4. Le rebasage des moyens de fonctionnement des préfectures

Le projet de loi de finances pour 2003 prévoit, pour la première fois depuis de nombreuses années, une mesure nouvelle de « rebasage » des crédits de fonctionnement des préfectures, à hauteur de 2,15 millions d'euros , dont 1,9 million d'euros au chapitre 37-10-10 au bénéfice des préfectures non globalisées.

Cet abondement vise à prendre en compte les charges nouvelles résultant notamment de l'augmentation des surfaces utilisées (donc des dépenses d'entretien), du renforcement des effectifs des SGAR, de la hausse du coût de commissionnement de la carte bancaire et de l'introduction du nouveau passeport sécurisé « Delphine ».

5. La poursuite de la globalisation des crédits des préfectures

Entamée en 2000, la globalisation des moyens des préfectures vise à permettre aux préfets un meilleur emploi des crédits. Ils disposent ainsi d'une enveloppe globale et fongible incluant leurs crédits de fonctionnement et de personnel (cf. l'encadré ci-après).

En 2000, quatre préfectures étaient concernées : celles du Doubs, du Finistère, de l'Isère et de Seine-Maritime. En 2001, s'y sont adjointes celles du Territoire de Belfort, de l'Eure, de la Charente-Maritime, de l'Eure-et-Loir, du Maine-et-Loire, du Haut-Rhin, de la Somme, du Var, des Vosges et de la Seine-Saint-Denis. En 2002, les ont rejointes les préfectures du Calvados, de la Haute-Vienne, de l'Yonne et de l'Oise.

A ces 18 préfectures globalisées devraient s'ajouter 11 préfectures supplémentaires en 2003 (Aisne, Alpes-Maritimes, Cher, Indre, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loiret, Rhône, Saône-et-Loire, Seine-et-Marne, Martinique), ce qui porterait le nombre total de préfectures globalisées à 29.

Trois régions (Centre, Haute-Normandie et Picardie) auraient désormais l'ensemble de leurs préfectures globalisées et, pour la première fois, une préfecture d'outre-mer, celle de la Martinique, serait concernée.

Le contrat pluriannuel passé entre la direction du budget et le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales ayant été reconduit pour un an, le projet de loi de finances pour 2003 prévoit comme l'an passé une progression de 0,3 % des dotations de l'ensemble des préfectures globalisées ce qui se traduit par une augmentation des crédits de 1,8 million d'euros sur le chapitre 37-20 et de 2,06 million d'euros sur le chapitre 37-21.

La globalisation des crédits des préfectures

Les principes de l'expérimentation reposent sur la fongibilité des crédits au sein d'un budget global et sur la possibilité offerte aux préfets de modifier la pyramide des emplois par rapport à leur dotation initiale, dans le cadre de différents plafonds (en crédits, en emplois et en masse indiciaire) qui encadrent la liberté d'action des préfectures. Ces dernières disposent ainsi de moyens accrus pour adapter leurs moyens aux missions qui sont les leurs et aux priorités dégagées dans le projet territorial de l'Etat que chaque préfet a arrêté, tout en continuant de s'inscrire dans une gestion des personnels conforme aux statuts en vigueur.

Concrètement, chaque dotation globale regroupe deux sous-ensembles de crédits. Les crédits de personnel et de charges sociales forment le premier sous-ensemble. Les crédits de fonctionnement ( en provenance du chapitre 37-10, article 10 et d'une partie du chapitre 57-40 pour ce qui concerne le gros entretien immobilier ) forment le second sous-ensemble.

En contrepartie, les dotations globales ne font l'objet d'aucun abondement complémentaire en dehors de certains cas bien précis : augmentation de la valeur du point fonction publique et autres mesures générales ou catégorielles de revalorisation des rémunérations et variation des taux de cotisations sociales à la charge des employeurs. Elles évoluent selon une norme fixée à 0,3 % d'une année sur l'autre.

Les dotations sont garanties dans le cadre d'un contrat pluriannuel, elles ne peuvent donc pas être remises en cause et faire l'objet, en cours d'exercice, d'annulations. Les crédits qui n'auront pas été consommés en fin d'année sont automatiquement reportés sur l'exercice suivant. Les crédits sont délégués en totalité en début d'exercice.

La mise en place d'outils de contrôle de gestion au sein des préfectures globalisées constitue la contrepartie de la souplesse de gestion dont elles bénéficient dans le cadre de l'expérimentation.

Deux dispositifs complémentaires ont ainsi été mis en place dans les préfectures globalisées : un système de comptabilité analytique qui constitue le corollaire en matière d'analyse stratégique et comparée des coûts et un dispositif plus qualitatif de contrôle de gestion dénommé INDIGO (« Indicateurs de Gestion Optimisée »), outil de mesure de la performance globale de la préfecture sur ses champs d'activité.

Ils reposent tous les deux sur la division des activités d'une préfecture en sept missions tournées vers l'extérieur (communication et représentation de l'Etat, sécurité, accueil du public et délivrance des titres, réglementation générale et élections, relations avec les collectivités locales, animations des politiques interministérielles, action régionale), et six fonctions logistiques (immobilier des services et services techniques, garage et parc automobile, administration générale, informatique, formation, résidences du corps préfectoral), qui doivent rendre compte des prestations remplies en interne par les services de la préfecture pour lui permettre de fonctionner dans des conditions satisfaisantes.

