avoir ce débat avec vous ?

Mme Françoise Gatel . - L'ouverture des écoles est une bonne chose, mais les familles ont du mal à tester leurs enfants trois fois par semaine. Pourquoi ne pas recourir davantage aux tests salivaires ? Sait-on combien de faux passes sanitaires sont en circulation ? Le dispositif de repentance encouragera-t-il les gens à se faire vacciner ? Enfin, quid des personnes qui développent un covid long et qui voient leur vie bouleversée : est-il envisageable de leur appliquer le régime des affections de longue durée (ALD) ?

Mme Victoire Jasmin . - Au mois de juillet dernier, j'évoquais les limites des vaccins et posais la question de la cinétique vaccinale. On parle aujourd'hui d'une quatrième dose. Cela montre bien que l'on peut s'interroger sur l'efficacité des vaccins. Les professionnels de santé qui ne sont pas vaccinés sont suspendus alors qu'ils pourraient simplement faire un test pour s'assurer qu'ils ne sont pas malades. Dans le même temps, les moyens humains manquent dans les hôpitaux. Est-il donc pertinent de se passer de ces professionnels ?

Mme Catherine Di Folco . - La pandémie illustre le malaise existant à l'hôpital. On peut remercier les soignants pour leur engagement. Les déprogrammations d'opérations se multiplient. Dans quelle mesure le secteur privé est-il sollicité pour prendre en charge les malades atteints de la covid et venir en aide aux hôpitaux publics ?

M. Guy Benarroche . - Vous ne parlez plus de lutter contre la « propagation » de l'épidémie ; vous avez d'ailleurs supprimé le terme dans le texte. Est-ce que vous assumez votre politique d'abandonner la lutte contre la propagation ?

Vous semblez considérer que les non-vaccinés sont essentiellement des réfractaires, mais l'Inserm estime qu'il s'agit pour 40 % de personnes qui ont des difficultés d'accès à la vaccination : immigrés, personnes âgées ou isolées, etc .

Quelles sont vos intentions sur la quatrième dose ? Enfin, les masques FFP2 ont fait la preuve de leur efficacité : envisagez-vous d'en distribuer massivement et gratuitement, notamment aux professeurs des écoles ?

M. Jean Sol . - Vous avez évoqué la possibilité d'une prise en charge à domicile pour les patients dont l'état de santé nécessite de l'oxygène : mais avons-nous assez de stocks d'oxygène ? Je voudrais savoir aussi pourquoi les délais préconisés entre les différentes doses ne cessent de varier : on parlait de cinq mois, puis de quatre, puis maintenant de trois... Le directeur de l'OMS alerte lui-même sur cette stratégie, considérant que la répétition des doses n'est pas une solution. Envisagez-vous alors une quatrième voire une cinquième dose, et dans quel délai ? Enfin, combien de lits sont-ils réellement disponibles aujourd'hui ?

M. Patrick Kanner . - Vous avez utilisé l'adage : « Advienne que pourra ! » En général, celui-ci est précédé de la phrase : « Fais ce que dois ». C'était d'ailleurs l'expression favorite de Gaston Monnerville. Depuis des mois, le groupe socialiste réclame l'obligation vaccinale ; vous avez toujours dit qu'une telle obligation était impossible à mettre en oeuvre, puis on en arrive à cette obligation vaccinale déguisée. Le 30 juillet 2021, le bilan s'élevait à 112 000 morts de la covid ; six mois plus tard, le total s'élève à 126 000 morts. Pensez-vous que si l'obligation vaccinale avait été mise en oeuvre, nous aurions pu éviter une partie de ces décès ?

Mme Mélanie Vogel . - Vous n'avez pas répondu sur la levée des brevets. La France compte-t-elle changer de position et aider les pays qui le souhaitent à fabriquer eux-mêmes les vaccins ?

