B. UN TEXTE QUI CONTIENT DE NOMBREUX ANGLES MORTS

1. Un projet de loi qui oscille entre promesses et déceptions

Alors que le contexte migratoire actuel nous invite à des mesures fortes, le projet de loi présenté par le Gouvernement reste au milieu du gué . Certaines dispositions telles que l'obligation de réussite à un examen de langue pour obtenir un titre pluriannuel ( article 1 ), la facilitation de la levée des protections contre l'éloignement ( articles 9 et 10 ) ou celles relatives au respect des principes de la République ( article 13 ) sont intéressantes, même si leur champ pourrait être étendu. C'est surtout le cas de la réforme du contentieux qui est l'aboutissement très attendu d'un travail de longue haleine initié par le Conseil d'État et prolongé par la commission des lois (articles 21 à 23) 3 ( * ) . La commission des lois appelle le Gouvernement à renouveler l'exercice s'agissant de la simplification du régime des titres de séjour, véritable « hydre à 187 têtes ».

Au-delà de ces quelques dispositions prometteuses mais perfectibles, la commission des lois n'a pu que constater que le texte soumis à discussion était loin des ambitions affichées . Ainsi, la plus-value de la création d' « Espaces France Asile » ( article 19 ) et de la réforme de la Cour Nationale du droit d'asile (CNDA, article 20 ) est modeste. De la même manière, le renforcement des sanctions pénales applicables aux passeurs ou aux marchands de sommeil (articles 14 et 15) ne soulève pas de difficulté de principe, même si la commission des lois ne nourrit pas d'illusion sur leur portée concrète. L'utilité de certaines dispositions est enfin peu évidente , par exemple l'article 5.

2. De nombreux enjeux fondamentaux qui ne sont pas traités par le projet de loi

Surtout, le projet de loi laisse de côté des pans entiers de la politique migratoire qui devraient pourtant être traités en priorité . Il ne comprend ainsi aucune disposition relative à la mise en place de quotas migratoires, au resserrement du régime du regroupement familial et de la procédure dite « étranger malade », à l'instruction des demandes de titres de séjour, aux conditions d'une intégration ou encore à la possibilité de restreindre les visas à l'encontre des pays peu coopératifs en matière de délivrance de laissez- passer consulaires.

À partir de ce constat, la commission des lois a entrepris d'améliorer les dispositions les plus intéressantes du texte, de supprimer celles dont l'intérêt n'est pas démontré ainsi que de le compléter par des dispositifs concrets et qu'elle défend de longue date . Comme elle l'avait fait lors de l'examen de la loi « Collomb » en 2018, la commission des lois a entendu présenter un contre-projet plus cohérent, plus robuste et donc plus efficace.


* 3 Rapport d'information n° 626 (2021-2022) de M. François-Noël Buffet, fait au nom de la commission des lois, « Services de l'État et immigration, retrouver sens et efficacité », 10 mai 2022.

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