B. LES MINI-MOTOS ET QUADS NON SOUMIS À RÉCEPTION : UNE RÉGLEMENTATION INSUFFISANTE

Si les mini-motos et quads réceptionnés requièrent une attention particulière, l'essentiel des problèmes de sécurité et de nuisance proviennent des mini-motos et quads non conçus pour circuler sur les voies ouvertes à la circulation publique. Ces véhicules 10 ( * ) ont pour seule finalité la pratique de loisir ou la compétition sportive.

1. Un régime juridique mal adapté

Non conçus pour un usage sur route, les mini-motos et quads de loisir échappent au champ d'application de la directive 2002/24/CE du 18 mars 2002 relative à la réception des véhicules à moteur à deux ou trois roues. De manière générale, ils échappent à toute la réglementation applicable aux véhicules conçus pour un usage sur route. Ils ne sont pas soumis notamment à la procédure de réception et d'immatriculation.

Ces engins n'entrent pas non plus dans le champ de la législation communautaire relative à la sécurité des jouets 11 ( * ) , bien que le public visé par les fabricants et les distributeurs soient précisément les enfants.

Interpellée par certains Etats membres de l'Union européenne sur les accidents et les nombreux rappels de produits, la Commission européenne a précisé dans un courrier adressé le 6 juillet 2006 aux Etats membres le statut juridique des mini-motos et quads non réceptionnés : « Les mini-motos équipées de moteurs à combustion interne, qui ne sont pas destinées à une utilisation sur route, entrent dans le champ de la directive « Machines » 12 ( * ) . Elles sont également soumises à la législation communautaire sur la compatibilité électromagnétique 13 ( * ) . En outre, les mini-motos sont des produits destinés aux consommateurs, certaines dispositions de la législation communautaire relative à la sécurité générale des produits sont applicables 14 ( * ) ».

Au titre de cette directive, le fabricant d'une mini-moto doit donc :

- procéder ou faire procéder à une analyse des risques ;

- appliquer les règles techniques de l'annexe I de l'article R. 233-84 du code du travail pour réduire et supprimer les risques dès la conception ;

- constituer et conserver un dossier technique indiquant les procédures techniques mises en oeuvre pour parvenir à la réalisation des règles techniques applicables à son produit ;

- apposer le marquage CE.

S'appuyant sur cette base juridique, plusieurs actions ont été engagées pour tenter d'assainir le marché des mini-motos et des quads non réceptionnés.

Au stade de l'importation, la direction générale des douanes et des droits indirects a procédé à de nombreux contrôles. Les contrôles opérés au cours des trois premiers trimestres de 2007 ont montré que les produits étaient dans l'ensemble non-conformes et dangereux. Ainsi, après prélèvements et analyses, sur 2297 mini-motos contrôlées, 2003 se sont révélées non-conformes et dangereuses et 134 non-conformes. De plus, 3388 mini-motos ont été déclarées non-conformes sur le plan documentaire et retirées du marché.

Au stade aval de la mise sur le marché, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a sensibilisé les fédérations d'importateurs, les vendeurs spécialisés en motocycle ainsi que les grands surfaces au statut juridique des mini-motos. Une enquête réalisée en 2007 auprès de 200 établissements a montré que cette information était généralement bien donnée (moins de 1 % d'anomalies). Les problèmes de sécurité associés à un défaut de conception ou de conformité ont représenté moins de 2,5 % du total des engins contrôlés.

Ces résultats satisfaisants au stade de la mise sur le marché montrent que la principale difficulté demeure la vente de ces engins par Internet, souvent depuis l'étranger, laquelle échappe au contrôle de la DGCCRF.

Concernant l'utilisation de ces engins , les règles relatives aux véhicules conçus pour un usage sur route ne s'appliquent pas. C'est ainsi que comme le rappelle la circulaire n° 2006-43 du 30 mai 2006 15 ( * ) relative aux dispositions de la loi du 5 janvier 2006 précitée, l'article L. 321-1 du code de la route qui réprime la commercialisation de véhicules n'ayant pas fait l'objet d'une réception ou qui ne sont plus conformes à celle-ci ne s'applique pas aux véhicules non soumis à réception.

