MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

I. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE NON RECONDUCTIBLE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à majorer à titre non reconductible de 8.000 euros les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

II. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE RECONDUCTIBLE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement minorant les crédits de 3.834.192 euros en AE et de 2.952.219 en CP, destinés principalement à financer les mesures annoncées par le Président de la République en faveur de l'agriculture et de l'outre-mer.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 28 octobre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Pierre Bernard-Reymond, rapporteur spécial, sur la mission « Immigration, asile et intégration ».

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a tout d'abord rappelé le caractère intrinsèquement interministériel de la politique d'immigration et d'intégration des étrangers en France. Cette politique transversale représentera, d'après le projet de loi de finances pour 2010, 3,62 milliards d'euros en crédits de paiement, en augmentation de 4 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Au total, ce sont quinze programmes répartis dans onze missions et entre dix périmètres ministériels qui contribuent à cette politique transversale. La mission « Immigration, asile et intégration » ne représente que 560 millions d'euros soit 15,6 % des crédits consacrés à cette politique.

Les principales missions contribuant à la politique d'immigration et d'intégration sont les missions à caractère social ou culturel du budget de l'Etat. Ainsi, la mission « Recherche et enseignement supérieur » représente plus de 40 % des crédits de cette politique et la mission « Santé » environ 15 %, soit un taux équivalent à la contribution de la mission « Sécurité ».

Le caractère interministériel de la politique d'immigration et d'intégration rend parfois difficile l'appréhension de ses coûts, par exemple de ceux des reconduites à la frontière des étrangers en situation irrégulière. A ce propos, M. Eric Besson, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire, avait annoncé lors de son audition devant la commission des finances, le 1 er juillet 2009, qu'une étude de l'inspection générale de l'administration était en cours. M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a indiqué qu'il venait de recevoir le rapport de cette inspection.

La mission « Immigration, asile et intégration » est également, du point de vue budgétaire, une mission à caractère social. En effet, moins de 17 % de ses crédits correspondent à la politique de lutte contre l'immigration clandestine, la majorité des crédits étant consacrée à l'accueil et à l'accompagnement des demandeurs d'asile ainsi qu'au traitement des demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra).

Puis, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a présenté les crédits de la mission proposés pour l'année 2010. Ceux-ci s'élèvent à 570 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 560 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Ils sont en augmentation de respectivement 12 % et 9,8 % par rapport à l'année 2009. La hausse nette des crédits de paiement se réduit toutefois à 8,4 % si l'on neutralise les effets d'une mesure de périmètre mise en oeuvre entre les années 2009 et 2010, à savoir le transfert au ministère de l'immigration des crédits d'investissement relatifs aux centres de rétention administrative (CRA), auparavant gérés par le ministère de l'intérieur.

L'augmentation des crédits est relativement équilibrée entre les deux programmes de la mission : « Immigration et asile » et « Intégration et accès à la nationalité française ».

Le premier de ces programmes est, budgétairement, le plus important, puisqu'il représente plus de 85 % des crédits de la mission.

Il regroupe notamment les crédits destinés à l'accueil des demandeurs d'asile et à l'instruction de leurs demandes. Sur ce point, la prévision qui a servi de base à la construction du projet de budget pour 2010 paraît sous-évaluée. En effet, le nombre prévisionnel de demandeurs d'asile pour 2010 est de 45500, ce qui représente une augmentation de 6,8 % par rapport au nombre effectifs de demandes en 2008. Cette prévision est très optimiste si on la compare au rythme d'augmentation de 19,7 % des demandes en 2008 et de 16,5 % sur les premiers mois de l'année 2009. Le ministère du budget semble prévoir une diminution du nombre de demandes après le pic constaté depuis la fin de l'année 2008. La sous-évaluation des crédits liés aux demandes d'asile n'est pas nouvelle. Un décret d'avance est en effet prévu pour abonder, au titre de l'année 2009, les crédits liés aux demandes d'asile à hauteur de 60 millions d'euros en CP et de 70 millions d'euros en AE.

