EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 12 novembre 2015 sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de MM. Charles Guéné et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 58 à 62 quater ) et le compte de concours financier « Avances aux collectivités territoriales ».

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - La mission « Relations avec les collectivités territoriales » représente à peine plus de 2 % des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales, qui prennent essentiellement la forme de prélèvements sur recettes. Ses crédits augmentent de plus de 25 % en autorisations d'engagement, du fait de la mise en place de la dotation de soutien à l'investissement des communes et de leurs groupements, pour un montant de 800 millions d'euros. La majoration exceptionnelle de 200 millions d'euros des crédits de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est reconduite en 2016, ce qui traduit l'engagement du Premier ministre de soutenir l'investissement local à hauteur d'un milliard d'euros. Les crédits de paiement correspondants s'élèvent cependant à 150 millions d'euros environ, du fait du décaissement progressif des crédits.

Une « dotation de solidarité en faveur de l'équipement des collectivités territoriales touchées par des événements climatiques ou géologiques » est créée dans le programme 122, qui remplace les fonds « calamités publiques » et « catastrophes naturelles ».

Les crédits du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » s'élèvent à près de 110 milliards d'euros en 2016. Ce compte retrace essentiellement les avances sur les recettes fiscales des collectivités territoriales, mais aussi les avances que l'État peut accorder à des collectivités territoriales connaissant des difficultés de trésorerie. L'évolution de ces crédits n'appelle pas de remarque particulière. Nous vous proposons l'adoption sans modification des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

La commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales ».

Article 58

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'article 58 prévoyait une réforme profonde de la dotation forfaitaire des communes et de la dotation globale de fonctionnement (DGF) des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), ainsi que des évolutions importantes des dotations de péréquation des communes. Le 3 novembre dernier, le Premier ministre a annoncé le report de cette réforme à 2017, tout en souhaitant que ses grands principes soient inscrits dès le présent projet de loi de finances. Le texte a été modifié en ce sens à l'initiative du Gouvernement : l'ensemble des dispositions relatives à la réforme est conservé, mais un paragraphe ajouté précise qu'elles n'entreront en vigueur qu'en 2017. Le Gouvernement prévoit de remettre un rapport au Parlement avant le 30 juin 2016, pour « approfondir l'évaluation des dispositions » relatives à la réforme de la DGF, « notamment en fonction des nouveaux périmètres des EPCI à fiscalité propre » et précise que « ce rapport peut proposer des adaptations aux règles de répartition prévues ».

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements, à commencer par un nouveau dispositif de garantie pour les communes qui verraient baisser leur DGF d'un montant supérieur à 25 % de leurs recettes de fonctionnement entre 2017 et 2021. Cette nouvelle garantie montre que tous les effets de cette réforme n'ont pas été correctement anticipés.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Cela ne vous surprendra pas, Charles Guené et moi ne parvenons pas à la même conclusion sur l'article 58. Certains points peuvent néanmoins faire l'objet d'un consensus. La réforme nous oblige au regard de la situation des collectivités territoriales, et peut être améliorée. Nous pensons toujours qu'il est nécessaire de réformer la DGF. Le rapport Pires Beaune - Germain a mis en évidence à quel point cette dotation est devenue illisible et injuste et a souligné la difficulté d'expliquer les différences de dotations entre communes aux caractéristiques parfois très proches. Le report de la réforme ne doit pas nous empêcher de continuer à travailler sur ce sujet. Les simulations des effets de la réforme ont mis en lumière des situations difficiles à comprendre et à justifier, notamment pour la répartition de la dotation de centralité, dont la part communale est répartie en fonction de la part de la population communale dans la population de l'EPCI, portée à la puissance 5. Dans certaines zones urbaines et en périphérie des grandes métropoles, la répartition de cette dotation n'était pas véritablement corrélée aux charges de centralité, mais dépendait excessivement de la carte intercommunale et des choix d'entrer dans telle ou telle intercommunalité.

De plus, la volonté technique de supprimer les « DGF négatives » a conduit à redonner une DGF à des communes bénéficiant de ressources considérables, du fait par exemple de la présence d'une centrale nucléaire, par le mécanisme regrettable redonnant une dotation forfaitaire aux communes qui n'en percevaient plus en 2015 du fait de leur contribution au redressement des finances publiques. Cela doit être corrigé.

Par ailleurs, comment expliquer que les communes qui perdent le bénéfice de la dotation nationale de péréquation (DNP) et qui ne bénéficiaient ni de la dotation de solidarité urbaine (DSU), ni de la dotation de solidarité rurale (DSR), seraient les seules à ne pas bénéficier d'un dispositif de lissage ?

Réduire les écarts-types de dotation forfaitaire par habitant peut avoir du sens, à condition que ces écarts ne soient pas justifiés par des différences de situation. S'intéresser aux écarts de potentiel financier entre communes serait intéressant, surtout dans le contexte de réduction de la DGF.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - La méthode choisie par le Gouvernement est tout autant critiquable. Il y a une semaine, le Premier ministre a semblé découvrir que la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), adoptée il y a trois mois, prévoyait une refonte de la carte intercommunale en 2017. Mener en 2016 une réforme de la DGF prévoyant une dotation de centralité fortement dépendante de la carte intercommunale est insensé, ou du moins très difficile. Les simulations sont entièrement fausses, puisque basées sur une réalité qui aura complètement changé dans quelques mois.

Certes associé à la réflexion en amont, le Comité des finances locales n'a pu travailler que sur l'architecture globale de la réforme ou sur des données financières partielles, tardives et ne correspondant pas au projet finalement présenté au Parlement. Le 8 octobre, plus d'une semaine après le dépôt du projet de loi de finances, le Gouvernement n'était pas en mesure de transmettre les simulations des conséquences de sa réforme au Parlement. Une semaine plus tard, des données ont été transmises aux commissions des finances de chaque assemblée, qui laissaient de côté les communes du Grand Paris, soit plus de sept millions d'habitants et près de 20 % de la dotation forfaitaire - excusez du peu... Deux semaines après le dépôt du projet de loi de finances, le Gouvernement ne connaissait toujours pas les effets de la réforme qu'il proposait au Parlement.

