B. LES PIAL, UN OUTIL DE GESTION ADMINISTRATIVE CONTROVERSÉ, ACCUSÉ D'AVOIR AGGRAVÉ LES CONDITIONS DE TRAVAIL DES AESH

Créés par la loi pour une école de la confiance de 2019, les PIAL, après une phase d'expérimentation, ont été généralisés à la rentrée 2021 à tout le territoire. Il y en a désormais plus de 4 000.

Pour le ministère, ce nouveau mode de gestion des ressources humaines doit remplir trois objectifs :

Des auditions, il ressort que le premier bilan des PIAL fait l'objet d'appréciations très diverses, voire totalement divergentes de la part des différents acteurs concernés :

pour les syndicats des personnels de l'Éducation nationale et les collectifs d'AESH , il manque à cet outil de gestion administrative une dimension pédagogique et éducative, ainsi qu'une approche interdisciplinaire (absence de lien avec le médico-social et le médico-éducatif). Surtout, la mise en place des PIAL a entraîné de profondes évolutions du métier d'AESH ayant accentué la dégradation des conditions de travail : hausse du nombre d'élèves suivis de manière simultanée - les notifications d'aide mutualisée (AESH-m) sont désormais majoritaires sur celles d'aide individuelle (AESH-i) -, extension des interventions à l'ensemble du territoire géographique couvert par le PIAL, changements fréquents d'affectation sans délai de prévenance, augmentation des déplacements entre les lieux d'affectation. Deux expressions entendues en audition résument ce très fort rejet des PIAL : « c'est le royaume de la flexibilité », « c'est un système perdant-perdant pour les enfants et pour les accompagnants » ;

pour le syndicat des personnels de direction de l'Éducation nationale , les PIAL ont globalement permis de gagner en qualité d'accompagnement, en réactivité et en proximité de gestion des ressources humaines . Ces améliorations sont toutefois variables d'un PIAL à l'autre, leur taille étant un critère déterminant - certains PIAL gèrent 90 AESH, alors que le dimensionnement optimal d'un PIAL est estimé autour d'une trentaine d'AESH. Bien que l'outil soit perfectible, le PIAL est considéré, par les représentants des chefs d'établissement, comme une avancée sur laquelle il ne faut pas revenir ;

pour les représentants des directeurs de maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) , le PIAL est, en pratique, un outil d'allocation optimale de la ressource d'AESH et non un mode de gestion au service des besoins de l'élève. Preuve en est, le travail collaboratif entre les équipes des MDPH et celles des PIAL, pourtant nécessaire à une meilleure prise en compte des besoins des élèves, est, à ce jour, quasi-inexistant ;

pour les associations de parents d'élèves , les PIAL ont apporté « du mieux » par rapport à une situation antérieure très dégradée, mais beaucoup reste encore à faire. Les PIAL s'accompagnent d' une augmentation de l'aide mutualisée, tendance qui pose un certain nombre de difficultés : sélection plus délicate du profil des AESH concernés, car leurs compétences doivent correspondre aux besoins de plusieurs enfants ; moins de temps pour les AESH de nouer des liens avec les équipes pédagogiques ; plus de déplacements, surtout en milieu rural. Les associations déplorent aussi l'insuffisance voire l'absence de prise en compte des parents dans le fonctionnement des PIAL . Plus globalement, elles pointent le manque de dialogue entre les AESH et les familles , alors que l'élève en situation de handicap a besoin d'être pris en charge « dans sa globalité » ;

pour le ministère , les PIAL ont déjà beaucoup évolué depuis leur phase expérimentale, mais sont toujours sous-tendus par le principe d'une gestion de la ressource humaine au plus près des besoins d'accompagnement. Des écarts importants de taille et de fonctionnement des PIAL ayant été constatés selon les territoires, un travail d'harmonisation est en cours , sur la base d'un référentiel national, le ministère estimant que le calibrage le plus pertinent se situe autour de 30 AESH par PIAL (50 au maximum).

Au cours de la table ronde consacrée aux PIAL, la rapporteure a été particulièrement intéressée par les pratiques mises en oeuvre par le service départemental de l'école inclusive des Pyrénées-Atlantiques . Le département se distingue par un taux d'accompagnement optimal : tous les élèves bénéficiant d'une notification d'aide humaine sont accompagnés. Le fonctionnement des 70 PIAL que compte le département donne également satisfaction : les coordonnateurs s'efforcent de mettre en oeuvre une gestion « RH » de proximité et de favoriser un sentiment d'appartenance des AESH aux PIAL, le retour des familles est très positif (une cellule « Écoute école inclusive » a été créée, un temps d' « installation » des AESH auprès des familles a été mis en place). Les AESH du département bénéficient, en plus de l'adaptation à l'emploi obligatoire, de 12 heures de formation continue. Leurs frais de déplacement sont pris en charge au-delà d'une distance de 15 km entre leur domicile et leur(s) établissement(s) d'affectation. 12 AESH-référents ont été recrutés pour venir en appui des AESH.

Compte tenu de la grande diversité de fonctionnement des PIAL, au sein d'un même département et entre départements, la rapporteure appelle le Gouvernement à encourager l'échange de bonnes pratiques et à mettre en place un pilotage national pour éviter de trop grandes disparités selon les territoires .

Au regard des nombreuses critiques que les PIAL suscitent, la rapporteure appelle le ministère à agir pour :

§ mettre un terme aux dérives d'une gestion de la ressource humaine basée sur la flexibilité ;

§ replacer la qualité de l'accompagnement au coeur de leur objectif ;

§ renforcer le cadrage national pour plus d'harmonisation entre les territoires .

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