Ils permettent tous les deux, d'opérer au niveau local un pilotage des principales missions des préfectures, d'instaurer un dialogue de gestion entre les préfectures et l'administration centrale, de fournir aux préfectures un outil de comparaison avec les autres préfectures.

Le principe général du dispositif de comptabilité analytique est celui du calcul des coûts directs relatifs à chaque mission ou fonction logistique. En pratique, cela signifie que chaque dépense de fonctionnement et de rémunération directement imputable à celle-ci, doit lui être rattachée. La comptabilité analytique permet ainsi aux préfectures globalisées de disposer d'un outil synthétique de suivi de l'évolution du coût des différentes missions de la préfecture, d'un outil de pilotage interne de la politique d'allocation des moyens et d'arbitrage entre les priorités (par exemple, examen des avantages et inconvénients d'une éventuelle externalisation de certaines prestations), d'un outil de comparaison de la structure des coûts avec des préfectures de taille équivalente).

Par ailleurs, le dispositif INDIGO est basé sur des objectifs répondant eux-mêmes à des grands enjeux identifiés sur les missions et fonctions logistiques et appuyés sur des indicateurs chiffrés. Ces indicateurs portent exclusivement sur le champ d'activité sur lequel la préfecture a un pouvoir d'orientation et d'inflexion. Pour certains de ces indicateurs, une norme nationale sera fixée, pour d'autres, c'est une norme adaptée aux enjeux locaux qui sera établie par l'administration centrale après un dialogue de gestion avec chacune des préfectures concernées .

L'ensemble de ces éléments, ainsi que certains des ratios de gestion établis annuellement par l'administration centrale sur la base des informations transmises par les préfectures, portant uniquement sur la partie « fonctionnement » des préfectures globalisées, fournit d'ailleurs la matière aux indicateurs contenus dans l'agrégat « Administration territoriale ».

Les dispositifs d'indicateurs du contrôle de gestion (BALISE, INDIGO, PTE), dans sa dimension de pilotage qualitatif des missions, ont été rassemblés au sein d'un infocentre territorial, véritable base de données de pilotage local et national, et étendus à l'ensemble des préfectures

Enfin, cette déconcentration et cette responsabilisation accrues imposent également un renouvellement du dialogue social local, notamment au sein des comités techniques paritaires de chaque préfecture.

S ource : ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales .

Pour l'avenir, le ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales indique qu'un bilan détaillé de l'expérience de globalisation sera établi dans le courant de l'exercice 2003, afin que soient prises les décisions relatives à une éventuelle généralisation du dispositif en 2004, tout en précisant que le bilan d'étape établi à ce jour est positif (cf. l'encadré ci-après).

Le bilan d'étape de l'expérience de globalisation des crédits des préfectures

Un premier bilan d'étape peut être fait à partir de l'exploitation des réponses données par les préfets à un questionnaire qui leur a été adressé en mai 2001 sur les conditions de mise en oeuvre de l'expérimentation qui montrent que l'expérience se déroule dans de bonnes conditions :

l'apport de l'expérience est jugé globalement très positif au sein des préfectures en termes de pilotage des services, d'approfondissement du dialogue avec l'encadrement sur les priorités locales et avec les représentants des personnels et également en terme de diffusion d'une culture de gestion renouvelée et élargie ;

• la maîtrise technique du dispositif de « globalisation » des crédits de rémunération et de fonctionnement, qui implique l'assimilation de nouveaux concepts de gestion et l'appropriation d'outils informatiques spécifiquement créés pour cette expérience, est désormais acquise au prix d'un investissement lourd des équipes de gestionnaires locaux qui dans la plupart des départements ont été renforcées et réorganisées ;

• des marges de manoeuvre financières plus ou moins marquées sont dégagées en gestion au sujet desquelles la réflexion, en concertation avec les agents, a commencé sur leur utilisation. Ces marges sont pour l'essentiel le fait de vacances de postes frictionnelles résultant soit de décisions locales dans le cadre d'une gestion prudente des remplacements, soit surtout des délais inhérents à toute affectation en préfecture dans le mode de gestion actuel des personnels. Outre dans certains cas un abondement du régime indemnitaire des personnels qui reste néanmoins dans la limite autorisée par les textes régissant les indemnités et primes, ce sont les domaines de la maintenance et des travaux d'aménagement immobiliers, du renouvellement des mobiliers et des moyens informatiques qui bénéficient en priorité de ces redéploiements ;

• le dialogue social au sein des préfectures connaît un approfondissement très marqué soit de manière informelle au travers des comités de pilotage mis en place dans les préfectures, soit au sein des comités techniques paritaires locaux qui voient ainsi leur rôle renforcé ;

• la mise en oeuvre du contrôle de gestion, après une première phase de rodage particulièrement délicate et plus longue que prévu du fait qu'elle reste essentiellement perçue comme un instrument d'évaluation individuelle ou comme un outil exclusivement réservé à l'usage de l'administration centrale, commence à être mieux comprise et acceptée notamment parmi les personnels des quatre préfectures pilotes ;

• la bonne qualité des relations, dans la très grande majorité des cas, avec les services locaux du ministère de l'économie et des finances ( TPG et contrôleurs financiers en région ) est soulignée ;

pour certains préfets, l'expérience met toutefois en lumière la lourdeur du dispositif actuel de gestion nationale des personnels du cadre national des préfectures. Des propositions d'assouplissement de cette gestion, voire de déconcentration accrue de celle-ci au niveau local sont émises.