Le report de la réforme est une bonne chose, mais le texte transmis au Sénat est paradoxal. Nos collègues députés - qui ont déposé plusieurs centaines d'amendements - ont considéré que le projet du Gouvernement n'était pas bon et ne pouvait s'appliquer en 2016, tout en inscrivant dans la loi qu'il s'appliquerait en 2017. De même, le Gouvernement prévoit un rapport avant l'été pour continuer à travailler sur la réforme mais souhaite qu'elle soit adoptée dès aujourd'hui.

Soyons plus cohérents et prenons acte que la réforme de la DGF proposée par le Gouvernement ne s'appliquera pas en 2016 et donnons-nous le temps de préparer une réforme pour 2017. L'amendement n° 1 que je vous propose écrase totalement les dispositions de l'article 58 tout en complétant l'objet du rapport proposé par le Gouvernement.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Dès lors que la carte de l'intercommunalité n'est pas achevée, la réforme est impossible. Lors de mon contrôle sur place, le directeur général des collectivités locales a reconnu que le texte n'était pas applicable en l'état. Le Gouvernement a reporté la réforme au 1 er janvier 2017 et annonce un rapport d'évaluation avant le 30 juin 2016, comme si la loi s'appliquait. Remettons de l'ordre ! Il faut d'abord achever la carte de l'intercommunalité, demander au Gouvernement un rapport sur ses intentions, effectuer des simulations et ensuite adopter le texte en se fondant sur celles-ci. Nous n'allons pas voter à l'aveugle !

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Il est paradoxal d'adopter des articles précis alors que la majorité parlementaire de l'Assemblée nationale a prouvé par le dépôt de centaines d'amendements que le texte ne fonctionnait pas. Nous vous proposons d'inscrire seulement les principes de la réforme qui font consensus en écrasant les dispositions du texte telles qu'elles sont formulées. Cela n'empêchera pas le Gouvernement de travailler sur sa réforme en 2016.

M. Vincent Delahaye . - Je souscris aux propos du rapporteur général et de Charles Guéné, peut-être que Claude Raynal y souscrit également ! Évitons toute précipitation. Nous sommes favorables à une réforme de la DGF par un texte spécifique ; le Gouvernement craint peut-être qu'il ne passe jamais, d'où l'intégration dans le projet de loi de finances... Il prend davantage le temps que pour la réforme à toute vitesse de la taxe professionnelle. L'application sera reportée en 2017, mais on veut nous faire voter les principes et les modalités. Pourquoi voter ces dernières ? Nous sommes dans le brouillard, avec la réduction des dotations et le changement de périmètre des intercommunalités. Il s'agit non seulement de réformer la DGF mais aussi de revenir sur certaines compensations aux collectivités territoriales, ce qui peut faire très mal. C'est le flou artistique complet ! Prenons le temps de l'analyse et ne votons que les principes dans la loi de finances.

M. Didier Guillaume . - Tout le monde approuve une réforme de la DGF, mais personne ne l'a faite, ni à droite ni à gauche : on a toujours complexifié. Le Gouvernement a fait le choix de se lancer dans une aventure risquée, la réforme de la DGF à moyens constants, en pleine décrue des dotations aux collectivités, sans compensation pour éponger les pertes. Évidemment, personne n'est d'accord, chacun regarde d'abord comment sera traitée sa ville ou son intercommunalité. Lors de notre réunion de commission du 28 octobre dernier, les orateurs de notre groupe ont annoncé qu'en l'état, nous ne la voterions pas. Nous avons essayé de convaincre qu'il fallait revenir sur les charges de centralité, sur le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales (FPIC)... Mais pour donner le signal de la réforme de la DGF, il faut inscrire ses orientations et ses moyens dans le budget : il est toujours plus facile d'amender ce qui sera écrit que de partir de rien. Soutenons le Gouvernement. Certes, nous devrons attendre la mise en place des intercommunalités pour l'application de la loi. Mais le Gouvernement a répondu aux élus locaux et au Parlement en n'allant pas jusqu'au bout de sa réforme. Nous en reparlerons lors du prochain congrès des maires.

Oui ou non, pouvons-nous collectivement réformer la DGF, avec des gagnants et des perdants ? Si l'on refuse d'avoir des perdants, ce sera impossible, aujourd'hui, en 2017 ou en 2020.

M. Roger Karoutchi . - Je ne suis pas d'accord avec Didier Guillaume: il est plus difficile de modifier par la suite un dispositif inscrit dans la loi que d'innover. Je partage l'avis du rapporteur général sur le calendrier et l'ordonnancement. On met en évidence des éléments de centralité sans rien savoir du financement de la métropole du Grand Paris en 2016 et 2017. On veut réformer la DGF avant la mise en place des nouveaux conseils de territoire, sur lesquels nous n'avons aucune simulation.

Mme Marie-France Beaufils . - Selon les simulations, certains dispositifs ne fonctionnent pas correctement. Pourrions-nous connaître les points précis de fragilité du texte pour en débattre ? J'avais compris qu'un amendement du Gouvernement présenterait les grandes orientations de la réforme ; or nous débattons de la nouvelle DGF. Il est important d'assurer un minimum vital pour les collectivités, mais pourquoi ne pas tenir compte du ratio de leurs charges par rapport à leur population, sujet souvent abordé au sein du Comité des finances locales ? La dotation de centralité avec une puissance 5 favorise la commune la plus importante et créera des distorsions impensables et inacceptables, ce qui montre la fragilité du système. J'aurais aimé un débat sur les grands principes avant de discuter de leur mise en oeuvre qui impactera fortement les collectivités : l'attente de composition des intercommunalités n'est qu'un épiphénomène.

Réunie de nouveau le jeudi 12 novembre 2015, la commission poursuit l'examen du rapport de MM. Charles Guené et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » (et articles 58 à 62 quater ).

Mme Michèle André , présidente . - Nous reprenons l'examen des articles rattachés à la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et notre discussion sur la réforme de la DGF.

M. Vincent Capo-Canellas . - Impossible d'en traiter sans aborder l'ensemble des moyens et missions des collectivités territoriales. L'examen des lois Maptam et NOTRe, et en particulier la création des métropoles, ont mis en évidence l'absence d'anticipation du Gouvernement. Quelle improvisation dans le traitement du FPIC, de la DGF, du Grand Paris... La proposition de Charles Guené va dans le bon sens. Certes, le Gouvernement a fait un pas en acceptant le compromis, en s'en tenant aux principes et en renvoyant à plus tard le détail des modalités. Ce recul est à saluer. Cependant, sur les sujets fiscaux, le diable est souvent dans les détails...

