3. Les mesures d'insertion par l'activité : des résultats décevants

La France compte une proportion particulièrement élevée de demandeurs d'emploi de longue durée. En effet, dans notre pays, il est deux fois plus difficile de sortir du chômage qu'en Allemagne et six fois plus qu'aux États-Unis. Les personnes engagées dans la vie active ont donc une perception plus négative de la situation de l'emploi, contrairement à d'autres pays où le chômage est vécu comme une période transitoire. La période de chômage est, de ce fait, particulièrement redoutée.

En conséquence, le nombre de bénéficiaires de minima sociaux est élevé : on compte 1.300.000 titulaires du revenu minimum d'insertion (RMI) et 365.000 titulaires de l'allocation spécifique de solidarité (ASS).

Par ailleurs, nombre de bénéficiaires du RMI demeurent dans le dispositif pendant une longue période.

a) Les contrats aidés : un système complexe

Les contrats d'insertion par l'emploi se sont beaucoup développés au cours des dernières années 1 ( * ) . Ils comprennent :

- les contrats aidés du secteur non marchand : les contrats emploi-solidarité (CES) et les contrats emploi-consolidé (CEC) ;

- les contrats aidés du secteur marchand : les contrats initiative-emploi (CIE) et les contrats d'accès à l'emploi (CAE) en vigueur dans les départements d'outre mer ;

- les contrats aidés relevant à la fois du secteur marchand et du secteur non marchand : le contrat d'insertion-revenu minimum d'activité (CI-RMA).

A côté de ces contrats aidés, il existe des stages d'insertion. Il ne s'agit pas de contrats de travail et les bénéficiaires sont des stagiaires de la formation professionnelle, rémunérés par l'État ou la région. Les principaux sont les stages d'insertion et de formation à l'emploi (SIFE) et les stages d'accès à l'emploi (SAE).

Les SIFE , collectifs ou individuels, ont pour objectif de favoriser la réinsertion professionnelle des demandeurs d'emploi connaissant des difficultés d'accès à l'emploi :

les SIFE collectifs s'adressent en particulier aux chômeurs de longue durée et à des publics prioritaires : personnes peu qualifiées, bénéficiaires du RMI, handicapés, détenus, parents isolés, jeunes bénéficiaires du programme TRACE.

les SIFE individuels constituent plutôt un instrument de prévention du chômage de longue durée. Ils visent à répondre aux besoins individuels de formation et à développer les compétences des demandeurs d'emploi ayant une première expérience professionnelle et présentant des risques importants de chômage prolongé.

Les SAE sont destinés à mettre en adéquation, au cas par cas, les compétences des demandeurs d'emploi avec celles requises pour occuper un poste de travail. Ils sont donc utilisés à la fois pour répondre à une offre d'emploi difficile à satisfaire et placer des demandeurs d'emploi menacés ou touchés par le chômage de longue durée.

b) Des déceptions certaines

Ces contrats aidés ont montré leurs limites, notamment en raison de leur rigidité et de leur ciblage, puisqu'ils ont souvent profité à des publics ne connaissant pas les plus graves difficultés d'accès à l'emploi.

Les CES et les CEC, aujourd'hui au nombre de 110.000 et 98.000, n'ont pas eu les effets positifs escomptés. Pour les CES, le tableau suivant illustre cette déception. En revanche, les contrats aidés du secteur marchand affichent des taux d'insertion professionnelle meilleurs, comme par exemple le CIE.

Comparaison : situation des anciens bénéficiaires
de CES et de CIE trois ans après leur sortie

emploi

emploi aidé

chômage

formation

inactivité

CES

38%

21,4%

28,7%

1,8%

10,1%

CIE

74,3%

2,0%

15,1%

0,6%

8,0%

Source : DARES - Premières synthèses informations - 2003

Toutefois, le CIE est resté en deçà de ses potentialités. Après deux années de forte baisse, le nombre d'entrées en CIE a progressé de 25 % en 2003 pour s'établir à 65.000. Il est nécessaire d'en poursuivre la relance, comme l'a affirmé le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité lors de la table ronde pour l'emploi qui s'est tenue le 18 mars 2003.

Le CI-RMA, quant à lui, n'a pas connu de montée en charge. Peu connu, le dispositif a notamment été critiqué parce qu'il ne donnait pas de droits à la retraite, le temps passé en activité n'étant pas considéré comme un travail. Moins de 200 contrats ont été conclus dans 24 départements depuis l'entrée en vigueur du dispositif, dont deux tiers dans le secteur marchand et un tiers dans le secteur non marchand. L'échec du CI-RMA dans le secteur non marchand justifierait sa profonde révision.

Dans les départements d'outre mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon, le nombre de CAE conclus a souvent été supérieur aux prévisions des lois de finances. Toutefois, son articulation reste à trouver avec le CI-RMA qui s'en inspire.

Quant aux SIFE et SAE, les effectifs ont connu une baisse constante tout au long des années 90.

Ces dispositifs se sont révélés particulièrement coûteux par rapport aux attentes : ainsi, le coût des mesures emploi à la seule destination des bénéficiaires du RMI est estimé à plus de 1 milliard d'euros (dont 434 millions pour les CES, 382 pour les CEC, 103 pour les CIE et 78 pour les SIFE collectifs).

Depuis deux ans, le Gouvernement a amorcé une rupture notable avec cette tendance en favorisant l'émergence d'un contexte économique plus favorable. Ainsi la loi n° 2003-721 du 1er août 2003 pour l'initiative économique en faveur de la création d'entreprises, l'assouplissement de la réglementation relative à la durée légale hebdomadaire de trente cinq heures de travail, la mise en place d'une formation professionnelle tout au long de la vie et la création de nouvelles passerelles vers l'emploi en entreprises ont été autant d'éléments concourant à cet objectif. En créant les conditions favorables à l'émergence d'un environnement économique porteur, le Gouvernement a préparé le terrain à la croissance du PIB dont les premiers signes se font déjà sentir. C'est dans ce contexte qu'il propose de rénover l'architecture des contrats aidés d'insertion dans l'emploi.

* 1 Un tableau présentant les caractéristiques détaillées de ces contrats figure en annexe du présent rapport.

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