Il en résulte que les crédits de l'action n° 2 « Garantie de l'exercice du droit d'asile » paraissent, comme en 2009, sous-évalués, malgré une hausse de 10 % par rapport au projet de loi de finances initial pour 2009.

Le programme « Immigration et asile » regroupe également certains crédits de fonctionnement des CRA. Il convient de se réjouir du transfert dans ce programme des crédits d'investissement des CRA, auparavant gérés par le ministère de l'intérieur, qui doit permettre une meilleure appréhension du coût de la rétention. 24 millions d'euros en AE et 14 millions d'euros en CP seront consacrés à la construction et à l'entretien des CRA en 2010, soit une hausse de 7,2 millions d'euros par rapport à l'année 2009.

Le programme intègre également les dépenses de soutien du ministère. A ce sujet, il est satisfaisant de constater que les services parisiens, auparavant dispersés dans six sites, se sont regroupés dans seulement deux sites et qu'une économie de 1,8 million d'euros en a résulté.

Enfin, ce programme comporte 32 millions d'euros de subvention de service public pour l'Ofpra, qui traite les demandes d'asile. La performance de l'Ofpra s'est très nettement améliorée, avec un délai de traitement moyen des demandes d'environ trois mois qui paraît incompressible. En revanche, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), qui examine les recours contre les décisions de l'Ofpra, présentait des délais de traitement des dossiers de plus de quatorze mois en 2008. Elle a été rattachée au Conseil d'Etat depuis le 1 er janvier 2009 et dix nouveaux postes de magistrats ont été créés. M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, s'est proposé, en 2010, d'examiner le fonctionnement de cette juridiction, qui constitue le principal gisement d'économies budgétaires pour la mission « Immigration, asile et intégration ».

Il a ensuite indiqué que le second programme de la mission, « Intégration et accès à la nationalité française », est de moindre importance puisqu'il regroupe seulement 80 millions d'euros de crédits. Ces crédits augmentent de 9,2 % par rapport à 2009, essentiellement en raison du passage de 10 à 15 millions d'euros de la subvention versée à l'Office national de l'immigration et de l'intégration (Ofii), opérateur qui gère l'accueil et l'intégration des étrangers primo-arrivants.

Il a rappelé avoir relevé, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, la surbudgétisation de cette subvention qui n'était, en pratique, jamais versée à l'Office, celui-ci disposant d'un fonds de roulement largement supérieur à ses besoins. Dans le présent projet de loi de finances, le fonds de roulement a décru de manière satisfaisante et la situation financière de l'Office est donc revenue à la normale.

En conclusion, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a estimé que ce projet de budget, en augmentation, peut faire l'objet d'une appréciation positive pour plusieurs raisons : la restructuration immobilière du ministère, le transfert de la gestion des crédits d'investissement des CRA et le retour à une situation financière saine pour l'Ofii. Toutefois, des problèmes persistent quant au caractère réaliste des prévisions en matière de flux des demandeurs d'asile. Bien que ce flux soit imprévisible, l'Ofpra pourrait conduire une analyse plus précise de l'origine et des causes des demandes d'asile et tenter, à partir de ces éléments, d'affiner ses prévisions.

Sous le bénéfice de ces observations, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a préconisé l'adoption sans modification des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».

M. Jean Arthuis , président, a estimé que la politique d'immigration est une des plus délicates à mener et qu'elle nécessite beaucoup de tact et d'humanité.

Mme Michèle André s'est interrogée sur la possibilité de financer 1.000 places supplémentaires dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile avec une hausse de seulement 3,6 % des crédits qui leur sont consacrés.

En réponse, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a indiqué que les leçons des insuffisances passées ont été tirées et que le projet de budget doit effectivement permettre la création de 1000 places nouvelles.