S ource : ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales .

Ce diagnostic rejoint d'ailleurs l'appréciation portée par notre collègue André Vallet, précédent rapporteur spécial des crédits de la sécurité, à la suite d'une mission effectuée à la préfecture de Seine-Maritime en mai 2001 10 ( * ) .

On peut toutefois observer que demeurent d'actualité les limites du dispositif relevées l'an passé par votre commission : « si ses capacités en la matière ont considérablement augmenté, le préfet ne maîtrise bien entendu pas l'ensemble des paramètres qui s'imposent à sa gestion, et reste contraint par les procédures législatives et réglementaires. Mais, du fait de son rôle budgétaire nouveau, il se retrouve plus qu'auparavant en première ligne par rapport aux revendications - du personnel ou du public - même sur des thèmes pour lesquels il ne peut pas grand chose. En outre, l'absence de vraie compétence financière a pu être ressentie comme un manque. Surtout, le fait que la comptabilité analytique reste balbutiante et que le contrôle de gestion ne soit pas encore opérationnel a constitué une handicap fort : l'étude de la globalisation des crédits des préfectures montre que les systèmes d'information conditionnent la réussite de ce type de réformes car ils apportent une irremplaçable aide à la décision. D'autres limites sont plus globales : l'impossibilité de réaliser des amortissement, les reproches faits aux applications informatiques (système INDIGO mal compris et probablement trop lourd), déconcentration limitée en matière de personnel, absence de lien avec le projet territorial de l'Etat... Enfin, le fait que les autres services de l'Etat ne l'appliquent pas est source de dysfonctionnement, de mécontentement, mais aussi de gaspillages (par exemple des doublons importants existent comme dans les contrats de maintenance, les pools de chauffeurs, les ateliers de reprographie ou de cartographie, etc). La modernisation, désormais lancée par le Parlement, de la procédure budgétaire permet d'espérer que, d'ici dix ans, les progrès perçus dans les préfectures globalisées se seront diffusés à l'ensemble des services de l'Etat ».

* 10 Notre collègue André Vallet concluait ainsi : « l'unanimité semble se faire autour de la mise en place de cette réforme à Rouen. De nombreux avantages ont été cités : meilleure connaissance de la préfecture, démarche contractuelle avec l'administration centrale, amélioration des rapports avec les personnels, levier de modernisation, économies réalisées, aides à la décision, programmation pluriannuelle, etc. Votre rapporteur spécial a aussi apprécié que la réforme ait permis d'élaborer un dialogue budgétaire entre la préfecture et les sous-préfectures, devenues centres de responsabilité. L'aspect « gestion des ressources humaines » est probablement plus délicat à apprécier, mais il semble à votre rapporteur spécial que la globalisation facilite des décisions « frictionnelles » importantes pour l'accomplissement des missions d'une préfecture comme le recrutement de vacataires dans un service d'accueil du public pendant les vacances scolaires. Elle exige aussi une gestion prévisionnelle fine des emplois. Pour les personnels titulaires, les conséquences sont plus délicates car les choix opérés (par exemple ne pas remplacer un personnel d'une certaine catégorie pour préférer recruter un autre d'une autre catégorie) peuvent avoir par le jeu des indices et des carrières des effets à long terme. Les représentants du personnel rencontrés par votre rapporteur spécial ont brossé un tableau clair des effets de la réforme sur le dialogue social : il semble ainsi que les craintes initiales aient cédé la place à une opinion favorable, motivée par la conscience que cette réforme permet de mettre fin à des absurdités mal vécues, tout en regrettant la rapidité avec laquelle elle fut mise en place. Les relations entre les services de la préfecture et le contrôle financier se sont vues profondément modifiées, et ceci apparaît particulièrement significatif en vue de la mise en place des nouvelles procédures budgétaires. Le contrôle financier a accepté de faire évoluer son rôle en renonçant au contrôle juridique et en se contentant d'effectuer un contrôle de la disponibilité des crédits. Cependant, cet abandon a laissé la place à un enrichissement du dialogue entre les services préfectoraux et ceux du ministère du budget. Le contrôleur financier a aidé le préfet pour ses décisions budgétaires, lui a donné des conseils de gestion, lui a apporté une aide pour l'appréciation des conséquences financières de décision (par exemple en matière de recrutement), a facilité le passage d'un raisonnement en comptabilité de caisse à un raisonnement en comptabilité d'exercice (induisant par exemple la prise de conscience des charges restant à payer), etc. ».

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