M. Marc Laménie . - Je soutiens moi aussi l'amendement de Charles Guené. Deux critères doivent être mieux pris en compte dans le calcul de la dotation : l'effort fiscal et les charges de fonctionnement, qui varient fortement en fonction des collectivités. L'amendement va dans le bon sens, celui de la sagesse. La finalisation des intercommunalités se révèle très compliquée, et la réforme de la DGF ne l'est pas moins. Le sujet de la fiscalité directe locale et des bases d'imposition doit être abordé en parallèle.

M. Michel Bouvard . - Je ne méconnais pas les difficultés. Le Gouvernement a reconnu que son texte n'était pas applicable en l'état. Nous sommes des élus responsables et nous savons bien que la réforme de la DGF a été trop longtemps reportée. Cependant, nous ne pouvons la mettre en oeuvre dans n'importe quelles conditions. Comme Marie-France Beaufils, je suis convaincu de la nécessité de fixer des principes, de prendre en compte les charges de chaque collectivité, variables parce que liées à la sociologie de la population, à la géographie et à l'activité dominante. Or on ne trouve pas cela dans le texte adopté par l'Assemblée nationale.

M. Francis Delattre . - La réforme de la DGF présente l'avantage, pour le Gouvernement, de casser le front uni présenté par les collectivités face à la baisse des dotations. Nous défilions ensemble devant les préfectures, à présent chacun fait pour lui-même le compte de ce qu'il peut gagner ou perdre. Reconnaissons que c'est bien joué, mais ne soyons pas dupes. Cessons aussi d'invoquer le Comité des finances locales. C'est ici, au Sénat, que la réforme doit être étudiée.

Je représente un territoire relégué de la région parisienne ; on nous oblige à créer une intercommunalité d'au moins 200 000 habitants, ce qui nécessite de très nombreuses réunions pour fixer les statuts, déterminer les compétences, les encours, les aides, etc. Nous ne savons même pas encore quel sera notre coefficient d'intégration fiscale : imposer en plus de cela la réforme de la DGF est précipité. Mais j'y insiste, trouvons les solutions ici, et pas dans des comités Théodule.

M. Jean-François Husson . - En parlant d'aventure, je ne sais si Didier Guillaume voulait dire que ce projet est aventureux, ou que le Gouvernement est aventurier ? Il y a deux ans, juste avant le Congrès des maires de France, le Premier ministre d'alors annonçait une réforme de la fiscalité locale. Nous savons ce qu'il en est advenu : rien. Prenons garde à la colère des élus devant cette lessiveuse démocratique qui n'arrête pas de tourner sans que nous ne percevions ni le sens ni la portée des réformes.

Il serait bon que le Sénat, fort de sa réputation de sagesse, se réapproprie le débat sur les ressources locales, fiscalité incluse.

Il y a manifestement une erreur de calendrier. Aucune simulation n'est possible puisque la réforme de la carte intercommunale modifie le champ des compétences de chaque intercommunalité. De gauche, de droite ou du centre, nous nous devons d'attirer l'attention du Gouvernement sur ces aspects et de porter une parole commune. Les départements et les régions auront eux aussi de nouvelles compétences, avec les effets collatéraux que cela implique pour les autres collectivités.

M. Daniel Raoul . - Vous remplacez un article 58 qui définissait la répartition des dotations par une demande de rapport sur l'évolution de la DGF. Comment cela va-t-il se traduire dans le budget définitif ? Autant je peux être d'accord sur le contenu de l'amendement, autant je suis en désaccord sur la méthode et sur l'objet tel qu'il est rédigé, il est à peine objectif.

M. Yannick Botrel . - Nous sommes d'accord sur la nécessité d'une réforme de la DGF. Le mécanisme est trop complexe. Néanmoins, toutes les communes n'ont pas été affectées de la même façon par les premières baisses de la dotation, qui n'est pas leur seule ressource.

Faut-il qualifier toutes les parties qui se prononceront de « comités Théodule » ? Le Gouvernement a raison d'écouter les élus, sans faire abstraction des arrière-pensées des uns et des autres. Le délai de mise en oeuvre accepté par le Gouvernement est nécessaire et devra être mis à profit pour définir clairement les critères à prendre en compte dans le calcul de la future DGF et pour procéder à des simulations. L'improvisation est à bannir.

M. Éric Doligé . - Je partage l'avis du rapporteur spécial. Comme Marie-France Beaufils et d'autres collègues, je pense qu'il faut prendre en compte les charges et des facteurs comme la composition de la population ; mais il faut aussi considérer l'effort accompli dans le passé pour réduire les dépenses.

M. Philippe Dallier . - Je suis favorable à la réforme de la DGF, et même à une réforme plus ambitieuse qui intégrerait l'ensemble des dotations de péréquation. Cependant, l'attitude du Gouvernement est incompréhensible : tout en reconnaissant que le texte n'est pas mûr et que tout sera remis en discussion l'an prochain, il nous demande d'approuver les principes de la réforme. C'est illisible. La demande de rapport, cher Daniel Raoul, est la seule manière de faire si nous voulons préparer la réforme d'ici l'été prochain. J'espère que nous aurons le temps nécessaire pour élaborer un texte acceptable, en évitant les effets de bord constatés lors de la mise en place du FPIC... par la majorité que nous soutenions.

Mme Michèle André , présidente . - Vos remarques montrent que la commission s'est emparée du sujet et devra continuer d'y travailler.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Vous l'avez dit, nous avons un problème de calendrier. Comme Didier Guillaume, je suis séduit par les fondements de la réforme, mais force est de constater qu'elle ne convient pas en l'état : des centaines d'amendements ont été déposés à l'Assemblée nationale. De là notre position, qui conserve cependant les principes acceptés par tous. Notre amendement donne au Gouvernement la possibilité d'adapter sa réforme. Il est également de nature à satisfaire Michel Bouvard et Marie-France Beaufils, puisqu'il fait bien mention des charges.

Nous sommes prêts à réécrire, comme le demandent Jean-François Husson et Marc Laménie, la fiscalité locale : après cinquante ans, ce ne serait pas indécent. En nous saisissant du sujet, nous allons apaiser le débat. Les collectivités territoriales seront attentives à notre action.

