I. L'ANALYSE DE LA COUR DES COMPTES

1. L'utilisation contestable de la notion d'« accident de la vie » comme cause du surendettement

Les opposants à la création d'un registre positif se fondent notamment sur l'idée que le surendettement est principalement une conséquence des accidents de la vie.

Cependant, il convient de noter que dans son rapport annuel de 2010 74 ( * ) , la Cour des comptes, qui consacre un développement à la lutte contre le surendettement des particuliers, indique que la distinction établie par la Banque de France entre « l'endettement actif » et « l'endettement passif » n'est pas opérante. Le rapport souligne notamment que les chiffres fournis par la Banque de France, comme l'examen des dossiers par les rapporteurs de la Cour, ne confirment ni la pertinence de cette distinction entre deux natures de surendettement ni le ratio de 75 % contre 25 %, qui résulte de statistiques mal renseignées.

Plusieurs arguments sont avancés. Tout d'abord, une majorité de dossiers concernent des situations où des « accidents de la vie », au demeurant plus ou moins prévisibles, se cumulent avec des comportements de consommation imprudents (nombreuses cartes de crédit renouvelable, par exemple) qui rendaient le surendettement inévitable au moindre « accident ».

Il convient de rappeler qu'au troisième trimestre 2011 le niveau d'endettement moyen au moment de l'acceptation du dossier par les commissions de surendettement s'établit, selon la Banque de France, à 36 000 euros, et que cet endettement se compose pour 82,2 % de dettes financières et que des dettes à la consommation sont présentes dans 88,6 % des dossiers (4,7 dettes de ce type en moyenne pour un encours de 23 200 euros) et que des crédits renouvelables sont recensés dans 76,9 % des dossiers (4 dettes de ce type en moyenne pour un encours moyen de 16 100 euros).

Le rapport de la Cour des comptes dénonce également le caractère « attrape tout » de la catégorie « surendettement passif ». En particulier, la notion d'« accidents de la vie » est librement interprétée par les secrétariats des commissions : ainsi la perte d'emploi pour un salarié en contrat à durée déterminée sans qualification ou un départ à la retraite sont classés dans la catégorie « passif » et, d'autre part, il suffit souvent d'être divorcé, fût-ce depuis 20 ans, pour être classé dans la catégorie « divorce : passif ».

Sur la base de cette remise en cause du principal argument avancé contre le registre positif et du constat selon lequel les crédits à la consommation sont présents dans neuf dossiers de surendettement sur dix, il semble logique de conclure que la Cour des comptes adopte une position de principe plutôt favorable à la création du registre positif , ce qui a été confirmé par les auditions de vos rapporteurs.

2. Un bilan coûts-avantages vraisemblablement positif du fichier positif

Regrettant que le comité Constans n'ait pas évalué l'efficacité du fichier positif, les magistrats de la Cour des comptes entendus par votre groupe de travail ont souligné que le coût prévisionnel du registre positif leur paraissait excessif.

Ils ont indiqué qu'il serait opportun de pouvoir rapporter ce coût aux économies que le registre serait susceptible de générer . A cet égard, rappelant qu'environ un milliard d'euros de dettes est effacé chaque année par la procédure de rétablissement personnel (PRP), ils ont estimé qu'en évitant 10 % de cet effacement on pourrait considérer que le coût du registre serait « amorti ». Encore faut-il préciser qu'il s'agit là d'une limitation du dommage causé à l'ensemble des créanciers tandis que le coût du registre serait supporté par les seules banques et, à travers elles, par les emprunteurs.


* 74 Cour des comptes, rapport public annuel 2010, février 2010, « La lutte contre le surendettement des particuliers : une politique publique incomplète et insuffisamment pilotée », pages 465-487.

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