B. L'APPROCHE CONTRACTUELLE DES INTERVENTIONS ÉDUCATIVES DE LA POLITIQUE DE LA VILLE

1. L'évolution de l'approche contractuelle de la politique de la ville

Le contrat de ville, qui est conclu entre l'Etat et les collectivités territoriales, engage chacun des partenaires à mettre en oeuvre des actions en direction des quartiers en difficulté. Il concerne aussi bien des agglomérations que des villes petites et moyennes et il associe d'autres partenaires (logement social, transport...) ( 28 ( * ) ).

a) La dernière génération des contrats de ville (2000-2006)

La circulaire du 31 décembre 1998 a confirmé, comme pour la précédente programmation, l'objectif de faire du contrat de ville la procédure unique de contractualisation. Sa durée était fixée à sept ans.

Les contrats de ville 2000-2006

- 247 contrats de ville (25 dans les départements et territoires d'outre-mer et 43 en Ile-de-France), dont 70 % sont intercommunaux (la génération précédente des contrats de ville avait atteint 307 contrats, dont 40 % intercommunaux). Au total, 2.199 communes sont concernées par le périmètre des contrats de ville.

- Financement par l'Etat des contrats de ville : 1,37 Md€ (0,53 Md€ pour la génération précédente)

- Financement par les régions des contrats de ville : 0,77 Md€ (0,49 Md€ pour la génération précédente)

- Renouvellement urbain : 50 grands projets de ville en métropole et 2 projets dans les départements d'outre-mer / 70 opérations de renouvellement urbain. Le financement par l'Etat du renouvellement urbain s'élève à 1,19 Md€.

Source : DIV

Les contrats de ville 2000-2006 sont caractérisés par un partenariat plus large que les précédents : ils associent les conseils régionaux ou les conseils généraux, le fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations (FASILD) ( 29 ( * ) ), les organismes de logement social ( 30 ( * ) ) et les caisses d'allocations familiales. Il est difficile de chiffrer précisément la participation financière totale de l'Etat dans les contrats de ville 2000-2006, en l'absence d'une évaluation précise des financements de droit commun. Les engagements contractualisés dans les contrats de plan Etat-région au titre des crédits ville se sont élevés à 1,4 Md€.

b) Les contrats urbains de cohésion sociale (CUCS)

Anticipant l'arrivée à l'échéance des contrats de ville au 31 décembre 2006, le gouvernement a décidé, lors du conseil interministériel des villes (CIV) du 9 mars 2006, la création d'un nouveau cadre contractuel de la politique de la ville. Le régime des « contrats urbains de cohésion sociale » (CUCS) a été précisé par deux circulaires du 24 mai et du 15 septembre 2006 ( 31 ( * ) ). Les CUCS visent à tirer les conséquences des difficultés constatées pour les contrats de ville et à favoriser une évolution vers une plus grande formalisation des contrats et une meilleure définition des engagements des parties. Ils prévoient une concertation plus approfondie avec les acteurs de terrain, ainsi qu'un renforcement du volet suivi et évaluation.

Les CUCS ayant été signés au début de l'année 2007, une première évaluation de leur mise en oeuvre n'est pas encore envisageable. Cependant, plusieurs facteurs amènent à considérer que ce support contractuel n'a pas encore atteint son point d'équilibre :

- Si les CUCS constituent un instrument d'impulsion politique, en revanche leur assise juridique est en l'état étroite, puisqu'elle ne repose que sur deux circulaires.

- La nouvelle approche a conduit à un accroissement du nombre de contrats, de 247 pour la dernière génération de contrats de ville à 497 CUCS signés au 1 er janvier 2009, soit un doublement. Les CUCS signés fin 2006-début 2007 portaient sur 2 493 quartiers, alors qu'ils étaient environ 1500, dont 751 ZUS, dans les contrats de ville 2000-2006. Cette évolution va à l'encontre de la simplification du cadre contractuel que la Cour avait recommandée dans son rapport public particulier de 2002. Elle induit un risque de complication des procédures d'instruction, d'ores et déjà très lourdes, pour la mise en oeuvre des interventions de la politique de la ville ( 32 ( * ) ).

- Le conseil de modernisation des politiques publiques du 11 juin 2008 a enfin rappelé la nécessité de réaliser en 2009 un bilan de la première période triennale des CUCS.