Nous avons réécrit l'article 58 et posé, dans l'article 58 bis , les bases du fonctionnement de la DGF pour 2016, année transitoire avant la mise en place de la réforme. Dans ce cadre, le Gouvernement présentera un rapport plus élaboré précisant toutes les incidences escomptées, et notre commission travaillera en parallèle, comme c'est son rôle. Le Sénat s'en trouvera valorisé.

La prise en compte des efforts réalisés par les collectivités vertueuses reste problématique en France, mais il faudra bien l'aborder. En Italie, cette notion est mieux partagée.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - La volonté d'avancer nous réunit tous et je m'en félicite. Nous nous accordons tous sur la nécessité d'un report. L'intervention de Vincent Capo-Canellas m'a donné le sentiment que tout est dans tout, et réciproquement ... Il parle de cohérence, mais à un niveau si global...

M. Francis Delattre . - C'est un centriste !

M. Vincent Capo-Canellas . - J'ai une vision globale et cohérente.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - C'est une vision totalisante...

M. Philippe Dallier . - Tant qu'elle n'est pas totalitaire !

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Qui trop embrasse mal étreint. Restons sur notre sujet.

Le critère des charges sera pris en compte : il est mentionné dans l'amendement. Je ne partage pas l'incompréhension de Philippe Dallier au sujet de la réaction du Gouvernement : ce qui sépare le texte de l'Assemblée nationale de l'amendement de Charles Guené n'est rien d'autre que la confiance. Le Gouvernement impose un terme, celui de 2017. Un amendement de suppression obligerait à tout recommencer à zéro : et serions-nous prêts pour 2017 ? Soyons responsables : nous ne pouvons justifier, auprès de nos mandants, une opposition sans propositions alternatives. Avançons et proposons. Les deux positions - d'un côté une ouverture de la réflexion, de l'autre le maintien du délai - peuvent se rejoindre.

M. Jacques Chiron . - Très bien ! C'est cela, une attitude responsable.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Les points d'accord sont minces ! Le Gouvernement souhaite maintenir la date de 2017 ; il est maître de l'ordre du jour, la question de la confiance ne se pose donc pas. L'amendement de Charles Guené fixe le principe de la réforme. Nous sommes d'accord pour travailler, mais pas dans n'importe quelles conditions : la dotation de centralité ne fonctionne pas, les intercommunalités ne sont pas stabilisées, la péréquation n'est pas prise en compte... Ne mettons pas la charrue avant les boeufs : la solution de bon sens est de fixer certains principes en maintenant le cap.

L'amendement n° FINC.1 est adopté.

Article 58 bis

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'amendement n° 2 réécrit totalement l'article 58 bis introduit par l'Assemblée nationale afin de fixer la répartition de la DGF pour 2016. Il regroupe l'ensemble des dispositions relatives à cette DGF, reprenant les dispositions de l'article 58 relatives à la répartition de la baisse de la DGF des départements et des régions, ainsi que les dispositions de l'article 58 bis concernant la DGF des communes et des EPCI.

Il tire également les conséquences de l'amendement adopté ce matin par la commission des finances sur la première partie du projet de loi de finances, qui majore de 1,6 milliard d'euros le montant de la DGF, afin de prendre en compte les dépenses contraintes des collectivités territoriales, et il gèle le montant de la péréquation verticale à son niveau de 2015.

Ainsi, la baisse des dotations des communes serait de 820 millions d'euros au lieu de 1,45 milliard d'euros, celle des EPCI de 350 millions d'euros au lieu de 621 millions d'euros, celle des départements de 650 millions d'euros au lieu de 1,148 milliard d'euros et celle des régions de 255 millions d'euros au lieu de 451 millions d'euros ; la diminution des dotations est ainsi réduite de plus de 43 %.

L'amendement n° 2 supprime également une disposition introduite à l'Assemblée nationale : la prise en compte des recettes des budgets annexes des services publics autres que les services publics à caractère industriel et commercial dans la répartition de la minoration de la dotation forfaitaire des communes. Une remise en cause des modalités de répartition de la baisse de la DGF du bloc communal nuirait à la prévisibilité dont ont besoin les collectivités. De plus, les conséquences d'une telle mesure sont difficiles à évaluer, des données fiables sur les budgets annexes n'étant pas disponibles.

En matière de dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), l'amendement vise à revenir au texte du Gouvernement, en reprenant le mécanisme de sortie en sifflet en quatre ans pour les communes perdant le bénéfice de la dotation en 2016 ; et en étendant les futures hausses de la DSU au-delà des communes cibles, à l'ensemble des communes éligibles.

Enfin, l'amendement ne reprend pas les dispositions du VII de l'article 58, autorisant l'État, à titre expérimental, à créer une dotation pour compenser la perte de recettes résultant de l'abattement sur la taxe foncière sur les propriétés bâties dont bénéficient les organismes de logement social dans les quartiers de la politique de la ville. Ce dispositif trouverait mieux sa place en première partie du projet de loi de finances et le recours à l'expérimentation interroge.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Je ne suis pas co-signataire de l'amendement. Je n'ai pas d'objection à la première partie de l'amendement : la suppression de la prise en compte des budgets annexes relève du bon sens, le mécanisme de sortie en sifflet aussi. En revanche, je m'oppose à la majoration de 1,6 milliard d'euros de la DGF.

M. Philippe Dallier . - Concernant la DSU, le Gouvernement avait décristallisé l'évolution de la DSU, l'étendant à l'ensemble des communes ; mais François Pupponi et les députés ont réintroduit une hyper-concentration sur les communes bénéficiant de la DSU « cible ». Voulez-vous compléter le texte de l'Assemblée nationale ou revenir à celui du Gouvernement ?

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Revenir au texte initial.

L'amendement n° FINC.2 est adopté.

Article 58 quater

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'article 58 quater prévoit des incitations financières pour les communes nouvelles créées jusqu'au l er janvier 2016, qui comptent moins de 10 000 habitants ou regroupent l'ensemble des communes membres d'un ou plusieurs EPCI.

En 2016, 54 communes devraient être créées et bénéficier de ces dispositions : 100 à 250 projets sont en cours de finalisation et plusieurs centaines en cours d'élaboration. Les communes créées après le 1 er janvier 2016 ne pourront bénéficier des incitations financières. C'est pourquoi l'Assemblée nationale a repoussé ce terme au 30 juin 2016, à condition que la délibération soit prise avant le 31 mars ; elle a réservé les incitations aux communes nouvelles regroupant l'ensemble des membres d'un ou plusieurs EPCI de moins de 15 000 habitants ; enfin, l'extension ne s'applique pas à la dotation de consolidation.