Ma seconde question porte sur le profil des personnes non vaccinées. Vous nous aviez dit qu'ils se répartissaient en trois catégories : les personnes isolées, les personnes indifférentes au vaccin, et les personnes réfractaires à la vaccination. Auriez-vous des chiffres plus précis à nous communiquer en la matière ?

Enfin, je voudrais compléter la question de Jean-Yves Leconte : certaines personnes, qui ont eu un schéma vaccinal complet en France, mais qui résident à l'étranger et ont été contaminées là-bas, se retrouvent dans une situation aberrante, car la France ne reconnaît pas leur certificat de rétablissement établi à l'étranger. Elles ne peuvent pas recevoir une troisième dose, dans la mesure où ce n'est pas recommandé pour ceux qui ont développé la covid récemment, tandis que leur passe sanitaire est désactivé. Quelle solution pourriez-vous leur apporter ?

Mme Émilienne Poumirol . - Je voudrais évoquer le cas des personnes qui ont fait des réactions graves à la deuxième injection, et qui sont considérées par les médecins comme des cas de covid long : ces personnes seront-elles exemptées du passe vaccinal ?

M. Christophe-André Frassa . - Ma question s'inscrit dans le prolongement des questions de Jean-Yves Leconte et Mélanie Vogel, et concerne nos compatriotes de l'étranger qui ont un certificat de rétablissement établi par une autorité sanitaire d'un pays hors de l'Union européenne. Sur le site internet des démarches simplifiées, il était indiqué, jusqu'au mois d'octobre, que le certificat de rétablissement était pris en compte pour l'établissement du passe sanitaire. Or, désormais, le site indique que l'on ne peut plus établir un passe vaccinal avec un certificat de rétablissement. Pensez-vous rétablir la reconnaissance d'un certificat de rétablissement établi à l'étranger pour obtenir un passe vaccinal ?

Mme Véronique Guillotin . - J'exerce dans une zone frontalière. J'ai vacciné ce week-end et nous avons constaté une explosion du nombre des primo-vaccinations, car les frontaliers qui travaillent au Luxembourg doivent se faire vacciner pour continuer à travailler. Envisagez-vous une mesure similaire en France ? Enfin, il existe des différences entre le Luxembourg et la France quant à l'obtention du passe vaccinal lorsque l'on a été malade. Ne serait-il pas possible d'harmoniser les dispositifs ?

Mme Nadine Bellurot . - Vous n'avez pas répondu à la question de Florence Lassarade : le Gouvernement entend-il aider les collectivités pour acheter des purificateurs d'air ?

Mme Catherine Belrhiti . - Quelle est la définition d'un non-vacciné : est-ce une personne qui n'a pas reçu de dose, ou dont le schéma vaccinal est incomplet ou non encore effectif si la vaccination remonte à moins de 14 jours ? Pourriez-vous nous donner des données chiffrées plus précises ?

Quelles sont les études qui justifient de vacciner les personnes rétablies : de nombreuses études montrent une réduction de 90 % des formes graves pour les rétablis, qui plus est cette immunité serait pérenne dans le temps à la différence de celle conférée par les vaccins. Enfin les certificats médicaux de contre-indication à la vaccination, permettent-ils de bénéficier du passe vaccinal ?

M. Olivier Véran, ministre . - Je commencerai par dire un mot de l'immunité conférée par la vaccination. Il existe deux types d'immunité : l'immunité humorale, qui se traduit par la présence d'anticorps qui empêchent le virus d'entrer dans l'organisme, et l'immunité cellulaire, qui est la capacité des cellules à fabriquer des armes contre le virus si celui-ci entre dans l'organisme.

Les vaccins à ARN messager actuels sont moins bons pour développer l'immunité humorale face au variant omicron, donc pour empêcher l'infection, mais sont très bons pour développer l'immunité cellulaire, donc pour permettre aux cellules de se défendre et empêcher les patients de développer des formes graves. Les vaccins actuels sont ainsi très performants pour limiter les formes graves, mais ils sont moins efficaces pour réduire les contaminations au variant omicron.

