2. Mieux cibler les dispositifs actuels ?

Les critères d'éligibilité aux différents instruments de péréquation conduisent à verser des attributions à un nombre très élevé de communes. En 2000 :

- 92 % des communes sont éligibles à la fraction " péréquation " de la dotation de solidarité rurale ;

- 76 % des communes de plus de 10.000 habitants sont éligibles à la dotation de solidarité urbaine (mais seulement 12 % des communes dont la population est comprise entre 5.000 et 10.000 habitants) ;

- 51 % des communes de plus de 10.000 habitants de la région Ile-de-France sont éligibles au FSRIF ;

- 48 % des communes bénéficient d'attributions du FNP.

Mécaniquement, un durcissement des critères d'éligibilité à ces dotations permettrait d'accroître le montant des transferts en direction des communes les plus défavorisés.

Toutefois, plus des critères d'éligibilité sont stricts, plus ils se doivent d'être fiables afin d'éviter les injustices. Or, déjà aujourd'hui, les critères d'éligibilité, notamment ceux de la DSU, laissent de côté certaines communes qui, au regard de leur potentiel fiscal, ne peuvent pas être considérées comme riches.

3. Renforcer les moyens des dispositifs actuels ?

Les crédits consacrés aux instruments financiers de la péréquation sont en deçà des besoins.

Ce constat a conduit le parti socialiste, au cours de sa convention consacrée aux " territoires " tenue en juin 2000, à préconiser de porter à 25 % la part des concours de l'Etat ayant une vocation péréquatrice. Il a estimé la proportion actuelle à environ 15 %.

Ce taux correspond à la part de la péréquation dans la DGF. La part du total des concours péréquateurs dans l'ensemble des dotations de l'Etat aux collectivités locales est de 10,4 %. Le montant total des crédits de la péréquation (c'est-à-dire les dotations péréquatrices versées par l'Etat ajoutées aux dispositifs de redistributions entre collectivités) est de 23,1 milliards de francs, soit le quart du montant total de la DGF.

L'augmentation de ce montant par réorientation vers les collectivités défavorisées de crédits aujourd'hui attribuées sans condition de richesse se heurte au problème des transferts de richesse et à la difficulté de définir des critères d'éligibilité fiables.

L'augmentation de ce montant par augmentation de la masse totale des concours de l'Etat aux collectivités locales est également envisageable puisque, aujourd'hui, l'Etat perçoit de manière indue des crédits qui auraient vocation à alimenter les budgets locaux et qui pourraient donc légitimement être réorientés vers la péréquation. Il en va ainsi :

- du produit de la fiscalité locale de France Télécom , dont les collectivités locales ne perçoivent, par le biais du FNPTP, que la fraction du produit supérieure au produit acquitté en 1994, soit environ un tiers du total en 2000. L'Etat continue de percevoir l'équivalent du produit de la fiscalité locale de France Télécom en 1994, soit près de 5 milliards de francs.

De nombreux élus locaux plaident en faveur d'une mise au droit commun de la fiscalité locale de France Télécom. Cette évolution semble inévitable, notamment pour des raisons de concurrence équitable entre France Télécom et ses concurrents. Cependant, à titre transitoire, l'Etat pourrait décider d'affecter une fraction plus importante de ce produit au FNPTP 376( * ) ;

- du produit de la majoration de la cotisation de péréquation décidée par la loi de finances pour 1989. Entre 1990 et 1998, plus de 40 % du produit de cette cotisation a alimenté le budget de l'Etat et non le FNPTP. Cette proportion a augmenté depuis la loi de finances pour 1999 qui a majoré cette cotisation pour financer le coût pour l'Etat de la compensation de la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle.

Dans un rapport consacré à la péréquation de la taxe professionnelle 377( * ) , notre collègue député Gérard Fuchs a jugé qu'il serait " ambitieux (...) d'accroître la part de l'augmentation du taux de la cotisation de péréquation allant aux fonds de péréquation. Votre rapporteur ne méconnaît pas la difficulté d'une telle entreprise, compte tenu des contraintes budgétaires, alors que la compensation par l'Etat de la réforme de la taxe professionnelle est évaluée par la loi de finances pour 1999 à 11,8 milliards de francs pour la seule année 1999 ".

L'affectation au FNPTP de la majoration de 1989 au lieu de celle de 1999 permettrait de concilier le souci de M. Fuchs de ne pas remettre en cause l'équilibre financier de la réforme de la taxe professionnelle tout en majorant les ressources du FNPTP de plus de 1,5 milliard de francs. La perte de recettes pour le budget de l'Etat ne devrait pas être considérée comme une réduction de ses ressources mais comme la disparition d'un avantage indu, dans le cadre d'un retour à l'esprit de la loi du 10 janvier 1980 portant aménagement de la fiscalité directe locale, qui a prévu que le produit de la cotisation de péréquation était destiné à financer le FNPTP ;

- du montant des réfactions appliquées à certaines compensations versées aux collectivités locales dont les recettes fiscales augmentent rapidement . Plusieurs dispositions législatives prévoient que le montant des compensations d'exonérations fiscales versées à une collectivité est réduit si le produit des quatre taxes perçu par cette collectivité augmente à un rythme élevé. Les collectivités dont le produit des quatre taxes augmente faiblement sont dispensées de réfaction.

Le jeu des réfactions est aujourd'hui un moyen pour l'Etat de réduire le coût des compensations. S'il était prévu que les économies ainsi réalisées étaient consacrées à alimenter un fonds de péréquation, les réfactions deviendraient un instrument de la réduction des écarts de richesses entre collectivités.

En 1994, le commissariat général du Plan préconisait d'augmenter les crédits consacrés à la péréquation en regroupant " l'ensemble des compensations dans un fonds de péréquation à vocation nationale ". La mise en oeuvre d'une telle proposition se heurterait aux difficultés pratiques de détermination des critères d'éligibilité suffisamment incontestables pour justifier l'atteinte à l'autonomie fiscale des collectivités que constituerait une remise en cause totale des compensations qu'elles perçoivent au titre des exonérations de leurs bases fiscales.

Votre rapporteur préfère se réjouir du succès de la forme la plus décentralisatrice de péréquation, la mise en commun volontaire des recettes de la taxe professionnelle, principale source d'écart de richesse entre collectivités, dans le cadre de la taxe professionnelle unique (TPU). Entre 1999 et 2000, le nombre de communes concernées par ce régime fiscal a été multiplié par trois, de même que le nombre d'habitants résidant dans des communes à TPU.

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