Tout cela va dans le bon sens, mais ne touche pas l'ensemble des communes nouvelles créées en 2016. Or elles sont le meilleur moyen d'améliorer l'efficacité de l'action publique locale tout en respectant l'institution communale et la démocratie locale. De plus, créer une commune nouvelle est un processus long et complexe, qui ne peut se faire dans la précipitation.

C'est pourquoi l'amendement n° 3 repousse au 1 er janvier 2017 la date limite de création des communes nouvelles pouvant bénéficier de l'ensemble des incitations financières. Il conserve le seuil de population de 15 000 habitants introduit par l'Assemblée nationale pour limiter le coût du dispositif.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Les modifications introduites par l'Assemblée nationales me paraissent justes. La prolongation de trois mois du délai limite pour la délibération ouvre le dispositif aux communes qui ont pris la décision mais ont besoin de temps supplémentaire pour la mettre en oeuvre. De plus, la fin mars est aussi le moment où la carte des intercommunalités sera définie. Les EPCI auront le temps nécessaire pour définir leur projet. C'est une date bien choisie. Un report d'un an pourrait déboucher ... sur un nouveau report d'un an. Sans parler du coût budgétaire.

M. Michel Bouvard . - Cela se fait à enveloppe fermée.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Il y a un coût de solidarité, donc. Surtout, il faut savoir poser un terme à une procédure.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Pour avoir suivi un projet de commune nouvelle, je peux témoigner de la complexité du processus. L'amendement exclut tout effet d'aubaine. Seule la question du délai nous sépare : je reste favorable à la date butoir du 31 décembre 2016, d'autant que, même si la carte est arrêtée au mois de juin, les préfets auront jusqu'à la fin de l'année pour prendre les arrêtés définitifs.

Mme Marie-France Beaufils . - Nous avons un désaccord de fond sur les communes nouvelles. Les élus recherchent par là des solutions à leurs difficultés financières, mais sans réfléchir au périmètre le plus pertinent. On risque ainsi de modifier le paysage de nos structures communales et intercommunales sans y associer les habitants. Je voterai contre l'amendement.

M. Philippe Dallier . - Je partage la position de mes collègues Marie-France Beaufils et Claude Raynal. D'accord pour étendre le dispositif aux communes déjà engagées dans le processus de création, mais ne rouvrons pas la boîte de Pandore : dans 80 % des cas, les communes nouvelles ne se créent que pour bénéficier de la dotation. Et ce sont les autres communes qui paient ! Mieux vaut en rester aux dispositions retenues par l'Assemblée nationale.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - De nombreuses communes nouvelles sont en attente de création en raison de l'imperfection des textes ; les communes déléguées, en particulier, attendent une proposition de loi qui n'arrivera pas avant la fin de l'année. Ce sont ces communes, souvent de dimensions modestes, qui ont besoin de temps. Nous avons veillé à éviter des effets d'aubaine préjudiciables à la solidarité intercommunale.

M. Maurice Vincent . - Soyons pragmatiques et surmontons les divergences d'appréciation, notamment pour tenir compte de la maturation nécessaire des petites communes. Attendons les deux ou trois prochains mois, pour voir si le mouvement de création s'amorce. Il sera temps alors de prendre les décisions qui s'imposeront. Nous nous abstiendrons et mettrons les jours prochains à profit pour étudier ce qui pourrait nous réunir.

M. Jacques Genest . - Il est déjà difficile de créer des communes nouvelles en milieu rural. Les élus nous reprochent notre précipitation, et nous leur allons leur demander de tout définir en deux mois ! Si nous voulons des communes nouvelles, il faut des incitations. Mieux vaut créer une commune nouvelle à la date du 1 er janvier, notamment pour des raisons comptables. C'est pourquoi je suis favorable au 31 décembre 2016. Donnons aux communes le temps de la réflexion.

L'amendement n° FINC.3 est adopté.

Article 58 quinquies

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'amendement n° 4 supprime la disposition introduite à l'Assemblée nationale qui exclut des dotations de péréquation verticale les communes qui font l'objet d'un arrêté de carence au titre de la loi « solidarité et renouvellement urbain » (SRU), sauf si leur potentiel financier par habitant est inférieur à 75 % du potentiel moyen de leur strate démographique.

Actuellement, 218 communes font l'objet d'un tel arrêté. La suppression abrupte et totale des dotations de péréquation, sans tenir compte de la situation particulière de chaque commune, constituerait une mesure injuste et disproportionnée. Certaines font face à des difficultés réelles pour acquérir des bâtiments et en faire des logements sociaux ou pour trouver des terrains disponibles afin de construire de tels logements. Celles qui ne respectent pas leurs obligations en matière de logements sociaux font déjà l'objet de sanctions financières.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Une commune carencée est une commune qui ne suit pas le plan de progression du logement social tel qu'il a été défini, qui ne fait pas d'efforts pour accroître le parc de logements sociaux : ce n'est pas le cas, heureusement, de toutes les communes encore en dessous des 25 % !

Il peut être nécessaire de durcir les mesures, et la disposition introduite à l'Assemblée nationale va dans ce sens. On peut bien sûr discuter la nature de la sanction, ou sa portée. Je pense que cet article peut être vu comme un amendement d'appel de nos collègues députés, que l'on peut néanmoins partager dans son principe.

M. Daniel Raoul . - On tente à chaque fois de revenir sur cet article 55. Peut-être serait-il utile de rappeler que les arrêtés de carence sont pris par le préfet en tenant compte des conditions matérielles propres à chaque commune : plan de prévention du risque inondation (PPRI) ou risques industriels, par exemple. On ne se contente pas de calculer le pourcentage !

M. Vincent Capo-Canellas . - Combien de communes peuvent être concernées par cet article sanction ? Vu les conditions, il ne doit pas y en avoir beaucoup. Ne s'agit-il pas d'une simple gesticulation ?

Mme Marie-France Beaufils . - Exact ! Les communes concernées seront peu nombreuses. Cela reste néanmoins un moyen de sanctionner celles qui n'ont pas voulu faire un minimum d'efforts.

M. Claude Raynal . - On compterait 218 communes carencées, dont 190 bénéficieraient de la dotation de solidarité urbaine (DSU). Ce n'est pas tout à fait rien.