Cela explique pourquoi on n'utilise pas, sauf pour les immunodéprimés, le taux d'anticorps pour décider de l'opportunité d'une vaccination ; le taux d'anticorps n'est que le reflet de l'immunité humorale, mais ce taux ne dit rien de la capacité des cellules à se défendre en cas d'infection.

En ce qui concerne le variant omicron, une personne infectée, mais non vaccinée, aura une protection de 35 % : elle passe à 55 % en cas de vaccination avec deux doses, et à 85 % si un rappel est intervenu depuis moins de six mois. Une personne qui a eu la covid, mais qui n'est pas vaccinée, a 80 % de risques en moins de développer une forme grave dans les six mois qui suivent. La proportion tombe à 50 % au-delà de six mois. En revanche, pour une personne qui a reçu ses deux doses de vaccin, le risque d'hospitalisation est réduit de 90 % durant les six premiers mois et de 70 % au-delà de six mois, ce qui explique l'intérêt du rappel vaccinal. À mesure que l'on possède davantage de données scientifiques, on réduit progressivement le délai de rappel : celui-ci est justifié au bout de trois mois pour remonter la protection à 90 %. En cas de rappel, la protection contre les hospitalisations s'élève à 95 % dans les six premiers mois, et on estime, faute de recul encore suffisant, qu'elle sera égale à 90 %.

Nous n'avons pas fermé de lits intentionnellement : des chambres doubles sont devenues des chambres simples pour ne pas mettre un patient dans la même chambre qu'un malade atteint de la covid. Or comme on compte 20 000 malades hospitalisés pour covid, mécaniquement un certain nombre de chambres doubles est transformé en chambres simples. Ce n'est pas une fermeture de lits à proprement parler, il est temps de sortir de cette polémique ! Nous avons augmenté de 700 le nombre de lits de réanimation, ce qui constitue un effort notable dans la mesure où il faut dix ou douze ans pour former des médecins.

J'en viens à l'attractivité hospitalière : nous avons doublé la rémunération des heures supplémentaires et le rachat des congés. Des mesures sont prévues dans le Ségur de la santé. Je vais rencontrer tout à l'heure les infirmiers et infirmières anesthésistes (IADE) pour poursuivre la réflexion sur leurs métiers et leurs compétences. Le projet de loi ne prévoit pas de compensation pour les médecins du secteur public des pertes de rémunération liées aux déprogrammations, car les hospitaliers sont salariés et leur revenu n'est pas proportionnel aux actes.

En ce qui concerne le programme Covax, l'Union européenne est à la fois le premier producteur et le premier exportateur de vaccins. L'enjeu n'est pas tant la levée des brevets que de savoir combien de doses on peut donner dans l'urgence. Il est parfois difficile pour des pays en voie de développement de produire par eux-mêmes des vaccins. De même, ils ne disposent pas toujours des infrastructures logistiques ni d'un système de santé permettant de pouvoir vacciner ou de mener les campagnes d'information sur place. Je préfère donc que l'on mette nos forces dans la bataille pour distribuer des doses et faire en sorte que ces pays puissent les utiliser.

La semaine précédente, sur 8,3 millions de tests réalisés, 500 000 étaient des tests payants, et donc 7,8 millions étaient totalement pris en charge. Les vaccins s'améliorent. Les laboratoires développent des boosters permettant de lutter contre tous les variants.

Les certificats de contre-indication à la vaccination sont validés par l'assurance maladie, qui délivre un QR code qui peut être intégré dans l'application TousAntiCovid au même titre qu'un passe sanitaire ou vaccinal. S'agissant des schémas vaccinaux débutés à l'étranger, les règles du passe vaccinal seront les mêmes que pour le passe sanitaire.

Nous voulons autoriser les préfectures à accéder au fichier SI-DEP parce que c'est le seul moyen de vérifier que le test qui permet de mettre fin à une période de quarantaine a été réalisé.

