MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. ARTICLE 75

Après avoir été supprimé lors de l'examen en séance des crédits de la section travail et emploi à l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a rétabli cet article en seconde délibération à l'initiative du gouvernement. Au total, aucune modification n'est donc intervenue.

II. ARTICLE 76

A l'initiative de notre collègue député Alain Joyandet, rapporteur spécial, l'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision du I de l'article 76, afin de prévoir que le concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie concerne uniquement les centres d'aide par le travail et les ateliers protégés.

III. MAJORATION DE CRÉDIT

Une majoration de crédits à titre non reconductible concerne le titre IV, pour un montant de 889.000 euros.

Au sein du chapitre 43-70 « Financement de la formation professionnelle », l'article 41 « Dépenses de fonctionnement des organismes. Subventions à divers organismes » est abondé de 6.000 euros.

Le chapitre 44-70 « Dispositifs d'insertion des publics en  difficulté » est abondé de 77.500 euros, répartis comme suit :

- 2.500 euros à l'article 14 « Programme de lutte contre le chômage e longue durée : mesures de parrainage et mesures d'accompagnement de la globalisation » ;

- 13.500 euros à l'article 56 « Insertion par l'économique : associations intermédiaires » ;

- 61.500 euros à l'article 81 « Missions locales - Permanence d'accueil, d'information et d'orientation (PAIO) - Accompagnement renforcé des jeunes (nouveau) ».

L'article 44-73-11 « Formations syndicales et actions d'études et de recherche syndicales » est abondé de 250.000 euros.

Enfin, le chapitre 44-79 « Promotion de l'emploi et adaptations économiques » est abondé de 555.500 euros, répartis comme suit :

- 143.500 euros à l'article 11 « Promotion de l'emploi : subventions diverses » ;

- 382.000 euros à l'article 12 « Promotion de l'emploi : ingénierie, études, audits, conseil » ;

- 30.000 euros à l'article 13 « Promotion de l'emploi : encouragement au développement d'entreprises nouvelles ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 4 novembre 2004, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen des crédits du travail, de la santé et de la cohésion sociale : I - Emploi et travail et articles 74 à 76 rattachés, sur le rapport de M. Serge Dassault, rapporteur spécial.

M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a indiqué que les crédits dévolus à l'emploi et au travail, quasiment reconduits pour 2005, s'élevaient à plus de 32 milliards d'euros, dont 20 milliards d'euros consacrés à des allègements de charges, d'une efficacité, selon lui, contestable. Il a précisé que, compte tenu d'un changement de périmètre, les crédits marquaient, en réalité, une hausse de 1,8 %, en totale conformité avec la norme « zéro volume ».

Il a rappelé que, pour 2004, ces crédits avaient doublé en raison de la suppression du FOREC, au travers duquel la compensation des allègements généraux de charges auprès de la sécurité sociale avait été largement débudgétisée.

Puis M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a présenté ses observations.

En premier lieu, il a indiqué que le taux de chômage, d'un niveau très élevé, risquait de s'aggraver encore. Stabilisé au taux de 9,9 % au premier semestre 2004, le chômage des moins de 25 ans avait néanmoins continué sa progression, présentant le taux impressionnant de 21,5 %. Il a estimé que la situation des cadres se trouvait également dégradée.

Après avoir estimé que le chômage en France était de nature principalement structurelle, il a précisé qu'en raison de la rigidité de l'emploi en France, des horaires de travail trop limités, des coûts de production excessifs et d'impositions démotivantes telles que l'ISF, les chefs d'entreprise n'avaient d'autre choix que de sous-traiter à l'étranger et de s'expatrier lorsqu'ils prenaient leur retraite.

En deuxième lieu, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a approuvé que le ministre de l'emploi veuille s'inspirer du modèle nordique de « flexsécurité », qui combinait un marché du travail fluidifié avec une amélioration de la protection économique des individus, estimant qu'on ne pouvait protéger les salariés dans les entreprises en difficulté, mais qu'on pouvait et devait les protéger en dehors. Après avoir énuméré les composantes de la « flexsécurité », il a estimé cette voie prometteuse et indispensable pour la reprise des embauches.