M. Philippe Dallier . - D'autant que leur nombre augmentera fortement du fait de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur). On est passé de 20 à 25 %, avec un objectif figé à 2025. Il reste neuf ans à toutes les communes en retard pour atteindre un objectif qui a beaucoup augmenté. Ma ville de 22 000 habitants devra construire 400 logements sociaux dans la prochaine période triennale, et 400 de plus les trois ans suivants. La situation devient intenable. Inscrire dans le texte qu'on supprimera la DSU des communes concernées, et que les pénalités pourront être multipliées par cinq, c'est décidément aller trop loin. Il serait temps de revenir sur l'article 55 en jouant le contrat plutôt que le coup de bâton. On peut pénaliser ceux qui ne veulent pas faire - car ils existent - sans multiplier à l'envi les sanctions financières. Trop, c'est trop.

Mme Marie-France Beaufils . - Les communes qui bénéficient de la DSU et dont le potentiel financier par habitant est inférieur à 75 % de la moyenne sont protégées. Des dispositifs de protection existent, il faudrait voir comment ils s'appliquent aux 190 communes concernées.

M. Daniel Raoul . - Le coefficient 5 dans la pénalité n'est pas obligatoire. C'est une possibilité laissée à l'appréciation du préfet en fonction des conditions propres à chaque situation.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - La carence définit un cas très précis, qui ne se résume pas aux communes qui seraient en dessous des 25 % de logements sociaux en 2025. Il s'agit de comparer la réalisation aux objectifs de rattrapage que la collectivité, EPCI ou commune, s'est engagée à poursuivre dans ses pré-négociations avec l'État. Il y a carence quand le contrat n'est pas respecté. Il faudrait néanmoins regarder de quoi on parle en termes de montants financiers.

Mme Fabienne Keller . - La disposition de l'Assemblée nationale laisse à penser que les maires ne respectent pas la loi et sont presque des délinquants. Mieux vaudrait songer à les épauler ! Quant à une pénalité imposée par les préfets, elle n'est pas réaliste. Le préfet doit appliquer la règle. Lui transmettre la responsabilité d'une évaluation globale alors que la loi a déjà fixé des critères, cela relève de l'illusion.

L'amendement n° FINC.4 est adopté.

Article 58 septies

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - L'amendement n° 5 concerne la dotation politique de la ville (DPV), qui a remplacé la dotation de développement urbain. Il s'agit d'une dotation finançant des projets d'investissement ou d'actions dans le domaine économique et social. Aujourd'hui, la loi précise qu'elle ne peut pas financer de dépenses de personnel. L'Assemblée nationale revient sur cette interdiction. Notre amendement supprime l'ajout des députés pour revenir au droit existant.

M. Yvon Collin . - Très bien.

M. Jean-Claude Requier . - On est d'accord.

L'amendement n°  FINC.5 est adopté.

Article 61

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 6 est de cohérence avec notre vote de ce matin sur la première partie du projet de loi de finances. Dans l'article sur la DGF, nous avons choisi de geler la péréquation à son niveau de 2015. Par cohérence, le montant du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) doit être fixé à 780 millions d'euros.

L'amendement n° FINC.6 est adopté.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - En ce qui concerne le FPIC, l'Assemblée nationale a adopté de nombreuses modifications des règles de majorité.

Je vous rappelle que la répartition dite dérogatoire permet de répartir, entre les communes membres, la contribution ou le reversement selon les critères choisis, sans s'écarter de plus de 30 % de la règle de droit commun. Cette répartition dérogatoire doit être prévue par une délibération de l'EPCI à la majorité des deux tiers.

Nous vous proposons de prévoir qu'il est également possible de déroger à la répartition en fonction du coefficient d'intégration fiscale (CIF), entre l'EPCI d'une part et l'ensemble de ses communes membres d'autre part, à condition qu'elle ne conduise pas à s'écarter de plus de 30 % de la répartition de droit commun. Tel est l'objet de l'amendement n° 7. Autrement dit, nous proposons d'introduire dans la répartition dérogatoire la possibilité pour l'EPCI de revenir sur le CIF dans une limite de plus ou moins 30 %.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Cette mesure ouvre la possibilité que l'ajustement se fasse au profit des EPCI, selon les mêmes règles de majorité. C'est un système plus souple.

L'amendement n° FINC.7 est adopté.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Pour répartir librement le FPIC, des délibérations concordantes de l'organe délibérant de l'EPCI à la majorité des deux tiers et des conseils municipaux des communes membres sont requises. Tout en maintenant cette règle, nous vous proposons de rétablir la possibilité de l'unanimité du conseil communautaire. Tel est l'objet de l'amendement n° 8. Il faudra donc procéder en deux temps : s'il y a unanimité, il ne sera pas nécessaire de solliciter la majorité des deux tiers et toutes les communes membres, ce qui simplifiera le processus.

Nous prévoyons que l'EPCI se prononce dans un délai de deux mois à compter de la notification par le préfet, et que les conseils municipaux, s'il y a lieu de les consulter, le font dans un délai d'un mois à compter de la notification de sa délibération par l'EPCI. Les conseils qui ne se prononcent pas seront réputés favorables.

M. Vincent Capo-Canellas . - J'ai cru entendre que dans certains départements de province, certaines communautés se trouvaient confrontées à une absence d'unanimité, ce qui posait problème. Cela laisse à penser que l'unanimité est requise dans certains cas ?

M. Michel Bouvard . - Je comprends la nécessité de simplifier le dispositif. Cela étant, dans la mesure où il s'agit d'un prélèvement sur les recettes de la commune, il est hautement souhaitable que chaque conseil municipal puisse en délibérer.

M. Philippe Dallier . - Je voterai cet amendement dont les perspectives sont un peu plus larges que ce qui a été dit. Vous supprimez à juste titre les alinéas 29 et 30. Il y était cependant fait état du problème des communes pauvres qui rejoignent des intercommunalités moins pauvres. Si l'intercommunalité est contributrice au FPIC, même légèrement, les communes pauvres qui en avaient le bénéfice le perdent. François Pupponi a déposé un amendement pour régler ce cas, mais sa solution est inacceptable : il réaffecte aux communes pauvres de l'intercommunalité les fonds anciennement prélevés sur les communes moins pauvres. On arrive ainsi à des situations absurdes où deux communes, par exemple, reçoivent un montant de FPIC multiplié par cinq, grâce aux contributions de toutes les communes voisines, alors même que les dotations de l'intercommunalité au titre du FPIC ont baissé.

