2. La libéralisation progressive des marchés agricoles

a) Les échanges mondiaux de produits agricoles et alimentaires

Si l'agriculture est bel et bien un secteur internationalisé, force est de constater le déclin, depuis 1950, de la part de l'agro-alimentaire dans le commerce des marchandises. Trois facteurs expliquent cette tendance générale :

- la diminution du poids relatif des produits agro-alimentaires dans la consommation de différents pays, au fur et à mesure que les revenus s'élèvent, en particulier pour les produits situés en amont de la filière ;

- la baisse des prix relatifs des produits, qui apparaît lorsque l'offre tend à s'accroître plus vite que la demande et qui est accentuée par le décalage entre les prix intérieurs et les prix mondiaux ;

- l'émergence, puis la prédominance de politiques agricoles visant à accroître le potentiel de production local au détriment des importations.

En dépit de ce recul des échanges agro-alimentaires dans les flux totaux de marchandises, les échanges mondiaux de produits agricoles et alimentaires ont connu une vive expansion à partir des années 70, juste après le premier choc pétrolier, en particulier dans le secteur des produits bruts (céréales notamment). L'envolée des importations de l'ex-Union soviétique et la croissance de la demande en provenance des pays sous-développés, à la suite de la montée de l'endettement consécutive au recyclage des pétro-dollars, ont été à l'origine d'un boom des échanges. En outre, les produits transformés occupent, depuis le milieu des années 80, une place de plus en plus importante dans les flux mondiaux agro-alimentaires et ont même supplanté les produits bruts au début de la décennie 90. Rappelons que ce dynamisme du commerce agricole mondial s'est affirmé aux dépens des Etats-Unis, l'accroissement des flux intracommunautaires et la proposition de l'Union Européenne sur les marchés tiers ayant contribué au recul des exportations américaines de produits agricoles et alimentaires.

Cette amputation de l'hégémonie américaine en matière d'échanges mondiaux agricoles a exacerbé les conflits d'intérêts entre les Etats-Unis et l'Union Européenne. L'UE a pu ainsi combler une large part de son déficit bilatéral avec les Etats-Unis et accentuer son exédent vis-à-vis du Japon. Les enjeux sont, de part et d'autre, importants, en dépit du poids déclinant qu'occupe l'agriculture non seulement à l'intérieur des frontières, mais également dans le commerce mondial. Outre le fait que des deux côtés de l'Atlantique subsistent des exploitants agricoles qui disposent d'une représentativité politico-économique non négligeable, la dynamique de la demande mondiale alimentaire incite les producteurs américains à convaincre l'Etat de renforcer les dispositifs de déréglementation des politiques agricoles, à promouvoir la libéralisation des marchés, dans un cadre institutionnel précis, l'Organisation Mondiale du Commerce (ex-GATT), afin d'évincer les concurrents européens, supposés mal préparés à affronter la production américaine.

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