1. Malgré un infléchissement en 1996, les dépenses nettes d'aide sociale augmentent toujours à un rythme soutenu

Selon l'enquête réalisée par le groupe permanent de l'ODAS composé des responsables des services financiers des services d'action sociale de 29 départements constituant un échantillon représentatif de la France métropolitaine, la dépense nette d'aide sociale s'est élevé à 76 milliards de francs en 1996, soit une augmentation de 4,1 % par rapport à l'année dernière où elle atteignait 73 milliards de francs.

Il convient d'apporter une précision terminologique.

Les dépenses nettes d'aide sociale sont égales aux dépenses brutes -c'est-à-dire au montant total des prestations versées par les départements- diminuées des recettes ultérieurement encaissées auprès des bénéficiaires de l'aide sociale, de leurs obligés alimentaires et des organismes de sécurité sociale.

C'est cette donnée qui est prise en compte par l'ODAS et qui apparaît comme le renseignement le plus révélateur sur la charge financière réelle qui pèse sur les départements.

Par ailleurs, les dépenses directes d'aide sociale ne comprennent que les prestations versées, tandis que les dépenses indirectes incluent les dépenses de fonctionnement liées à l'exercice de leurs compétences par les départements. Elles se composent essentiellement des dépenses de personnel ainsi que des dépenses d'équipement et de fonctionnement courant des services sociaux du conseil général.

Selon l'étude de l'APCG qui porte sur les données brutes en matière d'aide sociale inscrites au compte administratif de 99 départements, hors Paris, Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte (72,7 milliards de francs de dépenses brutes en 1996), le taux de croissance pourrait être un peu plus élevé (+ 4,3 %) pour 1996 que celui observé par l'ODAS tout en restant comparable.

Les premières données sur les budgets primitifs de 1997 confirmeraient l'infléchissement de la hausse des dépenses qui s'établirait encore à 4,5 % en 1997 (75,9 milliards de francs de dépenses comptabilisés).

En tout état de cause, l'année 1996 apparaît donc comme une année de décélération apparente des dépenses , même si l'analyse des diverses composantes de la dépense, sur laquelle nous reviendrons, confirme le maintien des facteurs structurels de hausse .

L'ODAS souligne par ailleurs que cette progression moyenne de 4 % est liée à la faible progression des dépenses des départements très peuplés. Or, il faut souligner que les 20 départements les plus peuplés représentent 70 % de l'ensemble de la dépense nette d'action sociale des départements. Les dépenses de la majorité des départements progressent donc encore de beaucoup plus de 4 %.

L'ODAS estime donc qu'" il serait donc imprudent de tirer des enseignements définitifs d'une évolution assez contrastée, et probablement très influencée par les pratiques locales . "

Quoi qu'il en soit, la progression de la dépense d'aide sociale demeure impressionnante rapportée à d'autres indicateurs économiques.

a) La progression des dépenses demeure toujours sensiblement plus rapide que l'inflation

L'évolution de la dépense nette d'aide sociale a été particulièrement spectaculaire en 1990 et en 1993 où elle a frôlé les 10 % d'augmentation annuelle. En 1994 et 1995, la hausse a été quatre fois supérieure à l'inflation en moyenne.

Au cours des années 90, la faiblesse du taux d'inflation a clairement joué comme un " révélateur " de la progression considérable des dépenses d'aide sociale. La pression qui résulte sur les budgets locaux de la hausse des dépenses sociales n'est plus " masquée " artificiellement par l'évolution de la hausse des prix.

Evolution des dépenses nettes d'action sociale départementale

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

Dépenses nettes
(en milliards de francs)

49,8

54,1

57,7

63

68,2

73

76

Evolution

+ 9,9 %

+ 8,6 %

+ 6,7 %

+ 9,2 %

+ 8,3 %

+ 7,0 %

+ 4 %

Prix à la consommation (moyenne annuelle)

3,4

3,2

2,4

2,3

2,1

1,7

2

Source : ODAS

L'année 1996 semble marquer un retour à la normale ; encore faut-il souligner que le taux de progression de 4 % est encore le double de celui de l'inflation et excède de 1,5 point le taux du produit intérieur brut en valeur qui ressort à 2,4 % dans les documents du projet de loi de finances pour 1998.

b) Les dépenses d'aide sociale représentent une part croissante des dépenses des départements

Les données fournies par l'APCG sur les comptes administratifs en 1995 montrent que si les dépenses totales d'aide sociale, c'est-à-dire les dépenses brutes versées au titre des prestations auxquelles s'ajoutent les dépenses indirectes de structure administrative, représentaient en moyenne 56 % des dépenses totales de fonctionnement des départements entre 1984 et 1989, ce taux a dépassé la barre des 60 % en 1995 .

Evolution de la part de la dépense totale d'aide sociale
de fonctionnement au sein des dépenses des départements

(en millions de francs)

Dépenses totales d'aide sociale (1)

% des dépenses

Montant

Evolution en %

de fonctionnement

1985

47.145

56,5

1986

48.981

3,9

55,3

1987

50.497

3,1

56,1

1988

52.106

3,2

55,5

1989

54.133

3,9

55,2

1990

58.339

7,8

55,5

1991

63.166

8,3

57,0

1992

68.295

8,1

57,7

1993

73.383

7,5

58,9

1994

77.949

6,2

59,6

1995

82.092

5,0

60,4

(1) Dépenses directes et indirectes, hors Paris Source : APCG-CEDI

L'action sociale demeure donc la cause principale de l'augmentation des dépenses de fonctionnement des départements, même si l'on a assisté en 1995 à une décélération du taux de progression de ces dépenses qui variait entre 6 % et 8 % au cours des six derniers exercices et qui est passé à 5 % en 1996.

Proportion des dépenses d'aide sociale au sein des dépenses des départements

c) Les dépenses d'aide sociale progressent toujours plus rapidement que les ressources transférées lors de la décentralisation

En compensation du transfert de compétence résultant de la loi du 22 juillet 1983, les départements se sont vu attribuer le produit de la vignette automobile, des droits de mutation et de la plus-value des recettes provenant de la réforme de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Le solde des sommes non couvertes par les transferts de fiscalité est en principe opéré au sein de la dotation générale de décentralisation (DGD).

Or, l'analyse montre que si les dépenses sociales ont progressé très régulièrement, les recettes de fiscalité indirecte transférées aux départements se sont contractées sous l'effet du ralentissement économique tandis que la DGD, indexée sur la dotation globale de fonctionnement (DGF), a subi également le contrecoup de la recherche d'une meilleure maîtrise des dépenses de l'Etat.

Il résulte de ces évolutions inverses un véritable " effet de ciseaux " illustré par le graphique ci-après, établi à partir des données définitives disponibles dans les comptes nationaux.

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