En troisième lieu, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a donné le détail de la simplification des dispositifs d'aide aux publics prioritaires opérée dans le cadre du plan de cohésion sociale : suppression des contrats en alternance hors apprentissage, réunis au profit d'un « contrat de professionnalisation » unique ; fusion des contrats emploi solidarité et des contrats emplois consolidés au sein d'un « contrat d'accès à l'emploi » ; rénovation du contrat initiative emploi, qui devait être géré à l'échelon régional au sein d'une enveloppe fongible comprenant également les crédits à destination du contrat d'accès à l'emploi ; recentrage du revenu minimum d'activité (RMA) sur le secteur marchand, assorti de la création d'un contrat d'avenir, pendant du RMA pour le secteur non marchand ; mise en extinction des différentes formes de stages, jugés peu efficaces. Après avoir précisé que 415.000 entrées étaient prévues pour 2005 dans ces différentes formes de contrats aidés, contre 360.000 en 2004, il a souligné que ces contrats devraient encore trouver preneurs dans les secteurs marchands et non marchands.

En quatrième lieu, M . Serge Dassault, rapporteur spécial , a abordé le fonctionnement du marché du travail. Il a constaté que son optimisation se poursuivait surtout au travers d'une action qualitative sur l'offre de travail, avec une relance de l'apprentissage qui se traduisait par 600 millions d'euros de moyens nouveaux dès 2005, nonobstant l'article 75 rattaché qui, tendant opportunément de mettre fin aux exonérations de cotisations à la date d'obtention du diplôme d'apprenti, devait entraîner une économie de 33 millions d'euros pour l'Etat.

Dans le cadre d'une action quantitative sur l'offre, il a indiqué que les tentatives de rehaussement des taux d'emploi susceptibles de s'inscrire dans la stratégie européenne de Lisbonne, que constituaient la prime pour l'emploi, à l'efficacité contestable, et surtout les hausses du SMIC programmées par la loi « Fillon », avaient eu, finalement, une influence parfois négative sur les entreprises et sur le budget.

Concernant l'action sur la demande, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , est demeuré sceptique quant à l'efficacité des allègements sur les bas salaires, et a estimé que l'harmonisation des SMIC aurait notamment dû se traduire par une augmentation des horaires. Il a évoqué l'article 74 rattaché qui, tendant à réduire légèrement le champ des rémunérations devant donner lieu à réduction de charges sociales, d'une fourchette allant de 1 à 1,7 fois le SMIC horaire à une fourchette allant de 1 à 1,6 fois le SMIC horaire, devait procurer une économie de 1,2 milliard d'euros en 2005.

Par ailleurs, il s'est félicité de ce que le projet de loi « cohésion sociale » tende à remédier à l'éclatement du dispositif français d'intervention en direction des chômeurs (Etat, UNEDIC, ANPE, AFPA) par la création de « maisons de l'emploi » qui, améliorant les prestations offertes aux chômeurs, permettaient une redéfinition de l'obligation de recherche d'emploi et de son contrôle.

En cinquième lieu, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a exprimé son profond scepticisme quant à l'utilité de consacrer plus de 60 % des moyens du budget du travail à la compensation des allègements de charges, ayant précisé que, sur les 20 milliards d'euros de crédits inscrits à cet effet pour 2005, 10 milliards d'euros devaient figurer au « débit » des 35 heures. Selon lui, seul un assouplissement drastique des restrictions sur les licenciements devait permettre de relancer les embauches, aucune entreprise n'embauchant sans liberté de licencier en cas de baisse ultérieure de l'activité. Il s'est ainsi déclaré favorable aux « contrats de mission », qui pouvaient permettre l'embauche de personnel pour la réalisation d'un objectif donné, et a fait part de son vif intérêt pour les préconisations du rapport « Camdessus » qui, procédant d'une vision très libérale de l'économie observée notamment aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, s'inspiraient, ainsi, de pratiques notoirement favorables à l'emploi.

M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a ensuite mis en perspective, d'une part, une dépense de 20 milliards d'euros se rapportant aux exonérations de charges sociales et, d'autre part, le faible nombre des embauches qui trouvait son origine dans les contraintes pesant sur les licenciements. Il a remarqué qu'une suppression des charges pesant sur le salaire en échange d'une totale flexibilité de l'emploi, qu'il conviendrait de proposer aux représentants du MEDEF et de la CGPME, permettrait, selon lui, de ramener opportunément le déficit budgétaire de 50 milliards d'euros à 30 milliards d'euros, et de satisfaire, ainsi, largement aux exigences posées par le traité de Maastricht.

En sixième lieu, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a observé que le ministère était en marche vers la pleine application de la LOLF.

