2. La lutte contre la sur-occupation des foyers de travailleurs migrants

Si des progrès ont été accomplis en matière de résorption de l'habitat insalubre, les pouvoirs publics ne sont pas parvenus jusqu'à présent à faire reculer la sur-occupation des foyers de travailleurs migrants.

Selon M. Pierre-Yves Rébérioux, délégué général de la commission interministérielle pour le logement des populations immigrées, 100 à 150 foyers franciliens, sur un total de 240, seraient concernés par ce phénomène.

Les gestionnaires des foyers, qui appartiennent à hauteur de 55 % à la Sonacotra, n'ont pas les moyens, humains ou juridiques, de mettre un terme à la sur-occupation. Le président de cette société, M. Michel Pélissier, a souligné de plus que « le gestionnaire est dans l'incapacité absolue de savoir si les personnes qui résident chez lui, et qui sont hébergées par des clients titulaires de la chambre et parfaitement en règle au plan du séjour, sont ou non des immigrés clandestins » . Plus sévère, M. Pierre-Yves Rébérioux a estimé que « les gestionnaires ont perdu le pouvoir, si tant est qu'ils l'aient jamais eu » .

La solution consistant à mettre fin à la sur-occupation par la construction de nouveaux logements apparaît peu opérante. Une expérience en ce sens a été menée par la Sonacotra à Saint-Denis, à la demande de la municipalité. Un foyer, d'une capacité théorique de 300 places, mais qui abritait en fait 700 personnes en situation régulière et une centaine d'irréguliers, a été racheté pour être rasé et remplacé par un nombre de logements suffisant pour accueillir tous les occupants. Or, comme l'a indiqué M. Michel Pélissier, la Sonacotra constate que « sur les premiers foyers livrés, la sur-occupation se produit. Cela veut dire que les premiers qui ont été relogés dans la dignité se sont empressés de faire venir un certain nombre de leurs proches » . La construction de nouveaux foyers exerce donc un effet « d'appel d'air », dont on peut supposer qu'il affecte tant des étrangers en situation régulière qu'irrégulière.

Les gestionnaires de foyers peuvent recourir à la justice, pour tenter de mettre un terme aux situations de sur-occupation, mais ces démarches ont souvent peu d'effets. Ils peuvent demander l'autorisation de faire accompagner un huissier par les forces de police pour contrôler, au petit matin, l'identité des occupants des foyers, puis saisir à nouveau la justice pour demander la résiliation du contrat de location des résidents qui hébergent des sur-occupants. Mais ces procédures sont rarement suivies d'expulsions car, comme l'a noté de manière désabusée M. Michel Pélissier, « lorsque tout cela est fait, les personnes restent sur place parce qu'aucune force de police ne souhaite les mettre à la rue. »

Il n'existe pas de solution simple à ce problème humainement très complexe. Il semble à la commission d'enquête qu'il pourrait cependant être mieux traité s'il faisait l'objet d'une action coordonnée et cohérente des pouvoirs publics , appuyée sur une forte volonté politique. La première étape devrait consister à établir une liste fiable des occupants des foyers, distinguant les résidents des personnes hébergées par eux. Les personnes hébergées en situation régulière devraient se voir proposer une offre de relogement, en évitant bien sûr de les regrouper dans d'autres foyers, qui deviendraient rapidement de nouvelles sources de sur-occupation. La situation des personnes en situation irrégulière devrait être examinée attentivement par la préfecture pour aboutir soit à une régularisation, soit à une procédure d'éloignement.

Recommandation n° 34 : Mener une action volontariste, reposant sur une coordination de l'ensemble des services de l'Etat, pour lutter contre la sur-occupation des foyers de travailleurs migrants.

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