On peut bien sûr s'en remettre à la sagesse des élus communautaires à la majorité des deux tiers. On peut comprendre aussi que certaines communes s'inquiètent, et il serait bon de leur apporter des garanties.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Il est vrai que le système fonctionnait initialement à l'unanimité. Michel Bouvard imagine une situation où le représentant de chaque commune à l'intercommunalité ne reflète pas la vision de son conseil municipal ...

M. Michel Bouvard . - Cela arrive. Il suffit d'un vote avec panachage et majorité à une voix d'écart pour que les choses puissent devenir très compliquées.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Nous voulons au moins les simplifier dans le cas où l'accord est unanime au niveau de l'EPCI, ce qui, précisons-le, est très difficile à obtenir. Nous proposons, avec l'amendement n° 12, de revenir sur l'amendement de François Pupponi évoqué par Philippe Dallier.

L'amendement n° FINC.8 est adopté.

Enfin, la commission achève l'examen du rapport de MM. Charles Guené et Claude Raynal, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et le compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » (et articles 58 à 62 quater ).

Article 61

Mme Michèle André , présidente . - Nous reprenons la discussion à l'examen de l'amendement n° 9.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Une répartition dérogatoire du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) entre communes est possible sur des critères de ressources ou de charges, à condition que cela ne conduise pas à une majoration de la contribution, ou une minoration de l'attribution, de plus de 30 % par rapport au droit commun. L'Assemblée nationale a prévu que l'on puisse aller au-delà de ces 30 % si les communes les plus pauvres ne sont pas prélevées ou lorsque les communes riches perçoivent moins.

Créer des dérogations à la dérogation complexifierait le fonctionnement du FPIC. En outre, l'encadrement prévu actuellement évite de mettre en difficulté des communes. Enfin, si la répartition dérogatoire n'est pas assez souple, l'EPCI peut toujours recourir à la répartition libre. Aussi, l'amendement n° 9 supprime les règles introduites à l'Assemblée nationale qui remettent en cause l'encadrement de la répartition dérogatoire.

M. Michel Bouvard . - C'est trop compliqué, il faudrait supprimer le FPIC ! Je m'abstiens.

L'amendement n° FINC.9 est adopté.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - L'amendement n° 10 revient sur la modification de l'Assemblée nationale. Dans le droit actuel, le prélèvement au titre du FPIC susceptible d'être dû par les 260 communes les plus pauvres bénéficiant de la dotation de solidarité urbaine (DSU) cible n'est pas appliqué, et son montant est divisé par deux pour les 120 autres communes également éligibles à la DSU cible. Le coût est pris en charge par leur EPCI. Le Gouvernement propose d'élargir l'exonération de prélèvement aux 280 communes percevant la DSU cible ainsi qu'aux 2 500 premières communes bénéficiant de la fraction cible de la dotation de solidarité rurale (DSR). L'Assemblée nationale a préféré exonérer les communes bénéficiaires de la DSU dont le potentiel financier par habitant est inférieur à celui de sa strate ; les montants correspondants seraient pris en charge par l'EPCI et les communes membres, au prorata de leur contribution. Cette solution ne permet pas une identification claire des bénéficiaires et nous ne connaissons pas ses incidences financières. Il est donc préférable d'en revenir au dispositif du Gouvernement, plus lisible, dont les bénéficiaires sont clairement identifiés.

L'amendement n° FINC.10 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 11 vise à résoudre le problème des communes pauvres dans des EPCI riches. La situation actuelle est paradoxale puisque des communes sans recettes sont prélevées au titre du FPIC. Cet amendement - sans doute perfectible - exclut du prélèvement les communes, qui, si elles étaient isolées, bénéficieraient du fonds de péréquation. Le coût de cette exonération serait réparti au sein de l'EPCI. Lorsque j'y ai fait un contrôle début octobre, la direction générale des collectivités locales (DGCL) a reconnu que certaines communes sans ressources rencontraient des difficultés monstrueuses parce qu'elles appartiennent à un EPCI riche.

M. Michel Bouvard . - Je remercie le rapporteur général de cette excellente initiative. L'on pourrait également prendre en compte, parmi les critères de l'exonération l'éligibilité des communes à l'ancienne dotation de solidarité des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, qui visait les communes considérées comme pauvres.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Je suis réservé sur cet amendement, que je prends comme un amendement d'appel. Plusieurs aspects sont problématiques. D'abord, le retour à une logique communale, contraire à la logique du FPIC. L'indice synthétique devra être calculé pour chaque commune - ce sera une usine à gaz. Il ne faut pas non plus oublier qu'une commune pauvre membre d'un EPCI riche bénéficie de cette richesse, par les dotations de solidarité communautaire, les services mis en place... Il faut rester équilibré et ne pas se contenter d'une vision uniquement à l'échelle du FPIC. Enfin, le Gouvernement propose que le prélèvement dû par les 280 communes bénéficiant de la DSU cible soit annulé, et que les 2 500 communes bénéficiant de la fraction cible de la dotation de solidarité rurale (DSR) soient exonérées. Cela prend en compte ces problèmes.

M. Dominique de Legge . - Je partage l'objectif recherché, mais m'interroge sur la rédaction : l'amendement parle des communes n'appartenant à aucun établissement de coopération intercommunale. Sauf erreur de ma part, aujourd'hui, cela n'existe plus.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Il s'agit bien d'un amendement d'appel destiné à poser le problème qui n'est pas résolu par l'exclusion des communes percevant la DSR et la DSU. J'ai essayé de comparer la situation de ces communes avec celle qu'elles connaîtraient si elles étaient isolées et bénéficiaient du FPIC. C'est un critère simple. J'ai conscience que cet amendement est perfectible.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Je comprends le souhait du rapporteur général, mais je m'abstiens.

Mme Marie-France Beaufils . - Autre situation particulière : une commune pauvre appartenant à un EPCI ayant certains moyens permet à celui-ci de ne pas être prélevé au titre du FPIC. L'amendement ne couvre pas la diversité des situations. On risque l'injustice.

M. Daniel Raoul . - Selon mon expérience du fonctionnement d'une communauté d'agglomération, ce problème était réglé par la dotation de solidarité communautaire, facilement, par une connaissance de proximité.