Il a indiqué que la définition des futurs « programmes », qui ne reprenaient pas les agrégats existants, était globalement satisfaisante, d'autant plus qu'à la demande de la commission des finances, le personnel n'était plus regroupé dans un unique « programme support ». Il a appelé l'attention sur le fait que sa note de présentation des crédits tenait déjà compte de la nouvelle architecture prévue par ladite LOLF.

M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a rappelé que la mesure de la « performance » au moyen d'objectifs et d'indicateurs était au coeur de la réforme budgétaire, l'obligation faite aux gestionnaires de rendre compte de leurs résultats étant la contrepartie d'une liberté accrue dans la gestion de crédits devenus fongibles.

Il a précisé qu'au printemps prochain, il comptait examiner très attentivement les avant-projets de projets annuels de performance (PAP), avant qu'ils ne soient figés dans le cadre du prochain débat d'orientation budgétaire, celui pour 2006, et que les projets d'objectifs et d'indicateurs envisagés étaient, a priori , suffisamment diversifiés pour mesurer la performance globale de la politique de l'emploi, et d'un fonctionnement suffisamment simple pour que les gestionnaires et les observateurs puissent rapidement se les approprier.

Il a, enfin, constaté qu'une « expérimentation LOLF » méritoire devait être signalée : des projets de budgets opérationnels de programmes -les BOP- devaient être mis en place dans cinq régions et assortis d'objectifs et d'indicateurs de performance, nul ne contestant que cette première déclinaison des PAP au niveau des BOP constituait une des « expérimentations LOLF » les plus avancées.

Puis M. Serge Dassault, rapporteur spécial , évoquant le sujet récurrent des reports, en a déploré la pratique excessive qui diminuait la portée du consentement parlementaire et déformait la perception des évolutions budgétaires. Il a annoncé que le ministère déclarait ainsi que 600 millions d'euros de reports viendraient compléter le financement des allègements de charges sur les bas salaires en 2005.

Dès lors, il a estimé que toutes choses étant égales par ailleurs, la dépense de la section emploi et travail se trouvait d'emblée sous-évaluée de 600 millions d'euros. En matière de reports, il a indiqué qu'il comptait sur la pleine application de la loi organique précitée pour inciter à plus de mesure.

En conclusion, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , après avoir constaté que, jusqu'à présent, la complexité, le foisonnement et le coût des dispositifs en matière d'emploi étaient inversement proportionnels aux résultats obtenus en matière de créations d'emplois, a estimé que si 20 milliards d'euros d'allègements de charges pouvaient être libérés en contrepartie d'une totale flexibilité de l'emploi, ils seraient mieux employés, notamment, à un alignement de l'impôt sur les sociétés sur le niveau moyen européen, au financement de l'investissement et à celui de la recherche.

Il a ajouté qu'à défaut d'une suppression des 35 heures, il conviendrait, au moins, de supprimer le plafond des heures supplémentaires, dans l'attente d'une indispensable simplification du droit du travail en vue de parvenir à plus de flexibilité.

Enfin, espérant que l'ensemble de ces remarques serait un jour pris en compte, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a proposé l'adoption du budget de l'emploi et du travail ainsi que celle des articles 74 et 75 rattachés dont il avait déjà évoqué le contenu. S'agissant de l'article 76, il a indiqué qu'il convenait, pour l'instant, de réserver la position de la commission dans l'attente, notamment, de son examen par l'Assemblée nationale.

Après que M. Jean Arthuis, président , eut remercié M. Serge Dassault, rapporteur spécial, pour l'absence de conformisme de ses propos, un large débat s'est instauré.

M. Maurice Blin , après avoir confirmé que la masse des allègements existants était probablement responsable de la persistance d'une situation marquée par un chômage très élevé, a posé la question des contreparties attendues des chômeurs indemnisés en termes de recherche d'emploi, qui constituaient un tabou, nonobstant les évolutions attendues en application du plan de cohésion sociale.

En réponse, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a indiqué qu'il fallait effectivement inciter davantage les gens à retourner au travail, ce dont l'« épisode des recalculés » augurait mal. Il a ajouté que la main-d'oeuvre était insuffisamment mobile. M. Jean Arthuis, président , a précisé que ce problème devrait être réglé par les partenaires sociaux, qui assumaient la gestion du régime d'indemnisation du chômage.

