VII. LES INTERVENTIONS ÉCONOMIQUES DES COLLECTIVITÉS LOCALES

A. LA SITUATION ANTÉRIEURE À 1982 : UN CADRE JURISPRUDENTIEL RESTRICTIF

Les collectivités territoriales sont elles-mêmes des agents économiques de premier plan par le seul exercice de leurs compétences traditionnelles. Les flux financiers que produit l'accomplissement de leurs missions leur donnent une place importante dans l'économie locale en tant qu'acheteurs comme en tant qu'employeurs. Ce rôle économique essentiel se distingue de celui d'intervenant au profit des entreprises du secteur marchand.

Les relations entre les collectivités locales et l'économie n'ont longtemps été appréciées qu'à travers ce qu'il est convenu d'appeler l'" interventionnisme économique " c'est-à-dire le moment où la collectivité publique intervient dans un domaine réservé à l'initiative privée. Ces interventions sont demeurées soumises à des conditions très restrictives sinon à une interdiction totale et très largement définie par la jurisprudence administrative. Mais les lois de décentralisation de 1982 ont marqué un tournant décisif en reconnaissant et en confirmant les capacités d'intervention des collectivités locales dans le secteur économique.

Auparavant, les interventions économiques des collectivités locales évoluaient dans un cadre jurisprudentiel restrictif .

Dans de nombreux avis ou décisions du Conseil d'Etat, apparaissent plusieurs préoccupations : souci de ne pas fausser les règles du droit commercial et en particulier celles qui concernent la faillite ; souci de respecter les règles de la concurrence qui se trouveraient violées si des aides publiques pouvaient être attribuées à des entreprises privées ; nécessité de sauvegarder les finances locales contre les risques financiers encourus dans une gestion de type privé.

Le juge administratif considérait que seules des circonstances particulières de temps et de lieu ou un intérêt public local pouvaient justifier une intervention des collectivités locales .

Mais les premières transformations apportées par le Conseil d'Etat à sa position traditionnelle ont été progressivement élargies : ainsi a-t-il été admis qu'une commune crée un service dès lors que son prix était plus modique et ses conditions plus favorables que ceux du secteur privé ( Syndicat des exploitants de cinématographes de l'Oranie, 12 juin 1959 ) ; quant à la notion d'intérêt public local, elle a été élargie des besoins primordiaux aux besoins les plus divers.

Allant encore plus loin, le Conseil d'Etat a admis des interventions des collectivités locales justifiées par leur nature même, parce qu'elles se rattachent à un service public de nature administrative : création par une commune d'un service de consultation juridique à l'occasion de la réalisation d'un lotissement ( Sect. 23 décembre 1970, préfet du Val-d'Oise et ministère de l'intérieur contre commune de Montmagny ).

Dans le domaine des services publics industriels et commerciaux, la Haute Juridiction a considéré qu'un tel service pourrait être assuré dans le cas où il constitue le prolongement d'un service existant. Poursuivant cette évolution, le Conseil d'Etat en est venu à admettre des aides directes aux entreprises en vue du développement économique.

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