b) Les personnels de maintenance et d'entretien

M. Jean-Marc Boulanger a indiqué à la mission que les personnels d'entretien de l'AP-HP chez qui avaient été décelées des plaques pleurales étaient tous intervenus sur des matériaux amiantés, en les perçant notamment. L'exemple le plus fréquemment évoqué est celui du revêtement ou des dalles de sol. Amalgamées dans la matière plastique ou dans le ciment, les fibres d'amiante ne sont pas dangereuses, mais une intervention de nettoyage ou de maintenance sur ce revêtement peut provoquer la diffusion de poussières d'amiante. Mme Michèle Guimon a reconnu à cet égard qu' « il y a encore probablement des machines de nettoyage qui dégagent des fibres d'amiante » 78 ( * ) .

L'activité des personnels de maintenance et d'entretien est donc susceptible de les exposer aux fibres d'amiante et également de provoquer la détérioration de matériaux contenant de l'amiante lié, engendrant une pollution environnementale dangereuse pour l'ensemble des occupants des bâtiments.

S'agissant de l'amiante friable, l'article 28 du décret du 7 février 1996 précité prévoit que « lors d'opérations d'entretien ou de maintenance sur des flocages ou calorifugeages contenant de l'amiante : 1° Sauf si c'est techniquement impossible, les équipements de protection collective permettant de réduire les émissions de poussières doivent être mis en place ; 2° Dans tous les cas, les travailleurs doivent être équipés de vêtements de protection et d'appareils de protection respiratoire adaptés. »

Concernant la mise en oeuvre effective de ces mesures, il convient de distinguer la situation des personnels dont le statut autorise le contrôle des conditions d'intervention et celle des intervenants ponctuels, notamment sous-traitants, pour lesquels la sécurité est beaucoup moins bien assurée.

Lors du déplacement de la mission sur le campus de Jussieu, les représentants de Paris VII, de l'IPG et de l'EPA de Jussieu ont reconnu que « s'il est possible de surveiller l'état de santé de la trentaine d'agents affectés au nettoyage et à l'entretien des locaux, il est plus difficile de connaître le devenir des salariés employés par des sociétés extérieures et qui interviennent sur le campus ».

La situation des personnels de maintenance des hôpitaux est, à cet égard, particulière : M. Xavier Bertrand, ministre de la santé, a indiqué que les personnels techniques bénéficiaient aujourd'hui d'un suivi systématique par la médecine du travail. Devant la mission, il a reconnu que 25 % de ceux chez qui avait été détectée une maladie professionnelle étaient atteints de mésothéliomes.

A l'AP-HP en particulier, l'entretien et la maintenance sont internalisés et assurés par des permanents. A l'hôpital Saint-Louis, où le diagnostic amiante a été achevé, le directeur d'établissement a décidé de soumettre le personnel d'entretien à un suivi médical renforcé. Soixante-cinq personnes identifiées par la médecine du travail ont pu bénéficier d'un scanner qui a révélé une infection à caractère professionnel chez dix-neuf membres du personnel, dix-huit d'entre eux présentant des plaques pleurales, le dernier souffrant d'une fibrose pulmonaire.

M. Jean-Marc Boulanger a souligné que « toutes les personnes chez qui l'on a décelé des plaques pleurales, font partie du personnel d'entretien » , confirmant le risque d'exposition accru de cette catégorie d'employés.

Le dispositif mis en place par la direction de l'AP-HP poursuit trois objectifs :

- prévenir, informer et, lorsque les personnels d'entretien interviennent dans une pièce ou sur une installation, faire en sorte qu'elles sachent, dans tous les cas, si les matériaux qu'elles manipulent contiennent ou non de l'amiante ;

- mettre à leur disposition, lorsqu'elles sont en contact avec un matériau contenant de l'amiante, des équipements de niveau professionnel dotés de dispositifs d'aspiration ou d'équipements de protection leur permettant de ne pas respirer de poussière d'amiante ;

- faire en sorte qu'elles balisent le secteur dans lequel elles interviennent de façon à ce que d'autres personnes ne viennent pas respirer des poussières d'amiante.

A cet effet, un référent global a été désigné sur chaque site, qui devra s'assurer que le diagnostic portant sur la présence d'amiante est effectué et que son résultat est communiqué aux différentes équipes et pris en compte par les équipes d'intervention. Puis un référent technique, responsable des équipes d'entretien, est chargé au sein de l'équipe d'intervention de vérifier que les personnels sont bien informés et respectent les règles de sécurité. Enfin, tous les membres du personnel d'entretien se verront proposer une formation spécifique au risque posé par l'amiante.

Ce dispositif n'a pu être mis en place que parce que les personnels sont dans une situation stable au sein de la structure dans laquelle ils interviennent.

Pour les personnels occasionnels ou sous-traitants , l'INRS a pris ces dernières années un certain nombre d'initiatives : en collaboration avec la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), le ministère chargé du travail et l'organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), l'Institut a participé au développement d'un réseau national de centres de ressources. Ces « centres de ressource amiante » visent à informer les salariés exposés lors des travaux d'entretien et de maintenance sur le risque amiante et sa prévention. Dans ce but, l'INRS a mis à disposition des caisses régionales d'assurance maladie (CRAM) et des comités régionaux de l'OPPBTP des stands d'information exposés dans toute la France entre 2000 et 2002 79 ( * ) .

Par ailleurs, des fiches métiers ont récemment été mises en circulation pour sensibiliser les PME et les TPE (très petites entreprises) qui font de l'entretien et de la maintenance au problème posé par l'amiante et aux mesures de prévention à respecter. Un « guide de prévention », publié en 1997 et actualisé en juillet 2003, a également été rédigé à l'attention des professionnels de l'entretien et de la maintenance.

S'il a reconnu que des efforts significatifs avaient été développés en matière d'information 80 ( * ) , M. Philippe Huré a souhaité, l'INRS ne pouvant diffuser des messages de prévention à la télévision à une heure de grande écoute, que l'information emprunte d'autres canaux, notamment pour toucher certaines catégories de travailleurs, tels les artisans, qui travaillent de manière isolée. C'est ce que devrait permettre la généralisation du dossier technique amiante, s'il est correctement actualisé et diffusé.

Encore faut-il que les dispositifs de protection soient adaptés aux conditions d'intervention de ce secteur. A cet égard, M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi et à l'insertion des jeunes, a indiqué aux membres de la mission qu'un décret était en cours de préparation, afin de renforcer les règles encadrant les interventions des entreprises de maintenance dans les locaux amiantés.

* 78 Dans un article du 3 juin 2004 publié par « La Tribune » et intitulé : « Mieux informer les entreprises sur les dangers liés à l'amiante ».

* 79 On estime à 160.000 le nombre de visiteurs qui ont fréquenté ces centres de ressources.

* 80 Il a notamment indiqué que le site Internet de l'INRS était visité 17.000 fois par jour et que 75.000 exemplaires de la revue Santé et Hygiène au travail étaient diffusés.

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