M. Aymeri de Montesquiou , après s'être félicité de la mise en avant de l'entreprise dans la démarche adoptée par le rapporteur spécial, a posé la question des indicateurs de performance associés à la politique de l'emploi, et du niveau des salaires appliqué au Danemark. En réponse, M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a précisé que la présentation de ces indicateurs, purement indicative à ce stade, était globalement satisfaisante. M. Jean Arthuis, président , a souligné que le niveau des salaires pratiqué au Danemark était d'autant plus satisfaisant que les charges sociales, très largement transférées vers la TVA, y étaient faibles.

A M. Jacques Baudot qui l'interrogeait sur la façon de mettre en oeuvre ses orientations et le félicitait pour le programme qu'il avait présenté, M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a répondu qu'il s'agissait d'en avoir la volonté. M. Jean Arthuis, président , a indiqué, à cet égard, qu'il conviendrait d'« importer » du Danemark, où 85 % des salariés étaient syndiqués, une plus forte aptitude au consensus.

M. Yves Fréville a souligné que le niveau très élevé du chômage structurel, évalué en France à 8 %, ne devait pas être exclusivement attribué à un manque de flexibilité : un salaire minimum élevé, assorti d'un système de cotisation sociale pesant essentiellement sur le travail en était aussi la cause, ce dernier aspect méritant, probablement, d'être réformé. M. Jean Arthuis, président , a précisé que la réflexion entamée par la commission des finances sur l'instauration d'une TVA sociale répondait à cette préoccupation. M. Yves Fréville a soulevé le problème de l'allocation parfois erratique des crédits d'intervention, notamment en matière sociale. M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a alors précisé qu'en France, il conviendrait de dissocier ce qui devait naturellement revenir à l'impôt, d'une part, et aux charges devant peser les salaires, d'autre part, ces dernières étant certainement excessives.

M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a ensuite précisé à M. Philippe Adnot, qui souhaitait connaître le coût des « maisons de l'emploi », que leur mise en place faisait l'objet d'une programmation par le projet de loi sur la « cohésion sociale », et que, pour 2005, 120 millions de dépenses ordinaires et de crédits de paiement étaient inscrits à cet effet.

M. Philippe Adnot s'est par ailleurs enquis de l'utilisation qui serait faite du 1,2 milliard d'euros d'économies résultant du dispositif prévu par l'article 74.

M. Jean-Jacques Jégou a signalé que le niveau des bas salaires, en France, était insuffisant, particulièrement en Ile-de-France, où le travail ne garantissait pas, ainsi, une parfaite intégration dans la société. M. Serge Dassault, rapporteur spécial , a souligné que la concurrence étrangère, dont il était difficile de s'abstraire, pesait singulièrement sur le montant des salaires en France.

M. Maurice Blin , après avoir fait référence au concept danois de « flexicurit », puis observé que les résultats obtenus dans l'industrie par M Serge Dassault, rapporteur spécial , constituaient une des grandes réussites du capitalisme français, lui a demandé comment il s'était accommodé des entraves qui pesaient sur le marché du travail. M Serge Dassault, rapporteur spécial , lui a alors indiqué que son entreprise comptait aujourd'hui, comme en 1990, 9.000 collaborateurs, et qu'il n'avait pu la développer qu'en sous-traitant à l'étranger une partie de son activité.

Enfin, M. Jean Arthuis, président , a indiqué que le resserrement de l'échelle des salaires éligibles à l'allègement « Fillon » proposé par l'article 74 rattaché, présenterait probablement l'inconvénient de freiner l'évolution des bas salaires. M. Philippe Adnot s'est étonné que les économies résultant de l'article 74 soient réaffectées à de nouvelles dépenses. En conséquence, il a déclaré être défavorable à ce dispositif. M. Jean-Jacques Jégou a alors évoqué un amendement gouvernemental portant sur le projet de loi « cohésion sociale » visant à renforcer le dispositif de réduction d'impôt sur le revenu au titre des dons à certaines associations.

La commission a alors décidé d'adopter ce budget. Elle a également décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les articles 74 et 75 rattachés, et de réserver sa position sur l'article 76 rattaché jusqu'à l'examen définitif du projet de loi de finances, prévu pour le jeudi 25 novembre 2004.

Réunie à nouveau le jeudi 25 novembre 2004, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 76 rattaché, précédemment réservé, puis confirmé l'adoption du budget du travail et des articles 74 à 76 rattachés, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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