2. La prise en compte de la dimension éducative dans l'approche contractuelle de la politique de la ville

L'analyse des CUCS mis en oeuvre sur les trois territoires analysés dans l'enquête montre que le volet éducatif de ces contrats est nettement plus structuré que celui des contrats de ville. Toutefois, d'autres modes spécifiques de contractualisation sont, par ailleurs, mis en oeuvre avec l'éducation nationale :

- Le contrat local d'accompagnement à la scolarité (CLAS) vise à conduire des actions en dehors du temps scolaire pour favoriser la réussite scolaire des élèves, en priorité dans les territoires les plus défavorisés, urbains et ruraux. Régi par la « charte de l'accompagnement à la scolarité », qui a été actualisée en 2001, il a pour objectif d'offrir aux côtés de l'école l'appui et les ressources dont les enfants ont besoin pour réussir à l'école et qu'ils ne trouvent pas toujours dans leur environnement familial et social. Ces actions sont distinctes des actions d'aide personnalisée ou de soutien scolaire mises en oeuvre par l'éducation nationale. Les CLAS sont financés par la CAF, l'Acsé et la DDASS. Les actions destinées aux élèves ont lieu hors du temps scolaire, que ce soit ou non dans des locaux ; elles sont menées par des associations en partenariat avec les écoles et les parents. Les CLAS ciblent en priorité les élèves relevant des réseaux d'éducation prioritaires et des ZUS, notamment aux moments charnière de la scolarité (CP/CE1, CM2/6 ème , 3 ème /2 nde ). Une circulaire interministérielle du 6 juin 2008 a reconduit ce dispositif et souhaité son rapprochement avec les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents (REAAP), en vue d'une évolution vers l'accompagnement des familles.

- Les contrats éducatifs locaux (CEL) ont par ailleurs vocation à coordonner l'ensemble des dispositifs du domaine périscolaire dans lesquels les parents sont aussi visés (par exemple, les dispositifs d'aide à l'apprentissage de la lecture pour les mères).

Il convient par ailleurs de rappeler que les contrats de réussite sont, à la différence des deux dispositifs précédents, exclusivement internes à l'éducation nationale. Ce dispositif a été affiné en 2006 par la création du « contrat ambition réussite » dans les 254 réseaux ambition réussite  et du « contrat d'objectifs scolaires » dans les établissements en réseau réussite scolaire. Le contrat de réussite est un engagement entre le recteur et le réseau d'éducation prioritaire : il porte sur les objectifs spécifiques du réseau, les moyens attribués sur la durée du contrat, et les indicateurs qui constituent le tableau de bord et qui permettront de mesurer l'évolution des résultats obtenus par les élèves. Le contrat est signé pour quatre ou cinq ans et fait l'objet d'une communication à l'ensemble de la communauté éducative, ainsi qu'aux parents. L'importance du partenariat avec les acteurs de la politique de la ville est rappelée par une circulaire du 30 mars 2006 : le contrat de réussite doit être articulé, non seulement avec le projet d'établissement ou le projet d'école, mais également avec les activités hors temps scolaire. La circulaire précitée demandait en conséquence de procéder, préalablement à l'établissement des contrats de réussite, à un état des lieux des dispositifs existants (aide aux devoirs, études surveillées, CEL, CLAS, école ouverte,...) et de définir les publics prioritaires pour chacun des dispositifs. Il convient toutefois d'observer que cet objectif de coordination assigné aux contrats de réussite est similaire à celui que fixent pour les CUCS les circulaires concernées : entre interministérialité éducative portée par le contrat de réussite et interministérialité de la politique de la ville portée par le CUCS, le risque de cumuler des approches partielles est manifeste ( 33 ( * ) ).Cette situation met en lumière la nécessité de mettre en place une procédure permettant de recenser sur un document unique l'intégralité des moyens d'intervention en matière scolaire et éducative.

* 28 Alors que la contractualisation dans le champ de la politique de la ville était caractérisée, au début des années 1990, par la multiplication des dispositifs, le comité interministériel de la ville du 12 novembre 1992 a généralisé la formule du contrat de ville, même si d'autres procédures contractuelles continuent de coexister. Le choix retenu a été de faire du contrat de ville l'instrument contractuel unique de la politique de la ville.

* 29 Signataire de 83 % des contrats de ville en métropole.

* 30 Un organisme de logement social est signataire du contrat de ville dans 44 % des cas.

* 31 Circulaires aux préfets du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et de la ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité.

* 32 Le partenariat local entre l'Etat et les collectivités territoriales implique un processus lourd d'échanges, de réunions de comités techniques et de comités de programmation.

* 33 Dans le cadre de l'enquête, une analyse de la coordination interministérielle exprimée par les contrats de réussite et les CUCS à Marseille a en effet montré qu'un certain nombre de thématiques n'avaient pas d'écho dans les contrats de réussite, et inversement.

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