D. LA MISE EN PLACE D'UNE POLICE D'AGGLOMÉRATION : PARIS ET SA PETITE COURONNE

1. La suppression des frontières administratives et la mutualisation des unités

L'extension de l'agglomération parisienne au cours des trente dernières années s'est accompagnée d'une adaptation de la délinquance, qui a su tirer profit des possibilités offertes par les réseaux de transports, l'emploi des nouvelles technologies et les limites imposées aux services de police par les frontières administratives entre les départements . La confrontation avec de nouveaux comportements criminels et des phénomènes de bandes violentes et très mobiles a mis en lumière le besoin d'adopter une stratégie d'intégration, de mutualisation et d'équilibre de l'action policière sur Paris et sa petite couronne.

Ainsi, la décision a été prise de créer une police d'agglomération unifiée pour Paris et ses trois départements limitrophes (les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne). Cette police est placée sous l'autorité du préfet de police. La compétence territoriale des directions opérationnelles de la préfecture de police est, par ailleurs, étendue aux trois départements de petite couronne. Cette réforme est entrée en vigueur le 14 septembre 2009 .

Ainsi, les frontières administratives, qui faisaient barrière aux objectifs opérationnels de la police, ont-elles été supprimées. En outre, grâce à la mutualisation des unités et des renforts projetables , la présence policière sur la voie publique, aux heures et dans les lieux où la délinquance est le plus active, doit être optimisée.

2. La réorganisation des services

La mise en place de cette police d'agglomération induit de nombreuses réorganisations de services . Parmi celles-ci, on peut notamment relever les suivantes, qui comptent parmi les plus symboliques et les plus importantes.

Tout d'abord, la lutte contre la petite et la moyenne délinquance est confiée à la direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP) . Cette direction regroupe désormais l'ancienne direction de la police urbaine de proximité (DPUP) et les trois directions départementales de sécurité publique de la petite couronne, transformées en quatre directions territoriales. Son fonctionnement permet la circulation de l'information entre les salles d'information, les salles de commandement territoriales et l'état major d'agglomération, la mutualisation des renforts en unités d'intervention projetables en temps réels en fonction des besoins opérationnels sur les 4 départements, l'élaboration de stratégies et de tactiques de lutte contre les phénomènes transversaux de délinquance (bandes, vols avec violence...) coordonnées avec les directions territoriales, ainsi que le déplacement sur l'ensemble de l'agglomération des fonctionnaires bénéficiant d'une habilitation d'officier de police judiciaire, afin de suivre les mouvements de la délinquance.

Par ailleurs, la direction de l'ordre public et de la circulation (DOPC) joue un plus grand rôle en matière de maintien de l'ordre. Elle a la charge des grands événements et de certaines escortes officielles. La création d'une police de la circulation en Ile-de-France se fait également sous l'égide de la DOPC.

En matière de renseignement et d'information générale , les anciens services départementaux d'information générale (SDIG) de la petite couronne, ont été rattachés à la direction du renseignement de la préfecture de police (DRPP) dont ils sont devenus des antennes territoriales. Cette direction voit également ses missions de lutte contre l'immigration irrégulière et de renseignement intérieur étendues à l'ensemble de l'agglomération parisienne.

En outre, la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ) renforce sa capacité de lutte contre l'économie souterraine par la création de deux « groupes cités » dans les Hauts-de-Seine et le Val-de-Marne, ainsi que par le pilotage du « plan stupéfiant » pour toute l'agglomération.

Enfin, la réforme de la police d'agglomération permet au secrétariat général pour l'administration de la police de Paris de jouer pleinement son rôle de support administratif. Les services territoriaux de police en petite couronne se voient libérés de tâches de gestion, ce qui doit leur permettre de se concentrer sur leur mission première de lutte contre la délinquance .

Ainsi que le souligne le PAP pour 2010 de la mission « Sécurité », « par une meilleure intégration de la chaîne hiérarchique et opérationnelle, un gain d'efficience est attendu de cette réforme qui vise à établir une unité de commandement à l'échelle des principaux bassins de délinquance mis en évidence ».

3. Vers une réforme territoriale d'envergure : la mise en place de la « police d'agglomération »

L'exemple de Paris et de sa petite couronne préfigure une nouvelle organisation territoriale, axée autour de « bassins de criminalité » et en recherche d'une plus grande efficacité des forces de police et de gendarmerie.

Dans leur rapport précité « Vers une plus grande efficacité du service public de sécurité au quotidien », MM. Michel Gaudin et Alain Bauer soulignaient ainsi que « l'inscription spatiale de la délinquance correspond étroitement aux réalités géographiques de l'aménagement du territoire. Seul le niveau de l'agglomération est désormais pertinent pour assurer la sécurité de bassins de vie dans lesquels les flux de personnes et de biens sont de plus en plus mobiles . » 10 ( * ) .

La mise en place d'une « police d'agglomération » est en mesure de permettre une meilleure adaptation du dispositif de sécurité (sécurisation, ordre public et collecte du renseignement) aux réalités du terrain, tout en dégageant des économies d'échelle sur les moyens mis en oeuvre.

Alors qu'elle n'a connu que peu d'évolutions depuis les années 1940, la carte des circonscriptions de sécurité publique doit désormais coller au plus près aux nouveaux paysages et à la nouvelle géographie de la délinquance. Le PAP pour 2010 envisage ainsi l'extension de cette notion de « police d'agglomération » à « d'autres grandes agglomérations au premier rang desquelles Lille 11 ( * ) , Lyon et Marseille » .

* 10 Rapport « Vers une plus grande efficacité du service public de sécurité au quotidien », remis au Président de la République le 21 mars 2007.

* 11 L'arrêté NOR: IOCC0901303A du 13 avril 2009 a d'ores et déjà créé la circonscription de sécurité publique Lille - agglomération, regroupant Lille, Roubaix, Tourcoing et Armentières.

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