Mme Michèle André a soulevé la question de la qualité et de l'exhaustivité du document de politique transversale ainsi que des éventuels problèmes liés à l'articulation entre le ministère en charge de l'immigration et ses ministères partenaires, notamment celui de l'intérieur.

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a rappelé les difficultés résultant, en termes de clarté budgétaire, du caractère interministériel de la politique d'immigration et d'intégration, qui associe dix ministères différents. Le document de politique transversale s'est amélioré et le chiffre de 3,62 milliards d'euros paraît réaliste. Toutefois, certains outils manquent pour parvenir à chiffrer, à l'euro près, le coût de cette politique transversale.

M. Jean Arthuis , président, a relevé que de nombreux crédits d'aide sociale à destination des étrangers vivant en France ne sont pas retracés dans le document de politique transversale.

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a confirmé que la contribution de la mission « Santé » correspond essentiellement aux crédits de l'aide médicale d'Etat et que d'autres dépenses sont absentes, telles que celles de l'enseignement primaire et secondaire. Des progrès doivent donc encore être faits. Le travail de l'inspection générale de l'administration sur le coût de la reconduite à la frontière fournira probablement des éléments méthodologiques pertinents pour chiffrer le coût global de la politique d'immigration et d'intégration.

M. Adrien Gouteyron a souhaité pouvoir mieux appréhender les actions menées par le ministère de l'éducation nationale en faveur de l'intégration des jeunes issus de l'immigration. L'ampleur de la tâche est immense au regard des difficultés rencontrées par certains jeunes, notamment en matière de maîtrise de la langue française.

A ce sujet, M. Jean Arthuis , président, a rappelé que la commission des finances organise, le mardi 3 novembre 2009, une audition pour suite à donner à un rapport de la Cour des comptes sur l'articulation entre les dispositifs de la politique de la ville et ceux de l'éducation prioritaire dans les quartiers sensibles, à laquelle participeront notamment des proviseurs et principaux des établissements scolaires concernés.

M. Adrien Gouteyron a fait observer, dans le cadre du débat annoncé sur l'identité nationale, que de nombreux jeunes issus de l'immigration ne se reconnaissent pas comme Français. Par ailleurs, il a souhaité connaître les initiatives européennes en cours sur ce sujet.

En réponse, M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a rappelé que M. Brice Hortefeux, alors ministre en charge de l'immigration, a organisé, en novembre 2008, une conférence européenne réunissant, à Vichy, les responsables européens des politiques d'immigration. Un pas a donc été franchi dans la prise de conscience de la nécessité d'une harmonisation des politiques au niveau de l'Union européenne.

Mme Michèle André a jugé qu'il serait utile de former les jeunes migrants à la langue française avant même de les scolariser, afin d'atténuer les problèmes qu'ils rencontrent.

M. Pierre Bernard-Reymond , rapporteur spécial, a distingué deux sujets :

- d'une part, les difficultés d'intégration des jeunes Français issus de l'immigration, évoquées par M. Adrien Gouteyron, qui ne relèvent pas directement de la mission « Immigration, asile et intégration » ;

- d'autre part, la question de la formation, notamment linguistique, des primo-arrivants. En cette matière, le ministère de l'immigration a mis en place des actions de formation, dans les pays d'origine, avant les regroupements familiaux, afin de faciliter en amont l'intégration ultérieure des étrangers. Par ailleurs, un nombre croissant de contrats d'accueil et d'intégration est signé chaque année et ces contrats comportent des actions spécifiques en matière de maîtrise de la langue française.

M. Jean Arthuis , président, a souhaité que l'accent soit mis sur les lacunes du document de politique transversale et sur la difficulté à appréhender l'ensemble de l'effort de l'Etat en matière d'immigration et d'intégration.

A l'invitation du rapporteur spécial, la commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2010.

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Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2009, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position tendant à l'adoption sans modification des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration », après avoir pris acte de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale.

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