De même, une incertitude demeure sur l'applicabilité de l'article L. 362-1 du code de l'environnement aux mini-motos et quads non réceptionnés. Cet article issu de la loi n° 91-2 du 3 janvier 1991 relative à la circulation des véhicules terrestres dans les espaces naturels dispose que « la circulation des véhicules à moteur est interdite en dehors des voies classées dans le domaine public routier, des chemins ruraux et des voies privées ouvertes à la circulation publique des véhicules à moteur ». Ainsi la circulation sur un chemin forestier non ouvert à la circulation publique ou en dehors d'un chemin est interdite, quel que soit le véhicule « réceptionné » utilisé. Toutefois, la rédaction de cette interdiction peut laisser penser qu'elle ne joue pas pour les véhicules non réceptionnés, ceux-ci ne pouvant pas par définition circuler sur les voies ouvertes au public.

Dans ces conditions, il est apparu nécessaire au législateur d'adopter une législation spécifique aux mini-motos et quads non réceptionnés.

2. L'amorce d'une réglementation spécifique aux mini-motos et quads non soumis à réception

Avant la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, la base juridique pour sanctionner l'utilisation sur la voie publique d'un véhicule non soumis à réception était incertaine.

Certes, le troisième alinéa de l'article R. 321-4 punit d'une contravention de la quatrième classe le fait de mettre ou maintenir en circulation un véhicule à moteur sans qu'il ait fait l'objet d'une réception. Mais cette contravention a été créée pour réprimer l'utilisation sur la voie publique d'un véhicule conçu pour un usage sur route mais qui n'aurait pas fait l'objet d'une réception ou qui ne serait plus conforme à celle-ci ( à la suite d'un débridage notamment). Le recours à cette base juridique pour verbaliser l'utilisateur d'une mini-moto ou d'un quad non conçu pour un usage sur route était pour le moins fragile.

C'est la raison pour laquelle la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a inséré un nouvel article L. 321-1-1 dans le code de la route punissant d'une contravention de cinquième classe le fait de circuler sur les voies ou les lieux ouverts à la circulation publique ou au public avec un motocycle, un tricycle à moteur ou un quadricycle à moteur non soumis à réception.

L'immobilisation, la confiscation et la mise en fourrière peuvent être prescrites dans les conditions de droit commun définies aux articles L. 325-1 à L. 325-9 du code de la route.

Après huit mois d'entrée en vigueur, cette disposition avait permis en Ile-de-France de vérifier 779 engins. Parmi ceux-ci, 681 ont été soustraits à leur propriétaire, dont 66 à la suite d'une confiscation par le juge. 41 engins ont été détruits au cours de cette période.

* 10 Le terme d'engins motorisés serait plus exact afin de réserver le terme de véhicules aux véhicules admis à circuler sur la voie publique.

* 11 Directive 88/378/CE du 3 mai 1988.

* 12 Directive 98/37/CE dite « Machines ». Cette directive sera remplacée par la directive 2006/42/CE applicable au 29 décembre 2009. La directive a été transposée en droit français par les décrets n° 92-765, 92-766 et 92-767 du 29 juillet 1992 et par le décret n° 96-725 du 14 août 1996. Il convient de souligner que l'article 2 de la directive 2006/42/CE exclut les engins destinés exclusivement à la compétition, c'est-à-dire utilisables sur circuit et répondant aux exigences des fédérations sportives. Certains mini-motos pourraient donc à l'avenir ne plus relever de la directive « Machines ».

* 13 Directive n° 2004/108/CE du 15 décembre 2004.

* 14 Directive 2001/95/CE du 3 décembre 2001 relative à la sécurité générale des produits.

* 15 NOR : EQUS0611365C.

Page mise à jour le

Partager cette page