L'amendement n° FINC.11 est adopté.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - L'Assemblée nationale a prévu que lorsqu'une commune contributrice au FPIC intègre un EPCI non contributeur, elle reverse chaque année le montant de sa contribution à certaines communes membres de l'EPCI. L'amendement n° 12 supprime cette possibilité qui revient à figer la contribution due par une commune : dans les cas de changements de périmètres intercommunaux, une commune qui contribue aujourd'hui au FPIC car elle appartient à un EPCI riche devrait continuer à le faire, quelles que soient les caractéristiques du nouvel EPCI. Enfin, il s'agit d'un changement de logique du FPIC, qui a toujours été calculé à l'échelon intercommunal.

M. Michel Bouvard . - Je m'abstiens.

M. Philippe Adnot . - Je vote contre. C'est une question de solidarité, il ne faut pas inciter à l'opportunisme financier.

M. Philippe Dallier . - Mais non !

L'amendement n° FINC.12 est adopté.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'Assemblée nationale a porté le montant du Fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France (FSRIF) de 270 millions à 290 millions d'euros. L'amendement n° 13 suit la proposition du Gouvernement et propose d'en rester au montant fixé dans le projet de loi de finances initiale.

M. Roger Karoutchi . - On demande une réforme du FSRIF depuis des années, sans l'obtenir, et chaque année, il est augmenté. Réformons-le d'abord. Je soutiens l'amendement du rapporteur général.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Cet amendement correspond à un gel de la péréquation. Je m'abstiens.

M. Francis Delattre . - Je vote contre, mais je suis bien seul...

L'amendement n° FINC.13 est adopté.

Article 61 bis

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - L'amendement n° 14 corrige une erreur de référence.

L'amendement n° FINC.14 est adopté.

Article 61 sexies

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - L'amendement n° 15 reconduit annuellement le rapport sur le FPIC remis cette année pour la première fois au Parlement, qui évalue notamment la soutenabilité du prélèvement et les conséquences pour les communes bénéficiaires. Cela ne doit pas empêcher la direction générale des collectivités locales de fournir également aux commissions des finances les fichiers de répartition du FPIC. Demander un rapport sur l'utilisation des ressources du fonds, comme le propose l'Assemblée nationale, ne nous paraît pas justifié.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Il y a déjà un rapport sur le sujet, qu'il vaut mieux lire attentivement plutôt qu'en demander un deuxième.

M. Michel Bouvard . - Le rapport de cette année ne porte pas sur la soutenabilité du FPIC, mais sur ses usages. La question n'est abordée que dans les annexes, alors que c'était pourtant la commande du Parlement. On s'est moqué de la représentation nationale ! Non seulement le rapport a été délivré après le dépôt du projet de loi de finances et l'engagement de sa discussion à l'Assemblée nationale, mais en plus il est hors sujet.

M. Charles Guené , rapporteur spécial . - Le rapport précédent devait porter sur la soutenabilité des prélèvements. Astucieusement, nous avons laissé cette demande et ajouté l'effet du reversement pour les communes bénéficiaires. Nous aurons peut-être les deux... Il est vrai que ce rapport sur le FPIC est extrêmement léger.

M. Michel Bouvard . - C'est une caricature.

L'amendement n° FINC.15 est adopté.

Article 62

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - L'amendement n° 16 rétablit l'article 62 qui réduisait le plafond du taux de cotisation obligatoire des collectivités territoriales au Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) de 1 % à 0,8 %. Cela permettrait de restituer 68 millions d'euros aux collectivités qui souffrent de la baisse des dotations. Cette mesure est totalement soutenable pour le CNFPT, dont la Cour des comptes indique qu'il pourrait contribuer à la réduction des déficits publics sans réduire sa qualité de service. Chaque année, il dégage un excédent de fonctionnement. Ses dépenses de fonctionnement ont augmenté de 14,6 % entre 2007 et 2013, en raison de charges de structure, d'immobilier et d'une masse salariale non maîtrisée. Ses réserves étaient de 55 millions d'euros en 2013. Une baisse de 20 % du taux de la cotisation obligatoire était tout à fait soutenable, mais l'Assemblée nationale n'a pas été très courageuse.

M. Claude Raynal , rapporteur spécial . - Je propose pour ma part de rester au taux actuel de 1 %. Le rapport de la Cour des comptes cité a quatre ans, ce n'est pas la situation actuelle. Un nouveau rapport vient corriger le tir.

Le gain pour les collectivités territoriales est factice. Actuellement, beaucoup d'offres de formation sont gratuites, en particulier si elles sont internes aux collectivités, l'objectif étant d'utiliser activement le fonds en réserve. Le CNFPT assume la formation des apprentis, estimé entre 10 et 15 millions d'euros en 2016. La Cour des comptes a noté une amélioration de l'utilisation des fonds. Une baisse du taux de cotisation se traduira par une diminution de l'offre de formation, ou par des offres payantes à l'extérieur. Mais je ne sens pas un vent très favorable dans notre assemblée...

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Le rapport de la Cour des comptes auquel je faisais référence date de mai 2015.

M. Daniel Raoul . - Quand on connaît l'aisance financière du CNFPT et la dérive de sa masse salariale, on peut baisser de 20 % la dotation que payent les communes pour que le CNFPT contribue à l'effort national.

M. Roger Karoutchi . - Très bien.

M. Philippe Adnot . - Absolument.

M. Vincent Capo-Canellas . - Je soutiens cet amendement, qui exauce un souhait de Jean Arthuis, qui m'en a encore parlé récemment.

L'amendement n° FINC.16 est adopté.

Mme Michèle André , présidente . - Merci, chers collègues, de votre disponibilité et de votre présence active.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 19 novembre 2015, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a proposé d'adopter des crédits de la mission, tels que modifiés par l'amendement présenté par Charles Guené, de confirmer l'adoption, sans modification, des crédits du compte spécial, de confirmer l'adoption, sans modification, des articles 58 ter , 58 sexies , 58 octies , 58 nonies , 59, 60, 60 bis , 61 ter , 61 quater , 61 quinquies , 62 bis , 62 ter et 62 quater, de confirmer l'adoption des articles 58, 58 bis , 58 quater , 61 bis et 61 sexies , tels que modifiés par les amendements précédemment adoptés par la commission et de confirmer l'adoption de l'article 61 tel que modifié par les amendements adoptés par la commission et par l'amendement présenté par Charles Guené, de confirmer le rétablissement de l'article 62 et de confirmer la suppression des articles 58 quinquies et 58 septies .

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