C'est le Conseil d'État qui nous a demandé de restaurer l'autorisation des deux parents pour permettre la vaccination des 5-11 ans. Le Parlement peut tout à fait amender le texte. Je serai demain en séance au Sénat pour la discussion générale et alternerai ensuite avec mon secrétaire d'État, en fonction des urgences que je dois gérer.

Comme je l'ai dit, nous réfléchissons à l'utilisation d'autotests dans les écoles pour faciliter la vie des parents.

On estime que le nombre de faux passes sanitaires délivrés s'élève à 190 000.

Le système de repentance vise à permettre à des personnes qui ont triché, car elles ne souhaitaient pas se faire vacciner, de reconnaître leur erreur et de se faire vacciner. L'essentiel est de vacciner.

Pourquoi empêcher les soignants non vaccinés d'exercer alors que nous pouvons autoriser des soignants positifs asymptomatiques de travailler ? Ces deux situations sont très différentes. Il faut distinguer en effet la situation d'un soignant non vacciné qui continuerait à travailler tous les jours dans la durée, y compris pendant la vague épidémique, de l'autorisation d'exercice dérogatoire, donnée à titre exceptionnel pour quelques jours à un soignant malade si les circonstances l'exigent. En Guadeloupe, le taux de vaccination des soignants atteint le même niveau qu'en métropole. Un millier de salariés d'établissements de santé étaient non vaccinés ; chacun a eu un entretien individuel pour aborder la question de la vaccination ou pour se voir proposer un reclassement professionnel : 625 ont été depuis vaccinés ou sont en train de l'être ; un tiers a préféré partir. Je tiens d'ailleurs à saluer le travail remarquable du directeur général du CHU, qui a été victime d'une odieuse agression. Tous les soignants, tous les responsables publics, tous les élus ont le droit à la protection, mais aussi à l'estime des Français pour leur engagement. Il est dommage qu'une petite partie de la population très minoritaire s'en prenne verbalement ou physiquement à des personnes qu'elle devrait plutôt remercier.

Nous avons suivi la recommandation du Conseil d'État : on ne parle plus de propagation, car la diffusion du virus est désormais trop importante.

Le secteur privé est très mobilisé pour faire face à la pandémie.

La recommandation du Haut Conseil de la santé publique sur les masques FFP2 m'a été remise ce week-end et sera publiée très vite : elle concerne surtout sur les soignants ; le HCSP ne recommande pas une extension généralisée de ce masque.

Nous ne manquons pas d'oxygène puisque 15 000 patients, au moins, peuvent être pris en charge en médecine de ville. Si vous constatez des problèmes, il faut les faire remonter.

M. René-Paul Savary . - En Provence-Alpes-Côte d'Azur.

M. Olivier Véran, ministre . - Nous disposons de 6 200 lits de réanimation ; le nombre de lits armés augmente au fur et à mesure des besoins.

Je ne répondrai pas à la question provocatrice de M. Kanner sur le nombre de morts qui aurait pu être évité si on avait instauré la vaccination obligatoire : je ne vous demanderai pas combien de morts nous avons évitées en ne suivant pas vos avis et en instaurant des mesures de couvre-feu ou de confinement lors des dix lois précédentes, alors que le groupe socialiste avait voté contre ces mesures !

Sur la reconnaissance du certificat de rétablissement, si la fin de la contamination a été constatée par un test au sein de l'Union européenne, alors elle est reconnue. Si elle a eu lieu hors de l'Union européenne, nous réfléchissons à des modalités techniques pour pouvoir la démontrer. On ne peut pas avoir confiance dans la capacité de tous les pays de réaliser un test PCR en bonne et due forme. En tout cas, nous cherchons à simplifier la vie des Français vivant à l'étranger.

Enfin, nous n'avons pas prévu d'obligation vaccinale pour travailler, car cette mesure ne faisait pas consensus parmi les travailleurs sociaux. Nous avons donc préféré le télétravail, mesure qui se révèle efficace.

M. François-Noël Buffet . - Nous vous remercions.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

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